\ifx\danslelivre\undefined \documentclass[9pt]{../configuration/smfart} \input{../configuration/commun} \input{../configuration/smf} \input{../configuration/adresse} \input{../configuration/gadgets} \input{../configuration/francais} \input{../configuration/numerotation} \input{../configuration/formules} \input{../configuration/encoredesmacros} \usepackage{stmaryrd} \usepackage{graphics} \usepackage[usenames,dvipsnames]{xcolor} %\usepackage{makeidx} \usepackage{tikz} \usetikzlibrary{matrix} \usepackage{srcltx} % pour passer du dvi au tex en cliquant %\usepackage{pxfonts} \textwidth13cm % pour pouvoir lire le nom des étiquettes si \usepackage{showkeys} \externaldocument{extensions-algebriques} % là où regarder \externaldocument{categories} \externaldocument{entiers} \externaldocument{KAS} %\makeindex \title{Théorie de Galois infinie} \begin{document} \maketitle \tableofcontents \else \chapter{Théorie de Galois infinie} \fi \section{Théorie de Galois infinie} \subsection{Topologie de Krull sur le groupe de Galois} \subsubsection{}Soit $K\bo k$ une extension galoisienne de groupe $G$. Pour toute sous-$k$-extension \emph{finie galoisienne} $k'$ de $K$, le morphisme $G→G_{k'\bo k}$ est \emph{surjectif} (prolongement des plongements, \refext{CG}{prolongement-plongement}) et son noyau $G_{K\bo k'}$ est donc un sous-groupe distingué d'indice fini $[k':k]$ de $G$. Si $k'$ est maintenant une sous-extension finie non nécessairement galoisienne, le groupe $G_{K\bo k'}$ est également d'indice fini dans $G$ car il contient $G_{K\bo k''}$, où $k''$ est la clôture normale de $k'$ dans $K$. Les sous-groupes de $G$ d'indice fini de ce type seront momentanément dits « algébriques ». Il résulte de la formule $G_{K\bo k₁}∩G_{K\bo k₂}=G_{K\bo k₁k₂}$, où $k₁k₂$ désigne l'extension composée dans $K$, que l'intersection de deux sous-groupes d'indice fini algébriques est d'indice fini (c'est un fait général) et algébrique. \begin{lemme2}\label{rajoute-rien} \begin{enumerate} \item Tout sous-groupe contenant un sous-groupe d'indice fini algébrique est algébrique. \item Tout sous-groupe d'indice fini algébrique contient un sous-groupe distingué d'indice fini algébrique. \end{enumerate} \end{lemme2} \begin{démo} (i) Soit $H⊆G$ contenant $H'=G_{K\bo k'}$ où $k'\bo k$ est finie. Quitte à agrandir $k'$ (\cad rétrécir $G_{K\bo k'}$), on peut supposer que $k'\bo k$ est finie galoisienne. L'application composée $H/H'↪G/H' ⥲ \Gal(k'\bo k)$ identifie $H/H'$ à un sous-groupe de $\Gal(k'\bo k)$, nécessairement de la forme $\Gal(k'/k'')$ pour une unique sous-$k$-extension $k''$ de $k'$. Il en résulte que $H$ coïncide avec l'image inverse dans $G$ de $\Gal(k'\bo k'')$ par le morphisme $G↠\Gal(k'\bo k)$. Cette image inverse est l'ensemble $\Gal(K\bo k'')$ des éléments de $G$ qui sont $k''$-linéaires. (ii) Soit $k'\bo k$ une extension finie galoisienne et $H=G_{K\bo k'}$ le sous-groupe d'indice fini algébrique correspondant. Si $k''$ est la clôture galoisienne de $k'$ dans $k'$, le sous-groupe $H'=G_{K\bo k''}$ de $H$ est également d'indice fini algébrique par construction ; il est distingué dans $G$ car $k''\bo k$ est galoisienne. \end{démo} Nous allons maintenant munir $G$ de la structure de groupe topologique la moins fine pour laquelle les sous-groupes d'indice fini algébriques soient ouverts. \begin{définition2} On appelle \emph{topologie de Krull} sur $G$ la topologie pour laquelle un sous-ensemble $U$ de $G$ est ouvert \ssi pour tout $u∈U$ il existe un sous-groupe d'indice fini \emph{algébrique} $H_{u,U}$ de $G$ tel que $uH_{u,U}$ soit contenu dans $U$. \end{définition2} Pour s'assurer que cette collection de sous-ensembles définit bien une topologie le seul point non trivial à vérifier est que l'intersection de deux ouverts $U$ et $U'$ est ouverte. Or, si $u∈U∩U'$, $U$ (resp. $U'$) contient par hypothèse le translaté $uH_{u,U}$ (resp. $uH_{u,U'})$ d'un sous-groupe d'indice fini algébrique. Le sous-groupe $H_{u,U∩U'}:=H_{u,U}∩H_{u,U'}$ étant d'indice fini algébrique, l'inclusion $uH_{u,U∩U'}⊆U∩U'$ montre bien que $U∩U'$ est ouvert. Enfin, remarquons qu'il n'y a pas de « nouveaux » sous-groupes ouverts : un sous-groupe de $G$ est ouvert \ssi il est d'indice fini algébrique. Cela résulte immédiatement de la définition de la topologie et de \ref{rajoute-rien} (i). D'après \ref{rajoute-rien} (ii), on obtiendrait la même topologie en se restreignant aux sous-groupes \emph{distingués} d'indice fini algébriques. \begin{remarque2}\label{action-admissible} Considérant naturellement $K$ comme un $G$-ensemble, pour tout $x∈K$, le stabilisateur $\Stab_G(x)$ d'un élément $x∈K$ coïncide avec le sous-groupe $G_{K\bo k(x)}$. D'après le théorème de l'élément primitif, les sous-groupes ouverts de $G$ pour la topologie de Krull sont donc exactement les stabilisateurs d'éléments de $K$. Il n'est pas difficile d'en déduire que la topologie de Krull est la moins fine sur $G$ pour laquelle le morphisme $G×K→K$ déduit de l'action de $G$ soit continue, si l'on munit $K$ de la topologie discrète. (Cf. aussi \ref{compacite-Galois}, démonstration.) \end{remarque2} \begin{miseengarde2}\label{exemple-Kummerien} Il n'est pas vrai en général que tout sous-groupe d'indice fini d'un groupe de Galois soit ouvert. Considérons par exemple le corps des fractions $k=𝐐(x_i,i∈𝐍)$ de l'anneau des polynômes en une infinité dénombrable de variables et $K$ un corps de décomposition sur $k$ de la famille de polynômes $X²-x_i$. Si pour chaque $i∈𝐍$ on note $y_i$ l'une quelconque des racines carrées de $x_i$ dans $K$, on a $K=k(y_i,i∈𝐍)=𝐐(y_i,i∈𝐍)$. Un élément de $G=\Gal_{K\bo k}$ étant caractérisé par son action sur les $y_i$, le morphisme $G→\{±1\}^𝐍$, $g\mapsto (\frac{g(y_i)}{y_i})$ est injectif. D'autre part, pour tout $i∈𝐍$, le polynôme $X²-y_i$ est irréductible (\cad : n'a pas de racine) sur $k(y_j, j≠i)$ (exercice). Il en résulte que pour toute partie finie $I⊆𝐍$, le corps $k(y_i,i∈I)$ est isomorphe au produit tensoriel sur $k$ des corps $k(y_i)$ et que le morphisme $G→\{±1\}^𝐍$ est surjectif : pour tout choix de signes $ε∈\{±1\}^𝐍$, l'application $k$-linéaire $g_ε$ définie par $g_ε(y_i)=ε_i y_i$ est un élément de $G$. Ainsi, $G$ est naturellement isomorphe à $\{±1\}^𝐍≅\FF₂^𝐍$. L'ensemble des sous-groupes d'indice $2$ de $G$ est donc en bijection avec l'ensemble \emph{indénombrable} des formes linéaires non nulles $\FF₂^𝐍↠\FF₂$. (Rappelons que $\FF₂^𝐍$ est indénombrable donc de dimension indénombrable sur le corps fini $\FF₂$.) D'autre part, l'ensemble des sous-extensions finies de $K\bo k$ est dénombrable car toute telle extension est monogène sur $k$ et $K$ est dénombrable. Il en résulte que l'ensemble des sous-groupes ouverts est dénombrable. \end{miseengarde2} \begin{lemme2} Les applications $G→G$, $g\mapsto g^{-1}$ (inverse) et $G×G→G$, $(g,g')\mapsto gg'$ (produit) sont continues. \end{lemme2} En d'autres termes, muni de la topologie de Krull, $G$ est un \emph{groupe topologique}. \begin{démo} Soit $U$ un ouvert de $G$. Montrons que $U^{-1}=\{u^{-1}, u∈U\}$ est également ouvert. Si $u^{-1}∈U^{-1}$, il existe $H_{u,U}$ \emph{distingué} d'indice fini tel que $uH_{u,U}⊆U$. On a donc $H_{u,U}u^{-1}⊆U^{-1}$ ($H_{u,U}$ est un sous-groupe). Puisque $H_{u,U}u^{-1}=u^{-1}uH_{u,U}u^{-1}=u^{-1}H_{u,U}$ ($H_{u,U}$ est distingué), on a $u^{-1}H_{u^{-1},U^{-1}}⊆U^{-1}$ où $H_{u^{-1},U^{-1}}=H_{u,U}$. La continuité du produit ne présente pas plus de difficulté. \end{démo} \begin{proposition2}\label{compacite-Galois} Le groupe $G$ est un groupe compact. \end{proposition2} Rappelons qu'un espace topologique est dit \emph{quasi-compact} si tout recouvrement ouvert admet un sous-recouvrement fini et qu'un espace topologique est dit \emph{compact} s'il est séparé et quasi-compact. \begin{démo}Considérons l'ensemble $K^K=∏_{λ∈K} K$ des applications de $K$ dans $K$ et munissons-le de la topologie produit où chaque facteur $K$ est muni de la topologie discrète. Montrons que l'injection canonique $G→K^K$, $g\mapsto (g(λ))_{λ∈K}$, est continue, \cad que pour tout indice $λ∈K$, l'application composée $G→K^K\dessusdessous{\ev_λ}{→}K_λ$ est continue, où on note $\ev_λ$ l'« évaluation en $λ$ », projection sur le facteur d'indice $λ$. Cette application n'est autre que $g\mapsto g(λ)$, qui est bien continue car elle se factorise à travers $G/G_{K\bo k'}$ où $k'$ est une extension finie galoisienne de $k$ contenant $λ$. D'après le théorème de Tikhonov, l'espace topologique $K^K$ est compact. D'autre part, pour tout triplet d'indices $(x,y,z)∈K³$, l'application de projection $K^K→K³=K_x×K_y×K_z$ est continue. Puisque \emph{toute} application entre les espaces topologiques discrets $K³→K$ est continue, il en est en particulier ainsi des applications $∑:K_x × K_y × K_z → K$, $(λ,μ,ν)\mapsto ν-(λ+μ)$ et $∏:(λ,μ,ν)\mapsto ν-λμ$. On en déduit que l'ensemble des applications $f∈K^K$ telles que $f(x+y)=f(x)+f(y)$ (resp. $f(xy)=f(x)f(y)$) est \emph{fermé} dans $K^K$. Il coïncide en effet avec l'image inverse de $0∈K$ par l'application continue $K^K→K_x×K_y×K_{x+y}\dessusdessous{∑}{→}K$ (resp. $K^K→K_x×K_y×K_{xy}\dessusdessous{∏}{→}K$). De même, pour tout $λ∈K$, l'ensemble des $f∈K^K$ telles que $f(λ)=λ$ est fermé : c'est l'image inverse de $0∈K$ par le morphisme $K^K→K_λ\dessusdessous{Δ_λ}{→}K$, où $Δ_λ(μ)=μ-λ$. Il en résulte que le sous-ensemble de $K^K$ constitué des morphismes de \emph{$k$-algèbres} est une intersection de fermés donc fermé. Ainsi, tout élément $f$ de $K^K$ adhérent à l'image de $G$ est un \emph{morphisme de $k$-algèbres} $K→K$. D'après \refext{CG}{Hom=Aut}, $f$ est un automorphisme : $f∈G=\Aut_k(K)$. Le groupe $G$ s'identifie donc à un \emph{fermé} du compact $K^K$. CQFD. \end{démo} \begin{remarque2}\label{separation-Galois} Observons que la propriété de séparation de $G$ est plus élémentaire que la quasi-compacité. Utilisant le fait que dans un groupe topologique les translations, à droite ou à gauche, sont des homéomorphismes, il suffit de montrer que pour tout élément $g≠1$ de $G$, il existe un voisinage ouvert de l'unité ne contenant pas $g$. Cela revient à montrer qu'il existe une extension finie $k'$ telle que $g∉G_{K\bo k'}$. Or, $g$ étant non trivial, il existe $x∈K$ tel que $g(x)≠x$ et, finalement, $g∉G_{K\bo k(x)}$. (Cf. \ref{action-admissible}.) \end{remarque2} \begin{lemme2}\label{ouvert-contient-distingue-indice-fini} Soit $G$ un groupe topologique. \begin{enumerate} \item Tout sous-groupe ouvert de $G$ est fermé. \item Tout sous-groupe fermé d'indice fini $G$ est ouvert. \item Si $G$ est quasi-compact, tout sous-groupe ouvert est d'indice fini. \end{enumerate} \end{lemme2} \begin{démo} Soit $H$ un sous-groupe de $G$. L'ensemble $G$ (resp. $G-H$) est la réunion \emph{disjointe} des classes à gauche (ou à droite) de $H$ dans $G$ (resp. des classes à gauche différentes de $H$). Puisque les translations sont des homéomorphismes, chaque classe est ouverte (resp. fermée) \ssi $H$ l'est. Les énoncés (i—iii) résultent immédiatement de cette observation. \end{démo} \begin{proposition2}\label{Galois-totalement-discontinu} Le groupe groupe de Galois d'une extension est \emph{totalement discontinu} : pour toute paire d'éléments distincts $x,y$ de $G$, il existe un ensemble \emph{ouvert-fermé} $U$ tel que $x∈U$ et $y∉U$. \end{proposition2} De façon équivalente : la composante connexe de chacun de ses points est réduite à ce point. \begin{démo} On peut supposer $x=e$. Puisque tout \emph{sous-groupe} ouvert est fermé, il suffit de montrer qu'il existe un \emph{sous-groupe}, \emph{ouvert}, $H$ de $G$ tel que $y∉H$. On l'a vu en \ref{separation-Galois} ci-dessus. \end{démo} \subsection{Généralités sur les limites projectives}\label{limites-projectives-espaces-topologiques} \subsubsection{Définitions} Soit $I$ un ensemble ordonné (ou plus généralement préordonné). On appelle \emph{système projectif} d'ensembles (resp. de groupes, anneaux, espaces topologiques) \emph{indexé par $I$} la donnée d'une famille $(E_i)_{i∈I}$ d'ensembles (resp. groupes, anneaux, espaces topologiques) et, pour toute paire $(i,i')$ d'indices telle que $i≤i'$, d'une application (resp. d'un morphisme de groupes, d'un morphisme d'anneaux, d'une application continue) $π_{i,i'}:E_{i'}→E_{i}$ (souvent notée $π_{ii'}$) telles que les conditions suivantes soient satisfaites : \begin{enumerate} \item pour tout $i∈I$, $π_{i,i}=\Id_{E_i}$ ; \item pour tout triplet $(i,j,k)$ de $I$ tel que $i≤j≤k$, on a $π_{i,j}π_{j,k}=π_{i,k}$. \end{enumerate} On notera souvent $(E_i)_{i∈I}$ une telle donnée, les morphismes $π_{i,i'}$ étant sous-entendus. La \emph{limite projective} (ou simplement \emph{limite}) du système projectif $(E_i,π_{ij})$ est le sous-ensemble (resp. sous-groupe, sous-anneau, sous-espace topologique) de l'ensemble (resp. groupe, anneau, espace topologique) produit $∏_{i∈I} E_i$ constitué des familles $(e_i∈E_i)_{i∈I}$ d'éléments compatibles au sens suivant : si $i≤j$, $e_i=π_{ij}(e_j)$. On note $\lim_{i∈I} E_i$ cet ensemble (resp. groupe, anneau, espace topologique). Remarquons que la condition $π_{ij}π_{jk}=π_{ik}$ n'apparaît pas dans la définition de $\lim_i E_i$. On vérifie sans peine que $\lim E_i$ est une limite au sens de \refext{Cat}{limite-indices-ensemble-preordonne} : pour tout ensemble (resp. groupe, anneau, espace topologique) test $T$, on a $$ \Hom(T,\lim_i E_i) ⥲ \lim_i \Hom(T,E_i), $$ où le terme de droite est la limite des \emph{ensembles} d'applications (resp. morphismes de groupes, morphismes d'anneaux, applications continues) $\Hom(T,E_i)$. \begin{lemme2} Soit $(X_i)_{i∈I}$ un système projectif d'espaces topologiques séparés. Le sous-espace $\lim_{i∈I} X_i$ est \emph{fermé} dans $∏_i X_i$. \end{lemme2} \begin{démo} Soit $x=(x_i)_{i∈I}$ n'appartenant pas à $\lim_i X_i$ : il existe deux indices $α≤β$ tels que $x_α≠π_{αβ}(x_β)$. Soit $U_{αβ}=X_β×X_α-\{(x'_β,π_{αβ}(x'_β)) : x'_β∈X_β\}$ le complémentaire du graphe de $π_{αβ}$ dans $X_β×X_α$. Rappelons que l'espace topologique $X_β$ étant séparé, sa diagonale $Δ_β$ est fermée dans $X_β×X_β$ (cf. p. ex. Bourbaki, TG, I §8). Il en résulte que le graphe de $π_{αβ}$, qui est l'image inverse de $Δ_β$ par l'application continue $X_β×X_α→X_β×X_β$, $(x'_β,x'_α)\mapsto (x'_β,π_{αβ}(x'_α))$, est également fermé. Son complémentaire $U_{αβ}$ étant par conséquent ouvert, il en est de même de l'image inverse $U$ de $U_{αβ}$ par la projection \emph{continue} $∏_i X_i → X_β×X_α$. L'ouvert $U⊆∏_{i∈I} X_i$ contient $x$ et ne rencontre pas $\lim_i X_i$. CQFD. \end{démo} Du lemme précédent et du théorème de Tikhonov, on déduit le corollaire suivant. \begin{corollaire2}\label{limite-compacts=compact} Une limite projective d'espaces topologiques compacts est compacte. \end{corollaire2} \begin{définition2} Un espace topologique $X$ (resp. groupe topologique $G$) est dit \emph{profini} \index{profini} s'il est isomorphe à la limite d'un système projectif d'espaces topologiques (resp. groupes) finis munis de la topologie discrète. \end{définition2} \begin{proposition2} Un espace topologique profini est compact et totalement discontinu. \end{proposition2} On peut montrer que la réciproque est vraie. \begin{démo} La compacité n'est mise que pour mémoire (cf. \ref{limite-compacts=compact}). Puisque d'un fermé d'un espace topologique totalement discontinu est totalement discontinu, il suffit de vérifier qu'un produit d'espaces topologiques discrets a cette propriété. Si $x≠y$ sont deux éléments de $∏_i X_i$, où les $X_i$ sont discrets, il existe un indice $i$ tel que $x_i≠y_i$. L'ouvert-fermé $U=∏_{j≠i} X_j × \{x_i\}$ contient $x$ mais pas $y$. \end{démo} \begin{miseengarde2} Un morphisme entre groupes profinis n'est pas nécessairement continu : on a vu en \ref{exemple-Kummerien} qu'il existe des morphismes non continus entre $\FF₂^𝐍$ --- muni de la topologie produit, profinie --- et $\FF₂$ --- muni de la topologie discrète, profinie. De même, un groupe abstrait peut-être le groupe sous-jacent à des groupes topologiques profinis non homéomorphes, cf. exercice \refext{CG}{isom-non-cont}. \end{miseengarde2} \begin{remarque2} D'après un théorème de Nikolov et Segal, tout sous-groupe d'indice fini d'un groupe profini de type fini (c'est-à-dire ayant un nombre fini de générateurs topologiques) est \emph{ouvert}. \XXX \end{remarque2} \subsubsection{Spectre de l'anneau des fonctions localement constantes}\label{Spec(Hom(X,k))} Soient $X$ un espace topologique, $k$ un corps muni de la topologie discrète et $A$ l'anneau des fonctions \emph{continues} (\cad localement constantes) de $X$ dans $k$. Le morphisme d'évaluation en $x$, $\ev_x:f↦f(x)$, est une surjection de $A$ sur $k$. Son noyau $\{f∈A: f(x)=0\}$ est donc un idéal maximal de $A$, que nous noterons $\MM_x$. \begin{proposition3}\label{Spec(Hom(X,k))} Si l'espace topologique $X$ est quasi-compact et totalement discontinu, l'application $X→\Spec(A)$, $x↦\MM_x$, est une bijection. \end{proposition3} \begin{démo} Puisque $X$ est totalement discontinu, l'application $x↦\MM_x$ est \emph{injective} : si $x≠y∈X$, et $U$ est un ouvert-fermé contenant $y$ mais pas $x$, la fonction indicatrice $\mathbf{1}_U$ de $U$ appartient à $\MM_x$ mais pas à $\MM_y$. Montrons que sous l'hypothèse de compacité de $X$, tout idéal maximal $\MM$ de $A$ est de cette forme. Observons tout d'abord que les fonctions $f∈A$ ne prennent qu'un nombre fini de valeurs car elles sont localement constantes sur un espace quasi-compact. Il en résulte que l'ouvert ${y∈X:f(y)≠0}$, support de $f$, est \emph{fermé}. Supposons par l'absurde qu'il existe pour tout $x∈X$, une fonction $f_x∈\MM$ telle que $f_x(x)≠0$. Quitte à remplacer $f_x$ par le produit $f_x\cdot ∏\limits_{λ∈f_x(X)-\{f_x(x)\}} (f_x-λ)$, on peut supposer qu'elle ne prend qu'une seule valeur non nulle, que l'on peut supposer égale à un. Ainsi, pour tout $x∈X$, $\MM_x$ contient la fonction caractéristique d'un ouvert-fermé $U_x$ contenant $x$. Par quasi-compacité de $X$, il existe des points $x₁,…,x_n∈X$ tels que $⋃ U_{x_i}=X$. D'après le principe du crible, l'unité de $A$, qui est la fonction indicatrice de $X$, est une somme alternée de produits des fonctions $\mathbf{1}_{U_{x_i}}$ qui appartiennent à $\MM$. C'est absurde. Enfin, vérifions que tout idéal premier de $A$ est maximal. Soit $𝔭∈\Spec(A)$ et $x∈X$ tel que $𝔭⊆\MM_x$. Supposons par l'absurde qu'il existe une fonction $f∈\MM_x-𝔭$. Procédant comme ci-dessus, on se ramène au cas où $f$ est la fonction caractéristique d'un ouvert-fermé $U$ (son support) ne contenant pas $x$. (On utilise le fait que les fonctions $f-λ$ pour $λ≠f(x)$ n'appartiennent pas à $\MM_x$ donc, \emph{a fortiori}, pas à $𝔭$.) La fonction $f\cdot \mathbf{1}_{X-U}$ est identiquement nulle donc appartient à $𝔭$ mais ni $f$ (par hypothèse) ni $\mathbf{1}_{X-U}$ (qui n'appartient pas à $\MM_x$) n'appartiennent à $𝔭$. \end{démo} %\begin{définition2} %Soit $G$ un groupe profini. Un $G$-ensemble $X$ est dit %\emph{admissible} %\index{admissible} si le stabilisateur de tout point de $X$ %est ouvert. %\end{définition2} %Cela revient à supposer que l'on a : %$$ %X=⋃_{H≤G \atop \textrm{ouvert}} \Fix_H(X). %$$ %\begin{proposition2} %Soient $G$ un groupe profini, $A$ un anneau, %et $G→\Aut_{\categ{Ann}}(A)$ une action \emph{admissible}. %Alors, $G$ agit \emph{transitivement} sur les fibres %des morphismes $\Spec(A)→\Spec(\Fix_G(A))$. %\end{proposition2} %Ce proposition est déjà intéressante dans le cas %particulier %où $G$ est \emph{fini}. %\begin{démo} %Réduction au cas où $G$ est fini. %Cas où $G$ est fini. %Soient $𝔭,𝔭'$ deux idéaux de $A$ ayant même image dans %$B=\Fix_G(A)$, \cad %tels que $𝔭⋂B=𝔭'⋂B=p$. Soit $x∈𝔭$ et considérons $y=∏_{g∈G} %g(x)$. Il est %$G$-invariant et appartient à $𝔭$ donc à $𝔭⋂B=𝔭'⋂B⊆𝔭'$. %L'idéal %$𝔭'$ étant premier, il existe $g_x∈G$ tel que $g_x(x)∈𝔭'$, %soit %$x∈g_x^{-1}(𝔭')$. Faisant varier $x$, on en déduit %l'inclusion : %$𝔭⊆⋃_{g∈G} g(𝔭')$. Il résulte du lemme ci-dessous qu'il %existe $g∈G$ %tel que $𝔭⊆g(𝔭')$. Ces deux idéaux étant au-dessus de $p$, %on a $𝔭=g(𝔭')$. %\end{démo} %\begin{lemme2} %idéal premier contenu dans une union finie. %\end{lemme2} \subsection{Le groupe de Galois, muni de la topologie de Krull, est profini}\label{galois=profini} Considérons une famille $\mc{E}$ de sous-$k$-extensions galoisiennes $E\bo k$ (finies ou non) \emph{exhaustive}, \cad telle que $⋃_{E∈\mc{E}} E=K$. Supposons que, munie de la relation d'ordre définie par la relation d'inclusion des corps, cette famille soit \emph{filtrante à droite} : pour toute paire d'extensions $E₁,E₂∈\mc{E}$, il existe $E∈\mc{E}$ telle que $E₁⊆E$ et $E₂⊆E$. Si $E$ et $E'$ sont dans $\mc{E}$, avec $E⊆E'$, la restriction à $E$ induit un morphisme surjectif $π_{E,E'}:G_{E'\bo k}↠G_{E\bo k}$. Notons $\lim_E G_{E\bo k}$ la limite de ce système projectif. La famille des morphismes $G=G_{K\bo k}→G_{E\bo k}$ induit un morphisme de groupes $G→\lim_E G_{E\bo k}$. Ce morphisme est : \begin{itemize} \item injectif car tout élément non trivial de $G$ agit non trivialement sur un élément de $K$, et en particulier sur toute extension galoisienne $E∈\mc{E}$ qui le contient ; \item surjectif car toute famille compatible d'éléments $(g_E∈G_{E\bo k})$ se « recolle » en un automorphisme $g∈G_{K\bo k}$. \end{itemize} Ainsi, on a un isomorphisme de groupes abstraits : $$ G ⥲ \lim_{E∈\mc{E}} G_{E\bo k}. $$ Supposons maintenant que les extensions $E∈ℰ$ soient \emph{finies} sur $k$. On va voir que l'isomorphisme précédent est alors un \emph{homéomorphisme}. Il en résulte que la topologie de Krull sur $G$ coïncide avec la topologie de la limite projective (des groupes de Galois des extensions sous-extensions finie galoisiennes de $K\bo k$). Puisque $G$ est compact et $\lim_{E∈\mc{E}} G_{E\bo k}$ séparé (car compact, cf. \ref{limite-compacts=compact}), la bijection $G→\lim_{E∈\mc{E}} G_{E\bo k}$ est un homéomorphisme \ssi elle est continue (\cite{TG@Bourbaki}, I.63, cor. 2). Par définition de la topologie de la limite, il suffit de vérifier que pour chaque $E'∈\mc{E}$ le morphisme composé $G→\lim_E G_{E\bo k}→G_{E'\bo k}$ est continu. Puisque c'est un morphisme de groupes et que le but est muni de la topologie discrète, cela revient à démontrer que le noyau de $G→G_{E'\bo k}$ est ouvert. La topologie de Krull est précisément caractérisée par cette propriété. Nous sommes maintenant en mesure de généraliser l'énoncé \refext{CG}{galois=autodiag} au cas d'une extension infinie. \subsection{Correspondance de Galois profinie} \begin{proposition2}\label{KtensK-cas-infini} Soient $K\bo k$ une extension galoisienne de groupe $G$ et $K'\bo K$ une extension quelconque. Le morphisme $K⊗_k K'→∏_{g∈G} K'=\Hom_{\Ens}(G,K')$, $a⊗b\mapsto \big(g∈G\mapsto g(a)b∈K'\big)$ induit un isomorphisme de $K'$-algèbres $$ K⊗_k K' ⥲ \Hom_{\cont}(G,K'), $$ où $\Hom_{\cont}(G,K')$ désigne l'ensemble des applications \emph{continues} de $G$ dans $K'$, $G$ étant muni de la topologie de Krull et $K'$ de la topologie discrète. Cet isomorphisme est $G$-équivariant si l'on fait agir $g∈G$ sur $K⊗K'$ par $g⊗\Id$ et sur $\Hom$ par translation à droite : $g\cdot f(g')=f(g'g)$. \end{proposition2} \begin{démo} Vérifions que l'image de $K⊗_k K'→\Hom(G,K')$ est contenue dans l'ensemble des applications continues de $G$ dans $K'$. Puisque tout élément de $K⊗_k K'$ est somme d'un nombre \emph{fini} de tenseurs purs, il suffit de vérifier que pour toute paire $(a,b)∈K×K'$, l'application $g\mapsto g(a)b$ est continue. Ceci résulte du fait qu'elle est $G_{K\bo k(a)}$-invariante par translation à droite donc localement constante, et par conséquent continue car l'espace but est discret. Notons $\mc{E}$ l'ensemble des sous-$k$-extensions \emph{finies galoisiennes} de $K$. La démonstration se fait par « passage à la limite » sur $E∈ℰ$. Commençons par démontrer l'affirmation suivante, qui est une variante de \refext{CG}{galois=autodiag} : pour tout $E∈\mc{E}$, l'application $f_{E,K}:E⊗_k K'→\Hom_{\Ens}(G_{E\bo k},K')$ envoyant $e⊗b$ sur $\big(g\mapsto g(e)b\big)$ est un isomorphisme de $K$-algèbres. D'après \emph{loc. cit.}, le morphisme $f_{E,E}:E⊗_k E→\Hom_{\Ens}(G_{E\bo k},E)$ envoyant $e⊗e'$ sur $g\mapsto g(e)e'$ est un isomorphisme de $E$-algèbres, où la structure de $E$-algèbre sur $E⊗_k E$ est celle du \refext{CG}{KtensK=K-algebre}. Tensorisons à droite les deux termes de cet isomorphisme par $K'$ sur $E$. À gauche, on obtient la $K'$-algèbre $(E⊗_k E)⊗_E K'$ qui est $K'$-isomorphe à $E⊗_k K'$ par l'application $α:(e⊗e')⊗b\mapsto e⊗(e'b)$ (\refext{Cat}{}). À droite, on obtient $\Hom(G_{E\bo k},E)⊗_E K'$ qui est $K'$-isomorphe à $\Hom_{\Ens}(G_{E\bo k},K')$ par l'application $β:φ⊗b\mapsto (g\mapsto φ(g)b)$. La conclusion résulte de la commutativité du diagramme $$ \xymatrix{ (E⊗_k E)⊗_E K' \ar[r]^{f_{E,E}⊗_E K'} \ar[d]^{\alpha} & \Hom_{\Ens}(G_{E\bo k},E)⊗_E K' \ar[d]^{\beta} \\ E⊗_k K' \ar[r]^{f_{E,F}} & \Hom_{\Ens}(G_{E\bo k},K') } $$ Pour tout $E∈\mc{E}$, l'application $E⊗_k K'→ K ⊗_k K'$ déduite de l'inclusion $E⊆K$ est injective (cf. \refext{Cat}{}). De plus, identifiant $E⊗_k K'$ à son image dans $K ⊗_k K'$, on a (cf. \refext{Cat}{}) : $$K⊗_k K'=⋃_{E∈\mc{E}} E⊗_k K'.$$ D'autre part, pour tout $E∈\mc{E}$, l'application $\Hom_{\Ens}(G_{E\bo k},K')→ \Hom_{\mathrm{cont}}(G,K')$ déduite du morphisme de restriction $r_E:G→G_{E\bo k}$ est injective car $r_E$ est surjectif. Identifiant $\Hom_{\Ens}(G_{E\bo k},K')$ à son image dans $\Hom_{\mathrm{cont}}(G,K')$, on a : $$\Hom_{\mathrm{cont}}(G,K')=⋃_{E∈\mc{E}} \Hom_{\Ens}(G_{E\bo k},K').$$ Soit en effet $f:G→K'$ une application continue ; on souhaite montrer qu'elle se factorise à travers un quotient par un sous-groupe distingué ouvert de $G$. Comme remarqué plus haut, puisque $K'$ est discret, une application de but $K'$ est continue \ssi elle est localement constante \cad si pour tout $g∈G$, il existe un ouvert $U_g$ de $G$ contenant $g$ tel que $f(U_g)=\{f(g)\}$. Puisque $G$ est un groupe topologique, on peut supposer $U_g$ de la forme $U_g=gH_g$ où $H_g$ est un \emph{sous-groupe} ouvert de $G$. D'autre part, puisque $G$ est compact, il est recouvert par un nombre fini d'ouverts $g₁H_{g₁},\dots,g_nH_{g_n}$ du type précédent. Posons $H'=⋂_1^n H_{g_i}$ ; c'est un sous-groupe ouvert. Par construction, la fonction $f$ est $H'$-invariante à droite. Soit $H$ un sous-groupe ouvert distingué d'indice fini contenu dans $H'$, dont l'existence est assurée par \ref{rajoute-rien} (ii). La fonction $f$ est également $H$-invariante à droite et se factorise donc par le groupe quotient $G/H$. CQFD. La conclusion résulte de la commutativité des diagrammes $$ \xymatrix{ K⊗_k K' \ar[r] & \Hom_{\cont}(G,K') \\ E⊗_k K' \ar[u] \ar[r] & \Hom(G_{E\bo k},K') \ar[u] } $$ pour chaque $E∈\mc{E}$. Le fait que cet isomorphisme soit $G$-équivariant est conséquence immédiate des définitions. \end{démo} L'espace topologique sous-jacent à $G$ étant compact, il résulte du résultat de \ref{Spec(Hom(X,k))} que le spectre de $\Hom_{\cont}(G,K')$ est en bijection naturelle avec $G$, par l'application naturelle $g↦\Ker(\ev_g)$. On retrouve le résultat de \refext{CG}{points-KtensK}, pour $K'=K$, puisque l'application $\ev_g:\Hom_{\cont}(G,K')→K'$ correspond par l'isomorphisme de la proposition à l'application $a⊗b↦g(a)b$, $K⊗_k K'→K'$. \begin{théorème2}[Wolfgang Krull, 1927 \cite{unendlichen@Krull}] Soit $K\bo k$ une extension galoisienne de groupe $G$. Les applications $H \mapsto \Fix_H(K)$ et $k'\mapsto \Gal(K\bo k')$ sont des bijections inverses l'une de l'autre, et décroissantes pour l'inclusion, entre l'ensemble des sous-groupes \emph{fermés} de $G$ et l'ensemble des sous-$k$-extensions de $K$. \end{théorème2} \begin{miseengarde2} Comme on l'a vu en \ref{compacite-Galois} (démonstration) si $H$ est un sous-groupe de $G$, et $k'=\Fix_H(K)$, tout élément $g$ dans l'adhérence de $H$ est également $k'$-linéaire de sorte que l'inclusion \emph{a priori} $\Fix_{\sur{H}}(K)⊆\Fix_{H}(K)$ est une bijection. Il en résulte qu'un sous-groupe de $G$ n'est en général pas caractérisé par l'ensemble de ses points fixes\footnote{Par exemple, si $p$ est un nombre premier, $k=\FF_p$ et $K$ est une clôture algébrique de $k$, $G$ contient strictement le sous-groupe $H$ engendré par le Frobenius $φ:x\mapsto x^p$ (cf. \ref{exemple-gal-corps-fini}) mais $\Fix_H(K)=k=\Fix_G(K)$.}. D'autre part, on verra ci-dessous (\ref{sous-groupe-non-ferme}) que tout groupe de Galois infini possède un sous-groupe non fermé, de sorte que l'application $H\mapsto \Fix_H(K)$, de l'ensemble de \emph{tous} les sous-groupes de $G_{K\bo k}$ vers les sous-corps de $K$ n'est injective que si $G=\Gal(K\bo k)$ est fini, \cad si l'extension $K\bo k$ est finie. \end{miseengarde2} La démonstration se fait en deux temps. \begin{lemme2} Soit $k'$ une sous-extension de $K\bo k$. Alors $K\bo k'$ est galoisienne et le sous-groupe $G_{K\bo k'}$ de $G=G_{K\bo k}$ est fermé. En particulier, $k'=\Fix_{G_{K\bo k'}}(K)$. \end{lemme2} \begin{démo} L'extension $K\bo k'$ est normale et algébrique séparable donc galoisienne. Son groupe de Galois $G_{K\bo k'}$ est l'ensemble des éléments $k'$-linéaires de $G$. On a vu en \ref{compacite-Galois} (démonstration) qu'il est fermé pour la topologie de Krull. (Alternativement, on peut écrire $G_{K\bo k'}=⋂_{x∈k'} G_{K\bo k(x)}$, et observer que les $G_{K\bo k(x)}$ sont ouverts donc fermés dans $G$.) \end{démo} Réciproquement, on a le résultat plus précis suivant. \begin{lemme2} Soit $H⊆G$ un sous-groupe de $G$ et posons $k'=\Fix_H(K)$. L'extension $K\bo k'$ est galoisienne et l'inclusion naturelle $H→\Gal(K\bo k')$ induit une bijection entre l'adhérence de $H$ et $\Gal(K\bo k')$. \end{lemme2} \begin{démo} Le fait que $K\bo k'$ soit galoisienne n'est mis que pour mémoire. Soit $g$ un élément du sous-groupe \emph{fermé} $\Gal(K\bo k')$. On veut montrer que $g$ est adhérent à $H$, \cad que pour tout sous-groupe ouvert $U$ de $G$, l'intersection $H∩gU$ est non vide. Il suffit de le vérifier pour $U$ distingué dans $G$. Soit $l$ une sous-extension finie galoisienne de $K\bo k$ et $U=\Gal(K\bo l)$ le sous-groupe distingué ouvert correspondant. Notons $H_l=HU/U$ l'image de $H$ dans le groupe fini $G/U=\Gal(l\bo k)$. D'après le lemme précédent, $l$ est l'ensemble des éléments de $K$ fixes par $U$. D'autre part, $k'$ est l'ensemble des éléments de $K$ fixes par $H$. Il en résulte que $k'∩l=\Fix_{UH}(K)$. De l'égalité formelle $\Fix_{UH}(K)=\Fix_{UH/U}(\Fix_{U}(K))$, on tire : $k'∩l=\Fix_{H_l}(l)$. D'après la théorie de Galois finie, on a donc $H_l=\Gal(l\bo k'∩l)$ de sorte que $g_{|l}∈H_l$. Cette condition équivaut à $gU∩H≠∅$. \end{démo} Au cours de la démonstration du lemme précédent, nous avons établi le résultat suivant. \begin{proposition2}\label{description-adherence-sous-groupe} Soient $G=\lim_{i∈I} G_i$ un groupe profini et pour tout $i∈I$ désignons par $π_i$ l'application canonique $G→G_i$. Si $H$ est un sous-groupe de $G$, son adhérence $\sur{H}$ coïncide avec le sous-groupe $\lim_{i∈I} π_i(H)$ de $G$. Si $G_i=G/U_i$, cette égalité s'écrit : $$ \sur{H}=\lim_{i∈I} HU_i/U_i. $$ \end{proposition2} \begin{proposition2}[Krull, \emph{op. cit.}] Le groupe de Galois d'une extension galoisienne infinie est indénombrable. \end{proposition2} \begin{démo} Soit $K\bo k$ une extension galoisienne infinie. Il existe une suite \emph{strictement croissante} $k=k₀⊊k₁⊊\cdots⊊k_i⊊k_{i+1}⊊\cdots$ de sous-$k$-extensions de $K$ finies galoisiennes. Puisque le morphisme de restriction $G=\Gal(K\bo k)→\Gal\big((⋃_i k_i)\bo k\big)$ est surjectif, on peut supposer $K=⋃k_i$. Les morphismes de restrictions $G_{i+1}=\Gal(k_{i+1}\bo k)→G_i=\Gal(k_i\bo k)$ sont surjectifs, de noyaux $\Gal(k_{i+1}\bo k_i)$ tous non triviaux car $k_{i+1}≠k_i$. D'autre part, on a $G ⥲ \lim_{i∈𝐍} G_i$ (cf. \ref{galois=profini}). La conclusion résulte donc du lemme ci-dessous. \end{démo} \begin{lemme2} Soit $(G_i)_{i∈𝐍}$ un système projectif de groupes à morphismes de transitions surjectifs mais \emph{non injectifs}. Alors $G=\lim_{i∈𝐍} G_i$ est \emph{indénombrable}. \end{lemme2} \begin{démo} C'est intuitivement clair : chaque élément $g_i∈G_i$ ayant au moins deux antécédents dans $G_{i+1}$, le cardinal de $G$ est « au moins » celui de $2^𝐍$, qui est indénombrable. Vérifions-le en détail. Pour chaque $i∈𝐍$ l'application $G_{i+1}→G_i$ est surjective de sorte qu'il lui existe une section (ensembliste) $τ_i:G_i→G_{i+1}$. Soit $h=(h_i)_{i≥1}$ un élément de $H=∏_i \Ker(G_i→G_{i-1})$ à composantes toutes non triviales. Pour tout $ε$ appartenant à l'ensemble \emph{indénombrable} $\{0,1\}^{𝐍_{>0}}$ considérons l'élément $h^ε$ de $H$ défini par $h^ε_i=e$ si $ε(i)=0$ et $h^ε_i=h_i$ si $ε(i)=1$. Enfin, définissons par récurrence la suite $g_ε=(g_{ε,i})∈∏_i G_i$ par la règle suivante : $g_{ε,0}=e$ et $g_{ε,n}=τ_{n-1}(g_{ε,n-1})\cdot h^ε_n$ pour $n≥1$. Par construction c'est un élément de $G=\prlim_i G_i$. D'autre part, l'application $ε↦g_ε$ est \emph{injective}: si $n$ est le plus petit entier tel que $ε(n)≠ε'(n)$, on a $g_{ε,n}=g_{ε',n} h_n^{±1}$ donc $g_ε≠g_{ε'}$. \end{démo} Puisqu'un sous-groupe fermé d'un profini est profini (cf. p. ex. \ref{description-adherence-sous-groupe}), tout sous-groupe \emph{fermé} infini d'un groupe profini infini est indénombrable. Puisque tout groupe indénombrable possède un sous-groupe dénombrable, on en déduit le corollaire : \begin{corollaire2}\label{sous-groupe-non-ferme} Tout groupe de Galois infini possède un sous-groupe non fermé. \end{corollaire2} \subsection{Une autre équivalence de catégories} Soient $k$ un corps de caractéristique $p>0$, $k\sep$ une clôture séparable de $k$ et $G_k=\Gal(k\sep\bo k)$ le groupe de Galois absolu. \begin{définition2} Un $𝐅_p$-espace vectoriel de dimension finie $V$ muni d'une action linéaire de $G_k$ se factorisant à travers un quotient fini est appelé une \emph{$𝐅_p$-représentation continue de $G_k$}. \end{définition2} L'adjectif « continu » est justifié par les définitions de la section suivante. Pour toute telle représentation, le $k\sep$-espace vectoriel $V⊗_{𝐅_p} k\sep$ est naturellement muni d'une action \emph{$k$-linéaire} de $G_k$ caractérisée par $g(v⊗λ)=(g\cdot v)⊗g(λ)$, où $g∈G_k$, $v∈V$ et $λ∈k\sep$. On note $D(V)$ l'ensemble $\Fix_{G_k}(V⊗_{𝐅_p} k\sep)$ des points fixes ; c'est un $k$-espace vectoriel. L'application $𝐅_p$-linéaire $\Id⊗\Frob_p:V⊗_{𝐅_p} k\sep→V⊗_{𝐅_p} k\sep$, $v⊗λ↦v⊗λ^p$ est $G_k$-équivariante ; elle induit un endomorphisme $\Frob_p$-semi-linéaire $φ$ sur le $k$-espace vectoriel $D(V)$ : $φ(λx)=\Frob(λ)φ(x)$ pour tout $λ∈k$ et tout $x∈D(V)$. \begin{définition2} Un $k$-espace vectoriel muni d'une application additive $\Frob$-semi-linéaire est appelé un $φ$-module sur $k$. Il est dit \emph{étale} si $φ$ est injectif. \end{définition2} \begin{théorème2}\label{Fp representations continues et phi modules} Le foncteur $V↦D(V)$ induit une équivalence de catégories entre la catégorie des $𝐅_p$-représentations continues de dimension finie de $G_k$ et la catégorie de $φ$-modules étales de dimension finie sur $k$. Le foncteur $M↦M^{φ=1}$ est un quasi-inverse. \end{théorème2} \begin{démo} Cf. p. ex., Fontaine, cours à Orsay. \XXX On montre par Hilbert 90 que $\dim_k D(V)=\dim_{𝐅_p} V$. Pour la réciproque, on utilise le·: \begin{lemme3} Soient $K$ un corps de caractéristique $p>0$ et $(a_{ij})∈\GL_d(K)$. Posons $P_i=X_i^p+∑_j a_{ij}X_j$ et $A=K[X₁,…,X_d]/(P₁,…,P_d)$. Alors, le $𝐅_p$-sous-espace vectoriel $A(K)$ de $K^d$ est de dimension finie $d$. \end{lemme3} \end{démo} Amplification. [Katz, «·p-adic properties of modular schemes and modular forms·» (Anvers), 1972] Soit $S$ un $𝐅_p$-schéma normal connexe. La catégorie des $𝐅_p$-représentations (continues, de dimension finie) de $π₁(S)$ et la catégorie des paires $(ℳ,F)$, où $ℳ$ est un $𝒪_S$-module localement libre de rang fini et $F$ un isomorphisme $\Frob^*ℳ⥲ℳ$, sont équivalentes. \ifx\danslelivre\undefined \bibliography{../configuration/bibliographie-livre} \bibliographystyle{../configuration/style-bib-livre} \end{document} \fi