% vim: textwidth=150 \ifx\danslelivre\undefined \documentclass[9pt]{../configuration/smfart} \input{../configuration/commun} \input{../configuration/smf} \input{../configuration/adresse} \input{../configuration/gadgets} \input{../configuration/francais} \input{../configuration/numerotation} \input{../configuration/formules} \input{../configuration/encoredesmacros} \usepackage{stmaryrd} \usepackage{graphics} \usepackage[usenames,dvipsnames]{xcolor} %\usepackage{makeidx} \usepackage{tikz} \usetikzlibrary{matrix} \usepackage{srcltx} % pour passer du dvi au tex en cliquant %\usepackage{pxfonts} \synctex=1 \textwidth16cm \hoffset-1.5cm \externaldocument{extensions-algebriques} % là où regarder \externaldocument{categories} \externaldocument{entiers} \externaldocument{KAS} \externaldocument{correspondance-galois} \externaldocument{spectre} %\makeindex \title{Formes tordues} \begin{document} \maketitle \tableofcontents \else \chapter{Formes tordues} \fi \section{Formes et cohomologie galoisienne, généralités}\label{formes} Références : \cite{CG@Serre}, chap. I, §§2,5 et chap. III, §1 ainsi que \cite{CL@Serre}, chap. X et \cite[§§18,28]{Involutions@KMRT}. \subsection{Correspondance de Galois-Grothendieck} \label{Galois-Grothendieck} Dans ce paragraphe nous allons énoncer et démontrer une généralisation de la correspondance de Galois finie (\refext{CG}{correspondance Galois finie}), sous la forme d'une description des $k$-\emph{algèbres} étales trivialisées (\refext{Alg}{algèbre trivialisée}) par une extension de corps $K\bo k$, finie galoisienne de groupe $Π=\Gal(K\bo k)$. Quittant le cadre quelque peu étriqué des corps pour celui des algèbres, il nous faut abandonner les groupes pour les \emph{ensembles} avec action de groupe. \subsubsection{} \label{notations Galois-Grothendieck} Soit $A$ une $k$-algèbre et notons $π₀^{K\bo k}(A)$ l'ensemble des composantes connexes (\refext{Spec}{composantes connexes}) de la $K$-algèbre $A_K=A ⊗_k K$. À un $k$-morphisme d'algèbres $f:A → B$, on associe l'application $π₀(f_K): π₀(B_K) → π₀(A_K)$, que nous noterons $π₀^{K\bo k}(f)$ ; pour chaque $k$-morphisme $g:B → C$, on a l'égalité $π₀^{K\bo k}(gf)=π₀^{K\bo k}(f) ∘ π₀^{K\bo k}(g)$ (\refext{Spec}{fonctorialité pi0}). En particulier, chaque $k$-automorphisme $A_K → A_K$, $a ⊗ λ ↦ a ⊗ σ(λ)$, où $σ$ est dans $Π$, donne lieu à une bijection de $π₀^{K\bo k}(A)$, notée abusivement $π₀^{K\bo k}(σ)$ et l'on a \[π₀^{K\bo k}(σ τ)=π₀^{K\bo k}(τ) π₀^{K\bo k}(σ):\] le groupe de Galois $Π=\Gal(K\bo k)$ agit donc naturellement à droite sur l'ensemble $π₀^{K\bo k}(A)$, en posant : $𝔵 ⋅ σ=π₀^{K\bo k}(σ)(𝔵)$, $𝔵 ∈ π₀^{K\bo k}(A)$, $σ ∈ Π$. Pour $f$ comme ci-dessus, les applications $π₀^{K\bo k}(f)$ sont compatibles avec l'action de $Π$ ; on a donc construit un foncteur contravariant de la catégorie $k\traitdunion\Alg$ des $k$-algèbres vers la catégorie $Π\traitdunion\Ens$ des $Π$-ensembles à droite. Notons que si l'algèbre $A$ est finie sur $k$, l'ensemble $π₀^{K\bo k}(A)$ est fini (\refext{Alg}{k-algebres-finies} (i)). Par restriction, on en tire un foncteur contravariant, que nous noterons $π₀^{K\bo k}$, de la catégorie $\categ{\acute{E}t}(K\bo k)$ des $k$-algèbres étales trivialisées par $K\bo k$ vers la catégorie $Π\traitdunion\Ens𝖿$ des $Π$-ensembles à droite \emph{finis}. \begin{quote}Jusqu'à la fin de la section \ref{Galois-Grothendieck}, les $Π$-ensembles sont des $Π$-ensemble \emph{à droite}. \end{quote} Considérons maintenant un $Π$-ensemble fini $X$. La $k$-algèbre $K^X=\Hom_{\Ens}(X,K)$ est étale, trivialisée par $K \bo k$, si bien que sa sous-algèbre $Θ_{K\bo k}(X):=\Fix_{Π}(K^X)$, où $Π$ agit à gauche sur $K^X$ par $σ ⋅ f:\big(x ↦ σ(f(x ⋅ σ)\big)$, est également trivialisée par $K \bo k$ (\refext{Alg}{sous-quotient-diag=diag} (ii)). L'ensemble $Θ_{K\bo k}(X)$ n'est autre que $\Hom_{Π\traitdunion\Ens}(X,K)$, où l'on fait agir $Π$ à droite sur $K$ par $a ⋅ σ = σ^{-1}(a)$. En associant à un morphisme de $Π$-ensembles $φ:X → Y$ le morphisme de $k$-algèbres évident $Θ^{K\bo k}(φ) : Θ^{K\bo k}(Y) → Θ^{K\bo k}(X)$, on obtient un foncteur contravariant $Θ^{K\bo k}$ de $Π\traitdunion\Ens𝖿$ vers $\categ{\acute{E}t}(K\bo k)$. \subsubsection{}Étudions le lien entre ces constructions et la théorie de Galois telle que présentée en \refext{CG}{correspondance Galois finie}. À cet effet, considérons un sous-groupe $H$ de $Π$, auquel on associe naturellement le $Π$-ensemble $H ∖ Π$ des classes à droite $\{H σ\}$, $σ ∈ Π$. Pour tout $Π$-ensemble $Y$, l'application $\Hom_{Π\traitdunion\Ens}(H ∖ Π,Y) → \Fix_H(Y)$, $φ ↦ φ(H)$ est une bijection. Il en résulte que $Θ^{K\bo k}(H ∖ Π)$ est naturellement en bijection avec le sous-corps $\Fix_H(K)$ de $K$. % Dire que si $K ⊆ K ′$, $π₀^{K ′ /k}(A) → π₀^{K /k}(A)$ est un iso si $K/k$ trivialise $A$ % (Utile pour version profinie j'imagine.) \begin{théorème2} \label{Galois-Grothendieck fini} Soit $K\bo k$ une extension fini étale de groupe de Galois $Π$. Les foncteurs \[π₀^{K\bo k}: \categ{\acute{E}t}(K\bo k) → Π\traitdunion\Ens𝖿\] et \[Θ^{K\bo k}: Π\traitdunion\Ens𝖿 → \categ{\acute{E}t}(K\bo k)\] sont des anti-équivalences de catégories quasi-inverses l'une de l'autre. \begin{enumerate} \item L'application $A ↦ π₀^{K\bo k}(A)$ induit une bijection entre les classes d'isomorphismes de $k$-algèbres étales trivialisées par $K \bo k$ et les classes d'isomorphismes de $Π$-ensembles finis. De plus, \[ [A:k] = ♯ π₀^{K\bo k}(A). \] \item Pour toute paire $A,B$ d'objets de $\categ{\acute{E}t}(K\bo k)$, l'application \[ \Hom_{k\traitdunion\Alg}(A,B) → \Hom_{Π\traitdunion\Ens}(π₀^{K\bo k}(B),π₀^{K\bo k}(A)) \] est une bijection. \item \end{enumerate} \end{théorème2} \[⁂\] Il faut vérifier dans [Alg] que chaque $𝔵$ dans $π₀$ induit, dans le cas diagonalisable, un morphisme $A ↠ K$ qui envoie $a$ sur $\ev_A(a)$ via isomorphisme $π₀$ et $K$-points... \begin{proposition2} Soit $K\bo k$ une extension finie étale de groupe de Galois $Π$. \begin{enumerate} \item Les applications $A↦ A^{\japmath{田}}(K)$ et $X↦k_X$ induisent des bijections entre l'ensemble des classes d'isomorphismes de $k$-algèbres étales trivialisées par $K\bo k$ et l'ensemble des classes d'isomorphismes de $Π$-ensembles finis. Ces applications font se correspondre le $k$-rang et le cardinal. \item Elles sont réciproques l'une de l'autre au sens suivant : \begin{enumerate} \item pour toute $k$-algèbre étale $A$ trivialisée par $K\bo k$, l'application d'évaluation \[\ev_A:A→\Hom_{Π\traitdunion\Ens}(A^\japmath{田}(K),K)=k_{A^\japmath{田}(K)}\] \[a↦\big((f:A→K)↦f(a)\big)\] est un isomorphisme de $k$-algèbres ; \item pour tout $Π$-ensemble $X$, l'application d'évaluation \[\ev_X:X→\Hom_k(k_X,K)={k_X}^\japmath{田}(K)\] \[x↦\big((f:X→K)↦f(x)\big)\] est une bijection $Π$-équivariante. \end{enumerate} \item Pour toute paire de $k$-algèbres étales diagonalisées par $K\bo k$ et toute paire de $Π$-ensembles finis, les applications \[\Hom_k(A,B)→\Hom_{Π\traitdunion\Ens}\big(B^\japmath{田}(K),A^\japmath{田}(K)\big)\] et \[\Hom_{Π\traitdunion\Ens}(X,Y)→\Hom_k(k_Y,k_X)\] sont des \emph{bijections}. \item (Lien avec correspondance de Galois classique) Soit $H$ un sous-groupe de $Π$ et soit $k'$ une sous-$k$-extension de $K$. L'algèbre $k_{Π/H}$ est naturellement isomorphe au \emph{corps} $\Fix_H(K)$ et le $Π$-ensemble ${k ′}^\japmath{田}(K)$ à l'ensemble quotient $Π/\Gal(K\bo k ′)$. Plus précisément : \begin{enumerate} \item Le morphisme de $k$-algèbres \[k_{Π/H}→\Fix_H(K)\] \[\big((f:Π/H→K)↦f(H)\big),\] où $Π/H$ désigne l'ensemble $\{σH\}$ des classes à gauche suivant $H$, est un isomorphisme. \item Le morphisme de $Π$-ensembles \[Π/\Gal(K\bo k')→{k'}^\japmath{田}(K)\] \[σ\Gal(K\bo k')↦\big(k'→K,x'↦σ(x')\big)\] est un isomorphisme. \end{enumerate} \end{enumerate} \end{proposition2} On peut essentiellement paraphraser (i)-(iii) en disant, suivant (\refext{Cat}{definition-equivalence-categories}), que les catégories des $k$-algèbres étales diagonalisées par $K\bo k$ et des $Π$-ensembles finis sont anti-\emph{équivalentes}, les foncteurs $A↦ A^{\japmath{田}}(K)$ et $X↦k_X$ étant \emph{quasi}-inverses l'un de l'autre. Une démonstration « cohomologique » d'une partie de cette proposition sera donnée en §\ref{H1kSn}. \begin{démo} Nous allons procéder à reculons pour nous ramener au cas de la correspondance de Galois classique. (iv). Pour tout $Π$-ensemble $Y$, l'application $\Hom_{Π\traitdunion\Ens}(Π/H,Y)→\Fix_H(Y)$, $f↦f(H)$ est une bijection. Le a) en découle. Vérifions b). Soit $ι$ l'injection $k'↪K$ vue comme élément de ${k'}^\japmath{田}(K)$. Il est tautologique que le stabilisateur $\Stab_Π(ι)$ de $ι$ est le sous-groupe $\Gal(K\bo k')$ de $Π$. Pour démontrer b), il suffit donc de vérifier que l'action de $Π$ sur ${k'}^\japmath{田}(K)$ est \emph{transitive}. Or, si $ι₁$ et $ι₂$ sont deux $k$-plongements $k'→K$, ils se prolongent en des $k$-automorphismes $σ_1$ et $σ₂$ de $K$. L'élément $σ=σ_1σ₂^{-1}$ envoie $ι₂$ sur $ι₁$. (ii). Soient $X$ un $Π$-ensemble et $A$ une $k$-algèbre. Puisque $k_{X∐Y}$ (resp. $(A×B)^\japmath{田}(K)$) est naturellement isomorphe à $k_X×k_Y$ (resp. $A^\japmath{田}(K)∐B^\japmath{田}(K)$), et que ces isomorphismes sont compatibles aux applications d'évaluations, on peut supposer que $X$ est \emph{connexe}, \cad que l'action de $Π$ sur $X$ est transitive, et d'autre part que $A$ est un corps. Quitte à remplacer $X$ (resp. $A$) par un $Π$-ensemble (resp. une $k$-algèbre) isomorphe, on peut supposer que $X=Π/H$ (resp. $A=k'$) où $H$ est un sous-groupe de $Π$ (resp. $k'$ est une sous-$k$-extension de $k'$). (Rappelons (\refext{Alg}{diagonalisable implique sous-truc}) que toute $k$-\emph{extension} trivialisée par $K$ se plonge dans $K$.) Vérifions le point a). Comme nous l'avons vu en (iv), le $Π$-ensemble ${k'}^\japmath{田}(K)=\Hom_k(k',K)$ et la $k$-algèbre $k_{Π/\Gal(K\bo k')}$ sont respectivement isomorphes à $Π/\Gal(K\bo k')$ et $k'$. On vérifie immédiatement que l'isomorphisme $k'⥲k_{{k'}^\japmath{田}(K)}$ obtenu ainsi par composition n'est autre que le morphisme d'évaluation de l'énoncé. La démonstration du b) est semblable. Seconde démonstration de a) n'utilisant pas la correspondance de Galois classique. On souhaite montrer que le morphisme d'évaluation $A → \Fix_Π(\Hom_\Ens(A^\japmath{田}(K),K))$ est un isomorphisme. Comme l'algèbre $A$ est supposée étale sur $k$, trivialisée par $K$, on a égalité $♯A^\japmath{田}(K)=\dim_k(A)=:n$ de sorte que la dimension du $K$-espace vectoriel $\Hom_\Ens(A^\japmath{田}(K),K))$ est $n$. Il résulte du lemme \ref{lemme de Speiser} ci-dessous que le $k$-espace vectoriel $\Fix_Π(\Hom_\Ens(A^\japmath{田}(K),K))$ est également de dimension $n$. Pour montrer que le morphisme $\ev_A$ est un isomorphisme il suffit donc de vérifier qu'il est injectif. Si $a$ est dans le noyau, on a $f(a)=0$ pour tout $k$-morphisme $f:A → K$. Il en résulte que les $K$-morphismes $A_K=A ⊗_k K → K$ envoient $a ⊗ 1$ sur $0$. Comme $A_K$ est isomorphe à $K^n$, la considération des $n$ projections montre que $a ⊗ 1=0$ et, finalement, $a=0$. (iii). Soient $L$ une sous-$k$-extension de $K$ et $A$ une $k$-algèbre étale diagonalisée par $K\bo k$. L'isomorphisme (iv.b) $Π/\Gal(K\bo L)⥲L^\japmath{田}(K)$ induit une bijection \[\Hom_{Π\traitdunion\Ens}\big(L^\japmath{田}(K),A^\japmath{田}(K)\big)⥲ \Hom_{Π\traitdunion\Ens}\big(Π/\Gal(K\bo L),A^\japmath{田}(K)\big).\] Par composition avec l'isomorphisme \[\Hom_{Π\traitdunion\Ens}\big(Π/\Gal(K\bo L),\tiret)⥲ \Fix_{\Gal(K\bo L)}(\tiret)\] on en déduit un isomorphisme \(\Hom_{Π\traitdunion\Ens}\big(L^\japmath{田}(K),A^\japmath{田}(K)\big)⥲\Fix_{Π/\Gal(K\bo L)}\big(A^\japmath{田}(K)\big)\). Ce dernier ensemble n'est autre que $\Hom_k(A,L)$ car $\Fix_{Π/\Gal(K\bo L)}(K)=L$. On vérifie sans peine que la bijection ainsi obtenue est l'inverse de l'application $\Hom_k(A,L)→\Hom_{Π\traitdunion\Ens}\big(L^\japmath{田}(K),A^\japmath{田}(K)\big)$ de l'énoncé. Le cas d'une $k$-algèbre étale $B$ diagonalisable sur $K$ se ramène à ce cas particulier par « dévissage » (décomposition en produit de corps). La démonstration du second point est semblable et laissée en exercice au lecteur. \XXX. (i). Conséquence immédiate de (ii) et (iii). \end{démo} \begin{remarque2} On peut voir l'énoncé (ii) comme un résultat de « bidualité ». \end{remarque2} \begin{exemple2} Soient $C$ un groupe commutatif et $f:Π → C$ un morphisme de groupes. Notons $C_f$ le $Π$-ensemble $C$ muni de l'action $σ ⋅ c=c+f(σ)$. La $k$-algèbre $k_{C_f}$ est par définition la sous-$k$-algèbre \[\{(λ_c) ∈ K^C: σ(λ_c)=λ_{c+f(σ)} \text{ pour tout }σ ∈ Π\} \] de $K^C$. Elle est connue dans $\big(\Fix_{\Ker(f)}(K)\big)^C$. Il résulte du théorème précédent que $k_{C_f}$ est un corps si et seulement si l'action de $Π$ sur $C_f$ est \emph{transitive}. Cela revient à dire que le morphisme $f$ est \emph{surjectif}. Dans ce cas, le morphisme évident $\Aut_{Π\traitdunion\Ens}(C_f) → C$, $a ↦ a(0)$, est un isomorphisme. Il en découle que le corps $k_{C_f}$ est une extension galoisienne de $k$ de groupe naturellement isomorphe à $C$. La théorie de Galois prédit qu'une telle extension correspond à un sous-groupe distingué de $Π$. On peut vérifier qu'il s'agit du noyau de $f$, conformément au résultat attendu d'après (iv). En effet, la surjectivité de $f$ force $k_{C_f}$ à être l'image du sous-corps $\Fix_{\Ker(f)}(K)$ de $K$ plongé diagonalement dans $\big(\Fix_{\Ker(f)}(K)\big)^C ⊆ K^C$. \end{exemple2} \subsection{Formes, cocycles associés} \subsubsection{}Soit $K\bo k$ une extension de corps et supposons donné un procédé — appelé « extension des scalaires de $k$ à $K$ » et noté $x↦x_{∕K}$ — associant à des objets et des applications dits « définis sur $k$ » (ou $k$-objets, $k$-morphismes) des objets et des applications dits « définis sur $K$ » (ou $K$-objets, $K$-morphismes). Un $k$-objet $y$ est dit être une \emph{$K\bo k$-forme} d'un $k$-objet $x$ s'il existe un $K$-isomorphisme entre $x_{∕K}$ et $y_{∕K}$. En termes plus précis, on se donne deux \emph{catégories} $\categ{C}$ et $\categ{C}'$ (la première étant appelée catégorie des $k$-objets, la seconde catégorie des $K$-objets), un \emph{foncteur} $e:\categ{C}→\categ{C}'$ (appelé foncteur d'extension des scalaires) et l'on dit qu'un objet $y∈\ob \categ{C}$ est une $K∕k$-forme d'un objet $x∈\ob \categ{C}$ s'il existe un isomorphisme (dans la catégorie $\categ{C}'$) entre les objets $e(x)$ et $e(y)$. Supposons maintenant que l'extension $K\bo k$ est galoisienne, dont on notera $Π$ le groupe de Galois, et que ce dernier agit naturellement sur les objets obtenus par extension des scalaires. Formellement : on se donne un morphisme $Π→\Aut(e)$, où $\Aut(e)$ désigne l'ensemble des transformations naturelles inversibles du foncteur $e$ vers lui-même. \begin{exemples2}\label{exemple k-formes kn} Ces conditions sont réunies si l'on prend pour $k$-objets les $k$-algèbres, pour $K$-objets les $K$-algèbres, et pour foncteur d'extension des scalaires le foncteur $\tiret⊗_k K$. Une $K\bo k$-forme de l'algèbre \emph{diagonale} $k^n$ ($n≥1$) n'est autre qu'une $k$-algèbre étale de rang $n$ trivialisée par l'extension $K\bo k$ (cf. \refext{Alg}{etale}). \end{exemples2} \subsubsection{}\label{action G sur Aut}Par hypothèse, le groupe $Π$ agit sur les objet $x_{∕K}$ où $x$ est défini sur $k$ : on a pour chaque $x$ un morphisme $Π→\Aut(x_{∕K})$, noté $σ↦g_x$. Il agit donc naturellement par conjugaison sur le groupe non nécessairement commutatif $A=\Aut(x_{∕K})$ des automorphismes $\Aut(x_{∕K})$, et plus généralement sur les ensembles $\Hom(x_{\bo K},y_{\bo K})$ : si $f:x_{∕K}→y_{∕K}$ est un $K$-morphisme, $σ⋅f$, aussi noté ${^σ f}$, est $σ_y f σ_x^{-1}$. En d'autres termes, le diagramme \begin{center} \begin{tikzpicture}[auto] \matrix(diag)[matrix of math nodes,column sep=4em,row sep=5ex]{ x_{∕K} & y_{∕K} \\ x_{∕K} & y_{∕K}\\}; \draw[->] (diag-1-1) -- node[swap]{$σ_x$} (diag-2-1); \draw[->] (diag-1-2) -- node{$σ_y$} (diag-2-2); \draw[->] (diag-1-1) -- node{$f$} (diag-1-2); \draw[->] (diag-2-1) -- node{$σ⋅f$} (diag-2-2); \end{tikzpicture} \end{center} commute. \XXX \subsubsection{}\label{definition cocycle forme}Fixons maintenant un $k$-objet $x$ et supposons que $y$ en soit une $K\bo k$-forme. À tout isomorphisme $φ:x_{\bo K}⥲y_{\bo K}$, on associe une \emph{fonction} $Π→A$, notée $c_φ$, définie par $c_φ(g)=φ^{-1}∘σ_y∘φ∘σ_x^{-1}$. (En diagramme : \XXX ) \begin{lemme2} L'application $c_φ$ satisfait la relation suivante : pour tout couple $(σ,τ)∈Π²$, \begin{equation} \tag{$\star$} c_φ(στ)=c_φ(σ)⋅{^σ c_φ(τ)}. \end{equation} \end{lemme2} \begin{démo} Cela résulte des deux égalités \[ c_φ(στ)=φ^{-1}σ_y τ_y φ τ_x^{-1}σ_x^{-1}=\big(φ^{-1}σ_y φ σ_x^{-1}\big)\big(σ_x(φ^{-1}τ_y φ σ_x^{-1})σ_x^{-1}\big). \] \end{démo} \subsubsection{}\label{généralités 1-cocycles} Une telle application est dite un \emph{$1$-cocycle} de $Π$ dans le groupe $A$ ; leur ensemble est noté $Z¹(Π,A)$. (Pour des définitions moins \emph{ad hoc} et plus générales des cocycles d'un groupe à valeurs dans un autre, ainsi que divers compléments, nous renvoyons le lecteur à l'appendice \refext{Coho}{}\XXX.) Voyons maintenant comment dépend de $φ$ l'application $c_φ$. Soit $ψ:x_{\bo K}⥲y_{\bo K}$ un autre $K$-isomorphisme et posons $a=ψ^{-1}φ∈\Aut(x_{\bo K})$. On vérifie immédiatement que l'on a \begin{equation} \tag{$\star\star$} c_φ(σ)=a^{-1}⋅c_ψ(σ)⋅{^σ a}. \end{equation} Deux $1$-cocycles $c$ et $c'$ de $Π$ dans un groupe non nécessairement commutatif $A$ muni d'une action de $Π$ (ici $A=\Aut(x_{\bo K})$) sont dit \emph{cohomologues} s'il existe un élément $a∈A$ tel que $c(σ)=a^{-1}⋅c'(σ)⋅{^σ a}$. C'est une relation d'équivalence sur $Z¹(Π,A)$ et l'ensemble quotient est noté $H¹(Π,A)$. Il est appelé « premier ensemble de cohomologie à valeurs dans $A$ ». Signalons que l'on note également $H⁰(Π,A)$ l'ensemble des points fixes $\Fix_Π(A)$. \begin{remarque2}\label{H1=Hom} Si $Π$ agit trivialement sur $A$, les $1$-cocycles de $Π$ à valeurs dans $A$ ne sont autre que les applications $f:Π→A$ qui sont multiplicatives (c'est-à-dire : $∀(σ,τ)∈Π²,f(στ)=f(σ)f(τ)$). Il s'agit donc de morphismes de groupes (car $f(e_Π)²=f(e²_Π)=f(e_Π)$) et deux tels morphismes sont cohomologues si et seulement si ils sont conjugués (dans $A$) : \[ H¹(Π,A)=\Hom_{\categ{Grp}}(Π,A)/\textrm{conjugaison dans }A. \] En particulier, si $A$ est abélien, on a canoniquement $\Hom_{\categ{Grp}}(Π,A) ⥲H¹(Π,A)$. \end{remarque2} Les cocycles $c_φ$ et $c_ψ$ étant cohomologues, on peut donc associer à toute $K\bo k$-forme $y$ de $x$ une classe $[y]∈H¹(Π,\Aut(x_{\bo K}))$ qui ne dépend que de $y$. Mieux encore : \begin{lemme2} Cette classe de cohomologie ne dépend que de la classe de $k$-isomorphisme de $y$ : si $y$ et $y'$ sont $k$-isomorphes, $[y]=[y']$. \end{lemme2} \begin{démo} Fixons un $K$-isomorphisme $φ:x_{\bo K}⥲y_{\bo K}$ et un $k$-isomorphisme $b:y⥲y'$. On en déduit un $K$-isomorphisme $ψ:x_{\bo K}⥲y'_{\bo K}$ par composition : $ψ=b_{\bo K}∘φ$. Il résulte des définitions que l'on a pour tout $σ∈Π$ : \[ c_φ(σ)=φ^{-1}σ_y φ σ_x^{-1} \] et \[ c_ψ(σ)=(b_{\bo K}∘φ)^{-1}σ_{y'}(b_{\bo K}∘φ)σ_x^{-1}. \] Comme $b_{\bo K}$ provient par extension des scalaires d'un $k$-morphisme, on a $σ_{y'}b_{\bo K}=b_{\bo K}σ_y$. De façon équivalente, $b_{\bo K}^{-1}σ_{y'}=σ_y b_{\bo K}^{-1}$ et, finalement, $c_ψ=c_φ$. \end{démo} Notons $\textrm{Formes}(x,K\bo k)$ l'ensembles des classes de $k$-isomorphisme des $K\bo k$-formes de $x$. Nous venons de construire une application \begin{equation}\label{formes vers H1} \textrm{Formes}(x,K\bo k)→H¹(Π,\Aut(x_{\bo K})). \end{equation} \subsubsection{}\label{hypothèse faisceau}Un des point clef de la théorie de Galois est le lemme \ref{KsurG=k} d'après lequel $\Fix_Π(K)=k$. Dans notre cadre axiomatique, il est naturel de faire une hypothèse de cette nature pour préciser le lien entre les objets sur $K$ et les objets sur $k$. Nous la formulons de la façon suivante : \begin{quote} (F) Pour toute paire d'objets $y$ et $y'$ définis sur $k$, l'application \[ \Hom(y,y')→\Hom(y_{\bo K},y'_{\bo K}) \] induit une \emph{bijection} \[ \Hom(y,y')⥲\Fix_Π\big(\Hom(y_{\bo K},y'_{\bo K})\big). \] \end{quote} % F pour « faisceau ». \begin{proposition2}\label{formes et cohomologie} Sous l'hypothèse (F), l'application \[ \textrm{Formes}(x,K\bo k)→H¹(Π,\Aut(x_{\bo K})) \] \[ \textrm{classe de $k$-isomorphisme de }y↦[y] \] est \emph{injective}. \end{proposition2} \begin{démo} Supposons en effet que $y$ et $y'$ soient deux $K\bo k$-formes de $x$ induisant la même classe de $1$-cocycle. Si $φ$ (resp. $ψ$) est un isomorphisme $x_{\bo K}⥲y_{\bo K}$ (resp. $x_{\bo K}⥲y'_{\bo K}$), la condition $[y]=[y']$, se réécrit : il existe $a$ dans $\Aut(x_{\bo K})$ tel que pour tout $σ∈Π$, $φ^{-1}σ_y φ σ_x^{-1}=a^{-1}⋅ψ^{-1}σ_{y'}ψ σ_x^{-1}⋅{^σ a}$. Cette égalité est équivalente à ${^σ (ψaφ^{-1})}=ψaφ^{-1}$. D'après l'hypothèse (F), le $K$-isomorphisme $σ=ψaφ^{-1}:y_{\bo K}⥲y'_{\bo K}$ provient donc d'un $k$-isomorphisme $y⥲y'$. CQFD. (\emph{A priori}, on sait seulement que $σ$ provient d'un $k$-\emph{morphisme} $τ:y→y'$ ; il suffit d'appliquer le même argument à $σ^{-1}$ pour obtenir un inverse de $τ$.) \end{démo} Terminons cette discussion générale par une illustration de la théorie dans un cas particulièrement simple. \subsection{$k$-algèbres finies diagonalisables par $K\bo k$}\label{H1kSn} \begin{quote} réécrire les deux paragraphes suivants avec du $π₀$ et références à [Spec] \XXX \end{quote} \subsubsection{}\label{H1kSn début} Considérons comme en \ref{exemple k-formes kn} les catégories des $k$-algèbres, des $K$-algèbres et le foncteur évident d'extension des scalaires (produit tensoriel). Fixons un entier $n≥1$. Comme on l'a rappelé ci-dessus, les $K\bo k$-formes de $k^n$ ne sont autres que les $k$-algèbres de rang $n$ trivialisées par l'extension $K\bo k$. Pour mémoire, rappelons que les trois applications $\{1,\dots,n\}→\Spec(K^n)$, $i↦\Ker(\mathrm{pr}_i)$ ($\mathrm{pr}_i$ est la projection sur le $i$-ième facteur), $\Hom_{K\traitdunion\categ{Alg}}(K^n,K)→\Spec(K^n)$, $φ↦\Ker(φ)$, et $\Aut_{K\traitdunion\categ{Alg}}(K^n)→\Aut_{\Ens}(\Hom_{K\traitdunion\categ{Alg}}(K^n,K))$, $φ↦(ψ↦ψφ)$, sont des bijections. Cela résulte par exemple de \refext{Alg}{ideaux-k-X} pour la première, de \refext{Spec}{points rationnels et ideaux maximaux}, \refext{Alg}{k-algebres-finies}, et \refext{Alg}{critere diagonalisabilite} pour la seconde et enfin de \ref{Galois-Grothendieck fini} (dans le cas particulier où $G=\{1\}$) pour la troisième. En d'autres termes, le groupe $\Aut_K(K^n)$ est naturellement isomorphe à $𝔖_n$ : un automorphisme de $K$-algèbre de $K^n$ est une permutation des coordonnées. L'action induite de $Π$ sur $𝔖_n$ est ici triviale car $Π$ agit composante par composante sur $K^n$. Il résulte de la construction générale qui précède que nous disposons d'une application explicite : \[ \textrm{Formes}(\text{algèbre } k^n,K\bo k)=\{k\traitdunion\textrm{alg. rang }n\textrm{ diag. sur }K\}∕\textrm{isom.}→H¹(Π,𝔖_n). \] \begin{proposition2}\label{formes algebres commutatives} L'application \[ \textrm{Formes}(\text{algèbre } k^n,K\bo k)→H¹(\Gal(K\bo k),𝔖_n) \] est une bijection. \end{proposition2} \begin{démo} Soit $A$ une $K\bo k$-forme de $k^n$ et considérons le $Π$-ensemble fini $A^\japmath{田}(K)$ où $σ∈Π$ agit par composition : $σ⋅x=g∘x$. Par hypothèse, cet ensemble est de cardinal $n$. D'après la correspondance de Galois-Grothendieck (\ref{Galois-Grothendieck fini}) cette construction induit une bijection entre l'ensemble $\textrm{Formes}(k^n,K\bo K)$ et l'ensemble des classes d'isomorphismes d'action de $Π$ sur $\{1,\dots,n\}$. Ce dernier n'est autre que l'ensemble des morphismes de groupes de $Π$ dans $𝔖_n$, modulo conjugaison, qui coïncide avec $H¹(Π,𝔖_n)$ car l'action de $Π$ est triviale (cf. \ref{H1=Hom}). Ceci montre déjà que les deux ensembles $\textrm{Formes}(k^n,K\bo k)$ et $H¹(Π,𝔖_n)$ sont en bijection ; en particulier, ils ont même cardinal. Pour conclure deux méthodes s'offrent à nous. \emph{Première méthode} : vérifier que l'hypothèse (F) est satisfaite. C'est une simple variante de la seconde démonstration de \refext{CG}{KsurG=k}. Il en résulte (cf. \ref{formes et cohomologie}) que l'application de l'énoncé est injective. Comme le but est fini et, d'après ce qui précède, en bijection avec la source, l'application de l'énoncé est une bijection. \emph{Seconde méthode} : vérifier que l'application $\textrm{Formes}(k^n,K\bo K)→H¹(Π,𝔖_n)$ que nous venons de construire en utilisant la correspondance de Galois-Grothendieck coïncide avec l'application de l'énoncé, définie de façon plus générale. Pour cela, on explicite cette dernière. Soit $A$ une $k$-algèbre de rang $n$ trivialisée par $K\bo k$. Le morphisme d'évaluation (cf. \refext{Alg}{consequences lemme chinois}) $A_K→ K^{A_K^\japmath{田}(K)}$ est un isomorphisme. Rappelons que $A_K=A⊗_k K$ (par définition) et que l'application de restriction $A_K^\japmath{田}(K)→A^\japmath{田}(K)$ des $K$-morphismes de $A_K$ dans $K$ vers les $k$-morphismes de $A$ dans $K$ est une bijection (\refext{Alg}{critere-numerique-diagonalisable}). Notons $\ev:A_K⥲K^{A^\japmath{田}(K)}$ l'isomorphisme ainsi obtenu et $φ$ son inverse. On vérifie immédiatement que $\ev$ envoie $b=a⊗λ$ sur $x∈A^\japmath{田}(K)↦λx(a)∈K$. Soit $σ∈Π=\Gal(K\bo k)$. Son action sur $A_K$ est caractérisée par $σ_A⋅a⊗λ=a⊗σ(λ)$ tandis que son action sur l'algèbre diagonale $K^{A^\japmath{田}(K)}$ se fait coordonnées par coordonnées : $σ⋅(λ_x)_{x∈A^\japmath{田}(K)}=(σ(λ_x))_{x∈A^\japmath{田}(K)}$. Ainsi, \[\big(σ∘\ev∘σ_A^{-1}∘{\ev}^{-1}\big)\big(x↦λx(a)\big)=(x↦λ \big(σ∘x)(a)\big).\] Par définition, l'automorphisme $σ∘\ev∘σ_A^{-1}∘{\ev}^{-1}$ est l'\emph{inverse} du $K$-automorphisme $c_{φ}(σ)$ de $K^{A^\japmath{田}(K)}$ ; d'après ce qui précède, la permutation de $A^\japmath{田}(K)$ induite par $c_φ$ en prenant le spectre n'est autre que l'application $x↦σ∘x$. (Prendre garde que si $σ$ est une permutation d'un ensemble fini $X$, l'image inverse par l'automorphisme $(λ_x)↦(λ_{σ(x)})$ de $K^X$ de l'idéal premier $𝔭_x=\Ker(\mathrm{pr}_x)$ est $𝔭_{σ^{-1}(x)}$.) CQFD. \end{démo} \begin{remarque2}Comme l'avons vu au début de la démonstration, l'ensemble $H¹(Π,𝔖_n)$ est canoniquement en bijection avec l'ensemble des classes de conjugaison de morphismes $Π → 𝔖_n$ (\ref{H1=Hom}), ce dernier étant lui-même naturellement en bijection avec l'ensemble des classes d'isomorphisme de $Π$-ensembles de cardinal $n$. En explicitant les flèches (cf. \ref{formes algèbres et cocycles} \emph{infra}), on peut vérifier qu'un morphisme $c: Π → 𝔖_n$ ($1$-cocycle) correspond à l'algèbre étale $\Hom_{Π\traitdunion\Ens}([1,n],K)$, où $Π$ agit sur $[1,n]$ par $c$. On retrouve la description (\ref{Galois-Grothendieck fini}) des $k$-algèbres étales trivialisées par $K\bo k$. \end{remarque2} \begin{remarque2} Le morphisme signature $𝔖_n → \{±1\}$ induit une application \[H¹(Π,𝔖_n) → H¹(Π,\{±1\}).\] (Signalons, bien que cela ne soit pas important ici, que le terme de droite est naturellement isomorphe au quotient $({K^×}² ∩ k^×)/{k^×}²$ si la caractéristique de $k$ n'est pas deux.) D'après ce qui précède, on a associe donc à toute $k$-algèbre étale $A$ de rang $n$ trivialisée par $K\bo k$ une $k$-algèbre étale de rang $2$ trivialisée par $K\bo k$. Supposons que l'algèbre $A$ soit un corps. Elle est alors $k$-isomorphe à un quotient $k[X]/f(X)$ où $f ∈ k[X]$ est un polynôme séparable de degré $n$, scindé sur $K$. Il est essentiellement tautologique (cf. \refext{CG}{definition discriminant et 2-distinguant}) de vérifier que l'algèbre étale de rang $2$ obtenue est $k[T]/(T²-Δ(f))$ si $\car(k)≠2$ et $k[T]/(T²-T-\japmath{別}₂(f))$ sinon. \end{remarque2} \subsection{Torseurs sur $k$ sous un groupe fini $G$}\label{G-torseurs sur k} \subsubsection{}Soient $K\bo k$ une extension finie galoisienne de groupe $Π$ et $G$ un groupe fini. Nous allons donner une interprétation générale de l'ensemble de cohomologie $H¹(Π,G)$. Signalons qu'on ne l'étudie pas nécessairement \emph{per se} mais souvent au motif qu'il décrit les objets que nous allons introduire dans un instant. Pour le lien entre ce qui suit, dans le cas particulier où $G=𝔖_n$, et la bijection $\textrm{Formes}(\text{algèbre } k^n,K\bo k) ⥲ H¹(Π,𝔖_n)$ précédente, voir remarque \ref{H1(k,Sn)=H1(k,Sn)}. \subsubsection{}Considérons les catégories des $k$-algèbres \emph{munies d'une action $k$-linéaire de $G$} (resp. des $K$-algèbres munies d'une action $K$-linéaire de $G$) et le foncteur évident d'extension des scalaires associant à $A$ l'algèbre $A ⊗_k K$ où $G$ agit trivialement sur $K$. De tels objets seront appelés ici $(G,k)$-algèbres (resp. $(G,K)$-algèbres). Les morphismes dans $(G,k)\traitdunion\Alg$ sont les morphismes de $k$-algèbres commutant à l'action de $G$. De même sur $K$. \subsubsection{La $(G,K)$-algèbre $K^G$} Considérons la $K$-algèbre $K^G=\Hom_{\Ens}(G,K)$ munie de l'action de $G$ par translation à droite : $g ⋅ f=f(\tiret g)$. Malgré la similitude formelle, prendre garde de ne pas confondre cette algèbre avec une des algèbres construites en \ref{notations Galois-Grothendieck} ; ici, le groupe $G$ n'est pas supposé agir sur $K$. (Voir cependant \ref{classification ensembliste des torseurs} pour un lien entre ces deux approches.) Notons pour chaque $g ∈ G$, $e_g$ la fonction valant $1$ en $g$ et zéro ailleurs. Comme vérifié en \refext{Spec}{idempotents-produit}, l'application $G → \Idem(K^G) ⊆ K^G$, $g ↦ e_g$, induit une bijection $G$-équivariante de $G$ vers l'ensemble des idempotents indécomposables, où $G$ agit sur lui-même par translation à droite : $g ⋅h=hg^{-1}$. L'algèbre $K^G$ étant réduite, il résulte de l'exercice \refext{Alg}{algebres finies via idempotents} que l'application $G → \Spec(K^G)$ $g ↦ \Ann(e_g)$ est une bijection\footnote{On obtient une seconde démonstration de ce fait en observant que $\Ann(e_g)=\Ker(\pr_g)$ et en utilisant \refext{Alg}{ideaux-k-X}}. L'isomorphisme $G ⥲ \Spec(K^G)$ ainsi obtenu est $G$-équivariant, si l'on fait agir $G$ sur le spectre de la manière naturelle, c'est-à-dire par $g ⋅ 𝔭=g(𝔭)$. (À titre d'exercice, on pourra comparer ces observations avec la conjonction de \refext{CG}{galois=autodiag} et \refext{CG}{points-KtensK}.) Afin d'étudier suivant la méthode de ce chapitre les formes tordues de $K^G$, \emph{en tant que $(G,K)$-algèbre}, il nous faut calculer $\Aut_{(G,K)\traitdunion\Alg}(K^G)$. Le sur-groupe $\Aut_{K\traitdunion\Alg}(K^G)$ est déjà connu : c'est le groupe $𝔖(G)$ des permutations de $G$, que l'on peut voir d'après ce qui précède comme groupe de permutations des $𝔭_g ∈ \Spec(K^G)$ ou bien comme groupe de permutations des $e_g ∈ \Idem(K^G)$. Les seules permutations commutant à l'action de $G$ (par translation à droite des indices) sont les translations à gauche par des éléments de $G$. En d'autres termes, $\Aut_{(G,K)\traitdunion\Alg}(K^G)$ est (canoniquement) isomorphe au groupe $G$. \begin{définition2} On appelle $G$-torseur sur $k$ trivialisé par une extension galoisienne $K\bo k$ toute $k$-algèbre $A$ munie d'une action $k$-linéaire de $G$ telle que $A_K$ soit isomorphe à $K^G$. \end{définition2} On note $\mathrm{Tors}(K\bo k,G)$ leur ensemble. On appelle $G$-torseur trivial (sous-entendu : sur $k$) le $G$-torseur $k^G$. \begin{exemple2}\label{extension galoisienne groupe G est un G-torseur} Toute extension $k′\bo k$ galoisienne de groupe $G$ et trivialisé par $K\bo k$ est un objet de $\mathrm{Tors}(K\bo k,G)$. Choisissons en effet un $k$-plongement $ι$ de $k′$ dans $K$, dont l'existence est conséquence du fait que $K\bo k$ diagonalise $k′\bo k$ (voir aussi \ref{description explicite Tors=H1}, (i)). Une généralisation immédiate de \refext{CG}{galois=autodiag} montre que le morphisme $k ′ ⊗_k K → K^G$, $x ⊗ y ↦\big(ι(g(x))y\big)_g$ est un isomorphisme. Il est $G$-équivariant. \end{exemple2} \begin{remarque2} Dans l'exemple précédent, le groupe $G$ est le groupe $\Aut_k(k ′)$. Il faut cependant se garder de croire qu'en général le groupe se retrouve à partir de l'algèbre sous-jacente au torseur. Il fait partie de la donnée (cf. \refext{CG}{meg-torseurs}). \end{remarque2} De façon générale, on a : — l'action de $G$ est fidèle ; — $A\bo k$ est une $G$-algèbre galoisienne. \begin{proposition2}\label{H1G=TorsG} L'ensemble des classes d'isomorphismes $\mathrm{Tors}(K\bo k,G)/∼$ est naturellement en bijection avec l'ensemble $H¹(Π,G)$, quotient de l'ensemble $\Hom(Π,G)$ sous l'action de $G$ par conjugaison. Si $G$ est abélien, il est isomorphe à $\Hom(Π,G)$. \end{proposition2} On trouvera en \ref{description explicite Tors=H1} une démonstration plus directe de ce résultat ainsi qu'un complément. \begin{démo} Le premier énoncé est un cas particulier de la théorie des formes et de ce qui précède. La description de $H¹(Π,G)$ est tirée de \ref{H1=Hom}. \end{démo} Ces deux ensembles sont naturellement pointés, respectivement par la classe d'isomorphisme du torseur trivial et la classe du $1$-cocycle trivial ; la bijection respecte ces points. \begin{exercice2}\label{description explicite Tors=H1} % tiré de Serre et Bayer-F. (1994) Soit $A$ un $G$-torseur sur $k$ trivialisé par $K\bo k$. \begin{enumerate} \item Montrer que l'ensemble $\Hom_k(A,K)$ a $♯G$ éléments, permutés transitivement par l'action naturelle de $G$. (Indication : $\Hom_k(A,K) ⥲ \Hom_K(A_K,K)$.) \item Soit $ι ∈ \Hom_k(A,K)$. Montrer que pour chaque $σ$ dans $Π$, il existe un unique $g_σ$ dans $G$ tel que $σ ∘ ι = ι ∘ g_σ$. Montrer que $φ_{A, ι}: Π → G$ est un morphisme de groupes. \item Montrer que les $φ_{A,ι}$, pour $ι ∈ \Hom_k(A,K)$, sont conjugués par $G$. \item Montrer que la classe $φ_A$ des $φ_{A,ι}$ dans $H¹(Π,G)$ coïncide avec la classe de $A$ par l'isomorphisme \ref{H1G=TorsG}. \item Montrer que l'image de $ι$ est un sous-corps de $K$, indépendant de $ι$. On le notera $i(A)$. \item Montrer que l'extension $i(A)\bo k$ est galoisienne de groupe $φ_A(Π)$. \item Montrer que $A$ est $k$-isomorphe à $(G: φ(Π))$ produits de $i(A)$. \item En déduire que $φ_A$ est \emph{surjectif} si et seulement si le torseur $A$ est un \emph{corps}. \end{enumerate} \end{exercice2} \begin{remarque2}\label{H1(k,Sn)=H1(k,Sn)} Nous avons vu en \ref{formes algebres commutatives} une description de l'ensemble $H¹(K\bo k,𝔖_n)$ comme ensemble des classes d'isomorphismes de $k$-algèbres étales de rang $n$ trivialisées par $K\bo k$. D'après le corollaire précédent, c'est aussi l'ensemble des classes d'isomorphismes de $(𝔖_n,k)$-torseurs trivialisés par $K\bo k$. Ces torseurs sont de rang $n!$. Cependant, à tout tel torseur $B$, on peut associer l'algèbre des points fixes $A=\Fix_{𝔖_{n-1}}(B)$ où $𝔖_{n-1}$ agit par l'injection canonique $𝔖_{n-1} ↪ 𝔖_n$. L'algèbre $A$ étale de rang $n$ sur $k$ et trivialisée par $K\bo k$. Réciproquement, si $A$ est une algèbre étale de rang $n$ trivialisée par $K\bo k$, posons $X=A^{\japmath{田}}(K)$ (cf. p. ex. \ref{notations Galois-Grothendieck}) et $Y⊆X^n$ le sous-ensemble de $n$-uplets à coordonnées toutes distinctes. Il est naturellement muni d'une action du groupe de permutation $𝔖_n$ ; il en est donc de même de l'algèbre $k_Y$. On vérifie aisément que $k_Y$ est $𝔖_n$-torseur (trivialisé par $K\bo k$). À titre d'exercice, le lecteur pourra vérifier que ces deux constructions sont réciproques l'une de l'autre. % pas fait mais ça a l'air facile \end{remarque2} \begin{exercice2}\label{classification ensembliste des torseurs} Définir $G$-torseurs pour $Π$-ensembles. Montrer que $H¹(Π,G)$ est en bijection avec classes d'isom de torseurs. En déduire une seconde démonstration de \ref{H1G=TorsG}. \XXX % cf. KMRT, § 28.15. \end{exercice2} \section{Descente galoisienne : théorème $90$ de Hilbert, tenseurs}\label{descente galoisienne} \subsection{Théorème $90$ de Hilbert} \subsubsection{}Considérons maintenant les catégories des $k$-espaces vectoriels, des $K$-espaces vectoriels et le foncteur évident d'extension des scalaires (produit tensoriel). Fixons un entier $n≥1$. Les $K\bo k$-formes du $k$-espace vectoriel $k^n$ ne sont autre que les $k$-espaces vectoriels de rang $n$ ; ils sont tous isomorphes. D'autre part, le groupe des $K$-automorphismes du $K$-espace vectoriel $K^n$ est $\GL_n(K)$. L'action induite de $Π$ sur $\GL_n(K)$ se fait composante par composante ; cela résulte immédiatement du fait qu'il en est ainsi de l'action naturelle de $Π$ sur $K^n$ et de la formule ${^σ f}=σfσ^{-1}$, où $f∈\GL_n(K)$ (cf. \ref{action G sur Aut}). La construction générale du §\ref{formes} fournit une application de l'ensemble à un élément des $K\bo k$-formes de $k^n$ vers l'ensemble $H¹(Π,\GL_n(K))$ ; elle n'est guère intéressante et envoie la classe d'isomorphisme de $k^n$ sur la classe du $1$-cocycle trivial. Cependant, il est remarquable que cette application soit, ici encore, une bijection : \begin{théorème2}[D. Hilbert, A. Speiser \cite{ZSG@Speiser}]\label{Hilbert 90} Soient $K\bo k$ une extension finie galoisienne de groupe $Π$ et $n≥1$ un entier. Tout $1$-cocycle de $Π$ à valeurs dans $\GL_n(K)$, où l'action de $Π$ sur $\GL_n(K)$ se fait composante par composante, est cohomologue au cocycle trivial : \[H¹(\Gal(K\bo k),\GL_n(K))=\{\star\}.\] \end{théorème2} Dans la littérature, le cas particulier où $n=1$ de ce théorème est souvent appelé « théorème $90$ de Hilbert », où le nombre $90$ fait référence à la numérotation consécutive employée dans son fameux « Zahlbericht » \cite{Zahlbericht@Hilbert}. \subsubsection{Première démonstration}\label{H90 via Poincaré} Soit $c:Π→\GL_n(K)$ un $1$-cocycle et montrons qu'il est cohomologue au cocycle trivial $σ∈Π↦1∈\GL_n(K)$. (On dit alors que $c$ est un \emph{cobord}.) Cela revient à montrer qu'il existe un élément $a∈\GL_n(K)$ tel que $c(σ)=a^{-1}⋅{^σ a}$ pour tout $σ∈Π$. Soit $m∈\mathrm{M}_n(K)$ une matrice carrée et posons \[ m_c:=∑_{σ∈Π} c(σ)⋅{^σ m}, \] où l'action de $σ$ sur $m$ se fait composante par composante. On vérifie immédiatement que ${^σ m_c}=c(σ)^{-1}⋅m_c$. Cette formule montre que $c$ est un cobord, pourvu que l'on sache trouver une matrice $m$ telle que $m_c$ soit inversible. À cette fin, considérons pour chaque $x∈K^n$, le vecteur \[ x_c:=∑_{σ∈Π} c(σ)\big(σ(x)\big). \] Les $x_c$, $x∈K^n$, engendrent $K^n$ comme $K$-espace vectoriel car toute $K$-forme linéaire $ℓ$ nulle sur les $x_c$ est nulle. En effet, il résulte du théorème \refext{CG}{indépendance linéaire des automorphismes} (indépendance linéaire des $σ(\tiret)$) et des égalités \[ 0=ℓ\big((λx)_c\big)=∑_{σ∈Π} σ(λ)⋅ℓ\big(c(σ)(σ(x))\big) \] pour tout $λ∈K$ et tout $x∈K^n$ que l'on a $ℓ\big(c(σ)(σ(x))\big)=0$ pour tout $x$ et tout $σ$, et finalement $ℓ=0$ car les $c(σ)$ sont inversibles. Soient $x₁,\dots,x_n$ des vecteurs de $K^n$ tels que les ${x_i}_c$ soient linéairement indépendants sur $K$ et $m$ la matrice de vecteurs-colonnes les $x_i$. Il est immédiat que $m_c$ est la matrice \emph{inversible} de vecteurs-colonnes les ${x_i}_c$ ; CQFD. \subsubsection{Seconde démonstration (esquisse)}\label{action semi lineaire} Disons qu'une action \emph{semi-linéaire} de $Π=\Gal(K\bo k)$ sur un $K$-espace vectoriel $W$ est la donnée, pour tout $σ∈Π$, un endomorphisme de groupe additif $φ_σ:W→W$ tel que \begin{equation} φ_σ(λw)=σ(λ)φ_σ(w) \tag{semi-linéarité} \end{equation} pour tout $λ∈K$ et tout $w∈W$, de sorte que les relations \begin{equation} φ_{στ}=φ_σ φ_τ \tag{$Π$-action} \end{equation} soient satisfaites pour tous $σ,τ∈Π$. Nous noterons $(W,φ)$ une telle donnée. Il est immédiat de vérifier que la donnée d'un $1$-cocycle de $Π$ à valeurs dans $\GL_n(K)$ est équivalente à la donnée d'une action \emph{semi-linéaire} de $Π$ sur le $K$-espace vectoriel $K^n$ : à un cocycle $c$ on associe $(K^n,φ^c)$, $φ^c_σ$ étant l'unique endomorphisme semi-linéaire tel que $φ^c_σ(e_i)=c_σ(e_i)$ pour tout indice $i$, où $(e_i)_{1≤i≤n}$ est la base canonique de $K^n$. (En d'autres termes : $φ^c_σ(∑_i λ_i e_i)=∑_i σ(λ_i)⋅c(σ)(e_i)$.) À $(W,φ)$ comme ci-dessus, associons le sous-groupe \[W^{φ=\Id}:=\{w∈W:∀σ∈Π,φ_σ(w)=w\}.\] Il est stable par multiplication par les scalaires dans $k$ : c'est un sous-$k$-espace vectoriel de $W$. \begin{théorème2}[lemme de Speiser ; « descente galoisienne »]\label{lemme de Speiser} L'inclusion de $W^{φ=\Id}$ dans $W$ induit un isomorphisme \[ W^{φ=\Id}⊗_k K ⥲ W. \] \end{théorème2} Achevons la seconde démonstration du théorème de Hilbert-Speiser en admettant momentanément ce théorème. D'après ce dernier, il existe une $K$-base de $W$ constituée d'éléments fixes sous l'action de $Π$ (considérer l'image dans $W$ d'une $k$-base de $W^{φ=\Id}$). Si $c$ est un $1$-cocycle à valeurs dans $\GL_n(K)$, il existe donc une $K$-base $(f_i)_{1≤i≤n}$ de $K^n$ telle que $φ^c(σ)(f_i)=f_i$ pour tout $σ∈Π$ et tout $i∈[1,n]$. Soit $P$ la matrice de vecteurs-colonnes les $f_i$. On vérifie immédiatement que l'on a $c(σ)=P⋅{^σ P^{-1}}$. CQFD. Revenons à la démonstration du théorème \ref{lemme de Speiser}. Deux méthodes s'offrent à nous : imiter la démonstration précédente du théorème \ref{Hilbert 90} en vérifiant que toute $K$-forme linéaire nulle sur $W^{φ=\Id}$ est nulle — la démonstration est identique à celle de \emph{loc. cit.} — ou bien utiliser un résultat général de descente. Pour cette dernière méthode, nous renvoyons le lecteur à \refext{descente}{}. % Voir aussi Gille-Szamuely, p. 28. \begin{corollaire2}\label{H1Ga=0} Soient $K\bo k$ une extension finie galoisienne de groupe $Π$. Tout $1$-cocycle de $Π$ à valeurs dans $K$, où $Π$ agit naturellement sur $K$, est trivial : \[H¹(\Gal(K\bo k),K)=\{\star\}.\] \end{corollaire2} \begin{démo} Soit $c:Π→K$ un $1$-cocycle. Considérons l'application $c₂:Π→\GL₂(K)$, $σ↦\left(\begin{matrix}1 & c(σ)\\ 0 & 1\end{matrix}\right)$. On a $c₂(στ)=\left(\begin{matrix}1 & c(σ)+σ⋅c(τ)\\ 0 & 1\end{matrix}\right)=c₂(σ)⋅{^σ c₂(τ)}$ de sorte que $c₂$ est un $1$-cocycle à valeur dans $\GL₂(K)$. D'après le théorème 90 de Hilbert, il est trivial : il existe une matrice inversible $a∈\GL₂(K)$ telle que $a⋅c₂(σ)={^σ a}$ pour tout $σ∈Π$. Si $a=\left(\begin{matrix}α & β\\ γ & δ\end{matrix}\right)$ on a donc \[\left(\begin{matrix}α & c(σ)α+β \\ γ & c(σ)γ+δ\end{matrix}\right)=\left(\begin{matrix}σ(α) & σ(β)\\ σ(γ) & σ(δ)\end{matrix}\right)\] pour tout $σ∈Π$. Il en résulte que $α$ et $δ$ appartiennent à $k$ et si $α≠0$ (resp. $γ≠0$) $c(σ)=σ(β/α)-(β/α)$ (resp. $c(σ)=σ(δ/γ)-(δ/γ)$). Puisque $a$ est inversible, $α$ ou $γ$ est non nul de sorte que $c$ est un $1$-cobord. \end{démo} \subsection{Descente galoisienne de tenseurs} Le but de ce paragraphe est d'énoncer un théorème général qui nous permettra ci-après d'obtenir un analogue non commutatif de la proposition \ref{formes algebres commutatives} où l'on remplace la $K$-algèbre diagonale $K^n$ par la $K$-algèbre non nécessairement commutative $M_n(K)$. Le rôle de $𝔖_n$ sera joué par $\PGL_n(K)$. Pour cela nous commençons par quelques sorites sur les « tenseurs » et une application du théorème 90 de Hilbert. \begin{définition2}\label{définition tenseurs} Soient $k$ un corps et $V$ un $k$-espace vectoriel. On appelle \emph{tenseur}\index{tenseur} sur $V$ de type $(p,q)$ un élément de $T^p_q(V)=T^p(V)⊗T^q(V^∨)$, où $p$ et $q$ sont des entiers positifs ou nuls et $T^p(V)$ désigne $V⊗_k \cdots ⊗_k V$ ($p$ fois). \end{définition2} \subsubsection{}Pour $p$ et $q$ fixés, on peut définir la catégorie des $k$-tenseurs de type $(p,q)$ dont les objets (« $k$-objets ») sont les paires $(V,x)$ où $V$ est un $k$-espace vectoriel et $x$ est un tenseur de type $(p,q)$ sur $V$ et les morphismes entre $(V,x)$ et $(V',x')$ sont les applications $k$-linéaires $f:V→V'$ telles que $f(x)=x'$. On définit de même la catégorie des $K$-tenseurs de type $(p,q)$, où $K\bo k$ est une extension finie galoisienne de groupe $Π$, et l'« extension des scalaires » de $k$ à $K$ n'est autre que le foncteur $(V,x)↦(V_K,x_K)$ où $x_K∈T^p_q(V_K)$ est l'image de $x$ par l'isomorphisme canonique $T^p_q(V)⊗_k K⥲T^p_q(V_K)$ (cf. \refext{Tens}{}). \begin{théorème2}\label{formes des tenseurs=CG} Soient $(p,q)$ une paire d'entiers, et $K\bo k$ une extension finie galoisienne. Pour tout $k$-tenseur $(V,x)$ de type $(p,q)$, l'application \[ \mathrm{Formes}\big((V,x),K\bo k)→H¹\big(\Gal(K\bo k),\Aut((V,x)_{\bo K})\big) \] est une bijection. \end{théorème2} \begin{convention2} Conformément à l'usage, nous écrirons dorénavant $H¹(K\bo k,\tiret)$ les ensembles de cohomologie $H¹(\Gal(K\bo k),\tiret)$, que nous appellerons ensembles de \emph{cohomologie galoisienne}\index{ensemble de cohomologie galoisienne}. \end{convention2} Remarquons que si $x=0$, le théorème est équivalent au théorème 90. \begin{démo} Comme précédemment, notons $Π$ le groupe de Galois de l'extension $K\bo k$. Injectivité. Il suffit de vérifier la propriété (F) de \ref{hypothèse faisceau}, c'est-à-dire : $\Hom((V,x),(V',x'))=\Fix_Π(\Hom((V,x)_{\bo K},(V',x')_{\bo K}))$. Soit $σ:(V,x)_{\bo K}→(V',x')_{\bo K}$ un $K$-morphisme $Π$-invariant. D'après le corollaire \ref{VKsurG=V}, l'application linéaire $V_{\bo K}→V'_{\bo K}$ est $k$-rationnelle : elle provient par extension des scalaires d'une application $k$-linéaire $f:V→V'$. Vérifions que $f(x)=x'$. On a $f(x)_{\bo K}=f_{\bo K}(x_{\bo K})=σ(x_{\bo K})=x'_{\bo K}$. La conclusion résulte de l'injectivité de l'application $T^p_q(V)→T^p_q(V_K)$, $y↦y_{\bo K}$. Surjectivité. Pour simplifier, notons $X=(V,x)$ et $G=\Aut(X_{\bo K})$. Le groupe $G$ est naturellement un sous-groupe de $\GL(V)$. Soit $c$ un $1$-cocycle de $Π$ à valeurs dans $G$. D'après \ref{Hilbert 90}, il existe un $K$-automorphisme $φ$ de $V_K$ tel que $c(σ)=φ^{-1}⋅{^σ φ}$ pour tout $σ∈Π$. Posons $\tilde{x}=φ(x)∈T^p_q(V_K)$. Il appartient à $\Fix_Π(T^p_q(V_K))=T^p_q(V)$ — où l'égalité résulte de \ref{VKsurG=V} — car \[σ(\tilde{x})=σ(φ)(σ(x))=σ(φ)(x)=φ∘c(σ)(x)=φ(x)=\tilde{x}.\] Par construction, $\tilde{X}=(V,\tilde{x})$ est une $K\bo k$-forme de $X$. Il résulte immédiatement de l'égalité $c(σ)=φ^{-1}⋅{^σ φ}$ et de la définition \ref{definition cocycle forme} que le $1$-cocycle $c_φ$, dont la classe de cohomologie est $[\tilde{X}]∈H¹(Π,G)$, n'est autre que $c$. \end{démo} \subsubsection{}Soient $A$ et $B$ deux $k$-algèbres, $K\bo k$ une extension finie galoisienne de groupe $Π$ et $φ$ un $K$-isomorphisme $A_K ⥲ B_K$, de sorte que $B$ est une $K\bo k$-forme de $A$ (et réciproquement). L'image de $B$ dans $B_K$ par le plongement canonique $b ↦ b ⊗ 1$ est le sous-$k$-espace vectoriel \[ \{ β ∈ B_K, (\Id_B ⊗ σ)(β)=β \text{ pour tout } σ ∈ Π\} \] de $B_K$ de sorte que $B$ est $k$-isomorphe à sous-$k$-algèbre $\{α ∈ A_K, (\Id_B ⊗ σ)φ(α)=φ(α) \text{ pour tout } σ ∈ Π\}$ de $A_K$. L'égalité $(\Id_B ⊗ σ)φ(α)=φ(α)$ se réécrit $φ^{-1}(\Id_B ⊗ σ)φ(α)=α$ ou encore $c_φ(σ)(\Id_A ⊗ σ)(α)=α$ par définition même de $c_φ$ (cf. \ref{definition cocycle forme}). Cette observation conduit à la description explicite suivante des formes tordues d'une algèbre donnée. \begin{corollaire2}\label{formes algèbres et cocycles} Si $A$ est une $k$-algèbre et $c: Π → \Aut(A_K)$ un $1$-cocycle, la $k$-forme de $A_K$ correspondant à la classe de $c$ est la classe d'isomorphisme de la $k$-algèbre \[ \{x ∈ A_K : c(σ)(\Id ⊗ σ)(x)=x \text{ pour tout } σ ∈ Π \}. \] Réciproquement, toute $K\bo k$-forme de $A$ est, à $k$-isomorphisme près, obtenue par ce procédé. \end{corollaire2} À titre d'illustration du théorème \ref{formes des tenseurs=CG} dans un autre contexte, considérons un corps $k$ de caractéristique différente de $2$ et une forme bilinéaire symétrique non dégénérée sur un $k$-espace vectoriel de dimension finie. Une telle forme correspond à un tenseur de type $(0,2)$. Notons $q$ la forme quadratique associée et $\Orth_q$ le groupe orthogonal correspondant. \begin{corollaire2} L'ensemble des classes d'isomorphisme de $k$-formes quadratiques $K$-isomorphes à $q$ sont en bijection avec l'ensemble de cohomologie galoisienne $H¹(K\bo k,\Orth_q(K))$. \end{corollaire2} \subsection{Un critère pour que les formes tordues soient galoisiennes} \subsubsection{}\label{foncteur des automorphismes tenseur}Soient $X=(V,x)$ comme ci-dessus, $d$ la dimension de $V$ et $e=(e₁,…,e_d)$ une base. Considérons pour toute $k$-algèbre $T$ le sous-groupe $G_{X}(T)=\Aut_{T}(X_{\bo T})$ de $\GL(V_T)$ constitué des applications $T$-linéaires $f:V_T → V_T$ telles que $f(x_T)=x_T$. Soit $(f_{i,j}) ∈ \GL_d(T)$ la matrice de $f$ dans la base $e₁ ⊗ T,…,e_d ⊗ T$. La condition $f(x_T)=x_T$ est équivalente à un système d'équations polynomiales à coefficients dans $k$ en les variables $f_{i,j}$ ($1≤i,j≤d$) \[g₁\big((f_{i,j})\big)=…=g_N\big((f_{i,j})\big)=0\] où les $g_α∈k[(T_{i,j})]$ ne dépendent que de $x$ et du choix de la base. D'autre part, $f$ est un automorphisme : il existe $t ∈ T$ tel que $\det\big((f_{i,j})\big)t=1$. En d'autres termes, la $k$-algèbre \[A_{X,e}=k[T_{i,j},U]/\big((g_α(T_{i,j}))_{1≤ α ≤N},\det(T_{i,j})U-1\big)\] \emph{représente} le foncteur $G_{X}$ : les applications $(f_{i,j}) ↦ f$ induisent un isomorphisme de foncteur $A_{X,e}^\japmath{田} ⥲ G_{X}$. En particulier, il résulte du lemme de Yoneda (\refext{Cat}{lemme-de-yoneda}) que la $k$-algèbre $A_{X,e}$ est bien définie à $k$-isomorphisme près ; nous la noterons $A_{X}$ voire $A$ pour alléger les notations. Elle possède un nombre fini de générateurs (comme $k$-algèbre). \begin{théorème2}\label{critère forme étale} Soient $K\bo k$ une extension finie et $Y=(W,y)$ une $K\bo k$-forme de $X=(V,x)$. Si la $k$-algèbre $A_{X}$ est \emph{géométriquement réduite} (\refext{Alg}{geometriquement-reduit}), il existe une extension \emph{étale} $k'\bo k$ telle que $Y$ soit une $k'\bo k$-forme de $X$. \end{théorème2} \begin{démo} Soit $I_{X,Y}$ le foncteur des isomorphismes de $X$ vers $Y$ : $I_{X,Y}(T)=\Isom_T(X_{\bo T},Y_{\bo T})$. En considérant des bases de $V$ et $W$ on constate comme ci-dessus que le foncteur $I_{X,Y}$ est représentable par une $k$-algèbre de type fini, que nous noterons $B_{X,Y}$ ou $B$ pour alléger les notations. Par hypothèse, $I_{X,Y}(K)≠ ∅$ : il existe un isomorphisme $φ:X_{\bo K} ⥲ Y_{\bo K}$. Pour toute $K$-algèbre $U$, cet isomorphisme induit une bijection fonctorielle $I_{X,Y}(U) ⥲ G_X(U)$, envoyant $ι:X_U ⥲ Y_U$ sur $ι ∘ (φ_U)^{-1}:X_U ⥲ X_U$. Cet isomorphisme de foncteurs correspond, par le lemme de Yoneda, à un isomorphisme $A_K⥲B_K$ entre les algèbres $A_X$ et $B_{X,Y}$ \emph{étendues à $K$}. Il en résulte que $B$ est une $k$-algèbre géométriquement réduite. En effet, si $L\bo k$ est une extension finie et $L'$ une extension composée de $L$ et $K$, $B_L$ s'injecte dans l'anneau $B_{L'}$, isomorphe à $A_{L'}$ — car $K$ est contenu dans $L'$ —, donc réduit par hypothèse sur $A_X$. On utilise alors le théorème \refext{AC}{} d'après lequel une $k$-algèbre de type fini non nulle et géométriquement réduite a un point dans une extension étale. Si $k'\bo k$ est une telle extension, l'inégalité $B^\japmath{田}(k')≠ ∅$ signifie que $I_{X,Y}(k')$ est non vide : $X$ et $Y$ sont isomorphes sur $k'$. CQFD. \end{démo} Pour référence ultérieure, extrayons la proposition élémentaire suivante du début de la démonstration ci-dessus. \begin{proposition2} Soient $(p,q)$ une paire d'entiers, $k$ un corps, et $X=(V,x)$, $Y=(W,y)$ deux $k$-tenseurs de type $(p,q)$, Le foncteur allant des $k$-algèbres vers les ensembles, associant à $T$ l'ensemble $\Isom_T(X_{\bo T}, Y_{\bo T})$ est \emph{représentable} par une $k$-algèbre de type fini $B_{X,Y}$. \end{proposition2} Moins formellement : \begin{corollaire2} Il existe une $k$-algèbre de type fini $B$ telle que pour toute extension $K\bo k$, l'ensemble $B^{\japmath{田}}(K)=\Hom_K(X_{\bo K}, Y_{\bo K})$ soit non vide si et seulement si il existe un $K$-isomorphisme entre $X_{\bo K}$ et $Y_{\bo K}$. \end{corollaire2} \begin{corollaire2}\label{formes définies sur kalg} S'il existe une extension $K\bo k$ telle que $X_{\bo K}$ et $Y_{\bo K}$ soient $K$-isomorphes, il existe une telle extension \emph{finie sur $k$}. \end{corollaire2} \begin{remarque2} On peut paragraphser le corollaire précédent en disant que toute $K\bo k$-forme est une $k\alg\bo k$-forme. Le théorème \ref{critère forme étale} donne un critère pour que toute $k\alg\bo k$-forme soit un $k\sep\bo k$-forme. \end{remarque2} D'après ce qui précède, il suffit de démontrer le lemme suivant. \begin{lemme2} Soit $B$ une $k$-algèbre de type finie et soit $K\bo k$ une extension telle que l'ensemble $B^{\japmath{田}}(K)$ soit non vide. Alors, il existe une extension \emph{finie} $k ′ \bo k$ telle que $B(k ′)≠ ∅$. \end{lemme2} \begin{démo}[Démonstration dans le cas particulier où $K\bo k$ est algébrique] Comme expliqué par exemple en \refext{Spec}{points-quotient}, un élément de $B^{\japmath{田}}(K)$ correspond — via le choix d'une « présentation » de $B$ — à un point $x=(x₁, …, x_n)$ d'un espace affine $K^n$ satisfaisant un nombre fini d'équations polynomiales. Le sous-corps $k ′=k(x₁, … ,x_n)$ de $K$, algébrique sur $k$, convient. \end{démo} \begin{démo}[Cas général] L'ensemble $B^{\japmath{田}}(K)$ étant non vide, l'anneau $B$ est non nul. Soit donc $𝔪$ un idéal \emph{maximal} de $B$ (\refext{Spec}{Krull}). Le quotient $B/𝔪$ est une $k$-algèbre de type fini qui est un corps. D'après \refext{}{} \XXX, l'extension $B/ 𝔪 \bo k$ est \emph{finie}. \end{démo} %\section{Torseurs sous un groupe} %\subsection{} %\begin{définition2} %Soient $k$ un corps, $K\bo k$ une extension finie galoisienne de groupe $π$ %et $G$ un groupe. On appelle \emph{$G$-torseur} sur $k$ trivialisé par $K\bo k$ %toute $k$-algèbre $A$ munie d'une action de $G$ (respectant la structure de $k$-algèbre) %telle que la $K$-algèbre $A⊗_k K$ soient isomorphe à l'algèbre $\Hom_{\Ens}(G,K)$ %et que l'action induite par cet isomorphisme soit l'action évidente de $G$ sur %$\Hom_{\Ens}(G,K)$. %\end{définition2} %\XXX \ifx\danslelivre\undefined \bibliography{../configuration/bibliographie-livre} \bibliographystyle{../configuration/style-bib-livre} \end{document} \fi