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author | David A. Madore <david@procyon.(none)> | 2011-03-11 17:57:43 +0100 |
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[calculs] Réorganisation importante de la section sur les transformations de Tschirnhaus.
-rw-r--r-- | chapitres/calculs-galois.tex | 345 |
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diff --git a/chapitres/calculs-galois.tex b/chapitres/calculs-galois.tex index 694bbd8..6760bd9 100644 --- a/chapitres/calculs-galois.tex +++ b/chapitres/calculs-galois.tex @@ -521,10 +521,10 @@ représentera la transformation sous la forme $U(x)$ avec $U \in k[X]$ un polynôme (considéré modulo $P$) qui sera souvent par abus de langage identifié avec la transformation de Tschirnhaus elle-même. -Le polynôme minimal $Q$ de $U(x)$ sur $k$ (dont le degré est, par -hypothèse, le même que $P$) sera qualifié de polynôme obtenu à partir -de $P$ par la transformation de Tschirnhaus définie par $U$, ou de -polynôme \emph{transformé} de $P$ par la transformation $U$. +Le polynôme minimal unitaire $Q$ de $U(x)$ sur $k$ (dont le degré est, +par hypothèse, le même que $P$) sera qualifié de polynôme obtenu à +partir de $P$ par la transformation de Tschirnhaus définie par $U$, ou +de polynôme \emph{transformé} de $P$ par la transformation $U$. Si $U$ est une fraction rationnelle dont le dénominateur est premier avec $P$, ce qui donne un sens à l'élément $U(x)$ de $k(x)$, on pourra @@ -537,7 +537,10 @@ Le cas le plus important, qu'il faut avoir à l'esprit dans ce qui suit, est celui où $P$ est irréductible, auquel cas une transformation de Tschirnhaus sur $P$ équivaut à la donnée d'un élément primitif du corps de rupture $k(x)$ de $P$, c'est-à-dire un élément engendrant -celui-ci (i.e., de degré $\deg P$). +celui-ci (i.e., de degré $\deg P$). Remarquons d'ores et déjà que +dans ce cas, le polynôme $Q$ transformé est nécessairement lui aussi +irréductible (puisque c'est le polynôme minimal d'un élément dans un +corps). \begin{exemples2}\label{exemples-transformations-de-tschirnhaus} \begin{itemize} @@ -555,7 +558,7 @@ celui-ci (i.e., de degré $\deg P$). encore une transformation de Tschirnhaus sur $P$, qui transforme ce dernier en $Q = X^3 - \frac{1}{2}$. En revanche, le polynôme $X^3 + 1$ ne définit pas une transformation de Tschirnhaus sur $P$, car - $(\root3\of2)^3 + 1 = 3 \in Q$. + $(\root3\of2)^3 + 1 = 3 \in \QQ$. \item Soit $P = \prod_{i=1}^d (X-\xi_i) \in k[X]$ un polynôme unitaire scindé et séparable de degré $d$ dont on note $\xi_1,\ldots,\xi_d$ les racines deux à deux distinctes dans le corps $k$. Alors @@ -574,27 +577,40 @@ celui-ci (i.e., de degré $\deg P$). quelle condition $U(X)$ définit une transformation de Tschirnhaus sur $P$, c'est-à-dire à quelle condition les éléments $1, U(x), U(x)^2, \ldots, U(x)^{d-1}$ de $k(x) = k[X]/(X^d)$ en forment une - base. Lorsque $c_0 = 0$, la condition est évidemment $c_1 \neq 0$ - puisque si c'est le cas les polynômes $U(x)^i$ sont échelonnés en - valuation, et si ce n'est pas le cas les derniers d'entre eux sont nuls ; - et pour $c_0$ quelconque, on peut exprimer les polynômes $1, - U(x)-c_0, (U(x)-c_0)^2, \ldots$ en fonction de $1, U(x), U(x)^2, - \ldots$ par un système triangulaire de diagonale $1$, donc la - condition $c_1 \neq 0$ est encore la bonne. L'élément $y = U(x) \in - k(x)$ vérifie manifestement $(y-c_0)^d = 0$ donc, lorsque $U$ est - bien une transformation de Tschirnhaus (i.e., $c_1 \neq 0$ comme on - vient de le voir), ce polynôme $Q(Y) := (Y-c_0)^d$ est le polynôme - minimal de $y$, c'est-à-dire le polynôme obtenu à partir de $P$ par - la transformation $U$. + base. + + Supposons d'abord $c_0 = 0$. Lorsque $c_1 \neq 0$, les polynômes + $1, U(x), U(x)^2, \ldots, U(x)^{d-1}$ (considérés modulo $X^d$) sont + échelonnés en valuation (c'est-à-dire que leur expression dans la + base $1,x,x^2,\ldots,x^{d-1}$ de $k[X]/(X^d)$ forme une matrice + triangulaire dont la diagonale est formée des coefficients + $1,c_1,c_1^2,\ldots,c_1^{d-1}$ tous non nuls, donc $U$ est bien une + transformation de Tschirnhaus. Lorsque $c_1 = 0$ (toujours en + supposant $c_0=0$), les polynômes $U(x)^i$ sont nuls pour + $i \geq \frac{d}{2}$, donc on n'a pas affaire à une transformation + de Tschirnhaus (sauf dans le cas trivial $d=1$). Bref, dans le cas + $c_0 = 0$, nous avons montré que $U$ définit une transformation de + Tschirnhaus si et seulement si $c_1 \neq 0$. + + Enfin, pour $c_0$ quelconque, on peut exprimer les polynômes $1, + U(x)-c_0, (U(x)-c_0)^2, \ldots$ en fonction de $1, U(x), + U(x)^2, \ldots$ par un système triangulaire de diagonale $1$, donc + la condition $c_1 \neq 0$ est encore celle qui détermine si $U$ est + une transformation de Tschirnhaus. + + L'élément $y = U(x) \in k(x)$ vérifie manifestement $(y-c_0)^d = 0$ + donc, lorsque $U$ est bien une transformation de Tschirnhaus + (i.e., $c_1 \neq 0$ comme on vient de le voir), ce polynôme $Q(Y) := + (Y-c_0)^d$ est le polynôme minimal de $y$, c'est-à-dire le polynôme + obtenu à partir de $P$ par la transformation $U$. \end{itemize} \end{exemples2} -La notion de transformation de Tschirnhaus est en elle-même peu -intéressante puisque pour un polynôme irréductible elle coïncide -exactement avec la notion d'élément primitif d'un corps de rupture. -Elle le devient un peu plus en raison des observations suivantes : +La notion de transformation de Tschirnhaus en elle-même est peu +intéressante, mais elle le devient un peu plus en raison des +observations suivantes : -\begin{remarques2}\label{remarques-reconnaitre-transformation-de-tschirnhaus} +\begin{remarques2}\label{remarques-calcul-transformation-de-tschirnhaus} Donné un polynôme $P \in k[X]$ unitaire, et un polynôme $U \in k[X]$, on dispose d'un \emph{algorithme} permettant de déterminer si $U$ définit une transformation de Tschirnhaus sur $P$, et le cas échéant @@ -606,41 +622,71 @@ U(x)^2, \ldots, U(x)^{\deg P-1}$ sur la base évidente $1,x,x^2,\ldots,x^{\deg P-1}$ de $k(x) = k[X]/(P)$ (ceci se fait en effectuant des divisions euclidiennes des différentes puissances de $U$ par $P$), et chercher si la matrice ainsi définie est -inversible, ce qui revient à calculer un déterminant ; si c'est le +inversible, ce qui revient à calculer un déterminant ; et si c'est le cas, on peut obtenir le polynôme $Q$ transformé de $P$ par $U$ en exprimant $U(x)^{\deg P} \in k(x)$ sur la base $1, U(x), U(x)^2, \ldots, U(x)^{\deg P-1}$ (le polynôme $Q$ est alors le polynôme unitaire de degré $\deg P$ dont l'annulation en $U(x)$ exprime cette relation). -Si l'on préfère, on peut exprimer la matrice, toujours sur la base -$1,x,x^2,\ldots,x^{\deg P-1}$ de $k(x) = k[X]/(P)$ qui représente la -multiplication par $U$ dans $k(x)$. La condition pour que $U$ soit -une transformation de Tschirnhaus est alors que le polynôme minimal de -cette matrice coïncide avec son polynôme caractéristique, et lorsque -c'est le cas, le polynôme en question (de degré $\deg P$) est le -polynôme $Q$. - -D'autres présentations, équivalentes en théorie mais éventuellement -différentes en complexité algorithmique, sont aussi possibles : par -exemple, le polynôme $Q(Y)$ peut se calculer comme le résultant de -$P(X)$ et de $Y - U(X)$ comme polynômes de la variable $X$ (et la -condition que $U$ définisse effectivement une transformation de -Tschirnhaus se traduit par le fait que le résultant en question soit -séparable), ce qui permet de remplacer les déterminants par des -résultants et d'utiliser des techniques spécifiques à eux comme -l'algorithme du sous-résultant. - -Remarquons en tout cas que, donné un polynôme $P$ unitaire de -degré $d$ et un polynôme $U$, la condition pour que $U$ définisse une -transformation de Tschirnhaus sur $P$, et le polynôme $Q$ transformé -ne dépendent pas du corps choisi contenant les coefficients de $P$ et -de $U$. Ainsi, lorsque $P$ est séparable, on peut penser à la +Une conséquence de cette remarque, et du fait qu'un déterminant ne +dépend pas du corps sur lequel il est calculé, est le fait suivant : +si $P$ est un polynôme unitaire de degré $d$ et $U$ un polynôme +quelconque, le fait que $U$ définisse une transformation de +Tschirnhaus sur $P$, ainsi que le cas échéant la valeur du polynôme +transformé, ne dépendent pas du corps contenant les coefficients de +$P$ et $U$. + +Notamment, lorsque $P$ est séparable, on peut penser à la transformation de Tschirnhaus comme dans le deuxième exemple de \ref{exemples-transformations-de-tschirnhaus} : si $E$ est un corps contenant les racines $\xi_1,\ldots,\xi_d$ de $P$ (deux à deux distinctes), alors $Q$ vaut $\prod_{i=1}^d (X-U(\xi_i))$ (comparer avec \ref{transformation-de-tschirnhaus-preserve-galois} ci-dessous). +C'est la manière dont on visualise les transformations de +Tschirnhaus : $Q$ est le polynôme obtenu en appliquant $U$ à chaque +racine de $P$. (On verra +en \ref{transformation-de-tschirnhaus-et-factorisation} ci-dessous que +cette description convient encore, convenablement interprétée, quand +les polynômes ne sont plus séparables.) Remarquons encore au passage +que si $P$ est séparable, le polynôme $Q$ transformé l'est aussi. +\end{remarques2} + +\begin{remarques2} +Nous avons introduit ci-dessus, pour évoquer la question algorithmique +de reconnaître une transformation de Tschirnhaus, et calculer le +polynôme transformé, la matrice donnant les coordonnées de $1, U(x), +U(x)^2, \ldots, U(x)^{\deg P-1}$ sur la base $1, x, x^2, \ldots, +x^{\deg P-1}$ de $k(x) = k[X]/(P)$. Si l'on préfère, une autre +matrice naturellement associée à la situation est celle qui +représente, toujours sur la base $1,x,x^2,\ldots,x^{\deg P-1}$ +de $k(x)$, la multiplication par $U(x)$. Le polynôme minimal de cette +matrice est celui de l'élément $U(x)$ de $k(x)$, et le fait que $U$ +soit une transformation de Tschirnhaus se reconnaît au fait que ce +polynôme minimal soit de degré $\deg P$, i.e., coïncide avec le +polynôme caractéristique, qui est alors le polynôme $Q$ transformé +de $P$ par $U$. + +On peut encore reformuler ceci en signalant que, lorsque $U(X)$ est +une transformation de Tschirnhaus sur $P(X)$, alors le polynôme $Q(Y)$ +transformé peut se calculer comme le résultant de $P(X)$ et $Y - U(X)$ +comme polynômes de la variable $X$ (on rappelle que le résultant de +deux polynômes $A(X)$ et $B(X)$ vaut $a^e \prod_{i=1}^d B(\xi_i)$ où +$A(X) = a\prod_{i=1}^d(X-\xi_i)$ est la factorisation de $A$ dans un +corps dans lequel il est décomposé, le résultat n'en dépendant pas +puisqu'on peut aussi l'écrire comme un déterminant de Sylvester, et où +$e$ est le degré de $B$) ; en effet, si $P(X) = +\prod_{i=1}^d(X-\xi_i)$, le résultant en question vaut $\prod_{i=1}^d +(Y-U(\xi_i))$, ce qui est bien $Q(Y)$ d'après les les remarques +précédentes. Cette façon de procéder peut être algorithmiquement +utile. + +(S'il s'agit de vérifier si $U$ définit bien une transformation de +Tschirnhaus, lorsque $P$ est séparable, on peut effectuer le calcul du +résultant et vérifier après coup si le polynôme $\prod_{i=1}^d +(Y-U(\xi_i))$ ainsi obtenu est séparable : d'après ce que nous avons +déjà vu, cela équivaut au fait que $U$ soit une transformation de +Tschirnhaus.) \end{remarques2} \begin{remarque2}\label{transformation-de-tschirnhaus-et-composee} @@ -660,12 +706,12 @@ degré : on notera $k[X]/(P)$ et $k[Y]/(Q)$ les algèbres quotient et $x,y$ les classes des indéterminées $X,Y$ dans ceux-ci respectivement. Alors la donnée d'une transformation de Tschirnhaus $U$ transformant -$P$ en $Q$ équivaut à la donnée d'un isomorphisme $k[Y]/(Q) \to -k[X]/(P)$ (en tant que $k$-algèbres), l'isomorphisme étant donné à -partir de la transformation $U$ par $A(y) \mapsto A(U(x))$, et -réciproquement $U$ étant déterminé (modulo $P$) à partir de -l'isomorphisme $k[Y]/(Q) \to k[X]/(P)$ comme l'image de la classe $y$ -de $Y$ par celui-ci. +$P$ en $Q$ équivaut à la donnée d'un isomorphisme +$k[Y]/(Q) \buildrel\sim\over\to k[X]/(P)$ (en tant que $k$-algèbres), +l'isomorphisme étant donné à partir de la transformation $U$ par +$A(y) \mapsto A(U(x))$, et réciproquement $U$ étant déterminé +(modulo $P$) à partir de l'isomorphisme $k[Y]/(Q) \to k[X]/(P)$ comme +l'image de la classe $y$ de $Y$ par celui-ci. En particulier, donnée une transformation de Tschirnhaus $U \in k[X]$ transformant $P$ en $Q$, il existe (modulo $Q$) un unique polynôme $V @@ -691,59 +737,73 @@ un isomorphisme (c'est-à-dire, qu'il est injectif ou, de façon polynôme en $z$ (les $1,z,z^2,\ldots$ engendrent $k[X]/(P)$ comme $k$-espace vectoriel, donc en fait les $1,z,z^2,\ldots,z^{\deg Q-1}$ l'engendrent), donc définisse une transformation de Tschirnhaus (sous -la forme $z = U(x)$). Ceci équivaut aussi au fait que le seul élément -$x$ puisse s'écrire sous la forme $V(z)$, c'est-à-dire qu'on puisse -trouver $V$ tel que $V(U(x))=x$. Les différentes affirmations de la -propositions sont alors toutes claires. +la forme $z = U(x)$). Ceci équivaut aussi au fait que le simple +élément $x$ puisse s'écrire sous la forme $V(z)$, c'est-à-dire qu'on +puisse trouver $V$ tel que $V(U(x))=x$. Les différentes affirmations +de la propositions sont alors toutes claires. \end{proof} +Cette proposition éclaire le fait, déjà signalé, que le polynôme +transformé d'un polynôme irréductible (resp. séparable) par une +transformation de Tschirnhaus est encore irréductible +(resp. séparable), puisque ces deux propriétés se lisent sur l'algèbre +quotient (comme le fait qu'elle soit un corps, resp. une algèbre +étale). + La transformation de Tschirnhaus $V$ de $Q$ en $P$ définie par la proposition précédente à partir d'une transformation de Tschirnhaus $U$ de $P$ en $Q$ s'appelle la transformation de Tschirnhaus \emph{réciproque} de $U$. -\begin{proposition2}\label{transformation-de-tschirnhaus-sur-un-produit} -Soient $P_1,P_2 \in k[X]$ deux polynômes unitaires premiers entre eux, -et $P = P_1 P_2$. Alors la donnée d'une transformation de Tschirnhaus -$U$ de $P$ équivaut à la donnée de transformations de Tschirnhaus -$U_1,U_2$ de $P_1,P_2$ respectivement telles que les polynômes -transformés $Q_1,Q_2$ respectivement soient premiers entre eux, le -polynome $U$ étant alors congru à $U_i$ modulo $P_i$ (pour $i=1,2$). -Et dans ces conditions, le polynôme transformé $Q$ de $P$ par $U$ -vaut $Q_1 Q_2$. -\end{proposition2} -\begin{proof} -D'après le théorème chinois (cf. par exemple \refext{Spec}{lemme - chinois}), $k[X]/(P)$ est isomorphe à $(k[X]/(P_1)) \times -(k[X]/(P_2))$. En notant $x_1,x_2$ les classes de $X$ -modulo $P_1,P_2$ respectivement, l'élément $(U_1(x_1),U_2(x_2))$ -engendre le produit en tant qu'algèbre si et seulement si $U_1(x_1)$ -et $U_2(x_2)$ engendrent chacun des facteurs et que leurs polynômes -minimaux $Q_1,Q_2$ sont premiers entre eux. -\end{proof} +\begin{exemples2}\label{exemples-transformations-de-tschirnhaus-reciproques} +Reprenons les exemples +de \ref{exemples-transformations-de-tschirnhaus} pour en expliciter +les réciproques. +\begin{itemize} +\item Soit $P = X^3 - 2 \in \QQ[X]$, dont on note $\root3\of2$ la + racine dans le corps de rupture. La transformation de Tschirnhaus + réciproque de $U = X+1$ est évidemment $V = Y-1$. La transformation + de Tschirnhaus réciproque de $U = X^2$ est $V = \frac{1}{2}Y^2$ car + $\frac{1}{2} ((\root3\of2)^2)^2 = \root3\of2$. La transformation + réciproque de $U = \frac{1}{X}$ (qui peut également s'écrire + $\frac{1}{2} X^2$, l'inverse de $X$ modulo $P = X^3-2$) est $V = 2 + Y^2$ (qu'on peut aussi vouloir écrire $\frac{1}{Y}$, puisque $2Y^2$ + est l'inverse de $Y$ modulo $Q = Y^3 - \frac{1}{2}$). +\item Soit $P = \prod_{i=1}^d (X-\xi_i) \in k[X]$ un polynôme unitaire + scindé et séparable de degré $d$ dont on note $\xi_1,\ldots,\xi_d$ + les racines deux à deux distinctes dans le corps $k$, et $U$ un + polynôme tel que $U(\xi_1),\ldots,U(\xi_d)$ soient deux à deux + distinctes. Alors la réciproque de $U$ vu comme une transformation + de Tschirnhaus sur $P$ est tout polynôme $V \in k[Y]$ (modulo $Q + = \prod(X-U(\xi_i))$) prenant en $U(\xi_i)$ la valeur $\xi_i$. +\item Soit $P = X^d$, et soit $U(X) = c_1 X + c_2 X^2 + \cdots + + c_{d-1} X^{d-1}$ (on suppose $c_0 = 0$ et $c_1 \neq 0$) un polynôme + considéré modulo $P$, qu'on peut donc imaginer comme un + développement limité tronqué à partir de l'ordre $d$ : la + transformation de Tschirnhaus réciproque de $V$ est alors le + polynôme $V = c'_1 Y + c'_2 Y^2 + \cdots + c'_{d-1} Y^{d-1}$ + définissant le développement limité réciproque de $U$, c'est-à-dire + que $V\circ U$ est de valuation $\geq d$ (on peut donner des + formules explicites : $c'_1 = 1/c_1$, $c'_2 = -c_2/c_1^3$, $c'_3 = + (2 c_2^2 - c_1 c_3)/c_1^5$ et ainsi de suite). +\end{itemize} +\end{exemples2} -\begin{proposition2}\label{transformation-de-tschirnhaus-preserve-galois} -Soit $Q$ un polynôme obtenu à partir d'un polynôme $P \in k[X]$ -unitaire séparable par une transformation de Tschirnhaus définie par -un polynôme $U$. Alors le corps de décomposition de $Q$ sur $k$ est -isomorphe à celui de $P$, les racines de $Q$ dans ce corps sont les -$U(\xi_1),\ldots,U(\xi_d)$ où $\xi_1,\ldots,\xi_d$ sont les racines -(deux à deux distinctes) de $P$ ; et le groupe de Galois de $Q$ -sur $k$ est isomorphe à celui de $P$. -\end{proposition2} -\begin{proof} -Soit $E$ un corps de décomposition de $P$, et soient -$\xi_1,\ldots,\xi_d$ les racines de ce dernier dans $E$ (qui -l'engendrent). Alors chacun des éléments $U(\xi_i)$ est racine de $Q$ -(puisque $Q\circ U$ est congru à $0$ modulo $P$). En introduisant $V$ -la transformation de Tschirnhaus réciproque de $U$, on a $V(U(\xi_i)) -= \xi_i$ pour chaque $i$ puisque $V\circ U$ est congru à $X$ -modulo $P$ : ceci permet d'affirmer que les racines $U(\xi_i)$ de $Q$ -sont deux à deux distinctes, donc que $E$, qui les contient, scinde le -polynôme $Q$, et comme les $U(\xi_i)$ engendrent les $\xi_i$ (on vient -de le voir) donc tout $E$, le corps $E$ est aussi corps de -décomposition de $Q$. Ceci prouve tout ce qu'on voulait. -\end{proof} +\begin{remarque2} +Pour faire suite à +\ref{remarques-calcul-transformation-de-tschirnhaus}, signalons qu'on +peut calculer algorithmiquement la transformation de Tschirnhaus +réciproque d'une transformation $U$ sur un polynôme $P$ : nous avons +observé que le fait que $U$ soit une transformation de Tschirnhaus se +détecte à l'inversibilité de la matrice représentant les puissances +$1, U(x), U(x)^2, \ldots, U(x)^{\deg P-1}$ dans $k[X]/(P)$ sur la base +$1,x,x^2,\ldots,x^{\deg P-1}$ de ce dernier ; en inversant cette même +matrice, on obtient celle représentant $1,x,x^2,\ldots,x^{\deg P-1}$ +sur la base $1, U(x), U(x)^2, \ldots, U(x)^{\deg P-1}$, c'est-à-dire +exactement $1,V(y),V(y)^2,\ldots,V(y)^{\deg P-1}$ sur la base +$1,y,y^2,\ldots,y^{\deg P-1}$ de $k[Y]/(Q)$ avec $Q$ le polynôme +transformé. +\end{remarque2} \begin{remarques2} Contrairement à ce que pourraient laisser penser les propositions @@ -771,13 +831,36 @@ $k[X]/(P)$ coïncide avec le corps de décomposition, il s'agit du groupe de Galois de $P$. \end{remarques2} +\begin{proposition2}\label{transformation-de-tschirnhaus-preserve-galois} +Soit $Q$ un polynôme obtenu à partir d'un polynôme $P \in k[X]$ +unitaire séparable par une transformation de Tschirnhaus définie par +un polynôme $U$. Alors le corps de décomposition de $Q$ sur $k$ est +isomorphe à celui de $P$, les racines de $Q$ dans ce corps sont les +$U(\xi_1),\ldots,U(\xi_d)$ où $\xi_1,\ldots,\xi_d$ sont les racines +(deux à deux distinctes) de $P$ ; et le groupe de Galois de $Q$ +sur $k$ est isomorphe à celui de $P$. +\end{proposition2} +\begin{proof} +Soit $E$ un corps de décomposition de $P$, et soient +$\xi_1,\ldots,\xi_d$ les racines de ce dernier dans $E$ (qui +l'engendrent). Alors chacun des éléments $U(\xi_i)$ est racine de $Q$ +(puisque $Q\circ U$ est congru à $0$ modulo $P$). En introduisant $V$ +la transformation de Tschirnhaus réciproque de $U$, on a $V(U(\xi_i)) += \xi_i$ pour chaque $i$ puisque $V\circ U$ est congru à $X$ +modulo $P$ : ceci permet d'affirmer que les racines $U(\xi_i)$ de $Q$ +sont deux à deux distinctes, donc que $E$, qui les contient, scinde le +polynôme $Q$, et comme les $U(\xi_i)$ engendrent les $\xi_i$ (on vient +de le voir) donc tout $E$, le corps $E$ est aussi corps de +décomposition de $Q$. Ceci prouve tout ce qu'on voulait. +\end{proof} + \begin{exemple2}\label{exemple-transformations-de-tschirnhaus-sur-quadratiques} Soit $P = X^2 + bX + c \in k[X]$ un polynôme quadratique sur un corps $k$ de caractéristique $\neq 2$. Une transformation de Tschirnhaus sur $P$ est décrite par un polynôme $U = \lambda x + \mu$, et la condition pour que $U$ définisse bien une transformation de Tschirnhaus, compte tenu des -remarques \ref{remarques-reconnaitre-transformation-de-tschirnhaus}, +remarques \ref{remarques-calcul-transformation-de-tschirnhaus}, est simplement : $\lambda \neq 0$. Lorsque c'est le cas, on calcule aisément que $U(x)^2 = \lambda(2\mu - b\lambda) x + (\mu^2 - c\lambda^2) \in k[X]/(P)$ (en notant comme d'habitude $x$ la classe @@ -810,6 +893,31 @@ les $(\lambda,\mu)$ tels que $\mu = \frac{b}{2}(\lambda-1)$ --- \XXX revérifier ce truc.) \end{exemple2} +Cherchons à présent à montrer comment les transformations de +Tschirnhaus sur un polynôme quelconque peuvent se ramener à celles sur +un polynôme irréductible. Commençons par le cas facile d'un produit +de deux polynômes étrangers : + +\begin{proposition2}\label{transformation-de-tschirnhaus-sur-un-produit} +Soient $P_1,P_2 \in k[X]$ deux polynômes unitaires premiers entre eux, +et $P = P_1 P_2$. Alors la donnée d'une transformation de Tschirnhaus +$U$ de $P$ équivaut à la donnée de transformations de Tschirnhaus +$U_1,U_2$ de $P_1,P_2$ respectivement telles que les polynômes +transformés $Q_1,Q_2$ respectivement soient premiers entre eux, le +polynome $U$ étant alors congru à $U_i$ modulo $P_i$ (pour $i=1,2$). +Et dans ces conditions, le polynôme transformé $Q$ de $P$ par $U$ +vaut $Q_1 Q_2$. +\end{proposition2} +\begin{proof} +D'après le théorème chinois (cf. par exemple \refext{Spec}{lemme + chinois}), $k[X]/(P)$ est isomorphe à $(k[X]/(P_1)) \times +(k[X]/(P_2))$. En notant $x_1,x_2$ les classes de $X$ +modulo $P_1,P_2$ respectivement, l'élément $(U_1(x_1),U_2(x_2))$ +engendre le produit en tant qu'algèbre si et seulement si $U_1(x_1)$ +et $U_2(x_2)$ engendrent chacun des facteurs et que leurs polynômes +minimaux $Q_1,Q_2$ sont premiers entre eux. +\end{proof} + Pour généraliser le dernier exemple de \ref{exemples-transformations-de-tschirnhaus}, attachons-nous maintenant à déterminer les transformations de Tschirnhaus entre @@ -875,6 +983,22 @@ l'explicitent) qu'en relevant arbitrairement deux transformations de Tschirnhaus réciproques entre $P$ et $Q$ on obtienne deux transformations de Tschirnhaus réciproques entre $P^r$ et $Q^r$. +\begin{proposition2}\label{transformation-de-tschirnhaus-et-factorisation} +Soit $P$ un polynôme unitaire à coefficients dans un corps $k$, dont +on note $P = \prod_{i=1}^k P_i^{v_i}$ la décomposition en facteurs +irréductibles (unitaires), les $P_i$ étant supposés deux à deux +distincts. Alors la donnée d'une transformation de Tschirnhaus $U$ de +$P$ équivaut à la donnée de transformations de Tschirnhaus $U_i$ de +chacun des $P_i$ telles que les polynômes transformés $Q_i$ +respectivement soient premiers entre eux, le polynome $U$ étant alors +congru à $U_i$ modulo $P_i$. Et dans ces conditions, le polynôme +transformé $Q$ de $P$ par $U$ vaut $\prod_{i=1}^k Q_i^{v_i}$. +\end{proposition2} +\begin{proof} +Ceci découle de \ref{transformation-de-tschirnhaus-sur-un-produit} et +\ref{relevement-transformation-de-tschirnhaus}. +\end{proof} + \medbreak Intéressons-nous maintenant à la relation d'équivalence définie par @@ -924,29 +1048,10 @@ $i$ on ait $w_{\sigma(i)} = v_i$ et $Q_{\sigma(i)}$ Tschirnhaus-équivalent à $P_i$. \end{proposition2} \begin{proof} -La condition annoncée est suffisante : si $U_i$ est une transformation -de Tschirnhaus de $P_i$ en $Q_{\sigma(i)}$, on a vu dans la -proposition \ref{relevement-transformation-de-tschirnhaus} que $U_i$ -définit encore une transformation de Tschirnhaus de $P_i^{v_i}$ en -$Q_{\sigma(i)}^{v_i} = Q_{\sigma(i)}^{w_{\sigma(i)}}$. En combinant -ces transformations au moyen de la -proposition \ref{transformation-de-tschirnhaus-sur-un-produit}, il -existe bien une transformation de Tschirnhaus de $P$ sur $Q$. - -La condition annoncée est nécessaire : si $U$ est une transformation -de Tschirnhaus sur $P$, -d'après \ref{transformation-de-tschirnhaus-sur-un-produit} elle -définit une transformation de Tschirnhaus sur chaque facteur -$P_i^{v_i}$, et si on note $R_i$ le polynôme transformé, on a $Q = -\prod R_i$ ; or on sait d'après -\ref{relevement-transformation-de-tschirnhaus} que $R_i$ s'écrit -$S_i^{v_i}$ pour un certain polynôme $S_i$ qui est un transformé de -Tschirnhaus de $P_i$, donc irréductible. La conclusion est alors -claire. +Cela découle immédiatement +de \ref{transformation-de-tschirnhaus-et-factorisation}. \end{proof} -\XXX --- Relire cette démonstration. Tout ceci est un peu merdique. - \begin{remarque2} On a vu en \ref{transformation-de-tschirnhaus-preserve-galois} que si $P$ et $Q$ sont Tschirnhaus-équivalents, alors ils ont même corps de |