%%% vim: set textwidth=80: %%% Emacs: -*- mode:latex; coding:utf-8; -*- \ifx\danslelivre\undefined \documentclass[a4paper,9pt]{amsart} \input{../config/preambule} \input{../config/macros} \title{Corps locaux, corps globaux} \externaldocument{AC} \externaldocument{extensions-algebriques} \externaldocument{correspondance-galois} \externaldocument{formes-tordues} \externaldocument{RT} \externaldocument{spectre} \externaldocument{verselles} \externaldocument{corps-finis} \externaldocument{entiers} \externaldocument{categories} \externaldocument{AVD-Dedekind} \begin{document} \maketitle \tableofcontents \else \chapter{Corps locaux, corps globaux} \begingroup \fi \DeclareMathOperatorWithFont{\module}{\mathtextrm}{mod} \section{Corps locaux} \subsection{Premières définitions, notations} \label{definition corps locaux} \subsubsection{} \label{corps topologique, corps local premier} Un \textbf{corps topologique} \index{corps topologique} est un corps $K$ muni d'une topologie telle que les applications envoyant $(x,y) ∈ K²$ sur $x+y$ (resp. $xy$) et $x ∈ K$ sur $-x$ (resp. $x ∈ K^×$ sur $x^{-1}$) soient continues. Une extension de corps topologiques est un morphisme \emph{continu} $K → L$ de corps topologiques. Par exemple, si $p$ est un nombre premier ou le symbole $∞$, le corps $𝐐_p$ — avec la convention \commentaire{Noter $𝐐_{\chap{p}}$, $𝐐_{\chap{∞}}$ ?} que $𝐐_∞=𝐑$ — muni de la topologie associé à la norme $|⋅|_p$ est un corps topologique. De même, pour chaque $p$ premier, le corps $𝐅_p((t))$ des séries de Laurent formelles est naturellement un corps topologique (cf. \refext{AVD-D}{}). Nous appellerons \textbf{corps local premier} \index{corps local premier} un corps topologique isomorphe à l'un des corps topologiques précédents. \begin{théorème2} \label{corps locaux conditions équivalentes} Soit $K$ un corps topologique. Les conditions suivantes sont équivalentes. \begin{enumerate} \item $K$ est \emph{localement compact} non discret ; \item $K$ est isomorphe (en tant que corps topologique) à $𝐑$, $𝐂$ ou bien au corps des fractions d'un anneau de valuation discrète $𝒪$ complet à corps résiduel fini, équipé de la topologie déduite de la valuation. \item $K$ est une extension finie (en tant que corps topologique) d'un corps local premier $K₀$. \end{enumerate} De plus : \begin{itemize} \item L'anneau $𝒪$ du (ii) est le plus grand sous-anneau compact de $K$ et son idéal maximal est l'ensemble des éléments $x$ de $K$ tels que $x^n$ tende vers $0$ lorsque $n$ tend vers $+∞$. \item Le corps local premier $K₀$ du (iii) est \emph{fermé} dans $K$. Si $K$ est de caractéristique nulle (resp. de caractéristique positive) il est unique : c'est l'adhérence de $𝐐$ (resp. il n'est pas unique). \end{itemize} \end{théorème2} Ce théorème est démontré en \ref{CL conditions équivalentes démo}, où l'on fait usage des résultats des paragraphes qui vont suivre. Notons que, compte tenu des résultats établis dans le chapitre précédent, la principale difficulté est de munir un corps localement compact d'une valeur absolue. Celle-ci sera construire via la théorie de l'intégration (mesure de Haar). \subsubsection{}On appelle \textbf{corps local} un corps topologique satisfaisant les conditions équivalentes précédentes. Il est dit archimédien s'il est isomorphe à $𝐑$ ou $𝐂$ et \textbf{ultramétrique}, ou \textbf{non archimédien}, dans le cas contraire. \subsubsection{}Lorsque $K$ est un corps local ultramétrique, on notera en général $𝒪$ son sous-anneau compact maximal, appelé \textbf{anneau des entiers}, $𝔪$ l'idéal maximal de $𝒪$, $ϖ$ une uniformisante ($𝔪=(ϖ)$), $k$ le corps résiduel $𝒪/𝔪$ et enfin $q$ le cardinal de $k$. L'uniformisante est bien définie à multiplication par une unité $u ∈ 𝒪^×$ près. On appelle \textbf{valeur absolue normalisée}, notée $|⋅|_K$ l'unique valeur absolue $K → 𝐑_{+}$ telle que $|ϖ|_K=\frac{1}{q}$. Lorsque $K=𝐑$ (resp. $𝐂$), la valeur absolue normalisée $|⋅|_K$ est la valeur absolue usuelle (resp. $z ↦ z \sur{z}$, c'est-à-dire le carré de la norme usuelle). On note également $|⋅|_p$ la valeur absolue normalisée $|⋅|_{𝐐_p}$ ; cette convention est étendue au cas où $p=∞$. (On rappelle que $𝐐_∞=𝐑$.) \subsection{Mesures} \label{généralités sur mesures} \subsubsection{}On procède dans un premier temps à quelques rappels et compléments de théorie de l'intégration. Le niveau de généralité de ces rappels est justifié par l'usage qui en sera fait dans la théorie des corps globaux (analyse sur les adèles). Le lecteur est invité à consulter par exemple \cite[\textbf{INT}, VII]{Bourbaki}, ou \cite{Integral@Nachbin} qui en reprend les points essentiels, pour plus de détails. \subsubsection{}Soit $X$ un espace topologique localement compact : $X$ est séparé et que tout point possède un voisinage compact. Cette hypothèse permet de démontrer des variantes du théorème de séparation d'Urysohn\footnote{Notons qu'un espace topologique localement compact n'est pas nécessairement « normal » ($T₄$) ; il est cependant « complètement régulier » ($T_{3+½}$).}. Soit $𝐊$ le corps $𝐑$ ou $𝐂$. Pour tout compact $C ⊆ X$, on note $𝒞_c(X,C;𝐊)$ l'ensemble des fonctions continues sur $X$ à valeurs dans $𝐊$ et à support contenu dans $C$. C'est un espace topologique normé par $‖ f ‖_C =\sup_{x ∈ C} |f(x)|$. L'ensemble $𝒞_c(X;𝐊)=⋃_C 𝒞_c(X,C;𝐊)$ — où l'union est prise dans l'ensemble des fonctions continues à valeurs dans $𝐊$ sur $X$ — des fonctions à support compact est donc naturellement muni de la topologie colimite (ou union). Explicitement : $f_n → f$ si et seulement si il existe un compact $C$ et un entier $N>0$ tel que les fonctions $f$ et $f_n$ pour $n ≥ N$ appartiennent à $𝒞_c(X,C;𝐊)$ et que la suite $(f_n)_{n ≥ N}$ tende vers $f$ dans $𝒞_c(X,C;𝐊)$. Observons que l'espace $𝒞_c(X;𝐊)$ muni de la norme $‖f‖=\sup_{x ∈ X} |f(x)|$ n'est \emph{pas} complet en général. (Si $X=𝐑$, son adhérence dans l'ensemble des fonctions continues bornées est l'ensemble des fonctions tendant vers zéro à l'infini.) \subsubsection{} \label{mesure de Radon} On appelle \textbf{mesure de Radon} sur $X$ une forme linéaire continue $μ:𝒞_c(X;𝐂) → 𝐂$. La continuité de $μ$ revient à supposer l'existence, pour chaque compact $C$ de $X$ d'une constante $M_C$ telle que pour chaque $f ∈𝒞_c(X;𝐂)$ à support dans $C$ on ait : $|μ(f)| ≤ M_C ‖f ‖_C$. Le nombre $μ(f)$ est appelé « intégrale de $f$ par rapport à $μ$ » et est également noté $∫f   dμ$, $∫_X f(x)  dμ(x)$, etc. Une telle mesure est dite \textbf{positive}, si $μ(f)$ est réel dès lors que $f$ est à valeurs réelles et si ce nombre est positif ou nul lorsqu'il en est de même des valeurs de $f$ ; cette dernière condition étant notée : $f ∈ 𝒞_c(X)_+$. (On peut montrer qu'une forme linéaire positive sur $𝒞_c(X;𝐑)$ est automatiquement continue.) Suivant le procédé usuel, on étend une telle mesure : \begin{itemize} \item à l'ensemble $ℐ_+(X)$ des fonctions réelles positives, finies ou non, semi-continues inférieurement, sur $X$ en posant $μ^*(f)=\sup_{g ≤ f} μ(g) ∈ \sur{𝐑}$, où $g ∈ 𝒞_c(X)_+$ et $\sur{𝐑}$ est la droite achevée $𝐑 ∪ \{+∞\}$ ; puis \item à l'ensemble des fonctions positives (finies ou non) sur $X$ en posant $μ^*(f)=\inf_{f ≤ g } μ^*(g) ∈ \sur{𝐑}$, où $g ∈ ℐ_+(X)$. Cette dernière quantité est également notée $∫^* f d μ$. \end{itemize} Cette \emph{intégrale supérieure} de fonctions positives satisfait le théorème de convergence monotone — c'est-à-dire l'égalité $μ^*(\sup_n f_n)=\sup_n μ^*(f_n)$ si les fonctions $f_n$ sont positives croissantes — et ses corollaires, dont le lemme de Fatou : $μ^*(\liminf_n f_n) ≤ \liminf_n μ^*(f_n)$ pour une suite non nécessairement croissante de fonctions. Enfin pour une fonction numérique quelconque $f$ et $s ≥ 1$ un réel, on pose : $|f|_s=∫^* |f|^s d μ$. Il résulte de l'inégalité de Minkowski que l'on obtient ainsi une semi-norme — donc en particulier une topologie (dite de la convergence en moyenne d'ordre $s$) — sur l'espace des fonctions $f:X → 𝐂$ telles que $|f|_s<+∞$. L'adhérence de $𝒞_c(X;𝐂)$ dans cet espace est notée $ℒ^s(X)$. On note $L^s(X)$ l'espace séparé (normé) associé ; c'est un \emph{espace de Banach} (théorème de Riesz-Fischer). L'inégalité $|μ(f)| ≤ |f|₁$, valable pour $f ∈ 𝒞_c(X)$, permet d'étendre $μ$ par continuité en une forme linéaire continue, également notée $μ$ ou $∫_X d μ$, sur $ℒ¹(X)$. Pour les fonctions intégrables, c'est-à-dire dans $ℒ¹(X)$, cette extension coïncide bien sûr avec $μ^*$. \subsubsection{Mesure produit} \label{Radon produit} \paragraph{Produit fini}Soient $X$ et $Y$ deux espaces topologiques localement compacts munis de mesures de Radon $μ_X$ et $μ_Y$. On vérifie sans difficulté (\cite[\textbf{INT}, III, §4, nº1]{Bourbaki}) que le sous-espace $𝒞_c(X,𝐂) ⊠ 𝒞_c(Y,𝐂)$ des fonctions de la forme $f ⊠ g:(x,y)↦ f(x)g(y)$ est dense dans $𝒞_c(X×Y,𝐂)$ et que la forme linéaire $f ⊠ g↦ μ_X(f)μ_Y(g)$ s'étend en une mesure de Radon, notée $μ_X ⊠ μ_Y$ sur $X×Y$. Plus généralement, on définit le produit d'un nombre fini de mesures de Radon. \paragraph{Produit infini de compacts} Soient $(X_s)_{s ∈ Σ}$ une collection d'espaces topologiques compacts munis de mesures de Radon positives $μ_s$. On suppose la famille de réels $μ_s(𝟭_{X_s})$ \emph{multipliable}, où $𝟭_{X_s}$ désigne la fonction caractéristique de $X_s$. Pour chaque sous-ensemble fini $S$ de $Σ$ et chaque fonction continue $f_S$ sur $∏_{s ∈ S} X_s$, notons $f_S ⊠ 𝟭$ la fonction « ne dépendant que d'un nombre fini de variables » \[ f_S ∘ \big(∏_{s ∈ Σ} X_s \dessusdessous{\pr_S}{↠} ∏_{s ∈ S} X_s\big), \] où $\pr_S$ désigne la projection évidente. Il résulte du théorème de Stone-Weierstraß que ces fonctions forment un sous-$𝐂$-espace vectoriel dense de $𝒞_c(∏_{s ∈ Σ} X_s,𝐂)$. On vérifie par réduction au cas où $μ_s(𝟭_{X_s})=1$ (cf. \cite[\textbf{INT}, III, §4, nº6]{Bourbaki}) qu'il existe une unique mesure de Radon $μ$ sur $∏_{s ∈ Σ} X_s$ telle que \[ μ(f_S ⊠ 𝟭)=(\bigboxtimes_{s ∈ S} μ_s) (f_S) × ∏_{s ∉ S} μ_s(𝟭_{X_s}). \] \subsubsection{Mesure des ensembles} \label{mesure des ensembles} On fait le lien avec la théorie de Lebesgue de la mesure en posant, pour toute partie $E ⊆ X$ : $μ^*(E)=μ^*(𝟭_E) ∈ \sur{𝐑}_+$, où $𝟭_E$ désigne la fonction caractéristique de $E$. C'est la \textbf{mesure extérieure} de l'ensemble $E$. Elle coïncide avec la borne inférieure des mesures extérieures des ouverts contenant $E$. (Noter que la fonction caractéristique d'un ouvert est semi-continue inférieurement, c'est-à-dire appartient à $ℐ_+(X)$.) On vérifie que les ensembles compacts, et plus généralement les ensembles relativement compacts sont de mesure extérieure finie. Prendre garde au fait que l'intégrabilité de la fonction caractéristique $𝟭_E$ d'un ensemble $E$ est \emph{a priori} plus forte que la seule finitude de sa mesure extérieure : on démontre que $E$ est intégrable — c'est-à-dire $𝟭_E ∈ ℒ¹(X)$ — si et seulement si il existe pour tout $ε>0$ un compact $C_ε ⊆ E$ tel que $μ^*(E-C_ε) ≤ ε$. On note $μ(E)=∫ 𝟭_E d μ$ la mesure d'un tel ensemble. On dit qu'un sous-ensemble $E$ de $X$ est \textbf{mesurable} (sous-entendu : relativement à $μ$) si pour tout compact $C$ de $X$, l'intersection $E ∩ C$ est intégrable. \subsubsection{}Considérons maintenant un \textbf{groupe topologique} $G$, localement compact. (Groupe topologique : $G² → G$, $(x,y) ↦ x y^{-1}$ est continue.) On appelle \textbf{mesure de Haar} sur $G$ une mesure (de Radon) $μ$ non nulle et positive telle que pour tout $f ∈ 𝒞_c(G;𝐂)$ et tout $h ∈ G$, on ait l'égalité : \[ ∫_G f   dμ= ∫_G f_h   dμ, \] où $f_h(g)=f(h^{-1}g)$. On peut montrer montrer que la continuité d'une telle forme linéaire est automatique. On précise parfois que la mesure $μ$ est « \emph{invariante à gauche} ». \subsubsection{}Tout groupe topologique localement compact $G$ peut être muni d'une mesure de Haar, unique à un facteur multiplicatif non nul près. L'existence est due à Haar Alfréd — sous une hypothèse restrictive dont s'est affranchi André Weil — et l'unicité à John von Neuman. Si $G$ est commutatif, une telle mesure est nécessairement invariante à droite, en un sens évident. Nous présentons dans le paragraphe suivant une esquisse de preuve de ces résultats. \subsubsection{Existence et unicité à un facteur près d'une mesure de Haar : esquisse de démonstration} \label{Haar existence et unicité} Le lecteur pressé peut omettre la lecture de ce paragraphe sans préjudice \commentaire{À vérifier} notable : dans les applications que nous en ferons, les énoncés peuvent se ramener par passage à la limite à des énoncés explicites sur un nombre fini de mesures locales décrites de manière \emph{ad hoc} en \ref{mesures Tamagawa locales}. %Cf. Weil, commentaire sur [1967c] dans ses Œuvres, tome III. %l'idée est que, sauf erreur, on intègre des fonctions %dans $𝒮(K_𝐀)$, que chaque $a ∈ K$ est à composantes presque toutes %dans $𝒪_{K,x}$ [utile pour formule du produit] et que %$μ_{ψ_x}(𝒪_{K,x})=1$ pp $x$, si bien que finalement, tout se ramène au cas %d'un produit fini. Soit $G$ un groupe topologique localement compact et soit $φ$ une fonction réelle sur $G$, continue à support compact. Si $ψ$ appartient à $𝒞_c(G)_+$ et n'est pas identiquement nulle, il existe des réels positifs $c₁,…,c_n$ et des éléments $h₁,…,h_n$ de $G$ tels que l'on ait l'inégalité \[ φ ≤ ∑_{i=1}^n c_i ψ_{h_i}. \] En effet, quitte à remplacer $ψ$ par une fonction $c ψ_h$, on peut supposer — par locale compacité — qu'il existe une voisinage ouvert $U$ de l'identité de $G$ tel que $ψ ≥ 1$ sur $U$. Le support (compact) de $φ$ étant recouvert par un nombre fini de translatés de $U$ et $φ$ étant bornée, la conclusion en résulte aussitôt. Notons $(φ : ψ)$ la borne inférieure des sommes $∑_i c_i$, où les $c_i$ et les $h_i$ sont comme ci-dessus. Observons que si $μ$ est une mesure de Radon (invariante à gauche) sur $G$, on a $μ(c_i ψ_{h_i})=c_i μ(ψ)$ d'où $μ(φ)/μ(ψ) ≤ ∑_i c_i$. Pour chaque $φ,φ′ ∈ 𝒞_c(G,𝐑)$, $ψ,ψ′ ∈ 𝒞_c(G)_+ -\{0\}$, $h ∈ G$ et $λ ≥ 0$, on a : \begin{enumerate} \item $(φ_h : ψ)=( φ : ψ)$ \item $(λ φ : ψ)=λ ( φ : ψ)$ \item $(φ + φ ′ : ψ) ≤ (φ : ψ) + (φ ′ : ψ)$ \item $(φ : ψ) ≤ (φ ′ : ψ)$ si $φ ≤ φ ′$ \item $(φ : ψ ′) ≤ (φ : ψ)(ψ : ψ ′)$ \item $(φ : ψ) ≥ \sup(φ)/\sup(ψ)$ \end{enumerate} Les quatre premières propriétés sont évidentes. (v) résulte du fait que si $φ ≤ ∑_i c_i ψ_{h_i}$ et $ψ ≤ ∑_j d_j ψ′_{k_j}$, on a $φ ≤ ∑_{i,j} c_i d_j ψ′_{h_i k_j}$ d'où $(φ : ψ) ≤ ∑_{i,j} c_i d_j = (∑_i c_i)(∑_j d_j)$. Pour vérifier (vi), on constate que si $φ ≤ ∑_i c_i ψ_{h_i}$ et que le $\sup$ de $φ$ est atteint en $g ∈ G$, on a $\sup(f) ≤ ∑_i c_i ψ(h_i^{-1}g) ≤ (∑_i c_i)\sup(ψ)$. Notons que (vi) entraîne que $(φ: ψ)$ est $>0$ si $φ$ est positive non identiquement nulle. Fixons une fois pour toutes une fonction $φ₀ ∈ 𝒞_c(G)_+ -\{0\}$ ; son intégrale pour la mesure que nous allons construire sera égale à $1$. Pour chaque $ψ ∈ 𝒞_c(G)_+ -\{0\}$ et chaque $φ ∈ 𝒞_c(G)_+$, posons \[ I_ψ(φ)=\frac{( φ : ψ)}{(φ₀ : ψ)}. \] Il résulte immédiatement des propriétés précédentes que $φ ↦ I_ψ(φ)$ est invariante par translation à gauche, commute à la multiplication par un scalaire positif, sous-additive, et croissante. D'autre part, si $φ$ est non nulle, on a les inégalités \[ 0<1/(φ₀: φ) ≤ I_ψ(φ) ≤ (φ : φ₀), \] qui résultent de (v) ci-dessus. Nous allons voir maintenant que $I_ψ$ est d'autant plus proche d'être \emph{additive} que le support de $ψ$ est concentré en l'identité de $G$. Précisément : pour chaque paire $φ, φ ′ ∈ 𝒞_c(G)_+$ et chaque $ε>0$ il existe un voisinage \emph{compact} $V_ε$ de l'identité de $G$ tel que si $ψ$ est de plus à support dans $V_ε$ on ait : \[ I_ψ(φ+φ ′) ≤ I_ψ(φ) + I_ψ(φ ′) ≤ I_ψ(φ + φ ′)+ ε. \] (La première inégalité n'est mise que pour mémoire.) Soit $H ∈ 𝒞_c(G)_+$ égale à $1$ sur le support de $φ + φ ′$ et posons $F=φ + φ ′ + ε H$. Considérons les fonctions $f$ et $f ′$ respectivement égales à $φ/F$ et $φ ′ /F$ sur le support de $φ+φ ′$ et zéro ailleurs. Elles sont continues à supports compacts et positives. Soit $η>0$. Par continuité des fonctions et compacité de leurs supports on a le résultat d'uniforme continuité suivant : il existe un voisinage compact $V$ de l'identité tel que $|f(x)-f(y)| ≤ η$ et $|f ′(x)-f ′(y)| ≤ η$ dès que $x^{-1}y ∈ V$. Soit $ψ ∈ 𝒞_c(G)_+$ non nulle à support dans $V$ et supposons qu'une inégalité $F ≤ ∑_i c_i ψ_{h_i}$ soit satisfaite. On a donc la majoration $φ= f ⋅ F ≤ ∑_i c_i f⋅ψ_{h_i}$. Or, $f ⋅ ψ_h ≤ (f(h)+η) ⋅ ψ_h$ : en un point hors de $hV$ c'est évident car $ψ_h$ y est nulle ; en un point de $hV$, on a $f ≤ f(h) + η$ par hypothèse sur $η$ et $V$. En sommant les deux majorations ainsi obtenues pour $φ$ et $φ ′$, on obtient : \[ (φ : ψ) + (φ ′ : ψ) ≤ ∑_i c_i (φ(h_i)+φ ′(h_i)+2 η) ≤ (1+2 η) ∑_i c_i \] car $φ + φ ′ ≤ 1$. On en tire la majoration $(φ : ψ) + (φ ′ : ψ) ≤ (1+2 η)(F: ψ)$ et, par division par $(φ₀: ψ)$ : \[ I_ψ(φ)+I_ψ(φ ′) ≤ (1+2 η)I_ψ(F) ≤ (1+2 η)\big(I_ψ(φ+φ ′)+δ I_ψ(H)\big) \] où la seconde inégalité résulte de la sous-additivité de $I_ψ$. Finalement, on a \[ I_ψ(φ)+I_ψ(φ ′) ≤ I_ψ(φ)+I_ψ(φ ′) + \Big(2 η (φ + φ ′ : φ₀)+ δ(1+2 η)(H : φ₀)\Big). \] Quitte à choisir $δ$ et $η$ suffisamment petits, le second terme peut être rendu inférieur à $ε$. Voyons maintenant comment en déduire l'existence d'une mesure de Haar. Pour $V$ un voisinage compact variable de l'identité, les ensembles $𝒞_c(G,V)_+-\{0\}$ forment une base d'un filtre sur l'ensemble $𝒞_c(G)_+-\{0\}$ des fonctions $ψ$ considérées. Soit $𝔉$ un ultrafiltre plus fin que ce dernier filtre. Par compacité de l'ensemble $[(φ₀: φ)^{-1},(φ : φ₀)]$, auquel appartiennent les $I_ψ(φ)$, la limite $\lim_{ψ,𝔉} I_ψ(φ)$ existe ; notons la $I(φ)$. (Le lecteur peu versé dans la théorie des filtres et ultrafiltres pourra avantageusement consulter \cite[\textbf{TG}, I, §6, nº4]{Bourbaki} ou bien \cite[chap. II, §8]{Integral@Nachbin} pour une variante de cet argument reposant sur le théorème de Tikhonov.) Il résulte de ce qui précède et du passage à la limite que l'on a \[ I(φ+φ ′)=I(φ)+I(φ ′) \] pour toute paire de fonctions dans $𝒞_c(G)_+$. Si $φ ∈ 𝒞_c(G,𝐑)$, il existe des fonctions $φ₁,φ₂ ∈ 𝒞_c(G)_+$ telles que $φ = φ₁ -φ₂$, par exemple $φ₁=\sup(φ,0)$ et $φ₂=-\inf(f,0)$. On vérifie immédiatement que la quantité $I(φ):=I(φ₁)-I(φ₂)$ ne dépend pas de la décomposition choisie. La forme $φ ↦ I(φ)$ est une mesure de Haar. Remarquons qu'il résulte de ce qui précède que si $φ ∈ 𝒞_c(G)_+$ est une fonction non nulle, $I(φ)$ est strictement positif : $I(φ) ≥ (φ₀: φ)^{-1}$. (On peut aussi remarquer que l'on a l'inégalité $I(ψ) ≤ (∑_i c_i) I(φ)$ si $ψ ≤ ∑_i c_i φ_{h_i}$ si bien que $I(φ)=0$ ⇒ $I=0$.) Considérons l'unicité. Soient $μ$ et $ν$ deux mesures de Haar invariantes à gauche et soit $φ₀ ∈ 𝒞_c(G)_+$ une fonction non nulle. D'après la remarque précédente, $μ(φ₀)>0$ et $ν(φ₀)>0$. On peut donc supposer que l'on a l'égalité $μ(φ₀)=ν(φ₀)=1$. Pour toute paire de fonctions $φ,ψ ∈ 𝒞_c(G)$, considérons le produit de convolution $φ ⋆_μ ψ$ : \[ g ↦ ∫ φ(h) ψ (h^{-1}g)   dμ(h)= ∫ φ(gh)ψ(h^{-1})  dμ(h), \] où l'égalité résulte de l'invariance à gauche de $μ$. Cette intégrale a un sens car, comme on le vérifie sans peine, l'intégrande est une fonction (continue) à support compact ; il en est de même de la fonction $φ ⋆_μ ψ$. En intégrant pour la mesure $ν$ on obtient la formule classique : \[ ∫ φ ⋆_μ ψ   d ν=∫ φ   dμ ⋅ ∫ ψ   dν, \] que l'on peut réécrire $ν(φ ⋆_μ ψ)=μ(φ)ν(ψ)$. Elle se démontre en intervertissant l'ordre d'intégration (Fubini) et en utilisant l'égalité $∫ ψ(h^{-1}g)   dν(g)=∫ ψ   dν$ (invariance à gauche). Fixons $φ$ et montrons que $μ(φ)=ν(φ)$. Pour tout $ε>0$, il existe un voisinage compact $V_{φ,ε}$ de l'identité tel que pour toute fonction $ψ ∈ 𝒞_c(G)_+$ de support dans $V_{φ,ε}$ et d'intégrale $μ(ψ)=1$, on ait $‖ φ ⋆_μ ψ - φ ‖_∞ ≤ ε$. (Un tel énoncé est souvent utilisé pour régulariser des fonctions ; nous n'en rappelons pas la démonstration.) Pour un tel $ψ$, on a $|ν(φ ⋆_μ ψ) -ν(φ)| ≤ ε ⋅ ν\big( \mathtextrm{Supp}(φ) V_{φ,ε}^{-1}\big)$. En particulier, il existe des fonctions $ψ$ positives de $μ$-intégrale unité telles que $ν(φ ⋆_μ ψ)$ soit arbitrairement proche de $ν(φ)$. En appliquant ceci à $φ=φ₀$, et en utilisant les égalités $ν(φ ⋆_μ ψ)=μ(φ)ν(ψ)$ et $μ(φ₀)=ν(φ₀)$, on en déduit qu'il existe des fonctions $ψ$ de $ν$-intégrale arbitrairement proche de l'unité et de support contenu dans des $V_{φ,ε}$. Ainsi, quitte à bien choisir $ψ$, on peut avoir $ν(φ ⋆_μ ψ)=μ(φ)ν(ψ)$ arbitrairement proche de $ν(φ)$ et $ν(ψ)$ arbitrairement proche de $1$. Nécessairement, $μ(φ)=ν(φ)$ ; CQFD. \subsubsection{} \label{définition module et cas compact ou commutatif} Si $φ$ est un automorphisme de $G$ et $μ$ une mesure de Haar invariante à gauche, la mesure de Radon $φ^*μ:f ↦ ∫_G f ∘ φ^{-1}   d μ$ est également une mesure de Haar. Il existe donc un nombre réel $\module(φ)>0$, appelé \textbf{module} de $φ$, tel que $φ^*μ=\module(φ) μ$ ; il ne dépend pas du choix de $μ$. Par construction, pour toute partie $μ$-mesurable $E$ de $G$, on a $μ(φ(E))=\module(φ)μ(E)$. Si $G$ est \emph{compact}, tout automorphisme est de module unité : en effet, $μ(G)<+∞$ (fait général aux mesures de Radon) et on a $μ(G)=μ(φ(G))$ — car $φ(G)=G$ — donc $μ(G)=\module(φ)μ(G)$, d'où le résultat. Appliquant cette observation au cas des automorphismes intérieurs, on en déduit dans ce cas que si $E ⊆ G$ est mesurable, on a $μ(E)=μ(gEg^{-1})=μ(Eg^{-1})$ : la mesure $μ$ est également invariante \emph{à droite} lorsque $G$ est compact. Le même argument montre que toute mesure de Haar invariante à gauche est également invariante à droite lorsque $G$ est \emph{commutatif} mais non nécessairement compact. \subsubsection{} \label{caractérisation compacité par mesure} Si $G$ est compact et $μ$ une mesure de Haar, on a vu que sa mesure $μ(G)$ est finie. (On appelle \textbf{mesure de Haar normalisée} l'unique mesure de Haar telle que $μ(G)=1$.) Réciproquement, si $G$ est seulement supposé \emph{localement} compact mais de mesure extérieure $μ^*(G)$ finie, alors $G$ est compact. En effet, soit $V$ un voisinage compact de l'unité de $G$. Le nombre de translatés de $V$ disjoints deux à deux est borné par le quotient fini $μ^*(G)/μ(V)$ ; il existe donc un ensemble de cardinal maximal $g₁V,…,g_nV$ de tels translatés. Si $g ∈ G$, il existe donc un indice $i$ tel que $gV ∩ g_iV ≠ ∅$, c'est-à-dire $g ∈ g_iV V^{-1}$. Le groupe $G$ est donc recouvert par les compacts $g_i V V^{-1}$, en nombre fini ; il est compact. CQFD. \subsubsection{} \label{module et mesure quotients} Soit $Γ$ un sous-groupe discret d'un groupe abélien topologique localement compact $G$. Supposons le groupe quotient $X=G/Γ$ compact ; on dit que $Γ$ est \textbf{cocompact} dans $G$. Fixons des mesures de Haar $μ_Γ$ (p. ex. la mesure de comptage) et $μ_X$ sur $Γ$ et $X$ respectivement. À toute fonction à support compact $f$ sur $G$, on peut associer la fonction « moyenne sur les $Γ$-orbites » : \[ m_Γ(f): g↦ μ_Γ([+g]^*f)= ∫_Γ f(g+γ) dμ_Γ(γ). \] Cette fonction est $Γ$-invariante et induit une fonction continue (à support compact) sur $X$, également notée $m_Γ(f)$. La forme linéaire $f↦ μ_X( m_Γ(f))$ est positive et $G$-invariante ; c'est donc une mesure de Haar sur $G$, que nous noterons $μ_G$. Par construction, \[ ∫_G f(g) dμ_G(g)=∫_X \Big( ∫_Γ f(g+γ) dμ_Γ(γ)\Big) dμ_X(\sur{g}). \] On peut montrer l'existence d'un triplet de telles mesures de Haar dès que $Γ$ est un sous-groupe fermé de $G$ (non nécessairement discret ou cocompact). % Nachbin, p. 86. Il résulte immédiatement de la formule ci-dessus que pour tout automorphisme de $G$ induisant un automorphisme de $Γ$, on a \[ \module_G(φ)=\module_{G/Γ}(φ)\module_Γ(φ). \] Dans le cas particulier considéré ici, on a $\module_Γ(φ)=1$ car $Γ$ est discret, et $\module_{G/Γ}(φ)=1$ car $G/Γ$ est compact, d'où $\module_G(φ)=1$. Réciproquement, partant d'une mesure de Haar sur $G$, et imposant à $μ_Γ$ d'être — par exemple — la mesure de comptage, il existe une unique mesure de Haar sur $X=G/Γ$ telle que la formule d'intégration ci-dessus soit satisfaite. \subsubsection{Domaine fondamental} \label{domaine fondamental} Une autre approche pour intégrer sur le quotient consister à définir un \textbf{domaine fondamental} dans $G$ et intégrer dessus. Esquissons une construction en conservant les notations du paragraphe précédent. Soit $U$ un voisinage ouvert de l'identité tel que $U^{-1} U ∩ Γ = \{e\}$ (notation multiplicative). Pour chaque $γ ∈ Γ$, notons $U_γ$ le translaté $U γ$. Il résulte de la compacité de $X$ qu'il existe un nombre fini d'éléments $g₁,…,g_n$ de $G$ tels que $⋃_{i,γ} g_i U_γ=G$. (En effet, la réunion $⋃_{g,γ} g U_γ$ est ouverte, $Γ$-saturée et se surjecte sur $X$.) Supposons de plus $Γ$ \emph{dénombrable}. Sous cette hypothèse, il existe donc une famille dénombrable d'ouverts $U₀,U₁,…$ de $G$ tels que la projection $π:G ↠ X$ restreinte aux $U_i$ induise une \emph{injection}. Alors, \[ F= ⋃_i \Big( U_i - (⋃_{j0$ il existe un voisinage ouvert $U_{a,ε}$ du compact $aC$ tel $μ(U_{a,ε}) ≤ μ(aC)+ε$ (cf. \ref{mesure des ensembles}). Soit $A$ un voisinage compact de $a$ tel que $AC ⊆ U_{a,ε}$, dont l'existence est assurée par la continuité du produit. Pour chaque $x ∈ A$, on a : \[ \frac{μ(xC)}{μ(C)}=\module_K(x) ≤ \module_K(a)+ ε μ(C)^{-1}. \] Il en résulte que la fonction $\module_K$ est \emph{semi-continue supérieurement}. En particulier, elle est continue en $0$ (où elle atteint son minimum.) L'égalité $\module_K(x)=\module_K(x^{-1})^{-1}$ pour chaque $x ≠ 0$ montre qu'elle est aussi semi-continue inférieurement sur $K^×$ donc, finalement, continue. \end{démo} \begin{exercice2} En déduire que $K$ n'est pas compact. %cf. AVD-D, EVT localement compact est de dimension finie \end{exercice2} \subsubsection{} \label{compacité des Br} Soit $r>0$ un réel. Il résulte de la proposition précédente que l'ensemble $B_r=\{x ∈ K:\module_K(x) ≤ r\}$ est un voisinage fermé de $0$ dans $K$. Montrons qu'il est \emph{compact}. Soit $V$ un voisinage compact de $0$ et $W$ un voisinage ouvert de $0$ tel que $WV ⊆ V$. L'existence de $V$ résulte de la locale compacité de $K$ ; celle de $W$ de la continuité du produit $K×K → K$. Le corps $K$ étant non discret et $\module_K$ étant continue, il existe $x ∈ W ∩ V$ tel que $0<\module_K(x)<1$. Par récurrence, $x^n$ appartient à $V$ pour tout $n ≥ 1$. Nous allons montrer que $B_r$ est contenu dans une réunion finie d'ensembles $x^{-n}V$, $n ≥ 0$. Soit $y$ une valeur d'adhérence de la suite $(x^n)$. Le réel $\module_K(y)$ est valeur d'adhérence de la suite $\module_K(x^n)=\module_K(x)^n$ donc nul. Finalement, $y$ est nul. Comme la suite $(x^n)$ appartient au \emph{compact} $V$, elle tend donc vers $0$. Ainsi, pour chaque $a ∈ K$, il existe $n ≥ 0$ — que l'on peut supposer minimal — tel que $x^n a$ appartienne à $V$. Nous allons vérifier que si $a ∈ B_r$, on peut majorer $n$ indépendamment de $a$ ; ceci suffit pour conclure. Si $n>0$, $x^n a ∈ V-xV$. Soit $X$ l'adhérence de $V-xV$ ; c'est un compact, car fermé dans $V$, ne contenant pas $0$, car $xV$ en est un voisinage. Il en résulte qu'il existe $m_r>0$ tel que $\module_K(y) ≥ m_r$ pour tout $y ∈ X$. En particulier, $\module_K(x^n a)=\module_K(a) \module_K(x)^n ≥ m_r$. Comme $\module_K(a)$ est inférieur à $r$ et $\module_K(x)<1$, l'entier $n$ est majoré indépendamment de $a$. CQFD. \subsubsection{} \label{Br système fondamental de voisinages} Les $B_r$ forment un système fondamental de voisinage de $0$ dans $K$ : pour tout voisinage $V$ de $0$, il existe $r>0$ tel que $B_r ⊆ V$. Pour le montrer, on peut supposer $V$ compact (par locale compacité de $K$). Soit $ρ$ un réel strictement supérieur à la borne supérieure de $\module_K$ sur $V$ ; on a $V ⊆ B_ρ$. Soit $X$ l'adhérence de $B_ρ-V$. C'est un compact ne contenant pas $0$. Soit $σ$ la borne inférieure de $\module_K$ sur $X$ ; on a $0<σ ≤ ρ$. Considérons enfin $00$ tel que $f_K(n)=n^c$ (\refext{AVD-D}{lemme clef va sur Q}). Vérifions l'équivalence ci-dessus. Une récurrence immédiate montre que (ii) entraîne (i). Considérons la réciproque. Soient $r$ un entier et $n=2^r$. Par récurrence sur $r$, on a \[ \module_K(∑_{i=1}^n x_i) ≤ A_K^r \max_i \module_K(x_i) \] pour tout choix d'éléments $x₁,…,x_n ∈ K$. Quitte à considérer des éléments nuls, cette inégalité est également valable pour $n ≤ 2^r$. Appliquant cette observation à la somme \[ (x+y)^{2^r}=∑_{i=0}^{2^r} \binom{2^r}{i} x^i y^{2^r-i}, \] où $x$ et $y$ sont des éléments quelconques de $K$ et la somme de gauche contient $2^r+1 ≤ 2^{r+1}$ termes, on obtient, grâce à l'hypothèse faite sur $f_K$, \[ \module_K(x+y)^{2^r} ≤ A_K^{r+1} \max_i \{\module_K(x)^i  \module_K(y)^{2^r-i}\}. \] Si $\module_K(y) ≤ \module_K(x)$, on en tire \[ \module_K(x+y) ≤ A_K^{(r+1)/2^r} \module_K(x), \] et l'inégalité ultramétrique par passage à la limite. \subsubsection{} \label{corps localement compacts archimédiens} Soit $K$ un corps localement compact \emph{archimédien}. La restriction du module $\module_K$ au sous-corps premier $𝐐$ est $|⋅|_∞^c$, où $|⋅|_∞$ désigne la valeur absolue usuelle et $c>0$ est un réel. D'autre part, la topologie induite sur $𝐐$ est celle donnée par la valeur absolue : cela résulte de \ref{Br système fondamental de voisinages}. L'adhérence $K₀$ de $𝐐$ dans $K$ est localement compacte donc complète : c'est donc le complété de $𝐐$ pour la valeur absolue $|⋅|_∞$. Le sous-corps fermé $K₀$ est donc isomorphe (en tant que corps topologique) au corps local premier $𝐑=𝐐_∞$. D'après \refext{AVD-D}{EVT localement compact sur corps valué est de dimension finie} l'extension $K \bo 𝐐_∞$ est nécessairement finie. Algébriquement, $K$ est donc isomorphe à $𝐑$ ou $𝐂$. Topologiquement, il en est de même car $K$ est homéomorphe à $𝐑^d$ où $d=[K:𝐑]$ (cf. \refext{AVD-D}{EVT sur corps valué complet}). \subsubsection{} \label{corps localement compacts ultramétriques} Soit $K$ un corps localement compact \emph{ultramétrique}. Posons $𝒪=\{x ∈ K: \module_K(x) ≤ 1\}$ ; c'est l'ensemble que nous notions $B₁$ précédemment. Il est donc compact. D'autre part, on a $𝒪+𝒪=𝒪$ car $K$ est ultramétrique. Ainsi, $𝒪$ est un sous-anneau compact de $K$ ; il est maximal car — comme il résulte de la continuité de $\module_K$ et de la formule $\module_K(x^n)=\module_K(x)^n$ — tout sous-ensemble relativement compact de $K$ est contenu dans $𝒪$. Le sous-ensemble $𝔪=\{x ∈ K:\module_K(x)<1\}$ de $𝒪$ est un idéal ; il est maximal car tout élément de $x ∈ 𝒪-𝔭$ est de module $1$ donc d'inverse $x^{-1}$ dans $𝒪$. Soit $x_i$ ($i ∈ I$) un ensemble de représentants de $𝒪$ modulo $𝔭$. L'ensemble $𝒪$ est recouvert par les ouverts disjoints $\{x ∈ K:\module_K(x-x_i)<1\}$. L'ensemble $I$ est donc fini ; le corps résiduel $k=𝒪/𝔭$ aussi. Le quotient $k$ étant fini donc séparé, l'idéal $𝔭$ est fermé dans $𝒪$ donc compact. Puisqu'il est recouvert par les ouverts $\{x:\module_K(x)<1-1/n\}$, $n ≥ 1$, il existe $n$ tel que $𝔭=\{x:\module_K(x)<1-1/n\}$. La valeur absolue $\module_K$ est donc discrète : son image est un sous-groupe discret de $𝐑_+$. Ainsi, $K$ est le corps des fractions d'un anneau de valuation discrète de corps résiduel fini. Il résulte des théorèmes de structure \refext{AVD-D}{structure corps discrètement valué complet fini inégale caractéristique} et \refext{AVD-D}{structure corps discrètement valué complet parfait égale caractéristique} que $K$ est une extension finie d'un corps local premier. \begin{remarque2}On pourrait également étudier la structure des corps localement compacts ultramétriques suivant la méthode de \ref{corps localement compacts archimédiens}. Esquissons brièvement comment procéder. En caractéristique nulle, on peut à nouveau considérer l'adhérence du corps $𝐐$ et utiliser \refext{AVD-D}{Ostrowki}). En caractéristique $p>0$, on peut remplacer $𝐐$ par le corps $ℚ=𝐅_p(ϖ)$ engendré par un élément $ϖ ∈ K$ tel que $\module_K(x)<1$. Un tel élément est nécessairement transcendant sur $𝐅_p$ sans quoi il serait une racine de l'unité, de module $1$. Utilisant \refext{AVD-D}{k-valuations de k(X)}, il en résulte que l'adhérence de $ℚ$ dans $K$ coïncide avec son complété une \emph{valuation} discrète à corps résiduel fini. D'après \refext{AVD-D}{structure corps discrètement valué complet parfait égale caractéristique}) un tel corps topologique est isomorphe à un corps de séries formelles $𝐅_q((u))$. Ce dernier est lui-même fini sur son sous-corps fermé $𝐅_p((u))$. \end{remarque2} \subsubsection{} \label{CL conditions équivalentes démo} Nous pouvons maintenant vérifier les équivalences annoncées en \ref{corps locaux conditions équivalentes}. \begin{itemize} \item[(i) ⇒ (ii)] Soit $K$ un corps localement compact non discret. Si $K$ est archimédien, il est isomorphe à $𝐑$ ou $𝐂$, cf. \ref{corps localement compacts archimédiens}. Si $K$ est ultramétrique, c'est le corps des fractions d'un anneau de valuation discrète à corps résiduel fini, muni de sa topologie naturelle, cf. \ref{corps localement compacts ultramétriques}. \item[(ii) ⇒ (iii)] Soit $K$ un corps topologique comme en (ii), ultramétrique. Il résulte des théorèmes de structure \refext{AVD-D}{structure corps discrètement valué complet parfait égale caractéristique} et \refext{AVD-D}{structure corps discrètement valué complet fini inégale caractéristique} que $K$ est fini sur un sous-corps local premier $K₀$. Celui-ci est fermé dans $K$ car isomorphe à une droite dans $K$ (cf. \refext{AVD-D}{EVT sur corps valué complet}). \item[(iii) ⇒ (i)] Les corps $𝐑$ et $𝐂$ étant localement compacts, il suffit de considérer le corps des fractions $K$ d'un anneau de valuation discrète complet $𝒪$ à corps résiduel fini. Pour montrer que $K$, muni de la topologie déduite de la valuation, est localement compact, il suffit de vérifier que $𝒪$ est compact. (C'est un voisinage de $0 ∈ K$.) Notons $𝔪$ l'idéal maximal de $𝒪$. Cet anneau étant séparé et complet pour la topologie $𝔪$-adique, c'est naturellement un fermé du produit $∏_{n ≥ 1} 𝒪/𝔪^n$, où chaque anneau quotient $𝒪/𝔪^n$ est muni de la topologie discrète. Ces anneaux sont finis donc compacts ; il en est de même de leur produit. \end{itemize} Parmi les précisions figurant dans l'énoncé du théorème \ref{corps locaux conditions équivalentes}, seule la non-unicité de $K₀$ dans le cas de la caractéristique positive est à vérifier. Or, si $K₀$ est un sous-corps local premier fermé dans $K$, le sous-corps $K₁=K₀^p=𝐅_p((t^p))$ de $K$ satisfait les mêmes conditions. (Que $𝐅_p((t^p))$ soit fermé dans $𝐅_p((t))$ résulte par exemple du fait que la dérivation par rapport à $t$ est continue pour la topologie $(t)$-adique et de noyau $𝐅_p((t^p))$.) \subsubsection{} \label{extension finie corps local est local} Soit $L\bo K$ une extension finie de corps. Si $K$ est un corps local, $L$ peut être muni d'une topologie qui en fait un corps local ; elle est unique et $K$ est fermé dans $L$. Cela résulte de \refext{AVD-D}{EVT sur corps valué complet}. (Notons que $L$ est non discret car son sous-corps $K$ ne l'est pas.) De plus, le corps $L$ est isomorphe comme $K$-espace vectoriel topologique à $K^d$ où $d=[L:K]$. Il en résulte que la restriction à $K$ du module $| ⋅ |_L$ est $| ⋅|_K^d$. \subsection{Mesure de Tamagawa locales} \label{mesures Tamagawa locales} \subsubsection{} Nous donnons ici une construction \emph{ad hoc} et une description explicite des mesures de Haar sur le groupe additif d'un corps local. \def\minus{\fontsize{5pt}{5pt}\selectfont} \begin{enumerate} \item[$𝐑$.] La mesure de Radon $μ^{\mbox{\minus $+$}}_{1}$ envoyant $f ∈ 𝒞_c(𝐑)$ sur son intégrale usuelle (au sens de Riemann ou Lebesgue) $∫_𝐑 f(x) dx$ est une mesure de Haar. Elle satisfait : $μ^{\mbox{\minus $+$}}_{1}([0,1])=1$. L'exposant « $+$ » est là pour insister sur le fait qu'il s'agit d'une mesure de Haar sur le groupe \emph{additif} du corps topologique $K=𝐑$. \item[$𝐂$.] La mesure de Radon $μ^{\mbox{\minus $+$}}_{1}$ envoyant $f ∈ 𝒞_c(𝐂)$ sur $∫_{𝐂} f(z) |dz ∧ d\sur{z}|$ est une mesure de Haar. Elle satisfait : \mbox{$μ^{\mbox{\minus $+$}}_{1}(\{z:|z| ≤ 1\})=2 π$}. (Si $z=a+ib$, c'est la mesure $2 dadb$.) \item[ultram.] Soit $K$ un corps local ultramétrique et soit $f ∈ 𝒞_c(K;𝐂)$. La fonction $f$ est localement constante : l'anneau des entiers $𝒪$ de $K$ étant un voisinage de l'origine, on se ramène par translation à montrer que toute fonction continue $𝒪 → 𝐂$ est localement constante. Cela résulte de la définition de la topologie sur $𝒪=\lim_n 𝒪/ 𝔪^n$ d'après laquelle $\Hom_{\mathtextrm{cont}}(𝒪,𝐂)=\colim_n \Hom(𝒪/𝔪^n,𝐂)$. Le fonction $f$ ci-dessus étant de plus à support compact, il existe un entier $e ∈ 𝐙$ tel que $f$ puisse s'exprimer comme une somme finie \[ f=∑_{i=1}^r c_i 𝟭_{x_i+𝔪^e}. \] On définit alors $μ^{\mbox{\minus $+$}}₁(f)$ par linéarité à partir des égalités : $μ^{\mbox{\minus $+$}}₁(𝟭_{x_i+𝔪^e})=q^{-e}$. On vérifie sans peine que la quantité obtenue ne dépend pas de la présentation de $f$ choisie et que l'on a unicité de la mesure de Haar à multiplication par une constante non nulle près. (Cette constatation, élémentaire est également utile lorsque l'on suit une approche dyadique pour définir l'intégration des fonctions numériques ; cf. \cite{Elements@Colmez}.) Par construction, on a $μ^{\mbox{\minus $+$}}_{1}(𝒪)=1$. \end{enumerate} La proposition suivante résulte immédiatement des exemples précédents. \begin{proposition2} \label{module=module} Soit $K$ un corps local et soit $a ∈ K^×$. Le module de l'automorphisme $[×a]:K → K$, $x ↦ ax$, du groupe additif de $K$ est égal à $|a|_K$. En d'autres termes, $[×a]^*μ^{\mbox{\minus $+$}}=|a|_K μ^{\mbox{\minus$+$}}$, c'est-à-dire \[ |a|_K ∫ f(ax) dμ^{\mbox{\minus$+$}}(x)=∫ f(x) dμ^{\mbox{\minus$+$}}(x), ∀ f ∈ 𝒞_c(K,𝐂) \] pour toute mesure de Haar $μ^{\mbox{\minus$+$}}$ sur $(K,+)$. \end{proposition2} Pour une variante plus conceptuelle de cet argument, voir \cite[II. §1, prop. 2]{CL@Serre}. \subsection{Caractères additifs d'un corps local} \begin{définition2} On appelle \textbf{caractère additif} d'un corps local $K$ tout morphisme continu de groupes $ψ:K → 𝐔=\{z ∈ 𝐂:|z|=1\}$. \end{définition2} Si $K$ est ultramétrique, l'hypothèse de continuité revient à supposer le noyau de $ψ$ \emph{ouvert}. % [Bushnell-Henniart] p. 10. On note $\chap{K}$ l'ensemble des caractères additif d'un corps local $K$ ; c'est naturellement un groupe abélien. \begin{définition2} \label{niveau caractère} Soit $ψ$ un caractère d'un corps local ultramétrique $K$. On appelle \textbf{niveau} \index{niveau} de $ψ$, noté $n(ψ)$, le plus grand entier $n$ tel que $ψ(𝔪^{-n})=\{1\}$ si $ψ$ est non trivial et $+∞$ sinon. \end{définition2} Le niveau induit une filtration naturelle sur le groupe $\chap{K}$. \subsubsection{}On suppose choisie une fois pour toute une orientation sur $𝐂$, c'est-à-dire un choix fait de $i=\sqrt{-1}$ dans $𝐂$. On note alors, pour chaque $x ∈ 𝐑$, $𝐞(x)=\exp(2 π i x)=e^{2 π i x}$. % cf Weil I, §2.1 pour discussion orientation. De même, \mbox{$p>0$} étant implicitement fixé, on note $ψ_{𝐅_p}$ le caractère additif du corps fini $𝐅_p$ défini par $x ↦ 𝐞(\frac{\tilde{x}}{p})$, où $\tilde{x}$ est un relèvement quelconque de $x$ dans $𝐙$. \subsubsection{Exemples de caractères additifs des corps locaux} \label{exemples caractères additifs locaux} Soit $K=𝐐_p$ (resp. $𝐑=𝐐_∞$, resp. $𝐅_p((t))$). L'application \[𝐞_p:x ↦ 𝐞(\{ x\}_p),\] où $\{x\}_p$ désigne l'unique rationnel $r$ (nécessairement dans $𝐙[1/p]$) tel que $0 ≤ r < 1$ et $x-r ∈ 𝐙_p$ (resp. \[𝐞_∞:x ↦ 𝐞(-x),\] resp. \[𝐞_{p,t}:x ↦ ψ_{𝐅_p}(\Res_t(x dt)),\] où $\Res_t(∑_{-n}^{+∞} a_i t^i dt)=a_{-1}$) est un caractère additif du corps $K$, de niveau nul. \begin{proposition2} \label{caractère corps local} Soit $K$ un corps local. \begin{enumerate} \item Si $K$ est de caractéristique nulle et $𝐐_p$ ($p$ premier ou $p=∞$) est l'adhérence de $𝐐$ dans $K$, le caractère additif $𝐞_{K}=𝐞_p ∘ \Tr_{K \bo 𝐐_p}$ est non trivial. \item Si $K$ est de caractéristique $p>0$ de corps résiduel $k$ et $ω ∈ Ω¹_K$ est une forme différentielle non nulle, le caractère additif $𝐞_{K,ω}: x ↦ ψ_{𝐅_p}(\Tr_{k\bo 𝐅_p} ∘ \Res(x ω))$ — où $\Res$ est le résidu défini en \refext{AVD-D}{résidu forme différentielle formelle} — est non trivial. \end{enumerate} \end{proposition2} \begin{démo} (i). L'extension $K\bo 𝐐_p$ étant séparable, la trace $\Tr_{K\bo 𝐐_p}$ est surjective. Le caractère $𝐞_p$ étant non trivial, il en est de même de $𝐞_{K}$. (ii). Même argument, joint au fait (\refext{AVD-D}{non nullité du résidu}) que l'application $k$-linéaire $\Res:Ω¹_K → k$ est surjective. \end{démo} On observe ici une différence fondamentale entre la caractéristique nulle et la caractéristique positive : dans ce dernier cas, il ne semble pas y avoir de caractère privilégié. \begin{proposition2} \label{dual corps local} Soit $K$ un corps local et soit $ψ$ un caractère additif non trivial. L'application \[K → \chap{K},\] \[x ↦ \big([×x]^*ψ: y ↦ ψ(xy)\big)\] est un isomorphisme de groupes. De plus, si $ψ$ est de niveau nul, l'image de $𝒪$ est l'ensemble des caractères triviaux sur $𝒪$. \end{proposition2} \begin{démo} L'égalité $[×(x + x ′)]^*ψ=[×x]^*ψ × [×x ′]^* ψ$ résulte immédiatement du fait que $ψ$ est un morphisme de groupes. L'injectivité est alors évidente car $ψ$ est supposé non trivial ; si l'on suppose $ψ$ de niveau nul, ce qui est loisible, on peut préciser : si $x,x ′ ∈ 𝒪$ et $r ∈ 𝐍$, les restrictions de $[×x]^* ψ$ et $[× x ′]^*ψ$ à $𝔪^{-r}𝒪$ coïncident si et seulement si $x ≡ x ′ \module 𝔪^r$. Observons que pour chaque $n ≥ 0$ et chaque $x_n ∈ 𝒪$, l'ensemble des relèvements de $x_n \module 𝔪^n$ à $𝒪/𝔪^{n+1}$ peut être muni d'une structure de torseur sous le groupe additif du corps résiduel $k=𝒪/𝔪$ : si $ϖ$ est une uniformisante, et $y ∈ 𝒪/𝔪^{n+1}$ un relèvement, on fait agir $λ ∈ k$ sur $y$ par $λ ⋅ y = y + ι(λ)$, où $ι : k ⥲ 𝔪^{n+1}/𝔪^n$ est l'isomorphisme défini par le choix de $ϖ$. De même, pour chaque $n ≥ 0$ et chaque caractère additif $θ_n$ de $𝔪^{-n}$, l'ensemble des prolongements de $θ_n$ en un caractère de $𝔪^{-(n+1)}$ est naturellement un torseur sous le groupe $\chap{k}$ : on fait agir $χ ∈ \chap{k}$ sur $θ$ par $χ ⋅ θ = θ × \chap{ι}(χ)$ où $\chap{ι}: \chap{k} ⥲ \chap{𝔪^{-(n+1)}/ 𝔪^{-n}}$ est un isomorphisme. Soit maintenant $ψ ′$ un caractère additif de $k$ et montrons qu'il appartient à l'image du morphisme considéré dans l'énoncé. On peut le supposer de niveau nul. D'après ce qui précède, et le fait que $k$ et $\chap{k}$ ait même cardinal (fini), il existe pour chaque $n ≥ 0$ un élément $x_n ∈ 𝒪$, unique modulo $𝔪^n$, tel que $[× x_n]^* ψ$ et $ψ ′$ coïncident sur $𝔪^{-n}$. La suite $(x_n)$ converge dans $𝒪$ vers un élément $x$ pour lequel $[× x]^* ψ = ψ ′$, comme on le voit immédiatement par restriction aux sous-groupes $𝔪^{-n}$ ($n ≥ 1$), qui recouvrent $K$. % cf. [Bushnell-Henniart] p. 11. % voir aussi \jap{井草}, « An introduction to the theory of % local zeta functions », chap. 8. \end{démo} \begin{remarque2} L'existence d'un caractère non trivial a été établie ci-dessus ; pour une autre démonstration de ce fait, cf. \cite[8.1.1]{introduction@Igusa}. Signalons que la non-trivialité de $\chap{K}$ est également un corollaire de la dualité de Pontrâgin. \end{remarque2} \begin{proposition2} \label{niveau et différente} Soit $K$ un corps local ultramétrique de caractéristique nulle et de caractéristique résiduelle $p>0$. On a l'égalité \[ n(e_{K})=v(𝒟_{K \bo 𝐐_p}) \] entre le niveau du caractère additif non trivial $e_{K}$ défini en \ref{caractère corps local} et la valuation de la différente définie en \refext{AVD-D}{différente}. \end{proposition2} \begin{démo} Soit $y ∈ K$. Par construction, $𝐞_{K}(y⋅ x)=1$ pour tout $x ∈ 𝒪_K$ si et seulement si $\Tr_{K\bo 𝐐_p}(y 𝒪_K)⊆ 𝐙_p$ c'est-à-dire si et seulement si $y ∈ 𝒟_{K\bo 𝐐_p}$. La conclusion en résulte aussitôt. \end{démo} En caractéristique, l'interprétation du niveau de $e_{K,ω}$ est plus subtile. Voir le théorème de Riemann-Roch pour un énoncé global. \begin{proposition2} \label{niveau reste nul si extension nette} Soit $L\bo K$ une extension séparable nette de corps locaux et soit $ψ$ un caractère de $K$. Si le niveau de $ψ$ est nul, il en est de même du niveau de $ψ ∘ \Tr_{L\bo K}$. %Plus généralement, […] \end{proposition2} Pour un extension au cas global et non nécessairement net, cf. \ref{Riemann-Hurwitz}. \begin{démo} Trivial : cf. \refext{AVD-D}{}. \end{démo} \subsection{Transformation de Fourier locale} \subsubsection{Espace de Schwartz} \label{BS-local} Soit $K$ un corps local. On note $𝒮(K)$ l'ensemble des fonctions continues $f:K → 𝐂$ qui satisfont les conditions suivantes de régularité et de décroissance à l'infini. Lorsque $K$ est archimédien, on demande que $f$ soit une fonction $𝒞^∞$ de $d=[K:𝐑]$ variables réelles et que chacune de ses dérivées partielles $g$ soit à décroissante rapide : pour tout $n ∈ 𝐍$, la fonction $x ↦ |x|^n g(x)$ est bornée. Lorsque $K$ est ultramétrique, on pose $𝒮(K)=𝒞_c(K;𝐂)$ : c'est l'espace des fonctions localement constantes à support compact. Ces espaces sont appelés \textbf{espace de Schwartz} ou de \textbf{Bruhat-Schwartz}. \subsubsection{}Fixons un caractère additif non trivial $ψ$ de $K$ et convenons de noter également, pour chaque $x ∈ K$, $ψ_x$ le caractère $[×x]^*ψ:y ↦ ψ(xy)$. Dans le cas global, cette notation aura un autre sens ; cela ne devrait pas prêter à confusion. Pour toute mesure de Haar $μ^{\mbox{\minus $+$}}$ sur $K$ et toute fonction $f ∈ 𝒮(K)$, on pose : \[ ℱ_{ψ,μ^{\mbox{\minus $+$}}}(f): x ↦ ∫_K f ψ_x dμ^{\mbox{\minus $+$}}. \] \begin{remarques2} \begin{enumerate} \item Lorsque $K$ est ultramétrique, l'intégrale précédente est en fait une somme \emph{finie} \[ ∑_{λ ∈ \Im(f ψ_x)} λ ⋅ μ^{\mbox{\minus $+$}}\big( (f ψ_x)^{-1}(λ)\big),\] où $\Im(f ψ_x)$ est l'ensemble fini des valeurs de la fonction localement constante à support compact $f ψ_x$. Si \mbox{$K=𝐑$}, $ℱ_{𝐞_∞,μ₁^{\mbox{\minus $+$}}}$ est la transformation de Fourier usuelle, que nous noterons aussi $ℱ_𝐑$, % notation XXX \[ f↦ \big(x ↦ ∫_𝐑 f(t)\exp(-2 π i tx) dt\big). \] \item D'après la proposition \ref{dual corps local}, si $ψ$ est non trivial, tout caractère additif de $K$ est de la forme $ψ_x$, de sorte que l'on peut alternativement considérer la transformée de Fourier $ℱ_{ψ,μ^{\mbox{\minus $+$}}}(f)$ comme une fonction sur $\chap{K}$. \end{enumerate} \end{remarques2} \begin{proposition2} \label{Fourier et mesure locaux} \begin{enumerate} \item La transformation de Fourier $ℱ_{ψ,μ^{\mbox{\minus $+$}}}$ envoie $𝒮(K)$ dans $𝒮(K)$. \item Si $K$ est ultramétrique et $r ∈ 𝐙$, on a \[ ℱ_{ψ,μ^{\mbox{\minus $+$}}}(𝟭_{𝔪^r})=\frac{μ^{\mbox{\minus $+$}}(𝒪)}{q^r} 𝟭_{𝔪^{-(r+n(ψ))}}. \] En particulier, $ℱ_{ψ,μ^{\mbox{\minus $+$}}}(𝟭_𝒪)=μ^{\mbox{\minus $+$}}(𝒪) [× ϖ^{n(ψ)}]^* 𝟭_𝒪$. \item Pour tout $a ∈ K^×$ et toute fonction $f ∈ 𝒮(K)$, \begin{enumerate} \item $ℱ_{ψ,μ^{\mbox{\minus $+$}}}([×a]^*f)=|a|^{-1} [× a^{-1}]^*ℱ_{ψ, μ^{\mbox{\minus $+$}}}(f)$ ; \item $ℱ_{ψ,μ^{\mbox{\minus $+$}}}([+a]^*f)=ψ_{-a} ℱ_{ψ, μ^{\mbox{\minus $+$}}}(f)$, où $[+a]^*f$ désigne la fonction $y ↦ f(y+a)$ ; \item $ψ_a f$ appartient à $𝒮(K)$ et $ℱ_{ψ,μ^{\mbox{\minus $+$}}}(ψ_a f)=[+a]^* ℱ_{ψ,μ^{\mbox{\minus $+$}}}(f)$. \end{enumerate} \item Il existe une constante non nulle $c_{ψ,μ^{\mbox{\minus $+$}}}$ telle que \[ ℱ_{ψ,μ^{\mbox{\minus $+$}}} ∘ ℱ_{ψ,μ^{\mbox{\minus $+$}}} = c_{ψ,μ^{\mbox{\minus $+$}}} ⋅ [×(-1)]^*, \] où $([×(-1)]^*f)(x)=f(-x)$. \item Il existe une unique mesure de Haar, dite \textbf{auto-duale} (relativement à $ψ$), $μ^{\mbox{\minus $+$}}_ψ$ telle que $c_{ψ,μ^{\mbox{\minus $+$}}_ψ}=1$. C'est la mesure $μ^{\mbox{\minus $+$}}_ψ=q^{-½n(ψ)} μ^{\mbox{\minus $+$}}_{1}$ (resp. $|a|^{½} μ^{\mbox{\minus $+$}}_{1}$) si $K$ est ultramétrique et $ψ$ de niveau $n(ψ)$ (resp. si $K$ est archimédien et $ψ=[×a]^*𝐞_{∞,K}$). \item $μ_{ψ_a}=\sqrt{|a|} μ_ψ$. \end{enumerate} \end{proposition2} \subsubsection{} \label{dépendance Fourier local en caractère} On note $ℱ_ψ$ la transformation de Fourier « auto-duale » (relativement à $ψ$) $ℱ_{ψ,μ^{\mbox{\minus $+$}}_ψ}$. Il résulte immédiatement de (vi) que l'on a \[ ℱ_{ψ_a}(f) = |a|^{½}[×a]^*\big(ℱ_ψ(f)\big). \] \begin{démo} Si $K$ est archimédien, ces résultats sont classiques : cf. par exemple \cite[chap. VII, §6]{distributions@Schwartz} ou \cite[chap. VII, §1]{analysisI@Hormander}. La détermination des constantes se fait habituellement en utilisant pour fonction test une gaussienne\footnote{On veut montrer que $∫_𝐑 e^{-2 π i xy}e^{-πx²}dx=e^{-πy²}$. Or, le terme de gauche est une fonction $g$ de $y$ satisfaisant l'équation différentielle $g′(y)=-2πyg(y)$. On a donc $g(y)=C e^{- π y²}$, où $C=∫_𝐑 e^{-π x²}dx>0$. Enfin, par Fubini et changement de variables, on a $C²=∫_{𝐑²} e^{-π (x²+y²)}dxdy= 2π ∫_{𝐑^+} e^{-π ρ²}ρdρ=1$.}. Considérons dorénavant le cas d'un corps local $K$ ultramétrique. (ii) Pour chaque $x ∈ K$, on a \[ ℱ_{ψ,μ^{\mbox{\minus $+$}}}(𝟭_{𝔪^r})(x)=∫_{𝔪^r} ψ(xy) d μ^{\mbox{\minus $+$}}(y). \] Si $x 𝔪^r$ est contenu dans $𝔪^{n(ψ)}$, l'intégrande est constante égale à $1$ de sorte que l'intégrale vaut $μ^{\mbox{\minus $+$}}(𝔪^r)=μ^{\mbox{\minus $+$}}(𝒪)/q^r$. (Voir p. ex. \ref{module=module} pour cette dernière égalité.) Dans le cas contraire, l'intégrale est nulle. En effet, on a la généralisation suivante de \refext{Fin}{variante-orthogonalite-caracteres} : pour tout caractère continu $χ$ \emph{non trivial} sur un groupe compact $G$ (noté multiplicativement) et toute mesure de Haar $μ$ sur $G$, l'intégrale $I= ∫_G χ d μ$ est nulle. En effet, on a $I=∫_G χ(gh) d μ(h)$ pour tout $g ∈ G$ (car $\module(g)=1$) de sorte que $I=χ(g)I$ pour tout $g ∈ G$ et finalement $I=0$ car $χ ≠ 1$. On applique ce résultat à $G=𝔪^r$, $χ$ la restriction à $𝔪^r$ de $ψ_x$, et $μ=μ^{\mbox{\minus $+$}}$. (Notons que, comme signalé ci-dessus, l'intégrale considérée ici est une somme finie : on peut donc ramener le calcul du lemme d'orthogonalité pour les groupes finis sus-mentionné.) (iii) La première formule résulte de \ref{module=module}, la seconde et la troisième sont immédiates. Le fait que $𝒮(K)$ soit stable par multiplication par les caractères $ψ_a$ est un cas particulier du fait général suivant : le produit d'une fonction localement constante par une fonction localement constante à support compact est localement constante à support compact. (i) On a vu en \ref{mesures Tamagawa locales} que l'espace vectoriel $𝒮(K)$ est engendré par les fonctions caractéristiques $𝟭_{a + 𝔪^r}=[+a]^*[× ϖ^r] 𝟭_{𝒪}$, $a ∈ K, r ∈ 𝐙$. La stabilité de l'espace de Bruhat-Schwartz par la transformation de Fourier résulte immédiatement du calcul explicite (ii), de la formule (iii.b) et du fait que $𝒮(K)$ est stable par multiplication $ψ_{-a}$ (iii.c). (iv). Notons $ℱ$ pour $ℱ_{ψ,μ^{\mbox{\minus $+$}}}$. D'après ce qui précède on a les égalités : \[ \begin{array}{rcl} ℱ ℱ(𝟭_{a+𝔪^r})=ℱ(ψ_{-a} ℱ(𝟭_{𝔪^r})) & = & [-a]^*ℱℱ(𝟭_{𝔪^r}) \\ & = & [-a]^*ℱ(\frac{μ^{\mbox{\minus $+$}}(𝒪)}{q^r} 𝟭_{𝔪^{-n(ψ)-r}}) \\ & = & \frac{μ^{\mbox{\minus $+$}}(𝒪)²}{q^{-n(ψ)}}[-a]^* 𝟭_{𝔪^r} \\ & = & c_{ψ,μ^{\mbox{\minus $+$}}}[×(-1)]^* 𝟭_{a+𝔪^r}, \end{array} \] où $c_{ψ,μ^{\mbox{\minus $+$}}}=\frac{μ^{\mbox{\minus $+$}}(𝒪)²}{q^{-n(ψ)}}$ est une constante indépendante de $a$ et $r$. La conclusion en résulte par linéarité des endomorphismes $ℱ²$ et $[×(-1)]^*$. (v) D'après ce qui précède, un mesure $μ^{\mbox{\minus $+$}}$ est auto-duale relativement à un caractère additif non trivial $ψ$ si et seulement si $μ^{\mbox{\minus $+$}}(𝒪)=q^{\frac{-n(ψ)}{2}}$. L'existence et l'unicité en découle. (vi) Résulte de l'égalité $n(ψ_a)=n(ψ)+v(a)$ et de (v). \end{démo} Contrairement à $μ^{\mbox{\minus $+$}}₁$, qui est à valeurs dans $𝐙[1/q]$, $μ^{\mbox{\minus $+$}}_ψ$ est à valeurs dans $𝐙[1/ \sqrt{q}]$ si le niveau de $ψ$ est impair. \begin{exemple2} \label{exemple Fourier et Gauss} Supposons $K=𝐐_p$ et fixons un caractère $χ: (𝐙/p)^× → 𝐂^×$. Soit $f_χ$ l'unique fonction sur $𝐐_p$ à support dans $𝐙_p$ telle que pour chaque $x ∈ 𝐙_p$, on ait $f_χ(x)=χ(x \module p)$, où l'on identifie naturellement le quotient $𝐙_p/p 𝐙_p$ à $𝐙/p𝐙=𝐅_p$ et on étend $χ$ à $𝐅_p$ en la prolongeant par zéro. On constate que $f_χ$ est localement constante et que l'on a l'égalité \[ ℱ_{𝐞_p}(f_χ)=\frac{G(χ)}{p} [×p]^* f_{\sur{χ}}, \] où $G(χ)$ est la somme de Gauß \[ ∑_{x ∈ 𝐅_p} χ(x) \exp(2 π i \frac{x}{p}). \] Voir \cite[F.2]{Elements@Colmez} et \ref{facteur epsilon ultramétrique}, \emph{infra}. \end{exemple2} %Cas géométrique : il résulte du théorème qu'il existe $ψ$ tel que $μ_ψ(𝒪)=1$ %(caractère de niveau nul) et que $ψ$ est bien défini à multiplication %près par une unité. Abordons maintenant la théorie multiplicative. \subsection{Quasi-caractères multiplicatifs d'un corps local} \subsubsection{Structure de $K^×$} \label{structure de Kétoile} Soit $K$ un corps local. S'il est ultramétrique, on fixe une uniformisante $ϖ$. Tout élément $x ∈ K^×$ peut s'écrire de façon unique \[ x=x₁ ρ, \] où $x₁$ appartient au groupe \emph{compact} $𝒰=\{y ∈ K^×:|y|=1\}$, et $ρ>0$ si $K$ est archimédien ou $ρ ∈ ϖ^𝐙$ si $K$ est ultramétrique. De plus, $x ↦ x₁$ est un épimorphisme continu, qui coïncide avec l'identité sur $𝒰$. Ainsi, le groupe topologique $K^×$ est isomorphe au produit direct $𝒰 × K^×_{>0}$, où l'on note $K^×_{>0}$ le sous-groupe $𝐑^×_{>0}$ (resp $ϖ^𝐙$) de $K^×$. (Notons que dans le cas ultramétrique $K^×_{>0}$ est isomorphe au groupe $𝐙$ et $𝒰$ égal à $𝒪^×$.) \begin{définition2} \label{quasi-caractère} On appelle \textbf{quasi-caractère} (resp. caractère) multiplicatif d'un corps local $K$ tout morphisme continu de groupes $ χ : K^× → 𝐂^×$ (resp. $χ: K^× → 𝐔=\{z ∈ 𝐂^×: |z|=1\}$). Un quasi-caractère est dit \textbf{non ramifié} ou \textbf{net} s'il est trivial sur le sous-groupe compact $𝒰=\{y ∈ K^×: |y|=1\}$ de $K^×$. \end{définition2} Un caractère multiplicatif est un quasi-caractère \emph{borné}. (Si $K^×$ était compact, tout quasi-caractère serait un caractère.) \subsubsection{} \label{définition conducteur} Supposons $K$ ultramétrique. Les sous-groupes $1+𝔪^n$ de $𝒰$ forment un système fondamental de voisinages (compacts ouverts) de l'unité. Tout quasi-caractère multiplicatif $χ$ de $K$ est donc trivial sur l'un d'entre eux. On appelle \textbf{conducteur} de $χ$, noté $a(χ)$, le plus petit entier $n ≥ 0$ tel que $χ(1+𝔪^n)=\{1\}$, où l'on fait la convention d'écriture que $1+𝔪⁰=𝒪^×$. En particulier, un quasi-caractère multiplicatif d'un corps local ultramétrique est net si et seulement si il est de conducteur nul. Traditionnellement, on note aussi $𝔣_χ$ l'\textbf{idéal conducteur} $𝔪^{a(χ)}$ d'un quasi-caractère $χ$. \subsubsection{} \label{notation omega-s et remarque sur caractères} Pour tout nombre complexe $s$, la fonction $ω_s: K^× → 𝐂^×$, $x ↦ |x|^s$ est un quasi-caractère multiplicatif net. On a $ω_s=ω₁^{s}$, où $ω₁:x ↦ |x|$ est à valeurs dans $𝐑^×_+$. Le quasi-caractère $ω_s$ est un \emph{caractère} si et seulement si $s ∈ 𝐑$. \begin{proposition2} \label{description quasi-caractères} Tout quasi-caractère multiplicatif $χ$ d'un corps local est de la forme $χ₁ ω_s : x ↦ χ₁(x₁) ω_s(x)$, où $χ₁$ est un caractère de $𝒰$ et $s$ est un nombre complexe bien défini modulo $2πi /\!\log(q)$ (resp. unique) si $K$ est ultramétrique (resp. archimédien). Si $K$ est archimédien, le caractère $χ₁$ est de la forme $u ↦ u^{-a}$, pour un unique entier $a$ appartenant à $𝐙$ si $K=𝐂$ et à $\{0,1\}$ si $K=𝐑$. Si $K$ est ultramétrique, le caractère $χ₁$ se factorise de façon unique à travers un caractère du groupe fini $𝒰/(1+𝔣_χ)$, où $𝔣_χ$ est l'idéal conducteur de $χ$. \end{proposition2} Si $K$ est archimédien, l'entier $a$ tel que $χ₁=(u ↦ u^{-a})$ est appelé \emph{conducteur} de $χ$. Les quasi-caractères $ω_s$ sont de conducteur nul, aussi bien dans le cas ultramétrique qu'archimédien. Si $K$ est réel, le quasi-caractère $x↦ x^{-1}$ n'est autre que $\mathtextrm{sgn} ⋅ ω_{-1}$, où $\mathtextrm{sgn}(x) ∈ \{±1\}$ est le signe du réel non nul $x$. \begin{démo} Soit $χ$ comme dans l'énoncé. Posons $χ₁=χ_{|𝒰}$ ; c'est un caractère de $𝒰$ et, par construction, le quasi-caractère multiplicatif $x ↦ χ(x) χ₁(x₁)^{-1}$ est net. Il suffit donc de démontrer que tout quasi-caractère net $χ$ est de la forme $ω_s$. Par définition, $χ$ se factorise à travers le quotient $K^× ↠ K^×_{>0}$. Si $K$ est ultramétrique, ce dernier groupe est isomorphe à $𝐙$ et $χ=ω_s$ dès lors que le nombre complexe non nul $χ(ϖ)$ est égal à $|ϖ|^s=q^{-s}$. Si $K$ est archimédien, il faut vérifier que tout morphisme continu $f:𝐑^×_{>0} → 𝐂^×$ est de la forme $ρ ↦ ρ^s$ pour un unique $s ∈ 𝐂$. Si $f$ est à valeurs réelles positives (resp. de module unité) cela résulte par passage au logarithme du fait que toute fonction additive continue $𝐑 → 𝐑$ (resp. $𝐑 → 𝐑/𝐙$) est une homothétie (resp. se relève en une homothétie). Le cas général en résulte par un dévissage immédiat. % références ? \end{démo} \begin{lemme2} \label{quasi-caractères Rplusétoile} Les quasi-caractères de $𝐑_{>0}$ sont de la forme $t↦ t^s$, pour un unique $s ∈ 𝐂$. \end{lemme2} \begin{lemme2} \label{quasi-caractères Z} Soit $r>0$. Les quasi-caractères de $r^𝐙$ sont de la forme $t↦ t^s$, où $s ∈ 𝐂$ est bien défini modulo $2 π i / \log(r)$. \end{lemme2} \begin{définition2} \label{partie réelle quasi-caractère local} Soit $χ=χ₁ ω_s$ un quasi-caractère multiplicatif d'un corps local. Le nombre réel $\Re(s)$ est appelé \textbf{partie réelle} de $χ$, noté $\Re(χ)$. \end{définition2} \subsubsection{} \label{notation quasi-caractère dual} À tout quasi-caractère $χ$, on associe le quasi-caractère $\chap{χ}=χ^{-1} ω₁$. On a $\Re(\chap{χ})=1-\Re(χ)$. \subsection{Transformation de Mellin}\footnote{Nous conseillons au lecteur d'omettre cette section en première lecture. Elle n'est pas utile avant la démonstration des résultats énoncés en \ref{énoncé équation fonctionnelle zêta}.} \subsubsection{Transformation de Mellin réelle : généralités} \label{transformation Mellin réelle} Afin de motiver les considérations qui vont suivre, nous esquissons ci-dessous la définition de la transformation de Mellin usuelle et son application à l'étude de la fonction zêta. Pour de plus amples développements, incluant la formule d'inversion, voir par exemple \cite[§1.5]{Fourier@Titchmarsh}. Soit $f : ]0,+∞[ → 𝐑$ une fonction, disons continue. Si $f$ n'est pas trop singulière en $0$, par exemple si c'est un $O(t^{A})$, la fonction \[ ζ_{≤1}(f,s)=∫₀¹ f(t)t^{s} \frac{dt}{t} \] est holomorphe sur $\Re(s)>-A$. Lorsque $f(t) ∼ ∑_{k ≥ 0} a_k t^{α_k}$ en $0$\footnote{Cette notation signifie que pour chaque entier $n ≥ 1$, on a $f(t)-∑^{n-1}_{k ≥ 0} a_k t^{α_k} = O(t^{α_n})$.} — où la suite $(α_k)$ des exposants est strictement croissante et tend vers $+∞$ — on peut pour chaque $n$ écrire \[ ζ_{≤ 1}(f,s)= ∫₀¹(f(t)-∑^{n-1}_{k ≥ 0} a_k t^{α_k}) t^{s} \frac{dt}{t} + ∑_{k=0}^{n-1} \frac{a_k}{α_k + s}, \] où le premier terme est, d'après ce qui précède, holomorphe sur $\Re(s)>-α_n$. Il en résulte que $ζ_{≤ 1}(f)$ se prolonge en une fonction méromorphe sur $𝐂$ à pôles simples en chaque $-α_k$, de résidu $a_k$. On peut bien entendu procéder en même en l'infini et poser \[ ζ_{ ≥ 1}(f,s)= ∫₁^{+∞} f(t)t^{s} \frac{dt}{t}. \] Lorsque les deux fonctions $ζ_{≤ 1}(f)$ et $ζ_{≥1}(f)$ se prolongent en des fonctions méromorphes sur un domaine commun, on définit la \textbf{transformée de Mellin} \index{transformée de Mellin} de $f$ comme la fonction \[ ζ(f,s)=ζ_{≤ 1}(f,s) + ζ_{ ≥ 1}(f,s) = \text{« } ∫₀^{+∞} f(t)t^{s} \frac{dt}{t} \text{ »}. \] \begin{remarque2} Comme on l'a vu en \ref{notation omega-s et remarque sur caractères}, les caractères du groupe topologique localement compact $G=𝐑^×_+$ ne sont autres que les $t↦ t^{s}$ pour $s$ imaginaire pur. D'autre part, la mesure $\frac{dt}{t}$ est une mesure de Haar sur $G$ (voir \ref{sorites mesures multiplicatives locales}). Ainsi, la transformation de Mellin, du moins restreinte à des droites verticales de $𝐂$, peut être vue comme un cas particulier de transformation de Fourier générale (cf. p. ex., \cite[\textbf{TS}, II, §1, nº2]{Bourbaki} ou \cite[chap. VII]{introduction@Katznelson}. Notons également que ce lien est également visible en faisant le changement de variable $t=e^x$, qui échange transformation de Mellin et transformation de Fourier sur $𝐑$. %Dym, McKean, « Fourier… », § 2.6 p. 103 \end{remarque2} \subsubsection{Exemple} \label{exemple Mellin réel} Si $λ$ est un réel strictement positif, on a $ζ(t↦ e^{-λt},s)=Γ(s) λ^{-s}$, fonction méromorphe sur $𝐂$, où \[ Γ(s)= ∫_0^{+∞} e^{-t} t^{s-1} dt\] est la fonction Gamma usuelle. Cette formule est également valable lorsque $λ=0$ : on a $ζ(𝟭)=0$, où $𝟭$ désigne ici la fonction constante égale à $1$. En effet, on a $ζ_{≤ 1}(𝟭,s)=\frac{1}{s}$ et $ζ_{≥1}(𝟭,s)=-\frac{1}{s}$. (Notons cependant que l'intégrale $∫₀^{+∞} t^{s} \frac{dt}{t}$ ne converge pour aucune valeur de $s$.) On en déduit d'une part que la transformée de Mellin de \[ β(t)=∑_{k ≥ 0} e^{-kt}= \frac{1}{e^t-1}=∑_{k ≥ 1} \frac{B_k}{k!} t^{k-1}, \] où la seconde égalité n'est autre que la définition des nombres de Bernoulli, est la fonction $Γζ$ et celle de \[ ψ(t)=∑_{k ≥ 1} e^{-π k² t} \] la fonction $π^{-s} Γ(s) ζ(2s)$. (Les notations $β$ et $ψ$ ne sont pas standards.) %% standard ? \subsubsection{} \label{équation-fonctionnelle-thêta} Notons que la fonction $Γ ζ$ n'est \emph{a priori} définie que sur le demi-plan $\Re(s)>1$, mais s'étend d'après ce qui précède en une fonction méromorphe sur $𝐂$, ayant des pôles simples de résidus explicites. Observons que la fonction Gamma a pour uniques pôles (simples) les entiers négatifs, comme il résulte immédiatement de l'identité $Γ(s+1)=s Γ(s)$ ($\Re(s)>0$) et que $Γ(1)=1$. Ceci permet de calculer le résidu en $s=1$ de $ζ$ et la valeur de cette fonction en les entiers négatifs ou nuls (cf. \ref{propriétés zêta Euler-Riemann} \emph{infra}). D'autre part, il résulte de la formule de Poisson \[ ∑_{n ∈ 𝐙} f(n) = ∑_{n ∈ 𝐙} \chap{f}(n) \] appliquée à $f(x)=e^{- π t x²}$ que $θ(t)=\frac{1}{\sqrt{t}} θ(\frac{1}{t})$ où $θ(t)=𝟭+2 ψ(t)=∑_{n ∈ 𝐙} e^{-π n² t}$. En appliquant la transformation de Mellin à cette équation fonctionnelle (due à Jacobi), on trouve immédiatement $ζ(θ,s)=ζ(θ,½-s)$ et de même pour $ψ$ car $ζ(𝟭)=0$. On a donc démontré le théorème suivant, dont l'énoncé et la démonstration forment un prototype des résultats que nous souhaitons démontrer dans ce chapitre. % Très classique. Référence utilisée : Zagier, « The Mellin % … ». \begin{théorème2} \label{propriétés zêta Euler-Riemann} La fonction zêta \[ ζ(s)=∑_{n} n^{-s} \] s'étend en une fonction méromorphe sur $𝐂$ ayant un unique pôle, simple de résidu $1$, en $s=1$ et pour chaque $n ≥ 0$, on a \[ ζ(-n) = (-1)^n \frac{B_{n+1}}{n+1}. \] De plus, la fonction $\sur{ζ}(s)=ζ(s) π^{-s/2} Γ(s/2)$ satisfait l'équation fonctionnelle \[ \sur{ζ}(s)=\sur{ζ}(1-s). \] \end{théorème2} En particulier $ζ(-1)=\text{« }1+2+3+4+5+\cdots\text{»}=-\frac{1}{12}$ car $B₂=⅙$. \begin{remarque2} Certains auteurs considèrent plutôt $M(f,s)=Γ(s)^{-1}ζ(f,s)$ (cf. \cite[VII.2]{Elements@Colmez}). Supposons que $f$ n'a pas de singularités : elle est $𝒞^∞$ sur $𝐑_+$ (c'est-à-dire restriction d'une fonction $𝒞^∞$ sur un ouvert $]-ε,+∞[$, pour un $ε>0$) et à décroissance rapide à l'infini, ainsi que toutes ses dérivées. Dans ce cas, la fonction holomorphe $M(f,s)$, définie \emph{a priori} sur le demi-plan $\Re(s)>0$, se prolonge en une fonction holomorphe sur $𝐂$ en vertu de l'égalité \[ M(f,s)=- M(f′,s+1), \] obtenue par intégration par partie. On en déduit que $M(f,0)=-M(f′,1)=-∫₀^{+∞} f′=f′(0)$ et, plus généralement, les égalités \[ M(f,-k)=(-1)^k f^{(k)}(0) \] pour chaque $k ∈ 𝐍$. Hormis l'équation fonctionnelle, on retrouve les résultats du théorème précédent en constatant que $β(t)=\frac{1}{t}f(t)$, où $f(t)=\frac{t}{e^t-1}=∑_n \frac{B_n}{n!}t^n$, si bien que la fonction zêta de Riemann $ζ(s)=ζ(β,s)=ζ(f,s-1)$ coïncide avec le produit $Γ(s-1)M(f,s-1)$. \end{remarque2} \begin{remarque2} Signalons un argument élémentaire conduisant à l'existence d'un pôle simple en $s=1$ de la fonction zêta. Soit en effet, \[ ζ^⋆(s):=(1-2 ⋅ 2^{-s})ζ(s), \] aussi notée parfois $η(s)$ (« fonction éta de Dirichlet »). Pour chaque réel $s>1$, on a l'égalité \[ ζ^⋆(s)=∑_n n^{-s} -2 ∑_n 2^{-s} n^{-s}=-∑_n (-1)^n n^{-s} : \] c'est la \emph{fonction zêta alternée}. Le terme de droite étant convergeant dès que $s>0$ (série alternée), on peut étendre $ζ^⋆$ à $𝐑_{>0}$ et l'on a $ζ^⋆(1)=\log(2)$. On en déduit que la fonction zêta de Riemann a un pôle simple en $s=1$ et se prolonge à $\{s:s>0\}$. \end{remarque2} \begin{exercice2} Montrer, à la manière d'Euler, que $ζ^⋆(0)=\frac{1}{1+x}|_{x=1}$ (resp. $ζ^⋆(-1)=\frac{d}{dx}(\frac{x}{1+x})|_{x=1}$) et en déduire une autre démonstration des formules \[ ζ(0)=-½ \] et \[ ζ(-1)=-\frac{1}{12}. \] Pour une présentation moderne de la « démonstration » d'Euler de l'équation fonctionnelle, cf. \cite[II.2.3]{Divergent@Hardy}. \end{exercice2} % cf. aussi exposé de Gross à Orsay (SAGA). \subsubsection{Mesures multiplicatives} \label{sorites mesures multiplicatives locales} Soit $μ^{\mbox{\minus $+$}}$ une mesure de Haar additive sur un corps local $K$. Rappelons que l'on note $q$ le cardinal du corps résiduel lorsque $K$ est ultramétrique ; convenons ici de poser $q=∞$ si $K$ est archimédien. La mesure sur $K^×$ définie par \[ μ^{\mbox{\minus $×$}}=\frac{(1-q^{-1})^{-1}}{| ⋅ |} ⋅ μ^{\mbox{\minus $+$}}_{|K^×}, \] où l'on convient que $∞^{-1}=0$, est une mesure de Haar (cf. §\ref{généralités sur mesures}) : si $f ∈ 𝒞_c(K^×,𝐂)$, la fonction $f ω_{-1}$, ou plutôt son prolongement $\gtilde{f ω_{-1}}$ par $0$ en zéro, appartient à $𝒞_c(K,𝐂)$ et la forme linéaire \[ f ↦ \frac{1}{1-q^{-1}} μ^{\mbox{\minus $+$}}(\gtilde{f ω_{-1}})= \frac{1}{1-q^{-1}} ∫_{K-\{0\}} f(x)|x|^{-1} d μ^{\mbox{\minus $+$}}(x) \] est une mesure de Radon positive, invariante par multiplication (cf. \ref{module=module}). On note $μ^{\mbox{\minus $×$}}₁$ la mesure de Haar multiplicative associée à la mesure de Tamagawa $μ^{\mbox{\minus $+$}}₁$ (\ref{mesures Tamagawa locales}). \begin{proposition2} Si $K$ est ultramétrique, on a l'égalité \[ μ^{\mbox{\minus $×$}}(𝒪^×)= μ^{\mbox{\minus $+$}}(𝒪). \] En particulier, $μ^{\mbox{\minus $×$}}₁(𝒪^×)=1$. \end{proposition2} \begin{démo} En effet, le terme de gauche est, par construction, égal à $\frac{1}{1-q^{-1}} μ^{\mbox{\minus $+$}}(𝒪^×)$. Or, $𝒪^×$ est extension du groupe $k^×$ (de cardinal $q-1$) par le groupe $1+𝔪=1+ϖ 𝒪$. On a donc $μ^{\mbox{\minus $+$}}(𝒪^×)=(q-1) μ^{\mbox{\minus $+$}}(1+𝔪)$. D'autre part, $μ^{\mbox{\minus $+$}}(1+𝔪)=μ^{\mbox{\minus $+$}}(𝔪)=q^{-1} μ^{\mbox{\minus $+$}}(𝒪)$, où la dernière égalité résulte de \ref{module=module}. \end{démo} \subsubsection{Fonction zêta locale : définition} \label{fonction zêta locale} Soit $χ$ un quasi-caractère multiplicatif d'un corps local $K$ et soit $ψ$ un caractère additif de $K$. Pour toute fonction $f$ sur $K$ telle que $f_{|K^×} ⋅ χ$ soit intégrable, on pose : \[ ζ_ψ(f,χ)= ∫_{K^×} f χ  dμ^{\mbox{\minus $×$}}_{ψ}, \] où l'on rappelle que la mesure $μ^{\mbox{\minus $×$}}_{ψ}$ n'est autre que la mesure de Haar associée (selon le procédé expliqué en \ref{sorites mesures multiplicatives locales}) à la mesure additive $μ^{\mbox{\minus $+$}}_ψ$ auto-duale relativement à $ψ$ (\ref{Fourier et mesure locaux}, (v)). La dépendance en $ψ$ est triviale : si $ψ ′$ est un autre caractère additif non trivial, il existe une constante non nulle $c∈ 𝐑^×_{>0}$ telle que $ζ_{ψ ′}= c ζ_ψ$ ; si les niveaux $n(ψ)$ et $n(ψ ′)$ sont égaux, $c=1$ (cf. \emph{loc. cit.}). Si $ψ$ est de niveau nul, c'est-à-dire si $μ^{\mbox{\minus $×$}}_ψ=μ^{\mbox{\minus$×$}}₁$, nous nous autorisons à l'omettre des notations. Pour étudier la dépendance en $χ$ dans les familles $χ ω_s$ de ces transformées de Mellin, appelées fonctions zêta, on introduit la notation : \[ ζ_ψ(f,χ,s)=ζ_ψ(f,χ ω_s). \] (On a alors $ζ_ψ(f,χ)=ζ_ψ(f,χ,0)$.) \begin{remarque2} \label{quasi-caractères=variété} Plutôt que de fixer $χ$ et introduire la variable complexe $s$ on pourrait — à l'aide de la proposition \ref{description quasi-caractères} — munir l'espace des quasi-caractères d'une structure de variété analytique (cf. p. ex. \cite[§2.1]{Weil2@Deligne}, \cite[VII.§3]{BNT@Weil}). \end{remarque2} \subsubsection{Cas archimédien réel : interprétation} \label{fonction zêta archimédienne} Si $K=𝐑$ et $ψ=𝐞_∞$ (\ref{exemples caractères additifs locaux}), la mesure $μ^{\mbox{\minus $×$}}_{ψ}$ est la mesure de Lebesgue usuelle (cf. \ref{Fourier et mesure locaux}) et l'on a : \[ ζ_{𝐞_∞}(f,1,s)=ζ(f,s), \] où le terme de droite est la transformée de Mellin réelle de $f$ considérée en \ref{transformation Mellin réelle} et $1$ désigne le caractère multiplicatif trivial. \subsubsection{Cas archimédien : calculs} \label{Mellin local archimédien} Supposons maintenant le corps local $K$ archimédien quelconque. Les gaussiennes \[ g_𝐑(x)=\exp(- π xx) ∈ 𝒮(𝐑) \] et \[ g_𝐂(z)=\frac{1}{π} \exp(- 2 π z \sur{z}) ∈ 𝒮(𝐂), \] jouent un rôle semblable à celui de la fonction $𝟭_𝒪$ dans le cas ultramétrique. Pour chaque nombre complexe $s$ de partie réelle strictement positive, on a \[ ζ_𝐑(s):=ζ(g_𝐑,1,s)=π^{-½s}Γ(½s) \] et \[ ζ_𝐂(s):=ζ(g_𝐂,1,s)=2(2 π)^{-s} Γ(s). \] Pour démontrer ces formules, il suffit d'effectuer le changement de variable $x=\sqrt{r}$ dans le cas réel\footnote{Explicitement : \[ ζ_𝐑(s):=∫_{𝐑^×} e^{-π x²} x^s \frac{dx}{x}= ∫₀^{+∞} e^{-π r} r^{s/2} \frac{dr}{r}. \]} ou $x=\sqrt{r} e^{i θ}$ dans le cas complexe\footnote{Explicitement : \[ ζ_𝐂(s) :=\frac{1}{π}∫_{𝐂^×} e^{-2 π z \sur{z}} |z|_𝐂^s \frac{2dxdy}{|z|_𝐂} =\frac{1}{π} ∫_{𝐑^× × [0, 2 π[} e^{-2 π r} r^s \frac{dr}{r} dθ =2 (2 π)^{-s} ∫_{𝐑^×} e^{-u} u^s \frac{du}{u}. \]}. À une constante multiplicative près dépendant des auteurs, ces fonctions zêta locales sont appelées « facteurs Gamma » et classiquement notés $Γ_𝐑$ et $Γ_𝐂$. On suit ici le choix de P. Deligne (\cite[§3.2]{constantes@Deligne}) ; voir aussi \cite[§3.1]{NTB@Tate}. Pour une variante, voir par exemple \cite{Facteurs@Serre}. Notons qu'avec notre convention, on a la \emph{formule de duplication} : \[ ζ_𝐂(s)=ζ_𝐑(s)ζ_𝐑(s+1). \] (Cf. P. Deligne, \emph{op. cit.}, prop. 3.8 pour une interprétation.) % attribuée à Legendre par Neukirch. \subsubsection{Cas ultramétrique : réécriture} \label{Mellin et Z} Supposons maintenant $K$ ultramétrique et considérons pour chaque $n ∈ 𝐙$ le translaté $𝒰_n$ du groupe des unités $𝒰=𝒪^×$ par $ϖ^n$ : \[ 𝒰_n=\{x ∈ K^×:|x|=q^{-n}\}=\{x ∈ K^×:v(x)=n\}. \] La restriction de $f$ au \emph{compact} $𝒰_n$ est localement constante donc intégrable et l'on pose \[ z_ψ(f,χ)_n=∫_{𝒰_n} f χ  dμ^{\mbox{\minus $×$}}_ψ \] Pour $n ≪ 0$, $𝒰_n$ ne rencontre par le support de $f ∈ 𝒞_c(K)$ ; ce coefficient est alors nul. On peut donc définir la série de Laurent formelle \[ Z_ψ(f,χ,X)=∑_{n ∈ 𝐙} z_ψ(f,χ)_n X^n ∈ 𝐂((X)). \] Soit $ρ_{f,χ} ≥ 0$ le rayon de convergence de la série $Z_ψ(f,χ,X)$. Le quasi-caractère $ω_s$ étant constant de valeur $q^{-ns}$ sur $𝒰_n$, l'intégrale $ζ_ψ(f,χ,s)$ est absolument convergente et holomorphe sur le domaine $\Re(s)> -\log_q(ρ_{f,χ})$ et l'on a \[ ζ_ψ(f,χ,s)=Z_ψ(f,χ,q^{-s}). \] \subsubsection{Cas ultramétrique : calculs} \label{calcul explicite intégrale quasi-caractère} Toute fonction dans $𝒮(K)$, où $K$ est local ultramétrique, étant combinaison linéaire de fonctions caractéristiques $f=𝟭_{x+𝔪^e}$ ($x ∈ K, e ∈ 𝐙$), le calcul de fonctions zêta locales ultramétriques se ramène au calcul des séries $Z(𝟭_{x+𝔪^e},χ,X)$, relativement à un caractère additif que l'on peut supposer de niveau nul. Nous allons distinguer les deux cas $x ∈ 𝔪^e$, c'est-à-dire $x+𝔪^e=𝔪^e$, et $x ∉ 𝔪^e$, c'est-à-dire $f(0)=0$. Il est immédiat que $z(𝟭_{𝔪^e},χ)_n$ vaut $χ(ϖ)^n ⋅ ∫_𝒰 χ₁  dμ^{\mbox{\minus $×$}}₁$ si $n ≥ e$ et est nul sinon. (On rappelle que $χ₁$ est la restriction à $𝒰$ de $χ$.) D'autre part, il résulte de l'orthogonalité des caractères et de l'égalité $μ^{\mbox{\minus $×$}}₁(𝒰)=1$ que l'intégrale $∫_𝒰 χ₁  dμ^{\mbox{\minus $×$}}₁$ vaut $1$ si $χ₁$ est trivial, c'est-à-dire si $χ$ est net, et $0$ sinon. Ainsi, \[ Z(𝟭_{𝔪^e},χ,X)= \begin{cases} \displaystyle \frac{χ(ϖ)^e}{1-χ(ϖ)X} & \text{si $χ$ est net}\\ \displaystyle 0 & \text{sinon}. \end{cases} \] Dans le premier cas, le rayon de convergence de $Z(𝟭_{𝔪^e},χ,X)$ est $|χ(ϖ)|^{-1}=q^{-\Re(χ)}$. Considérons maintenant le second cas : l'élément $x$ de $K$ n'appartenant pas à $𝔪^e$, c'est-à-dire tel que $r=v(x)-\Re(χ)$. Si de plus $f$ est nulle au voisinage de $0$, l'intégrale est absolument convergente et holomorphe sur $𝐂$. \item Pour toute fonction $f ∈ 𝒮(K)$, la fonction $ζ_ψ(f,χ,s)$ admet un prolongement méromorphe à $𝐂$. \item Il existe une fonction méromorphe non nulle $s ↦ γ_ψ(χ,s)$ telle que, pour toute fonction $f ∈ 𝒮(K)$, l'équation fonctionnelle suivante soit satisfaite : \[ γ_ψ(χ,s)ζ_ψ(f,χ,s)=ζ_ψ(ℱ_ψ(f),\chap{χ},-s). \] \end{enumerate} \end{théorème2} Rappelons (\ref{notation quasi-caractère dual}) que $\chap{χ}=χ^{-1} ω₁$ est de partie réelle $1-\Re(χ)$. On a a trivialement \[ ζ_ψ(ℱ_ψ(f),\chap{χ},s)=ζ_ψ(ℱ_ψ(f),χ^{-1},1-s). \] La démonstration du théorème occupe les trois paragraphes suivants. Pour l'analogue global, cf. \ref{pôles et équation fonctionnelle Iwasawa-Tate}. \subsubsection{} Si $K$ est ultramétrique, il résulte des calculs effectués en \ref{calcul explicite intégrale quasi-caractère} que $ζ_ψ(f,χ,s)=Z_ψ(f,χ,q^{-s})$ où $Z_ψ(f,χ,X)$ est une fraction rationnelle dont l'ensemble des pôles est inclus dans $\{0,χ(ϖ)^{-1}\}$. Les résultats (i) et (ii) sont alors évidents. (L'holomorphie sur $𝐂$ lorsque $f(0)=0$ a déjà été constatée.) Démontrons (i) dans le cas archimédien. L'intégrabilité de la fonction sur l'ouvert $|x|>1$ résulte immédiatement du fait que $f$ est à décroissance rapide en l'infini. Pour démontrer l'intégrabilité sur le fermé $|x| ≤ 1$, on se ramène à la convergence de l'intégrale \[ ∫_{|x|<1} ω_σ  dμ^{\mbox{\minus $×$}} \] pour chaque $σ ∈ 𝐑^×_{>0}$. Si $K=𝐑$, cette convergence est classique ; le cas $K=𝐂$ s'y ramène en utilisant des coordonnées polaires. (Si $f$ est nulle au voisinage de l'origine, on a convergence pour tout $s$.) L'holomorphie résulte d'un théorème classique de dérivation sous le signe somme (cf. p. ex. \cite[V.2.20]{Elements@Colmez}). Nous verrons ci-après que l'équation fonctionnelle et (i) entraînent formellement l'existence d'un prolongement méromorphe des fonctions zêta. %Il résulte de (i) que l'équation fonctionnelle %entraîne l'existence d'un prolongement méromorphe. %En effet, la fonction $ζ_ψ(χ,f,s)$ est holomorphe sur le demi-plan $\Re(s)>-\Re(χ)$ %et égale sur la bande $-\Re(χ)<\Re(s)<1-\Re(χ)$ à la %restriction de la fonction $γ_ψ(χ,s)^{-1}ζ_ψ(ℱ_ψ(f),\chap{χ},-s)$, %méromorphe sur le demi-plan $\{s:\Re(-s)>-\Re(\chap{χ})\}= %\{s:\Re(s)<1-\Re(χ)\}$ d'après (i) et la non nullité du %facteur $γ$. \subsubsection{}Pour démontrer l'équation fonctionnelle, nous allons commencer par établir une formule de « $ζ$-Plancherel ». Supposons $0<\Re(χ)<1$ et considérons deux fonctions $f,g ∈ 𝒮(K)$. Alors, on a l'égalité : \[ ζ(f,χ)ζ(\chap{g},\chap{χ})=ζ(\chap{f},\chap{χ})ζ(g,χ), \] où l'on note pour simplifier— et ce jusqu'à la fin de la démonstration — $ζ$ (resp. $\chap{f}$, etc.) pour $ζ_ψ$ (resp. $ℱ_ψ(f)$, etc.). En effet, le terme de gauche se réécrit \[ ∫_{K^× × K^×} f(x)\chap{g}(y)χ(x y^{-1}) |y|  d {μ^{\mbox{\minus $×$}}}^{⊠2}. \] On peut voir cette égalité comme un cas particulier, mais crucial, du théorème de Fubini appliqué à une fonction de deux variables séparées, c'est-à-dire de la forme $(x,y)↦ (φ₁ ⊠ φ₂)(x,y)=φ₁(x)φ₂(y)$. On effectue le changement de variables $(x,y) ↦ (x,xy)$ ; il préserve la mesure de Haar produit ${μ^{\mbox{\minus $×$}}}^{⊠2}$. Il résulte alors du théorème de Fubini que l'on a : \[ ζ(f,χ)ζ(\chap{g},\chap{χ})=∫_{K^×}h_{f,g}(y)χ(y^{-1})|y| d μ^{\mbox{\minus $×$}}(y) \] où \[ h_{f,g}(y)= ∫_{K^×} f(x)\chap{g}(xy)|x| d μ^{\mbox{\minus $×$}}(x)=(\text{constante } ≠ 0) ⋅ ∫_{K} f(x)\Big(∫_K g(z) ψ(xyz)  d μ^{\mbox{\minus$+$}}(z)\Big)  d μ^{\mbox{\minus$+$}}(x). \] La seconde égalité résulte de la définition de la transformation de Fourier et \ref{sorites mesures multiplicatives locales}. Enfin, une seconde application du théorème de Fubini donne \[ h_{f,g}(y)=(\text{constante } ≠ 0) ⋅ ∫_{K^× × K^×} f(x) g(z) ψ(xyz) dμ^{\mbox{\minus$+$}}(x) d μ^{\mbox{\minus$+$}}(z) = h_{g,f}(y). \] L'expression $ζ(f,χ)ζ(\chap{g},\chap{χ})$ étant symétrique en $f$ et $g$, elle est nécessairement égale à $ζ(\chap{f},\chap{χ})ζ(g,χ)$. \subsubsection{}Supposons dorénavant $\Re(χ)=½$, comme il est loisible de le faire. Il existe une fonction $g ∈ 𝒮(K)$ à support contenu dans une boule fermé centrée en $1$ ne contenant pas l'origine telle que $ζ(g,χ) ≠ 0$. En effet, l'égalité $χ(1)=1$ entraîne l'existence d'un voisinage $V$ de $1 ∈ K^×$ sur lequel la partie réelle des nombres complexes $χ(x)$, $x ∈ V$, est strictement positive ; la conclusion en résulte aussitôt. La fonction $ζ(g,χ,s)$ est donc holomorphe, non identiquement nulle. Considérons la fonction méromorphe sur $\{s:\Re(s)<½\}$ : \[ γ(χ,s)=\frac{ζ(\chap{g},\chap{χ},-s)}{ζ(g,χ,s)}. \] D'après la formule de $ζ$-Plancherel, on a l'égalité \[ ζ(f,χ,s)= γ(χ,s)^{-1} ζ(\chap{f},\chap{χ},-s), \] pour toute fonction $f ∈ 𝒮(K)$ et tout nombre complexe $s$ tel que $|s|<½$. (Cette égalité est à considérer dans le corps des fonctions méromorphes sur cet ouvert.) Le terme de gauche est holomorphe sur $\Re(s)>-½$ ; celui de droite est méromorphe pour $\Re(s)<½$. La fonction $ζ(f,χ,s)$ a un prolongement méromorphe à $𝐂$. En particulier, $ζ(\chap{g},\chap{χ},-s)$ donc $γ(χ,s)$ admettent un prolongement méromorphe à $𝐂$. CQFD. \subsubsection{}Esquissons une seconde démonstration de l'équation fonctionnelle du théorème précédent dans le cas ultramétrique. (Comme nous l'avons vu, l'existence d'un prolongement méromorphe en résulte immédiatement.) Montrons que pour tout quasi-caractère multiplicatif $χ$, il existe une fraction rationnelle $c_ψ(χ,X) ∈ 𝐂(X)$ telle que \[ c_ψ(χ,X)Z_ψ(f,χ,X)=Z_ψ(ℱ_ψ(f),\chap{χ},1/X) \] pour toute fonction $f ∈ 𝒮(K)$. L'équation fonctionnelle \ref{prolongement méromorphe et équation fonctionnelle cas local}.(iii) en résulte en posant $γ_ψ(χ,s)=c_ψ(χ,q^{-s})$. Considérons à cette fin l'ensemble $𝒟_χ$ des formes $𝐂$-linéaires $Δ: 𝒮(K) → 𝐂(X)$ telles que \[Δ([×a]^* f)=χ^{-1}(a)X^{-v(a)} Δ(f)\] pour chaque fonction $f$ et chaque $a ∈ K^×$. Il est formel que $f ↦ Z(f,χ,X)$ appartient à $𝒟_χ$ : en effet, $z_n([×a]^*f)=χ^{-1}(a)z_{n-v(a)}$ pour tout $n$, comme il résulte immédiatement des égalités $[×a]^* μ_ψ^{\mbox{\minus $×$}}=μ_ψ^{\mbox{\minus $×$}}$ et $a 𝒰_n=𝒰_{n-v(a)}$. De même, il résulte de l'égalité \ref{Fourier et mesure locaux}.(iii).(a) et du calcul précédent que la forme linéaire $f ↦ Z_ψ(ℱ_ψ(f),\chap{χ},1/X)$ appartient également à $𝒟_χ$. Or, et c'est là le point clef, l'espace $𝒟_χ$ est de dimension un sur $𝐂(X)$. Il suffit pour cela de montrer que l'évaluation $𝒟_χ → 𝐂(X)$, $Δ ↦ Δ(𝟭_{1+𝔪^{a(χ)}})$ est \emph{injective}, où $a(χ)$ est le conducteur du caractère multiplicatif $χ$. Posons $n=a(χ)$ et supposons $Δ(𝟭_{1+𝔪^n})=0$. Pour tout $r ≥ n$, considérons des représentants $(a_i)$ dans $1 + 𝔪^n$ du groupe quotient $1+𝔪^n ∕ 1+𝔪^r$, fini (de cardinal $q^{r-n}$). On a d'une part $𝟭_{1+𝔪^n}=∑_i [×a_i]^* 𝟭_{1+𝔪^r}$ par hypothèse sur les $a_i$ et d'autre part $Δ([×a_i]^* 𝟭_{1+𝔪^r})=Δ(𝟭_{1+𝔪^r})$ par hypothèse sur $φ$ et $n$ : $χ(a_i)=1$ et $v(a_i)=0$. En conséquence, $Δ(𝟭_{1+𝔪^r})=0$. Toute fonction $f ∈ 𝒮(K)$ à support dans $K^×$ étant combinaison linéaire de translatés (multiplicatifs) de fonctions caractéristiques $𝟭_{1+𝔪^r}$ pour $r ≥ n$, on a $Δ(f)=0$ pour de telles fonctions. Il en résulte que $Δ(f)$ ne dépend que de la valeur de $f$ en $0$, si bien que $Δ([×a]f)=Δ(f)$ pour tout $a ∈ K^×$ et tout $f ∈ 𝒮(K)$. Compte tenu de l'égalité $Δ([×a]^*f)=χ^{-1}(a)X^{-v(a)} Δ(f)$, on a $Δ(f)=0$. CQFD. Pour une discussion du cas archimédien, voir \cite[§1]{Fonction@Weil}. \subsection{Facteurs $ε$} \subsubsection{} \label{définition fonction L locale} Soit $χ=χ₁ ω_s$ comme en \ref{description quasi-caractères}. Posons \[L(χ)= \begin{cases} \displaystyle ζ_K(s) & \text{si } K \text{ est archimédien}\\ \displaystyle \frac{1}{1-χ(ϖ)} & \text{si } K \text{ est ultramétrique et }χ \text{ net}\\ \displaystyle 1 & \text{sinon}. \end{cases} \] % Deligne, §3.2 Il résulte des calculs effectués en \ref{Mellin local archimédien} et \ref{Matchett} que l'on a $L(χ)=ζ_ψ(g,χ)$, où $ψ$ est de niveau nul et $g$ est une gaussienne ou bien la fonction caractéristique de l'anneau des entiers. Sauf si $K$ est ultramétrique et $χ$ ramifié : remplacer $ζ_ψ(g,χ)=0$ par $1$. (Voir \cite[§23.2]{Bushnell-Henniart} pour une interprétation plus conceptuelle dans le cas ultramétrique.) Il est naturel de considérer pour chaque fonction $f ∈ 𝒮(K)$, le quotient $ζ_ψ(f,χ)/L(χ)$. \subsubsection{} \label{définition facteur epsilon local} D'après \ref{prolongement méromorphe et équation fonctionnelle cas local}, il existe un « \textbf{facteur epsilon} »\index{facteur epsilon}, indépendant de $f$, tel que l'on ait : \[ ε_ψ(χ)×\frac{ζ_ψ(f,χ)}{L(χ)}=\frac{ζ_ψ(ℱ_ψ(f),\chap{χ})}{L(\chap{χ})}. \] D'après \emph{loc. cit.}, on a $ε_ψ(χ)=γ_ψ(χ)×\frac{L(χ)}{L(\chap{χ})} ∈ 𝐂^×$. Les deux formules suivantes résultent respectivement de \ref{dépendance Fourier local en caractère} et \ref{Fourier et mesure locaux} (formule d'inversion). % détailler ? \XXX \begin{proposition2} \label{epsilon par translation et produit} Soient $K$ un corps local, $ψ$ un caractère additif non trivial et $χ$ un caractère multiplicatif. \begin{enumerate} \item Pour tout $a ∈ K^×$, $ε_{ψ_a}(χ)=χ(a)|a|^{-½}ε_ψ(χ)$. \item \label{epsilonepsilon} $ε_ψ(χ) ε_ψ(\chap{χ})=χ(-1)$. \end{enumerate} \end{proposition2} Notons que les mêmes formules sont valables pour le facteur $γ$. D'après (i), la détermination de ces facteurs se ramène au cas particulier où le caractère additif $ψ$ est de niveau fixé. \subsubsection{Formulaire archimédien} Si $K$ est réel ou complexe, et $χ=χ₁ ω_s$ comme ci-dessus où $χ₁:x↦ x^{-a}$, on a : \[ ε_{𝐞_K}(χ)=i^a. \] Vérifions-le brièvement dans le cas réel. Le cas complexe est laissé en exercice au lecteur (cf. \cite[§2.5]{Fourier@Tate}). Pour $a=0$, c'est une trivialité : on applique la définition \ref{définition facteur epsilon local} lorsque $f$ est la gaussienne $g_𝐑$ (invariante par Fourier). Le cas $a=1$ se ramène au cas précédent : considérer la dérivée de $g_𝐑$ et utiliser le fait que la transformation de Fourier échange dérivation et multiplication par $i$. \subsubsection{Formulaire ultramétrique} \label{facteur epsilon ultramétrique} Lorsque $χ$ est net et $ψ$ de niveau nul, on a : \[ ε_ψ(χ)=1. \] En effet, $ℱ_ψ(𝟭_𝒪)=𝟭_𝒪$ donc $ζ_ψ(ℱ_ψ(𝟭_𝒪),\chap{χ})=L(\chap{χ})$ et, plus trivialement encore, $ζ_ψ(𝟭_𝒪,χ)=L(χ)$. Considérons maintenant le cas général : $χ$ est éventuellement ramifié, de conducteur $a=a(χ) ≥ 0$ (\ref{définition conducteur}) et $ψ$ de niveau $n=n(ψ)$. Considérons la fonction $f=χ^{-1} 𝟭_{𝒪^×}$, où $χ^{-1}$ désigne abusivement le prolongement par zéro de la fonction $χ^{-1}:K^× → 𝐂$ à $K$. Elle appartient à $𝒮(K)$ et est constante sur les classes modulo $𝔪^a$ : si $x ∈ 𝒪^×$ et $y ∈ 𝒪$, on a $χ(x)=χ(x+y ϖ^a)$ car $χ(1+x^{-1}y ϖ^a)=1$. En conséquence (\ref{Fourier et mesure locaux}, (ii) et (iii).b), sa transformée de Fourier $ℱ_ψ(f)$ est à support contenu dans $𝔪^{-(n+a)}$. Pour simplifier les calculs, supposons dorénavant que $n+a=0$, comme il est loisible d'après \ref{epsilon par translation et produit}, (ii). Ainsi, $ℱ_ψ(f)$ est à support dans $𝒪$. D'autre part, par définition, c'est la fonction $x↦ ∫_{𝒪^×} χ^{-1}(y) ψ(xy)   dμ_ψ^{\mbox{\minus $+$}}(y)$. À moins que $χ_{|𝒪^×}$ ne soit trivial (c'est-à-dire $χ$ net, ou encore $a=0$). on a $ℱ_ψ(f)(0)=0$. Le cas $a=0$ ayant été traité, supposons maintenant $a>0$. Pour $x ∈ 𝒪-\{0\}$, le changement de variable $z=xy$ et la formule \ref{module=module} entraîne : $ℱ_ψ(f)(x)=\chap{χ}^{-1}(x) ∫_{x^{-1} 𝒪^×} χ^{-1}(z) ψ(z)   dμ_ψ^{\mbox{\minus $+$}}(z)$. Pour la même raison que précédemment, cette intégrale est nulle si $x$ n'appartient pas à $𝒪^×$. (Si $x ∈ 𝔪$, la fonction $χ^{-1} 𝟭_{x^{-1}𝒪}$ est constante modulo $𝔪^{a-1}$ et la valeur en $1$ de sa transformée de Fourier est nulle.) Finalement, \[ ℱ_ψ(χ^{-1} ⋅ 𝟭_{𝒪^×})=𝔤(χ,ψ) ⋅ \big( \chap{χ}^{-1} ⋅ 𝟭_{𝒪^×} \big), \] où la constante multiplicative est la \textbf{somme de Gauß} \index{somme de Gauß} \[ 𝔤(χ,ψ)=∫_{𝒪^×} χ^{-1} ⋅ ψ   dμ_ψ^{\mbox{\minus $+$}}. \] Ceci est une généralisation du calcul \ref{exemple Fourier et Gauss}. Enfin, par construction, $ζ_ψ(f,χ)=ζ_ψ(𝟭_{𝒪^×},1)(=μ_ψ^{\mbox{\minus $×$}}(𝒪^×))$ et, d'après ce qui précède, $ζ_ψ(\chap{f},\chap{χ})=𝔤(χ,ψ) ζ_ψ(𝟭_{𝒪^×},1)$. En résumé, on a a démontré la proposition suivante : \begin{proposition2} Sous l'hypothèse que $a(χ)+n(ψ)=0$, on a : \[ ε_ψ(χ)=𝔤(χ,ψ). \] \end{proposition2} Notons que cette formule est également valable lorsque $χ$ est net. %\subsection{Fonctorialité} %$N_{L\bo K}$ et lien avec la valeur absolue normalisée par exemple. %[À déplacer ? \XXX] \section{Corps globaux} \subsection{Premières définitions, notations} \subsubsection{} Un corps $K$ est un \textbf{corps global} s'il est de caractéristique nulle, fini sur $𝐐$ ou bien s'il est de caractéristique \mbox{$p>0$}, de type fini sur le corps fini $𝐅_p$ et de degré de transcendance $1$ sur ce corps. Dans le premier cas, on dit que $K$ est un \textbf{corps de nombres} ; dans le second, on dit que $K$ est un \textbf{corps de fonctions algébriques} sur le corps fini $𝐅_p$. \begin{exercice2} Montrer qu'un corps $K$ est un corps global si et seulement si il existe un anneau intègre $A$ de corps des fractions $K$ satisfaisant les propriétés suivantes : \begin{enumerate} \item pour tout $a ∈ A-\{0\}$, le quotient $A/(a)$ est \emph{fini} ; \item $A$ est engendré, sur $𝐙$, par un nombre fini d'éléments ; \item $A$ est \emph{normal} ; \item $A$ est infini. \end{enumerate} \end{exercice2} \subsubsection{} \label{notation places infinies} On appelle \textbf{point} de $K$ une classe d'équivalence de valeurs absolues non triviales sur $K$ ; on note $Σ(K)$ leur ensemble. Un point est dit \textbf{ultramétrique} (resp. \textbf{archimédien}) si les valuations correspondantes sont ultramétriques (resp. archimédiennes) ; leurs ensembles respectifs sont notés $Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)$ et $Σ^{\mathtextrm{arch}}(K)$. Nous faisons le choix de \emph{pas} utiliser les notations traditionnelles $Σ_f(K)$ et $Σ_∞(K)$, afin d'éviter la possible confusion entre les valeurs absolues archimédiennes et les valeurs absolues « à l'infini » en égale caractéristique, comme par exemple la classe de la valuation $P↦ p^{-\deg(P)}$ dans $𝐅_p(t)$. Nous noterons d'ailleurs souvent $∞$ cette place (ultramétrique). \begin{remarque2} Le choix du mot « point » est justifié par le fait suivant : un corps global $K$ de caractéristique $p>0$ de corps des constantes $k$ est le « corps des fonctions » d'une courbe projective lisse sur $k$ dont l'ensemble des points fermés est naturellement en bijection avec $Σ(K)$. \end{remarque2} \subsubsection{}Si $x ∈ Σ(K)$, on note $K_x$ le complété de $K$ pour la \commentaire{Noter $K_{\chap{x}}$ ? et réserver $K_x$ pour le corps valué $(K,||_x)$ ?} topologie induite par une valeur absolue quelconque dans la classe $x$ ; c'est un corps local au sens de \ref{definition corps locaux}, cf. \ref{Kx sont locaux} \emph{infra}. (Réciproquement, il n'est pas difficile de montrer que tout corps local s'obtient de cette manière.) % Si $G$ est un %groupe sous-groupe d'un $𝔖_n$ tel $𝐀^n/G$ soit rationnel, %on peut même relever un nombre fini d'extensions locales %galoisiennes de groupe $G$. Serre, Topics, th. 2 p. xiv. \XXX On dispose donc d'une valeur absolue privilégiée sur $K_x$, la valeur absolue normalisée, que l'on note $|⋅|_x$, ainsi que sa restriction à $K$, qui appartient à la classe $x$. Si $x$ est ultramétrique, on note également $𝒪_{K,x}=\{f ∈ K_x : |f|_x ≤ 1\}$ l'anneau de valuation de $K_x$, $𝔪_x$ son idéal maximal, $k_x=𝒪_{K,x}/𝔪_x$ le corps résiduel, $N(x)$ le cardinal de $k_x$ — appelé \emph{norme} de $x$ — et enfin $v_x$ la valuation $K_x ↠ 𝐙 ∪ \{+∞\}$. Notons que si $ϖ$ est une uniformisante de $𝒪_{K,x}$, on a $N(x)=|ϖ|_x^{-1}$. Il est parfois utile de faire la convention suivante : lorsque $x ∈ Σ^{\mathtextrm{arch}}(K)$, on pose $𝒪_{K,x}=K_x$. % pertinence à vérifier \XXX. (Cela permet parfois d'éviter % d'écrire « $S ⊆ Σ(K)$ fini contenant $Σ^{\mathtextrm{arch}}(K)$ » \subsubsection{} \label{U-entiers} Pour toute partie cofinie $U ⊆ Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)$, on note $𝒪_K(U)$ l'ensemble des éléments $f$ de $K$ qui sont \textbf{$U$-entiers}, c'est-à-dire appartenant à $𝒪_{K,x}$ pour chaque $x ∈ U$. De façon équivalente : $|f|_x ≤ 1$ pour tout $x ∈ U$. Nous dirons qu'un tel ensemble $U$ est un \emph{ouvert dense} \index{ouvert dense} de $K$. (Insistons sur le fait que l'on ne topologise pas $K$ et qu'il s'agit d'une convention de langage.) % choix terminologique discutable \XXX Lorsque $K$ est un corps de nombres, il est d'usage de noter $𝒪_K$ l'anneau $𝒪_K(Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K))$, dit \textbf{anneau des entiers} de $K$. \subsubsection{} \label{notation OLU} Lorsqu'une extension $L\bo K$ est fixée et que l'on considère un ouvert dense $U$ de $K$, il est parfois commode de noter $𝒪_L(U)$ l'anneau $𝒪_L(V)$, où $V$ est l'image inverse de $U$ dans $Σ(L)$. (On fait de même pour les \emph{adèles} définis plus bas, cf. \ref{définition adèles}.) \subsubsection{Exemples} \label{sections globales droite projective} Notons pour simplifier $Σ$ l'ensemble des points du corps global $𝐅_p(t)$. On a alors $𝒪_{𝐅_p(t)}(Σ)=𝐅_p$ : une fraction rationnelle sans pôle est une constante. Plus précisément, si l'on a $|f|_P ≤ 1$ pour chaque $P ∈ 𝐅_p[t]$ irréductible et que l'on écrit $f=a/b$ avec $a,b ∈ 𝐅_p[t]$ premiers entre eux, alors $P$ ne divise pas $b$. Ceci étant vrai pour tout $P$, le polynôme $b$ est nécessairement une constante. Comme $|a|_∞=p^{\deg(a)}$, on a $\deg(a)=0$ (absence de pôle à l'infini). « Calculons » maintenant $𝒪_{𝐅_p(t)}(U)$ pour un ouvert quelconque $U ≠ Σ$. Supposons pour commencer que la place $|⋅|_∞$ n'appartient pas à $U$. Dans ce cas, les points appartenant à $Σ-U$ sont de la forme $|⋅|_{P_i}$ où les $P_i$ sont des polynômes irréductibles, que l'on peut supposer unitaires, de $𝐅_p[t]$. Ils sont en nombre fini par hypothèse et l'on peut considérer leur produit $P=∏_i P_i$. On a alors l'égalité $𝒪_{𝐅_p(t)}(U)=k[t][1/P]=\{f ∈ 𝐅_p(t): ∃n ≥ 1, ∃a ∈ 𝐅_p[t], f=\frac{a}{P^n}\}$. Si l'on suppose maintenant que la place à l'infini appartient à $U$, l'anneau $𝒪_{𝐅_p(t)}(U)$ est l'intersection d'un anneau du type précédent avec l'ensemble des fractions rationnelles de degré négatif ou nul. Ce n'est autre que le sous-anneau $k[t^i/P, 0 ≤ i ≤ d]$ de $𝐅_p(t)$, où $d=\deg(P)$. Notons que dans un cas comme dans l'autre, ces anneaux sont des $k$-algèbres de type fini et de corps des fractions $𝐅_p(t)$. Par contre, si $K=𝐐$ et $Σ=Σ^{\mathtextrm{ultr}}(𝐐))$, on a $𝒪_𝐐=𝒪_K(Σ)=𝐙$. \subsubsection{} \label{corps des constantes} Si $K$ est un corps global de caractéristique $p>0$, la clôture algébrique de $𝐅_p$ dans $K$ est appelée \textbf{corps des constantes} de $K$. C'est le plus grand sous-corps fini de $K$ (\refext{RT}{finitude clôture algébrique dans tf}). \subsection{Points de $𝐐$ et $𝐅_p(t)$ ; applications} \subsubsection{}On a vu en \refext{AVD-Dedekind}{Ostrowski sur Q} que toute valeur absolue de $𝐐$ est équivalente à une unique valeur absolue $| ⋅ |_p$, où $p ∈ 𝒫 ∪ \{∞\}$, $𝒫$ désigne l'ensemble des nombres premiers et $| ⋅ |_p$ envoie $f ∈ 𝐐$ sur $p^{-v_p(f)}$, où $v_p(f) ∈ 𝐙 ∪\{+∞\}$ est la valuation $p$-adique de $f$ si $p$ est premier, ou sur la valeur absolue usuelle $|f|_∞$ de $f$ si $p=∞$. Ainsi, $𝒫 → Σ^{\mathtextrm{ultr}}(𝐐)$, $p ↦ (\text{classe de }|⋅|_p$) est une bijection, d'inverse noté $x ↦ p_x$, et $\{∞\} → Σ^{\mathtextrm{arch}}(𝐐)$, $∞ ↦ \text{classe de }|⋅|_∞$ également. Par la suite, on identifiera souvent ces ensembles par les bijections précédentes. Cette identification est compatible avec les notations introduites ci-dessus. Par exemple, si $p$ est un nombre premier, $𝒪_{x_p}=𝐙_p$, etc. Notons que $𝒫$ est naturellement en bijection avec $\Specmax(𝐙)$. \subsubsection{}Soit $p$ un nombre premier. Il résulte de \refext{AVD-Dedekind}{k-valuations de k(X)} %et [...] ? \XXX que les valuations non triviales de $𝐅_p(t)$ sont toutes ultramétriques et que l'ensemble $Σ(𝐅_p(t))$ est naturellement en bijection avec l'union $𝒫_p ∪ \{∞\}$, où $𝒫_p$ désigne l'ensemble des polynômes irréductibles unitaires de $𝐅_p[t]$. Notons que $𝒫_p$ est naturellement en bijection avec $\Specmax(𝐅_p[t])$. (Pour des renseignements quantitatifs sur $𝒫_p$, voir \refext{Fin}{denombrement-polynomes-irreductibles-corps-finis}.) %\XXX \subsubsection{} \label{Kx sont locaux} Soient $L\bo K$ une extension finie de corps globaux et $y ∈ Σ(L)$. Toute valeur absolue $| ⋅ |_L$ dans la classe $y$ induit par restriction une valeur absolue $| ⋅|_K$ sur $K$ dont la classe d'équivalence ne dépend que de $y$ et que nous noterons $x$. D'après \refext{AVD-Dedekind}{finitude préservée par complétion}, l'injection $K ↪ L$ induit une injection $K_x ↪ L_y$, faisant de $L_y$ une \emph{extension finie} de $K_x$. Si $K_x$ est un corps local, il en est de même de $L_y$ (cf. \ref{extension finie corps local est local}). Or, on a vu ci-dessus que si $K=𝐐$ ou $K=𝐅_p(t)$, chaque $K_x$ est un corps local ; tout corps global $L$ étant extension finie d'un tel corps global « premier » $K$, les $L_y$ sont locaux. Rappelons (\ref{extension finie corps local est local}) que la restriction à $K_x$ de la valeur absolue normalisée $|⋅|_y$ n'est en général pas égale à $|⋅|_x$ (mais plutôt à la puissance $[L_y:K_x]$-ième de celle-ci). Voir aussi \refext{AVD-D}{définition indice de ramification}. \begin{proposition2} \label{toute courbe est revêtement ramifié de P1} Soit $K$ un corps global de caractéristique $p>0$. Il existe un élément $t ∈ K$ tel que l'extension $K\bo 𝐅_p(t)$ soit étale. \end{proposition2} \begin{démo} Le corps $𝐅_p$ étant parfait, cela résulte de \refext{RT}{extension corps parfait est séparable}. Voici une seconde démonstration. Nous allons montrer plus généralement que si $K=𝐅_p(a₁,…,a_n)$, il existe un indice $i$ tel que $K$ soit séparable sur $𝐅_p(a_i)$. On procède par récurrence, le cas $n=1$ étant trivial (extension transcendante pure). L'hypothèse de récurrence, jointe au fait qu'une extension composée d'extension étale est étale (\refext{Alg}{compose-etale}), nous ramène au cas particulier $n=2$ : $K=𝐅_p(x,y)$. Soit $f ∈ 𝐅_p[X,Y]$ un polynôme irréductible tel que $f(x,y)=0$. Il existe un monôme $x^i y^j$ apparaissant avec un coefficient non nul dans $f$ dont les exposants ne sont pas simultanément divisibles par $p$. Dans le cas contraire, comme les coefficients sont des puissances $p$-ièmes ($𝐅_p$ est parfait), il en serait de même de $f$, ce qui est absurde. Supposons que $j$ ne soit pas divisible par $p$. Alors $y$ est racine du polynôme $g(Y)=f(x,Y) ∈ 𝐅_p(x)[Y]$ qui n'appartient pas à $𝐅_p(x)[Y^p]$. D'autre part, ce polynôme est \emph{irréductible} car $f$ l'est et $ x$ est transcendant sur $𝐅_p$. Ainsi, $y$ séparable sur $𝐅_p(x)$ et l'extension $K \bo 𝐅_p(x)$ est étale. \end{démo} \begin{corollaire2} \label{p-rang-corps-global-égal-1} Soit $K$ un corps global de caractéristique $p>0$. Alors, le degré de $K$ sur son sous-corps $K^p$ des puissances $p$-ième est égal à $p$. En d'autres termes, le \emph{$p$-rang} (\refext{RT}{définition-p-rang}) de $K$ est égal à $1$. \end{corollaire2} \begin{démo} Il est clair que $𝐅_p(t)^p=𝐅_p(t^p)$ et que l'on a l'égalité $[𝐅_p(t):𝐅_p(t)^p]=p$. D'autre part, on a vu en \refext{RT}{p-rang-invariant-par-extension-finie} que cette égalité passe aux extensions finies (non nécessairement étales). Pour une démonstration \emph{ad. hoc.}, cf. \cite[VIII.§6, lemme 1]{BNT@Weil}. \end{démo} \subsubsection{}Un corps global est donc une extension finie étale d'un \textbf{corps global premier}, un tel corps étant par convention égal à $𝐐$ ou isomorphe à un corps de fractions rationnelles $𝐅_p(t)$. L'étude des corps globaux procède souvent par réduction au cas des corps globaux premiers. (Voir par exemple l'observation \ref{Kx sont locaux} \emph{supra} et le théorème \ref{cocompacité} \emph{infra}.) \begin{proposition2} \label{finitude-infinitude-places} Soit $K$ un corps global. \begin{enumerate} \item L'ensemble $Σ^{\mathtextrm{arch}}(K)$ est \emph{fini}. \item L'ensemble $Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)$ est \emph{infini}. De plus, pour chaque $c ∈ 𝐑_{>0}$, son sous-ensemble $\{x ∈ Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K): N(x) ≤ c\}$ est \emph{fini}. \end{enumerate} \end{proposition2} \begin{démo} Il résulte de \refext{AVD-D}{fonctorialité valeurs absolues} et du fait que la restriction d'une valeur absolue archimédienne (resp. ultramétrique) est archimédienne (resp. ultramétrique), qu'il suffit de traiter le cas particulier où $K$ est un corps global premier. Dans ce cas, (i) résulte du fait que $Σ^{\mathtextrm{arch}}(𝐐)$ est un singleton et $Σ^{\mathtextrm{arch}}(𝐅_p(t))$ est vide. Quant au premier point de (ii), il suffit de montrer que l'ensemble des idéaux maximaux $(P)$ de $𝐙$ (resp. $𝐅_p[t]$) est infini. Ceci est bien connu et en substance dû à Euclide : considérer un diviseur irréductible d'une expression $P₁ \cdots P_n +1$. Enfin, $N(P)$ est la valeur absolue usuelle de $P$ dans le cas des nombres et $p^{\deg(P)}$ dans le cas des fonctions. Le complément en résulte aussitôt. \end{démo} \begin{proposition2} \label{normes fonction presque toutes petites} Soit $K$ un corps global et soit $f ∈ K$. Pour presque tout $x ∈ Σ(K)$, $|f|_x ≤ 1$. De façon équivalente, $K=\colim_U 𝒪_K(U)$, où $U$ parcourt les ouverts denses de $K$. \end{proposition2} Si $f ∈ K^×$, on a $|f|_x^{-1}=|f^{-1}|_x$ de sorte qu'il résulte de la proposition précédente que $|f|_x=1$ pour presque tout $x$. Pour une variante différentielle, cf. \ref{niveaux forme différentielle presque tous nuls}. \begin{démo} Si $K$ est un corps global \emph{premier} cela résulte de la description explicite de ses valeurs absolues (cf. \refext{}{}). Il nous suffit donc de montrer que si $L \bo K$ est une extension finie de corps globaux, la conclusion est valide pour $L$ si elle l'est pour $K$. Soit $f ∈ L$. Il existe des éléments $a_i ∈ K$ et un entier $n$ tels que $f^n=a₁ f^{n-1} + \cdots + a_n$. Par hypothèse, les $a_i$ sont \emph{$U$-entiers} pour un ouvert dense convenable de $K$. (On rappelle que cela signifie que pour chaque $i$ et chaque $x ∈ U$, on a l'inégalité $|a_i|_x ≤ 1$.) Utilisant la finitude (des fibres) de l'application $π:Σ(L) → Σ(K)$ (\refext{AVD-D}{fonctorialité valeurs absolues}), il existe donc un ouvert dense $V$ de $L$ (que l'on peut prendre égal à $π^{-1}(U)$) telle que les $a_i$, vus dans $L$, soient $V$-entiers. Il en est alors de même de $f$. En effet, on peut réécrire la relation de dépendance algébrique $1=a₁ f^{-1} + \cdots + a_n f^{-n}$ ; si $|f|_y > 1$, le terme de droite est de valeur absolue strictement inférieure à $1$. Absurde. \end{démo} \begin{démo}[Seconde démonstration dans le cas d'un corps de fonctions] Si l'élément $f ∈ K$ est algébrique sur $𝐅_p$, et non nul, il est multiplicativement d'ordre fini donc $|f|=1$ pour toute valeur absolue. Dans le cas contraire, l'extension $K \bo 𝐅_p(f)$ est finie et, comme indiqué ci-dessus, le résultat est connu pour le corps de fonctions transcendant pur $K₀=𝐅_p(f)$. Si $y ∈ Σ(K)$ est d'image $x ∈ Σ(K₀)$, on a $|f|_y = |f|^n_x$ pour un entier $n$ (dépendant de $y$). En particulier, $|f|_y ≤ 1$ s'il en est ainsi de $|f|_x$. \end{démo} \subsubsection{} \label{normalité triviale} Si $U$ est un ouvert dense de $K$, l'anneau $𝒪_K(U)$ est \emph{normal} car c'est l'intersection $⋂_{u ∈ U} K_u^+$ des sous-anneaux normaux $K_u^+=\{f ∈ K: |f|_u ≤ 1\}$ de $K$. Disons que l'ouvert $U$ est \textbf{affine} si $K$ est un corps de nombres ou bien si $K$ est un corps de fonctions et $U ≠ Σ(K)$. \begin{proposition2} \label{OKU Dedekind} %\label{fonctorialité et clôture intégrale} Soient $K$ un corps global et $U$ un ouvert \emph{affine} dense de $K$. Alors, l'anneau $𝒪_K(U)$ un \emph{anneau de Dedekind} de corps des fractions $K$ et l'application naturelle $U → \Specmax 𝒪_K(U)$ envoyant $u$ sur la trace de $K_u^{++}=\{f ∈ K: |f|_u < 1\}$ est une \emph{bijection}. \end{proposition2} \XXX Question : si $U′ ⊆ U$, $𝒪_K(U′)$ est-il un localisé de $𝒪_K(U)$ ? \begin{démo} Montrons le premier énoncé, en distinguant deux cas. Si $K$ est un corps de nombres, $𝒪_K(U)$ contient $𝐙$ donc la clôture intégrale $𝒪_K$ de $𝐙$ dans $K$. En conséquence $\Frac 𝒪_K(U)=K$ (et même $𝒪_K(U)𝐐=K$ ; cf. \refext{AC}{clôture intégrale commute à localisation}). Pour vérifier que l'anneau normal $𝒪_K(U)$ est de Dedekind, il suffit de montrer qu'il est nœthérien de dimension $1$ ; cela résulte du théorème de Krull-Akiduki (\refext{AVD-D}{Krull-Akiduki}). Si $K$ est un corps de fonctions, voir \ref{RR implique Dedekind de type fini}. % voir aussi Fried-Jarden, p. 32 Vérifions maintenant le dernier point. L'application $U → \Specmax(A)$ de l'énoncé \commentaire{J'utilise de nouvelles notations...} envoie $u$ sur l'image dans $\Spec(A)$ du point fermé de $\Spec(K_u^+)$ déduit de l'inclusion $A ↪ K_u^+$. C'est un idéal \emph{maximal} car $A/(A ⋂ K_u^{++})$ s'injecte dans le corps fini $K_u^+ / K_u^{++}$. (On utilise le fait qu'un anneau fini intègre est un corps.) Rappelons que $\Specmax(A)$ s'injecte naturellement dans \commentaire{mettre ces sorites ailleurs ?} $Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)$ car chaque idéal maximal $𝔭$ de l'anneau $A$ induit une valuation ultramétrique $|⋅|_𝔭$ sur son corps des fractions telle que $𝔭 = A ∩ K_{|⋅|_𝔭}^{++}$. L'application composée $U → \Specmax(A) → Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)$ est l'injection de $U$ dans $Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)$. En effet, si $u ∈ U$ et $𝔭_u=A ∩ K_u^{++}$ est l'idéal premier de $A$ correspondant, inclusion $A ⊆ K_u^+$ s'étend en une inclusion du localisé $A_{𝔭_u}$ dans l'anneau $K_u^+$ (car pour tout élément $b$ de $A∖ 𝔭_u$, on a $|b|_u=1$), d'où l'égalité $A_{𝔭_u}=K_u^+$ (\refext{AVD-D}{conditions équivalentes anneau valuation}). L'application $U → \Specmax(A)$, injective d'après ce qui précède, est surjective car si $v ∉ U$, il existe d'après \refext{AVD-D}{theoreme-approximation-Dedekind} un élément de $K$ qui est $U$-entier, donc dans $A$, mais pas $v$-entier. \end{démo} Considérons maintenant un résultat de finitude. \begin{proposition2} \label{fonctorialité anneau des Uentiers} Soient $K$ un corps global, $L\bo K$ une extension finie et $U$ un ouvert dense de $K$. \begin{enumerate} \item Pour toute extension finie $L \bo K$, l'anneau $𝒪_L(U)$ est la clôture intégrale de $𝒪_K(U)$ dans $L$. C'est un $𝒪_K(U)$-module de type fini. \item Sous les hypothèses précédentes, et si de plus $U$ est suffisamment petit, $𝒪_L(U)$ est un $𝒪_K(U)$-module \emph{libre} de rang $[L:K]$. \end{enumerate} \end{proposition2} Pour la notation $𝒪_L(U)$, cf. \ref{notation OLU}. Pour la définition de la clôture intégrale, cf. \refext{AC}{normalisation,normal}. \begin{démo} (i) Notons $A=𝒪_K(U)$, $V$ l'image inverse de $U$ dans $Σ(L)$, et $B=𝒪_L(U):=𝒪_L(V)$. Considérons également la clôture intégrale $B′$ de $A$ dans $L$. L'anneau $B$ est l'ensemble des éléments de $L$ appartenant à chacun des anneaux de valuation discrète complets $𝒪_{L,v}=\{f ∈ L_v: |f|_v ≤ 1\}$, pour $v ∈ V$. Or, si $f ∈ L$ est entier sur $A$, il est entier sur chaque sur-anneau $𝒪_{K,u}$, $u ∈ U$, donc contenu pour chaque $v↦ u$ dans l'anneau normal $𝒪_{L,v}$ de corps des fractions $L_v$ contenant $L$. Ainsi $B′$ est contenu dans $B$. Réciproquement si $Ω$ est une clôture algébrique de $L$ et $G=\Aut(Ω \bo K)$, un élément $b ∈ B$ est racine d'un polynôme $P=(∏_{β ∈ G ⋅ b} (X-β))^{p^e}$ à coefficients dans $K$, où $p$ désigne une puissance de l'exposant caractéristique de $K$, et $e$ un entier suffisamment grand (cf. \refext{CG}{polynôme minimal et conjugués dans cas général}). Soient $u ∈ U$ et $v ∈ V$ au-dessus (\refext{AVD-D}{finitude préservée par complétion}). Pour chaque $g ∈ G$, l'application $λ ↦ |g(λ)|_v$, $L → 𝐑$, est une valuation de $L$ au-dessus de $u$ donc dans $V$ (par hypothèse). Il en résulte que les coefficients de $P$ sont $u$-entiers pour chaque $u$. Ainsi $b$ est entier sur $A$ et, finalement, $B=B′$. Si l'extension $L\bo K$ est étale, il résulte de \refext{AC}{normalisation dans extension séparable} que l'anneau $𝒪_L(V)$ est un $𝒪_K(U)$-module de type fini. Dans le cas non nécessairement étale — qui ne se produit que si $K$ est un corps de fonctions — cela résulte du fait que $𝒪_K(U)$ est une algèbre de type fini sur un corps (\ref{RR implique Dedekind de type fini}, \emph{infra}) et de \refext{AC}{k-algèbre-tf-est-japonaise}. (ii) Soient $d=[L:K]$ et $α₁,…,α_d$ une base de $L$ sur $K$. Pour $U$ suffisamment petit, les $α_i$ appartiennent à $𝒪_L(V)$. L'injection $𝒪_K(U)^d → 𝒪_L(V)$ déduite des $α_i$ devient un isomorphisme sur $K$, donc — puisque c'est un morphisme entre modules de type fini sur $𝒪_K(U)$ — après inversion d'un élément $a$ de $𝒪_K(U)∖ \{0\}$. Quitte à rétrécir encore $U$, on peut supposer que $a ∈ 𝒪_K(U)^×$. \end{démo} \section{Adèles, idèles} \subsection{Groupes topologiques : quelques généralités} \commentaire{Supposer aux bons endroits les groupes abéliens} \commentaire{Vérifier droite/gauche} \subsubsection{Topologie quotient} \label{topologie quotient} Soient $X$ un espace topologique et $∼$ une relation d'équivalence sur $X$. La topologie la plus fine sur le quotient ensembliste $X /\hspace{-.3em}∼$ rendant la surjection canonique $π:X ↠ X/\hspace{-.3em}∼$ est appelée \textbf{topologie quotient} : sous-ensemble $V$ de $X/\hspace{-.3em}∼$ est ouvert si et seulement si son image réciproque $π^{-1}(V)$ est un ouvert de $X$. On dit que la relation d'équivalence $∼$ est \emph{fermée} si $π$ est une application fermée ce qui revient ici à dire que le saturé de toute partie fermée est fermé. Dans ce cas, pour tout fermé $F$ de $X$, l'application $F/\hspace{-.3em}∼_F → π(F)$ est un homéomorphisme, où $∼_F$ désigne la relation d'équivalence induite. \subsubsection{}Soit $G$ un groupe topologique et soit $H$ un sous-groupe, muni de la topologie induite. Comme à notre habitude, on note $G/H$ le quotient de $G$ par la relation d'équivalence $x ∼ y$ si et seulement si $x^{-1}y ∈ H$ ; sauf mention du contraire, il est équipé de la topologie quotient. On vérifie immédiatement que l'action de $G$ sur $G/H$ par translation est continue ; elle est bien sûr transitive. Lorsque $H$ est distingué dans $G$, l'espace homogène $G/H$ est naturellement un groupe et sa topologie est compatible avec cette structure : on obtient un groupe topologique. \subsubsection{}Un morphisme \textbf{propre} est, par définition, un morphisme $f:X → Y$ d'espaces topologiques « universellement fermé » au sens suivant : pour tout espace topologique $Z$, le morphisme $f× \Id_Z: X × Z → Y × Z$ est fermé (c'est-à-dire : l'image d'un fermé est fermé). On vérifie (\cite[\textbf{TG}, I, §10]{Bourbaki}) que cette condition est équivalente à : $f$ est fermé et chaque fibre $f^{-1}(y)$, $y ∈ Y$, est quasi-compacte. En particulier, si $X$ est un espace topologique quasi-compact, le morphisme $X → ⋆$ est propre, où $⋆$ désigne un espace topologique ponctuel. \subsubsection{}Si $H$ est un sous-groupe \emph{compact} — c'est-à-dire quasi-compact et séparé — de $G$, la relation d'équivalence $∼$ est \emph{fermée}. En effet, le saturé $HF$ d'un fermé $F$ de $G$ est l'image du morphisme propre — donc fermé — composé de l'isomorphisme $H×G ⥲ H×G$, $(h,g) → hg$, et du morphisme propre $\pr₂:H×G → G$, $(h,g)↦ g$. \begin{proposition2} \label{discrétion et séparation quotient} Soit $G$ un groupe topologique. \begin{enumerate} \item Si $G$ est quasi-compact et discret, il est \emph{fini}. \item Le quotient $G/H$ de $G$ par un sous-groupe $H$ est discret (resp. séparé) si et seulement si $H$ est ouvert (resp. fermé). \end{enumerate} \end{proposition2} \begin{démo} (i) Cette implication est vraie pour tout espace topologique $X$. Si $X$ est discret, les singletons $\{x\}$, pour $x ∈ X$, sont ouverts et recouvrent $X$. Si $X$ est de plus quasi-compact, il en existe un sous-recouvrement fini, CQFD. (Notons qu'un espace topologique fini est quasi-compact mais pas nécessairement discret.) % cf. topologie discrète par exemple. (ii) Le quotient $G/H$ est discret si et seulement si chaque singleton est ouvert, ou encore — l'action transitive de $G$ étant continue —, si et seulement si le singleton $\{\sur{e}\}$ correspondant à la classe de l'élément neutre de $G$ est ouvert. Or, par définition, l'image inverse de ce singleton par la surjection canonique $G ↠ G/H$ est le sous-groupe $H$ ; il est donc ouvert dans $G$. Considérons maintenant la question de la séparation du quotient. Si $G/H$ est séparé, le singleton $\{\sur{e}\}$ est fermé, ainsi donc que son image inverse $H$. Afin d'établir la réciproque, supposons maintenant $H$ fermé. Soient $x,y ∈ G$ tels que $xH ≠ yH$, ce qui correspond à l'inégalité des points $\sur{x} ≠ \sur{y}$ dans le quotient. L'application $μ:(g,g′)↦ g^{-1} g′$, $G×G → G$ est continue et le complémentaire $G-H$ est ouvert. L'image réciproque de $G-H$ dans le produit $G×G$ est donc un ouvert, contenant la paire $(x,y)$. Il existe donc deux voisinages ouverts $V_x$ et $V_y$ de $x$ et $y$ respectivement tels que $μ(V_x × V_y) ⊆ G-H$. On a $V_x H ∩ V_y H =∅$ : les voisinages ouverts de $\sur{x}$ et $\sur{y}$ dans $G/H$ sont donc disjoints. \end{démo} Par soucis d'économie, et comme expliqué en \refext{Cat}{exemples-basiques-categories}, nous appellerons « \emph{morphisme} de groupes topologiques » une application \emph{continue} $f:G₁ → G₂$ respectant la structure de groupes. \begin{définition2} Soit $f:G → G′$ un morphisme de groupes topologiques. On dit que $f$ est \textbf{strict}, si le morphisme canonique $\sur{f}:G/\Ker(f) → \Im(f)$ associé est un isomorphisme de groupes topologiques. \end{définition2} \begin{remarques2} \begin{itemize} \item Dans (i), on demande que l'isomorphisme de \emph{groupes} $\sur{f}$ soit bicontinu c'est-à-dire, ici, d'inverse continu. Cette condition n'est pas automatique : considérer le morphisme $G^{\mathtextrm{disc}} → G$, où $G$ est un groupe topologique quelconque et $G^{\mathtextrm{disc}}$ le même groupe, muni de la topologie discrète. \item Le composé de deux morphismes stricts n'est pas nécessairement strict. \end{itemize} \end{remarques2} \subsubsection{} \label{sorites sur stricts} Il résulte immédiatement des définitions qu'un morphisme $f:G → G′$ est strict si et seulement si pour tout sous-groupe ouvert $H$ de $G$, le sous-groupe $f(H)$ est ouvert \emph{dans $f(G)$}. À l'aide de cette caractérisation, ou bien directement à partir de la définition, on vérifie immédiatement les faits suivants : \begin{enumerate} \item le composé $g ∘ f$ de deux morphismes stricts $f$ et $g$ est également strict lorsque $f$ est surjectif ou lorsque $g$ est injectif ; \item si $f:G → G′$ est strict et $H′$ est un sous-groupe de $G′$, la « restriction » $f×_{G′} H′ : f^{-1}(H′) → H′$ est également stricte. \item Si $G₁$ est compact et $G₂$ séparé, tout morphisme $f:G₁ → G₂$ est strict. \end{enumerate} Vérifions brièvement (ii) et notons $H=f^{-1}(H′)$. Si $U$ est un ouvert de $G$ et $V=U∩H$ est un ouvert de $H$, on a $f(U) ∩ f(H) = f(V)$ (car $H$ est $f$-saturé) et $f(U)$ est, par hypothèse, ouvert dans $f(G)$. Vérifions brièvement (iii). En effet, $\Ker(f)=f^{-1}(\{e_{G₂}\})$ est fermé, car le singleton l'est, donc $G₁/\Ker(f)$ est \emph{séparé}, et $\Im(f)$ est l'image continue d'un quasi-compact donc quasi-compacte de sorte que $\sur{f}$ est une bijection continue entre espaces topologiques compacts ; c'est un homéomorphisme. %(Notons que l'on utilise seulement le fait que le sous-groupe $\Im(f)$ de $G₂$ %est séparé.) \subsection{Isomorphismes modulo les compacts} \begin{définition2} Un morphisme de groupes topologiques est un \textbf{isomorphisme modulo les compacts} s'il est strict, à noyau compact et à conoyau cocompact. \end{définition2} Rappelons (\ref{module et mesure quotients}) que $H ≤ G$ est \emph{cocompact} si $G/H$ est compact. \begin{proposition2} \label{restriction isomorphisme modulo compacts} La restriction d'un isomorphisme modulo les compacts à un sous-groupe \emph{fermé} du but est également un isomorphisme modulo les compacts. \end{proposition2} \begin{démo} Notons $f:G → G′$ le morphisme, $H′$ le sous-groupe fermé de $G′$ et $H=f^{-1}(H′)$ son image inverse, qui est un fermé de $G$. Le noyau de $f×_{G′} H′$ est $H ∩ \Ker(f)$ ; c'est un compact. Le morphisme $H′ ↪ G ′$ induit une injection continue $\Coker(f×_{G′} H′) ↪ \Coker(f)$ dont l'image coïncide avec celle de $H′$ dans $\Coker(f)$. Elle donc fermée et par conséquent compacte car $\Coker(f)$ l'est. \end{démo} \begin{proposition2} \label{composé isomorphismes modulo compacts} Le composé de deux isomorphismes modulo les compacts est un isomorphisme modulo les compacts. \end{proposition2} \begin{démo} Vérifions que le composé de deux isomorphismes modulo les compacts est un morphisme strict. En particulier, si $H$ est un sous-groupe cocompact d'un groupe topologique $G$ et $K$ un compact de $G$, alors $f:H → G/K$ — composé de $H ↪ G$ avec $G ↠ G/K$ — est strict : le morphisme $H/(H ∩ K) → HK/K$ est un isomorphisme. On a vu ci-dessus que la relation d'équivalence $x^{-1}y ∈ K$ est \emph{fermée} ; d'autre part, le sous-groupe $H$ est fermé car le quotient $G/H$ est séparé. Ceci suffit pour conclure (cf \ref{topologie quotient}). Le cas d'un composé général se ramène à ce cas particulier par un dévissage élémentaire s'appuyant sur \ref{sorites sur stricts} (i). %Soit $f:G₀ → G₁$ et $g:G₁ → G₂$ deux tels morphismes. %Le morphisme $G₀ → \Im(f)$ déduit de $f$ est strict et surjectif. %Pour montrer que $g ∘ f$ est strict, il suffit %donc de vérifier que le morphisme $\Im(f) → G₂$ déduit de $G$ %est également strict, ou encore que $\Im(f) → G₁/\Ker(g)$ l'est. Soient $f:G₀ → G₁$ et $g:G₁ → G₂$ deux isomorphismes modulo les compacts. Montrons que $\Ker(g ∘ f)=f^{-1}(\Ker(g)$ est compact. Il suffit de montrer que si $φ:G → G′$ est un isomorphisme modulo les compacts et $K′$ un compact de $G′$, $φ^{-1}(K′)$ est également compact. D'après la proposition précédente, on peut supposer $K′=G′$ auquel cas la compacité résulte du lemme ci-dessous. Enfin, le conoyau de $g ∘ f$ est extension du conoyau compact de $g$ par $\Im(g)/g(\Im(f)$, compact car quotient (via $g)$ du conoyau de $f$. %Le noyau de $f$ est $H ∩ K$ est compact : c'est un fermé %du compact $K$. Enfin, le conoyau $(G/K)/(HK/K)$ est canoniquement %isomorphe à $G/HK$, qui est un quotient du groupe compact $G/H$ ; %il est donc compact. \end{démo} \begin{lemme2} Soient $G$ un groupe topologique et $K$ un sous-groupe compact et cocompact. Alors $G$ est compact. \end{lemme2} \begin{démo} Soit $ℱ$ une collection de fermés de $G$ telle que toute intersection \emph{finie} d'éléments de $ℱ$ soit non vide. On veut montrer que $⋂_{F ∈ ℱ} F ≠ ∅$. Soit $π:G → G/K$ la surjection canonique ; elle est fermée par compacité de $K$. Ainsi, $π(ℱ)=\{π(F)\}$ est une collection de fermés du quotient ; elle satisfaisait également la propriété de l'intersection finie. Par compacité de $G/K$, on a donc $⋂_F π(F) ≠ ∅$ et, \emph{a fortiori}, $⋂_F F ≠ ∅$. \end{démo} % Références : % The three space problem in topological groups % uniform structures on topological groups and their quotients % Hewitt et Ross \subsection{Produits restreints} \label{généralités produits restreints} \subsubsection{Définition}Soient $Σ$ un ensemble d'indices, $(𝒳_s)_{s ∈ Σ}$ une collection d'espaces topologiques et, pour chaque $s ∈ Σ$, un ouvert $𝒱_s ⊆ 𝒳_s$. Pour chaque sous-ensemble cofini $U$ de $Σ$, on note $(𝒳;\!𝒱)_𝐀(U)$, ou simplement $𝒳_𝐀(U)$ lorsqu'aucune confusion n'est à craindre, le produit \[ ∏_{s ∉ U} 𝒳_s × ∏_{s ∈ U} 𝒱_s \] d'espaces topologiques. Toute inclusion $U′ ⊆ U$ induit une immersion ouverte (continue) $(𝒳;\!𝒱)_𝐀(U) ↪ (𝒳;\!𝒱)_𝐀(U′)$. Le produit restreint $(𝒳;\!𝒱)_𝐀$ (ou simplement $𝒳_𝐀$) des $𝒳_s$ relativement aux $𝒱_s$ — aussi noté $\resprod_{s ∈ Σ} (𝒳_s ;𝒱_s)$, ou simplement $\resprod_{s ∈ Σ} 𝒳_s$ — est la colimite \[(𝒳;\! 𝒱)_𝐀=\colim_{U ⊆ Σ} (𝒳;\!𝒱)_𝐀(U),\] où $U$ parcourt les sous-ensembles cofinis de $Σ$. Ensemblistement, $(𝒳;\!𝒱)_𝐀$ est l'ensemble des $(x_s)_{s ∈ Σ} ∈ ∏_{s ∈ Σ} 𝒳_s$ tels que pour presque tout $s$, l'élément $x_s$ appartient à $𝒱_s$. Topologiquement, les ouverts de $(𝒳;\!𝒱)_𝐀$ sont les sous-ensembles dont les intersections avec chaque $(𝒳;\!𝒱)_𝐀(U)$, $U ⊆ Σ$ cofini, sont ouvertes dans $(𝒳;\!𝒱)_𝐀(U)$. En particulier, les $(𝒳;\!𝒱)_𝐀(U)$ sont ouverts dans $(𝒳;\!𝒱)_𝐀$. \begin{remarque2} Cette construction s'étend immédiatement au cas où les $𝒱_s$ sont définis pour presque tout $s$, c'est-à-dire pour $s ∉ F$, où $F$ est une partie finie de $Σ$, en considérant la colimite sur les parties cofinies $U$ ne rencontrant pas $F$. \end{remarque2} \begin{remarque2} Bien que cela ne soit pas nécessaire, explicitons brièvement la notion de convergence lorsque les $𝒳_s$ sont des groupes topologiques métrisables, comme ce sera le cas ci-après. Par définition de la topologie, une suite $(a_n)_n=((a_{s,n})_{s ∈ Σ})_n$ de $(𝒳;\!𝒱)_𝐀$ converge vers $b=(b_s)_{s ∈ Σ}$ si et seulement si pour tout $ε>0$ et tout ensemble cofini $U ⊆ Σ$, il existe un entier $N$ tel que pour chaque $n ≥ N$ on ait $a_{s,n}-b_s ∈ 𝒱_s$ lorsque $s ∈ U$ et $d_s(a_{s,n},b_s)< ε$ sinon. On vérifie sans peine que si on suppose de plus $Σ$ dénombrable, le produit restreint $(𝒳;𝒱)_𝐀$ est également métrisable. \commentaire{à vérifier\\quoiqu'inutile} \end{remarque2} \subsubsection{Locale compacité} \label{locale compacité produit restreint} Il résulte de la définition et du théorème de Tikhonov que si chaque $𝒳_s$ (resp. $𝒱_s$) est localement compact (resp. compact), chaque $(𝒳;\!𝒱)_𝐀(U)$ est un ouvert compact du produit restreint $(𝒳;\!𝒱)_𝐀$ qui est lui-aussi localement compact. De plus, sous ces hypothèses, un sous-ensemble de $(𝒳;\!𝒱)_𝐀$ est \emph{relativement compact} — c'est-à-dire d'adhérence compacte — si et seulement si il est inclus dans un produit $∏_{s ∉ U} 𝒞_s × ∏_{s ∈ U} 𝒱_s ⊆ (𝒳;\!𝒱)_𝐀(U)$, où $U⊆Σ$ est une partie cofinie et chaque $𝒞_s$ est un compact de $𝒳_s$. % Tate, 3.1.2 \subsubsection{Mesures} \label{mesure produit-colimite} On suppose les $𝒳_s$ localement compacts et les $𝒱_s$ compacts. D'après ce qui précède le produit restreint des $𝒳_s$ relativement aux $𝒱_s$ est localement compact ; on veut construire une mesure de Radon (\ref{mesure de Radon}) « produit restreint » sur cet espace, définie à partir de mesures de Radon (dites « locales ») sur les facteurs. Soit $(μ_s)_{s ∈ Σ}$ une famille de telles mesures sur les $𝒳_s$, telle que $μ_s(𝟭_{𝒱_s})=1$ pour presque tout $s$, où $𝟭_{𝒱_s}$ désigne la fonction caractéristique de l'ouvert compact $𝒱_s$. Il résulte de \ref{Radon produit} qu'il existe pour chaque ensemble cofini $U$ de $Σ$ une unique mesure de Radon $μ_U$ sur $(𝒳;\!𝒱)_𝐀(U)$ telle que \[ μ_U(f_U)=∏_{s ∈ Σ} μ_s(f_s), \] lorsque $f_U=\mathop{\bigboxtimes}\lim_s f_s:(x_s)↦ ∏_s f_s(x_s)$, où les fonctions $f_s$ appartiennent à $𝒞_c(𝒳_s,𝐂)$ lorsque $s ∉ U$, et sont dans $𝒞_c(𝒱_s,𝐂)=𝒞(𝒱_s,𝐂)$ et presque toutes égales à $𝟭_{𝒱_s}$ lorsque $s ∈ U$. (L'expression $μ_s(f_s)$ ci-dessus désigne abusivement, lorsque $s ∈ U$, l'intégrale $μ_s({j^{U Σ}_s}_! f_s)$ où ${j^{U Σ}_s}_! f_s$ est le prolongement par zéro de $f_s$ à $𝒳_s$.) Si $U′ ⊆ U$ est une autre partie cofinie et que l'on désigne par ${j^{U U′}}_{\! !} f_U$ le prolongement par zéro de $f_U=\mathop{\bigboxtimes\nolimits_s} f_s$ à $(𝒳;\!𝒱)_𝐀(U′)$, on a $μ_{U′}( {j^{U U′}}_{\! !} f_U)=μ_U(f_U)$. Cela résulte de l'unicité de $μ_{U}$ et du fait que ${j^{U U′}}_{\! !} (\mathop{\bigboxtimes\nolimits_s} f_s) =\mathop{\bigboxtimes\nolimits_s} ({j^{U U′}_s}_!f_s)$, avec des notations évidentes. Soit maintenant $f ∈ 𝒞_c((𝒳;\!𝒱)_𝐀,𝐂)$. D'après l'observation du paragraphe précédent, il existe un ensemble cofini $U ⊆ Σ$ tel que $f$ soit le prolongement par zéro d'une fonction $f_U ∈ 𝒞_c((𝒳;\!𝒱)_𝐀(U),𝐂)$. Le nombre complexe $μ_U(f_U)$ est indépendant du choix de $U$ d'après ce qui précède. On le note $μ(f)$ ; la forme linéaire $f↦ μ(f)$ est une mesure de Radon \emph{produit restreint} des mesures $μ_s$. \subsection{Adèles} \subsubsection{} \label{définition adèles} Soit $K$ un corps global, dont on note $Σ(K)$ l'ensemble des points et $Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)$ l'ensemble cofini des points ultramétriques. La construction générale précédente nous permet de définir le produit restreint $K_𝐀$ des corps locaux $K_x$ pour $x ∈ Σ(K)$, relativement aux anneaux d'entiers $𝒪_{K,x}$ pour $x ∈ Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)$. C'est la colimite des anneaux topologiques $K_𝐀(U)=∏_{x ∉ U} K_x × ∏_{x ∈ U} 𝒪_{K,x}$ pour $U ⊆ Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)$ cofini, appelée \textbf{anneau des adèles sur $K$}. Un élément de $K_𝐀$ est souvent noté $a=(a_x)$, ou parfois $a_𝐀$ pour éviter toute confusion avec un élément de $K$. \subsubsection{} \label{définition adèles ultramétriques} On note aussi $K_𝐀^{\mathtextrm{ultr}}$ (resp. $K_𝐀^{\mathtextrm{arch}}$) le produit restreint des corps locaux $K_x$ pour $x ∈ Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)$, relativement aux anneaux d'entiers $𝒪_{K,x}$ (resp. le produit fini des $K_x$ pour $x ∈ Σ^{\mathtextrm{arch}}(K)$). C'est l'anneau des \textbf{adèles ultramétriques} ou \textbf{finis} (resp. \textbf{archimédiens} ou \textbf{infinis}). \subsubsection{} \label{adèles principaux} Pour chaque $x ∈ Σ(K)$, le corps $K$ se plonge naturellement dans $K_x$. De plus chaque élément $λ ∈ K$ est $x$-entier pour presque toute place $x ∈ Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)$. Ainsi l'inclusion diagonale $K ↪ ∏_{x ∈ Σ} K_x$ se factorise à travers l'inclusion $K ↪ K_𝐀$, dite \emph{inclusion canonique}. Par la suite, nous identifierons $K$ avec son image dans les adèles sur $K$, constituée des \textbf{adèles principaux}. (Voir \ref{cocompacité} pour les propriétés topologiques de cette inclusion.) \subsubsection{} \label{notation KAU} On prendra garde de ne pas confondre l'anneau $𝒪_K(U)$ des éléments $U$-entiers de $K$, pour $U ⊆ Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)$ cofini, et le sous-anneau $K_𝐀(U)$ des adèles. Ils sont liés par la relation : $𝒪_K(U)= K ∩ K_𝐀(U)$. Lorsque cela ne semble pas prêter à confusion, le sous-anneau $K_𝐀(Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K))$ des \textbf{adèles entiers} de $K_𝐀$ est parfois noté $𝒪_{K_𝐀}$ ; il est \emph{compact} lorsque $K$ est un corps de fonctions. D'autre part, lorsque $K$ est un corps de nombres, on a $𝒪_{K_𝐀} ∩ K =𝒪_K$ (\ref{U-entiers}). %Description alternative des adèles finies (ultramétriques) dans le cas des corps %de nombres : $\chap{𝔬_K} ⊗_K K=\colim \frac{1}{α} \chap{𝔬_K}$. %\XXX À inclure ? \subsubsection{}On note $μ^{\mbox{\minus $+$}}_{1}$ la mesure de Radon sur $K_𝐀$ produit restreint des mesures de Tamagawa locales (\ref{mesures Tamagawa locales}). C'est une mesure de Haar sur le groupe additif localement compact $K_𝐀$. La proposition suivante résulte immédiatement de la définition du produit restreint de mesures (\ref{mesure produit-colimite}) et de la proposition \ref{module=module}. \begin{proposition2} Pour tout $a_𝐀=(a_x) ∈ K_𝐀$, on a l'égalité $[×a_𝐀]^*μ^{\mbox{\minus $+$}}_{1}=|a_𝐀| μ^{\mbox{\minus $+$}}_{1}$, où $|a_𝐀|=∏_{x ∈ Σ}|a_x|_{K_x}$. \end{proposition2} Notons que pour presque tout $x$, on a $a_x ∈ 𝒪_{K,x}$ c'est-à-dire $|a_x|_x ≤ 1$ de sorte que la convergence du produit est \emph{a priori} évidente. \begin{théorème2} \label{adèles et cb} Soit $L\bo K$ une extension finie de corps globaux. Le morphisme $ι:K_𝐀 → L_𝐀$ envoyant $(a_x)_{x ∈ Σ(K)}$ sur $(b_{y})_{y ∈ Σ(L)}$ avec $b_{y}=a_x$ lorsque $y↦ x$, induit un isomorphisme d'anneaux topologiques $K_𝐀 ⊗_K L ⥲ L_𝐀$ compatible avec les inclusions canoniques $K ↪ K_𝐀$ et $L ↪ L_𝐀$. De plus, si $L\bo K$ est étale, toute forme $K_𝐀$-linéaire $L_𝐀 → K_𝐀$ est de la forme $\Tr_{L_𝐀 \bo K_𝐀} ∘ [× a_𝐀]$ pour un unique $a_𝐀 ∈ L_𝐀$. En particulier, l'application trace $\Tr_{L_𝐀 \bo K_𝐀}:L_𝐀 → K_𝐀$ est \emph{surjective}. \end{théorème2} Notons que la trace considérée est bien définie car $L_𝐀$ est un $K_𝐀$-module libre de rang fini (égal à $[L:K]$) ; cf. \refext{Alg}{trace-et-norme}. \begin{démo} D'après \ref{fonctorialité anneau des Uentiers}, il existe un ouvert dense $U$ de $K$, et des éléments $α₁,…,α_d ∈ 𝒪_L(U)$, où $d=[L:K]$, tels que $𝒪_L(U)=𝒪_K(U) α₁ ⊕ \cdots ⊕ 𝒪_K(U) α_d$, le terme de gauche étant comme expliqué en \ref{notation OLU}. Cette décomposition en somme directe reste valable lorsque l'on rétrécit $U$. Nous allons montrer que le morphisme $K_𝐀^d → L_𝐀$, $(λ_i)_{1,…,d}↦ ∑_{i=1}^d ι(λ_i)α_i$, est un isomorphisme. C'est la colimite des morphismes $K_𝐀(U′)^d → L_𝐀(U′)$ pour $U′ ⊆ U$. Montrons que chacun d'eux est un isomorphisme, ce dont découle le résultat souhaité. Quitte à rétrécir $U$, on peut supposer $U′=U$. Il suffit de montrer les deux faits suivants. \begin{enumerate} \item Pour chaque pour place $x ∉ U$, le morphisme $K_x^d → L_x:=∏_{y↦x} L_t$, $(λ_i)↦ ∑_i ι_x(λ_i) α_i$, où $ι_x$ est le plongement diagonal $K_x ↪ L_x$, est un isomorphisme. \item Pour chaque place $u ∈ U$, le morphisme $𝒪_{K,u}^d → 𝒪_{L,u}:=∏_{v↦u} 𝒪_{L,v}$, $(λ_i)↦ ∑_i ι_u(λ_i) α_i$ est un isomorphisme. \end{enumerate} Le (i) résulte de \refext{AVD-D}{finitude préservée par complétion}. Le (ii) résulte de l'hypothèse faite sur les $(α_i)$ ci-dessus. Supposons $L\bo K$ étale et montrons que l'accouplement $⟨ ,⟩_𝐀:L_𝐀 ⊗_{K_𝐀} L_𝐀→ L_𝐀$, $a ⊗ b↦ \Tr_{L_𝐀 \bo K_𝐀}(a b)$, met $L_𝐀$ en dualité avec lui-même (sur $K_𝐀$). Soit $a ∈ L_𝐀$ tel que $\Tr_{L_𝐀 \bo K_𝐀} ∘ [× a]=0$, c'est-à-dire dans l'orthogonal de $L_𝐀$. Pour chaque place $x$ de $K$ cet accouplement induit par changement de base $K_𝐀 → K_x$ l'accouplement $⟨ ,⟩_x:L_x ⊗_{K_x} L_x → L_x$ donné par la trace de $L_x$ à $K_x$, parfait d'après \refext{Alg}{pot-diag=geom-red=f-net} et le fait que $L_x ≃ L ⊗_K K_x$ est une $K_x$-algèbre étale. Ainsi chaque $a_x ∈ L_x$ est nul et finalement $a=0$, comme attendu. Soient $U$ et les $(α_i)$ comme ci-dessus. Il nous faut montrer qu'il existe des éléments $α_j^∨ ∈ L_𝐀$ tels que $⟨α_i,α_j^∨⟩=δ_{i,j}$, c'est-à-dire $1$ si $i=j$ et $0$ sinon. D'après ce qui précède, il existe des $α_j^∨$ dans le produit (non restreint) $∏_{x ∈ Σ(K)} L_x=∏_{y ∈ Σ(L)} L_y$ tel que pour chaque $x$ on ait $⟨α_{i,x},α_{j,x}^∨⟩_x=δ_{i,j}$. Pour conclure, il faut montrer que chaque $α_j^∨$ appartient à l'anneau des adèles $L_𝐀$. Or, l'accouplement parfait $⟨ ,⟩_∅: L ⊗_K L → L$ déduit de la trace est la colimite des accouplements $⟨ ,⟩_{U′}: 𝒪_L(U′) ⊗_{𝒪_K(U ′)} 𝒪_L(U′) → 𝒪_L(U′)$ pour $U′ ⊆ U$. Ainsi, quitte à rétrécir $U$, on peut supposer $⟨ ,⟩_U$ parfait. Pour un tel $U$, chaque $α_j^∨$ appartient à $L_𝐀(U) ⊆ L_𝐀$. CQFD. \end{démo} \begin{théorème2} \label{cocompacité} Soient $K$ un corps global et $U$ un ouvert dense de $K$. \begin{enumerate} \item L'inclusion canonique $K → K_𝐀$, où $K$ est muni de la topologie discrète, est continue et est un isomorphisme modulo les compacts : l'image de $K$ dans $K_𝐀$ est discrète et le quotient $K_𝐀 / K$ est compact. Cependant, si $U$ est \emph{affine} (\ref{normalité triviale}, \ref{OKU Dedekind}), le morphisme diagonal $K → \resprod_{u ∈ U} (K_{\chap{u}} ; K_{\chap{u}}^+)$ est d'image \emph{dense}. \commentaire{notations non homogènes, cf. $\chap{u}$...} \item L'inclusion $𝒪_K(U) → ∏_{x ∉ U} K_x$, où $𝒪_K(U)$ est muni de la topologie discrète, est un isomorphisme modulo les compacts. \end{enumerate} \end{théorème2} Ici et ci-dessous, « isomorphisme modulo les compacts » est synonyme de « morphisme \emph{continu} et isomorphisme modulo les compacts ». \begin{démo} (i). On procède, grâce au théorème précédent, par réduction à deux cas particuliers, que nous traitons d'abord et de façon identique. \begin{itemize} \item Cas des nombres rationnels. Soient $C=[-½,½]× ∏_p 𝐙_p$ le sous-ensemble compact de $𝐐_𝐀$, où le premier facteur est dans $𝐐_∞=𝐑$, et $C^∘$ le voisinage ouvert $]-½,½[× ∏_p 𝐙_p$ de l'origine dans $𝐐_𝐀$. Il est clair que $C^∘ ∩ 𝐐=\{0\}$ : tout rationnel dont l'image dans chaque $𝐐_p$ appartient à $𝐙_p$ est entier, c'est-à-dire dans $𝐙$. D'autre part, le seul entier dans $]-½,½[$ est l'entier nul. Ceci prouve que $𝐐$ est discret dans $𝐐_𝐀$. Il est également fermé — car discret dans un espace séparé — de sorte que le groupe topologique quotient $𝐐_𝐀 / 𝐐$ est séparé (\ref{discrétion et séparation quotient}). Pour montrer la compacité du quotient, il suffit de vérifier l'égalité $C + 𝐐 =𝐐_𝐀$. Par translation par un entier, il suffit de montrer que l'on a $\big(𝐑 × ∏_p 𝐙_p\big) + 𝐐 = 𝐐_𝐀$, ou encore que le groupe additif quotient $𝐐_𝐀 / 𝐐_𝐀(Σ^{\mathtextrm{ultr.}}(𝐐))$ est engendré par (l'image de) $𝐐$. Or, ce quotient est canoniquement isomorphe à la \emph{somme} directe $⨁_p 𝐐_p / 𝐙_p$, car l'anneau des adèles est un produit \emph{restreint}. Comme le morphisme évident $𝐐/𝐙 → ⨁_p 𝐐_p / 𝐙_p $ est un isomorphisme, on a le résultat. (Notons que le morphisme précédent correspond à la décomposition primaire suivant la $p$-torsion et que chaque facteur $𝐐_p/𝐙_p$ reçoit isomorphiquement le quotient $𝐙[1/p]/𝐙$.) \item Cas des fractions rationnelles sur $𝐅_p$, $p$ premier. Soient $C=𝐅_p((t^{-1}))× ∏_P 𝒪_{𝐅_p(t),P}$ — où $P$ parcourt l'ensemble des polynômes irréductibles unitaires de $𝐅_p[t]$, identifiés aux points de $𝐅_p(t)$ différents du point à l'infini — le sous-ensemble compact de $𝐅_p(t)_𝐀$ et $C^∘$ le voisinage ouvert $t^{-1}𝐅_p((t^{-1}))× ∏_P 𝒪_{K,P}$ de l'origine dans $𝐅_p(t)_𝐀$. Il est clair que $C^∘ ∩ 𝐅_p(t)=\{0\}$ : toute fraction rationnelle dont l'image dans chaque $𝐅_p(t)_P$ appartient à $𝒪_{𝐅_p(t),P}$ est un polynôme, c'est-à-dire dans $𝐅_p[t]$. D'autre part, le seul polynôme dans $t^{-1}𝐅_p((t^{-1}))$ est le polynôme nul. Ceci prouve que $𝐅_p(t)$ est discret dans $𝐅_p(t)_𝐀$. Pour montrer que le quotient (séparé) $𝐅_p(t)_𝐀/𝐅_p(t)$ est compact, il suffit de vérifier l'égalité $C+𝐅_p(t)=𝐅_p(t)_𝐀$, c'est-à-dire que le groupe additif quotient $𝐅_p(t)_𝐀 / 𝐅_p(t)_𝐀(Σ-\{∞\})$ est engendré par (l'image de) $𝐅_p(t)$. Or, ce quotient est canoniquement isomorphe à la somme directe $⨁_P 𝐅_p(t)_{P}/𝒪_{𝐅_p(t),P}$ et chaque facteur reçoit isomorphiquement $𝐅_p[t][1/P] / 𝐅_p[t]$. Comme le morphisme évident $𝐅_p(t)/𝐅_p[t] → ⨁_P 𝐅_p[t][1/P] / 𝐅_p[t]$ est un isomorphisme, on a le résultat. \item Cas général. Soit $L\bo K$ une extension finie de degré $d$ de corps globaux. Il résulte du théorème \ref{adèles et cb} que le quotient $L_𝐀/L$ est isomorphe, comme groupe topologique, à $(K_𝐀/K)^d$ ; c'est un produit de compacts donc compact. De même l'image de $L$ dans $L_𝐀$ est isomorphe à l'image de $K^d$ dans $K_𝐀^d$ ; elle est donc discrète. \end{itemize} Le résultat de densité $K$, lorsque $U$ est un ouvert affine, est un cas particulier de \refext{AVD-D}{theoreme-approximation-Dedekind} (cf. \ref{OKU Dedekind}. (Il est également possible de donner une démonstration adélique de ce résultat, en utilisant la dualité de Pontrâgin ; cf. \cite[6.79]{suuron1@kato-kurokawa-saito}.) (ii) Soit $U$ comme dans l'énoncé ; en particulier, $U$ ne contient pas de place archimédienne. On a vu que le morphisme $K → K_𝐀$ est un isomorphisme modulo les compacts. Or, $𝒪_K(U)$ est l'image inverse du fermé $K_𝐀(U)$ par ce morphisme. D'après \ref{restriction isomorphisme modulo compacts}, le morphisme $𝒪_K(U) → K_𝐀(U)$ est donc un isomorphisme modulo les compacts. D'autre part, la projection $K_𝐀(U) ↠ ∏_{x ∉ U} K_x$ est également un isomorphisme modulo les compacts car son noyau est le produit $∏_{u ∈ U} 𝒪_{K,u}$ de groupes compacts. D'après \ref{composé isomorphismes modulo compacts}, le morphisme composé $𝒪_K(U) → ∏_{x ∉ U} K_x$ est donc un isomorphisme modulo les compacts. \end{démo} \begin{corollaire2} \label{finitude K inter O sur a} Soit $K$ un \emph{corps de fonctions}. Pour tout $a_𝐀 ∈ K_𝐀^×$, l'ensemble $K ∩ a_𝐀^{-1}𝒪_{K_𝐀}$ est \emph{fini}. \end{corollaire2} Rappelons (\ref{notation KAU}) que $𝒪_{K_𝐀}$ est le produit $∏_{x ∈ Σ^{\mathtextrm{arch}}(K)} K_x × ∏_{x ∈ Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)} 𝒪_{K,x}$, le premier facteur n'apparaissant pas lorsque $K$ est un corps de fonctions. \begin{démo} D'après le théorème précédent, $K$ est discret dans $K_𝐀$. D'autre part, $𝒪_{K_𝐀}$ est compact. L'intersection est donc finie. \end{démo} \begin{théorème2}[Formule du produit] \label{formule du produit} Soit $K$ un corps global. Pour tout $a ∈ K^×$, le produit $|a|:=∏_{x ∈ Σ(K)} |a|_x$ des valeurs absolues normalisées est égal à $1$. \end{théorème2} Notons que ce produit est bien défini d'après \ref{normes fonction presque toutes petites}, et l'observation lui faisant immédiatement suite. \begin{démo} Il résulte du théorème de cocompacité précédent et de la formule de multiplicativité des modules (\ref{module et mesure quotients}) que le module de l'automorphisme $[×a]:K → K$ est égal à $1$. D'autre part, il résulte immédiatement de la construction de la mesure de Haar adélique (\ref{mesure produit-colimite}) que $\module_K([×a])= ∏_x \module_{K_x}([×a])$. Les facteurs sont respectivement égaux à $|a|_x$. CQFD. \end{démo} \begin{démo}[Seconde démonstration (esquisse)] On commence par vérifier la formule pour les rationnels et les fractions rationnelles. Si $a = ±∏_p p^{n_p} ∈ 𝐐$, on a $|a|_p=p^{-n_p}$ et $|a|_∞= ∏_p p^{n_p}$ de sorte que le résultat est évident. Si $f = λ ∏_P P^{n_p} ∈ 𝐅_p(t)$, où les $P ∈ 𝐅_p[t]$ sont irréductibles unitaires et $λ ∈ 𝐅_p^×$, on a $|f|_P=p^{-n_p \deg(P)}$ et $|f|_{∞}=p^{\deg(f)}$, de sorte que le résultat vient de l'égalité tautologique $\deg(f)=∑_P n_P \deg(P)$. (Rappelons que $\deg(f)$ est l'ordre du pôle en $∞$.) Le cas général se ramène aux cas particulier précédents car il résulte de la proposition \refext{AVD-D}{extensions valuations et norme} que si $L\bo K$ est une extension de corps globaux et $x$ une place de $K$, on a pour chaque $λ ∈ L$ la formule $|\N_{L\bo K}(λ)|_x = ∏_{y↦ x} |λ|_y$ et, par conséquent, $∏_y |λ|_y = ∏_x |\N_{L\bo K}(λ)|_x$. \end{démo} \subsection{Idèles} \subsubsection{} \label{définition idèles} Comme précédemment, on considère un corps global $K$, dont on note $Σ(K)$ l'ensemble des points et $Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)$ l'ensemble cofini des points ultramétriques. La construction générale du §\ref{généralités produits restreints} nous permet de définir le produit restreint $K^×_𝐀$ des groupes multiplicatifs $K^×_x$ des corps locaux $K_x$, relativement aux sous-groupes  $𝒪_{K,x}^×$ (pour $x ∈ Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)$). C'est la colimite des groupes topologiques $K^×_𝐀(U)=∏_{x ∉ U} K^×_x × ∏_{x ∈ U} 𝒪^×_{K,x}$ pour $U ⊆ Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)$ cofini, appelée \textbf{groupe des idèles sur $K$}. L'inclusion $K^×_𝐀 ↪ K_𝐀$ est \emph{continue} \XXX et son image est le groupe des éléments inversibles de l'anneau $K_𝐀$ des adèles. \begin{remarques2} \label{discontinuité adélique} Prendre cependant garde au fait que la topologie de $K^×_𝐀$ est n'est \emph{pas} la topologie induite par l'inclusion ensembliste \mbox{$K^×_𝐀 ⊆ K_𝐀$} : si pour chaque nombre premier $p$, $x_p$ désigne l'idèle de $𝐐$ dont la seule coordonnée non triviale vaut $p$ en $p$, la suite $x_p$ converge vers $1$ dans $𝐐_𝐀$ mais pas dans $𝐐^×_𝐀$ Notons également que la norme $K_𝐀 → 𝐑_{≥0}$, $a↦ \module_{K_𝐀}([×a])=∏_x |a_x|_x$, n'est \emph{pas} continue pour la topologie adèlique, alors que sa restriction en $K^×_𝐀 → 𝐑_{>0}$ l'est — essentiellement par définition — pour la topologie idélique : si pour chaque entier $n$, $x_n$ désigne l'adèle de $𝐐$ tel que $x_{n,∞}=1$ et $x_{n,p}=n!+1$ pour tout premier $p$, on a $|x_n|=(n!+1)^{-1}$, qui tend vers $0$ avec $n$, tandis que $x_n → 1$ dans $𝐐_𝐀$. \end{remarques2} On a cependant le résultat positif suivant, dont nous ferons usage ci-après. \begin{proposition2} \label{topologies induites coïncident} Les topologies induites sur $K^{×,=1}_𝐀=\{f ∈ K^×_𝐀: |f|=1\}$ par les inclusions $K^{×,=1}_𝐀 ⊆ K^×_𝐀$ et $K^{×,=1}_𝐀 ⊆ K_𝐀$ coïncident. De plus, pour chaque paire $b ≥ c >0$ de réels, l'ensemble ${K^×_𝐀}^{\substack{≤b \\ ≥c}}$ est un \emph{fermé} de $K_𝐀$. \end{proposition2} \begin{démo} Commençons par montrer que pour chaque $c ∈ 𝐑_{>0}$, le sous-ensemble $K^{×, ≥ c}_𝐀=\{g ∈ K^×_𝐀:|g| ≥ c\}$ est fermé dans $K_𝐀$ ou, de façon équivalente, que son complémentaire $K^{×, < c}_𝐀=\{f ∈ K^×_𝐀:|f| < c\}$ est ouvert. Fixons $c$ et considérons un élément $f$ de ce complémentaire. Il existe un ouvert dense $U$ de $K$ tel que $f ∈ K_𝐀(U)$. Quitte à rétrécir $U$, on peut supposer de plus que l'on a l'inégalité $∏_{s ∉ U} |f_s|_s c ρ^{-1}. \] Compte tenu du l'hypothèse faite sur le norme $N(u)$ de la place $u$, on a $v_u(g_u)<1$ d'où — par positivité et intégrité — $v_u(g_u)=0$. Les résultats établis permettent de conclure. \end{démo} \subsubsection{} \label{idèles principaux} Pour chaque place $x ∈ Σ(K)$, le groupe $K^×$ se plonge naturellement dans $K^×_x$. De plus chaque élément $λ ∈ K^×$ est une unité en $x$ pour presque toute place $x ∈ Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)$. Ainsi l'inclusion diagonale $K^× ↪ ∏_{x ∈ Σ(K)} K^×_x$ se factorise à travers l'inclusion $K^× ↪ K^×_𝐀$, dite \emph{inclusion canonique}. Par la suite, nous identifierons $K^×$ avec son image dans les idèles sur $K$, constituée des \textbf{idèles principaux}. On note $C_K$ le groupe topologique quotient $K^×_𝐀/K^×$ des \textbf{classes d'idèles} et $C_K^{=1}=K^{×,=1}_𝐀 /K^×$ son sous-groupe des classes d'idèles de norme $1$. Prendre garde au fait que $C_K$ n'est \emph{pas} compact. Cependant on a le résultat suivant. \begin{théorème2} \label{theoreme-unites-abstrait} L'inclusion canonique $K^× → K^{×,=1}_𝐀$, où $K^×$ est muni de la topologie discrète, est un isomorphisme modulo les compacts. En particulier, $C_K^{=1}$ est \emph{compact}. \end{théorème2} \begin{démo} La discrétion de $K^×$ dans $K^{×,=1}_𝐀$ ou, de façon équivalente dans $K^×_𝐀$, résulte de celle de $K$ dans $K_𝐀$ et de la continuité de l'injection $K^×_𝐀 ↪ K_𝐀$. Montrons maintenant que le quotient $K^{×,=1}_𝐀/K^×$ est compact en utilisant la compacité du quotient $K_𝐀/K$ et le résultat de comparaison \ref{topologies induites coïncident}. Soit $μ^{\mbox{\minus $+$}}$ une mesure de Haar sur le groupe (localement compact) $K_𝐀$ des adèles et notons $\sur{μ}^{\mbox{\minus $+$}}$ la mesure induite (\ref{module et mesure quotients}) sur le quotient $K_𝐀/K$ des adèles par le groupe discret cocompact $K$. Le groupe des adèles n'étant \emph{pas} compact \XXX, il existe d'après \ref{caractérisation compacité par mesure} un compact $C₀$ de $K_𝐀$ tel que $μ^{\mbox{\minus $+$}}(C₀)>\sur{μ}^{\mbox{\minus $+$}}(K_𝐀/K)$. Soit $C$ l'ensemble des différences $\{g-h:g,h ∈ C₀\} ⊆ K_𝐀$ ; c'est un compact de $K_𝐀$ par continuité de la soustraction, séparation de $K_𝐀$ et compacité de $C₀$. Notons $C^{=1}$ l'intersection $C ∩ K_𝐀^{=1} =C ∩ K_𝐀^{×,=1}$. C'est un compact de $K_𝐀$, étant intersection du compact $C$ avec le fermé $K_𝐀^{=1}$ de $K_𝐀$ (\ref{topologies induites coïncident}). Les deux topologies induites sur $K_𝐀^{=1}=K_𝐀^{×,=1}$ coïncidant, $C^{=1}$ est donc un compact du groupe des idèles de norme $1$. Montrons maintenant que $C^{=1}K^×=K_𝐀^{×,=1}$, ce qui suffit pour montrer la compacité du quotient $K_𝐀^{×,=1}/K^×$. Soit $f ∈ K_𝐀^{×,=1}$. Comme $μ^{\mbox{\minus $+$}}(f^{-1}C₀)>\sur{μ}^{\mbox{\minus $+$}}(K_𝐀/K)$, il existe deux éléments distincts $g,h ∈ C₀$ tels que $f^{-1}g-f^{-1}h = λ ∈ K$. En conséquence, $f = λ^{-1}(g-h)$ appartient à $K^× C$, et même à $K^× C^{=1}$ car $|f|=1$. CQFD. \end{démo} Le théorème précédent a pour corollaire le fameux théorème de Dirichlet suivant. \begin{théorème2}[Théorème des unités de Dirichlet] \label{theoreme-unites-Dirichlet} Soit $U$ un ouvert de $K$. L'application « logarithme » $\log_𝐀:f ↦ (\log(|f|_x))_{x ∉ U}$ de $𝒪_K(U)^×$ vers l'hyperplan $(⨁_{x ∉ U} 𝐑)⁰$ des éléments de somme nulle est un isomorphisme modulo les compacts et le groupe $𝒪_K(U)^×$ est isomorphe à la somme directe de $𝐙^r$, où $r = \max\{\mathtextrm{card}( Σ(K)∖U)-1,0\}$, et d'un groupe abélien fini. En particulier, si $K$ un corps de nombres, $r_{\RR},r_{\CC}$ sont les entiers tels que la $𝐑$-algèbre $K_𝐑=K\otimes_{\QQ} \RR$ se décompose en $\RR^{r_\RR}\times \CC^{r_\CC}$, alors le groupe $𝒪_K^{\times}$ des unités de l'anneau des entiers $𝒪_K$ est de type fini, de rang $r_\RR+r_\CC-1$. \end{théorème2} \begin{corollaire2} \label{finitude-racines-unite} Soit $K$ un corps global. L'ensemble des racines de l'unité de $K$ est fini. \end{corollaire2} \begin{remarque2} Lorsque $K$ est un corps de fonctions de corps des constantes $k$, il résulte de ce qui précède que le quotient $𝒪_K(U)^×/k^×$ est libre de rang $r$. Sous cette forme, c'est un résultat initialement dû à F. K. Schmidt (1931) ; cf. \cite[14.2]{Number@Rosen} ou \cite[chap. 29]{Zahlen@Hasse} pour des démonstrations non adéliques. \end{remarque2} \begin{remarque2} Lorsque $K$ est un corps de nombres, on peut montrer (théorie du corps de classe) que le groupe $C_K$ se surjecte naturellement (mais non trivialement) sur l'abélianisé du groupe de Galois de $K$ ; le noyau de ce morphisme est la composante neutre de $C_K$. \XXX \end{remarque2} \begin{démo} Soit $U$ comme dans l'énoncé. Montrons le premier point. Le groupe $𝒪_K(U)^×$ n'est autre que l'image inverse du sous-groupe $K^{×,=1}_𝐀(U)=\big(∏_{x ∉ U} K^×_x × ∏_{u ∈ U} 𝒪_u^×\big)^{=1}$ de $K^{×,=1}_𝐀$ par le plongement diagonal $K^× → K^{×,=1}_𝐀$. D'après le théorème \ref{theoreme-unites-abstrait} précédent et \ref{restriction isomorphisme modulo compacts}, le morphisme $𝒪_K(U)^× → K^{×,=1}_𝐀(U)$ est donc un isomorphisme modulo les compacts. Il en est de même de la projection $K^{×,=1}_𝐀(U)↠ \big(∏_{x ∉ U} K^×_x \big)^{=1}$, par compacité du produit $∏_{u ∈ U} 𝒪_u^×$. Enfin, chaque logarithme $K_x^× → 𝐑$, $f↦ \log(|f|_x)$ étant également un isomorphisme modulo les compacts (que $x$ soit archimédienne ou ultramétrique), il en est de même du produit $ ∏_{x ∉ U} K^×_x → ∏_{x ∉ U} 𝐑$ et de sa restriction à l'hyperplan de somme nulle. Par composition (\ref{composé isomorphismes modulo compacts}), on en déduit que $𝒪_K(U)^× → \big(∏_{x ∉ U} 𝐑\big)⁰$ est un isomorphisme modulo les compacts. Si $U=Σ(K)$, de sorte que $Σ(K)-U$ est vide — cas qui ne peut se produire que si $K$ est un corps de fonctions —, le groupe $𝒪_K^×(U)$ est un sous-groupe \emph{compact} du groupe \emph{discret} $K^×$ : c'est un groupe abélien fini (\ref{discrétion et séparation quotient}, (i)). Si $U ≠ Σ(K)$, notons $V$ le $𝐑$-espace vectoriel $\big(∏_{x ∉ U} 𝐑\big)⁰$ ; il est de dimension $r$. D'après ce qui précède, $𝒪_K(U)^×$ est extension de son image $Γ$ par le logarithme, qui est un sous-groupe \emph{discret} et \emph{cocompact} de $V$, par un sous-groupe fini de $K^×$. La conclusion résulte alors du lemme (\ref{reseau-discret-cocompact}) ci-dessous. \end{démo} \begin{lemme2} \label{reseau-discret-cocompact} Soient $V$ un $𝐑$-espace vectoriel de dimension finie $r$ et $Γ$ un sous-groupe discret de $V$ tel que le quotient $V/Γ$ soit compact. Alors $Γ$ est isomorphe à $𝐙^r$. \end{lemme2} \begin{démo} Soit $𝐑 Γ$ le $𝐑$-espace vectoriel engendré par $Γ$ dans $V$. Le quotient $V/𝐑 Γ$ est séparé et est l'image continue du compact $V/Γ$ ; c'est donc un compact. Comme c'est un $𝐑$-espace vectoriel, on a nécessairement $V=𝐑 Γ$ : le groupe discret $Γ$ contient une base de $V$. Soit $Γ′$ un sous-groupe engendré par une telle base ; on a $Γ′ ⊆ Γ$. Le quotient $Γ/Γ′$ est discret, car $Γ$ l'est, et compact, car fermé dans $V/Γ′$ isomorphe au tore $(𝐑/𝐙)^r$. Ainsi, $Γ/Γ′$ est un groupe abélien fini et, en particulier, il existe un entier non nul $n$ tel que $n(Γ/Γ′)=0$, c'est-à-dire $Γ′ ⊆ Γ ⊆ \frac{1}{n} Γ′$. La conclusion résulte aussitôt de la théorie (élémentaire) des groupes abéliens de type fini. Cf. \cite{} \XXX. \end{démo} \subsubsection{} \label{définition-régulateur} Soient $K$ un corps de nombres, $X$ l'ensemble de ses points ultramétriques et $A$ l'ensemble des points archimédiens, de cardinal $r_𝐑 + r_𝐂 = r +1$. D'après ce qui précède, le \emph{covolume} de $\log_𝐀 𝒪_K^×$ dans l'hyperplan $H$ des vecteurs de somme nulle de $𝐑^A$ (muni de la mesure de Lebesgue usuelle) est fini. On l'appelle \textbf{régulateur} de $K$. De façon (superficiellement) plus explicite, on peut l'exprimer comme un déterminant. Soient $u₁,…,u_{r}$ des éléments constituant une base de $𝒪_K^×$ modulo torsion et considérons la matrice $r×(r+1)$ dont la $i$-ième ligne est $(\log |u_i|_{K_a})$, pour $a ∈ A$. Par la formule du produit, la somme des colonnes est nulle : chaque ligne appartient à l'hyperplan $H$. Le régulateur est le déterminant de la matrice précédente à laquelle on retire une colonne (quelconque). Exemples. [...] Lien avec la formule des classes. \XXX \subsection{Quasi-caractères multiplicatifs d'un corps global} \label{quasi-caractères globaux} \subsubsection{} Soit $K$ un corps global. Le morphisme « norme » $K^×_𝐀 → 𝐑_{>0}$, $(f_x)↦ ∏_x |f_x|_x$, se factorise par la formule du produit en un morphisme $C_K → 𝐑_{>0}$, dont le noyau est le groupe compact $C_K^{=1}$. Si $K$ est un corps de nombres, le morphisme $C_K → 𝐑_{>0}$ est \emph{surjectif} et possède une section canonique envoyant un réel $t$ strictement positif sur la classe de l'idèle $(f_x)$, où $f_x=t^{1/[K:𝐐]}$ si $x$ est archimédien et $f_x=1$ sinon. Si $K$ est un corps de fonctions, l'image de la norme est trivialement un sous-groupe de la forme $q^{d 𝐙}$, où $q$ est le cardinal du corps des constantes de $K$ et $d$ est un entier strictement positif. (En fait, on peut montrer, cf. \ref{} \emph{infra}, que l'on a $d=1$.) Dans ce cas, il n'y a en général pas de section canonique. \begin{remarque2} Le fait que l'entier $d$ ci-dessus soit égal à $1$ revient à dire, dans le langage qui sera introduit ci-dessous, qu'il existe sur $K$ un « diviseur de degré $1$ ». %Cf. cours Katz, p. 13, via fonction zêta.) \end{remarque2} D'après \ref{quasi-caractères Rplusétoile} et \ref{quasi-caractères Z}, on a : \begin{proposition2} Le groupe des quasi-caractères des classes d'idèles $C_K$ est un groupe de Lie complexe dont la composante connexe est isomorphe à $𝐂$ dans le cas d'un corps de nombres et à $𝐂/𝐙$ dans le cas d'un corps de fonctions. Le groupe de composantes connexes est isomorphe au dual de Pontrâgin de $C_K^{=1}$. Pour tout quasi-caractère $χ$ de $C_K$, il existe un \emph{unique} $σ ∈ 𝐑$ tel que $|χ(ι)|=|ι|^σ$ pour toute classe $ι ∈ C_K$. \end{proposition2} \subsubsection{}Le groupe topologique $𝐂/𝐙$ est bien entendu isomorphe, par l'exponentielle, au plan complexe épointé $𝐂^×$. Comme dans le cas local (\ref{notation quasi-caractère dual}), l'ensemble des quasi-caractères est équipé d'une involution $χ↦ \chap{χ}=χ^{-1} ω₁$, où $ω_σ=|⋅|^σ$. \subsubsection{} \label{décomposition et partie réelle quasi-caractère global} On note $σ=\Re(χ)$ le réel défini ci-dessus, appelé \textbf{partie réelle} du quasi-caractère $χ$ (cf. \ref{partie réelle quasi-caractère local}). Voyons son rapport avec la définition locale. La donnée du quasi-caractère $χ$ est équivalente à celle d'une famille $χ_x : K_x^× → 𝐂^×$ de quasi-caractères locaux satisfaisant les conditions suivantes : — $χ_x$ est \emph{net} pour presque tout $x$ ; — $∏_x χ_x(λ_x)=1$ pour chaque $λ ∈ K^×$. Pour chaque place $x$, le quasi-caractère local $χ_x$ n'est autre que le morphisme envoyant $a_x ∈ K_x^×$ sur $χ(\gtilde{a_x})$, où l'idèle $\gtilde{a_x}$ a toutes ses composantes égales à $1$ sauf celle en $x$, qui est $a_x$. Comme $|\gtilde{a_x}|=|a_x|_x$ et $|χ(a)|=|a|^σ$ (par définition), on en déduite que les parties réelles $\Re(χ_x)$ sont toutes égales à $σ$. \subsubsection{Caractères de Hecke} \XXX \subsection{Groupes de Picard} \newcommand{\Div}{\mathop{\mathtextrm{Div}}} \renewcommand{\div}{\mathop{\mathtextrm{div}}\nolimits} \subsubsection{} \label{définition diviseur} Soient $K$ un corps global et $U$ un ouvert dense de $K$, c'est-à-dire une partie cofinie de l'ensemble $X$ des places ultramétriques de $K$. Notons $\Div(U)$ le groupe abélien $⨁_{u ∈ U} 𝐙$ des \textbf{diviseurs} sur $U$. Tout idèle $(f_x)$ de $K$ définit naturellement un diviseur \[ \div_U((f_x))=∑_{u ∈ U} v_u(f_u) ⋅ u ∈ \Div(U), \] où $v_u:K_u^× ↠ 𝐙$ est la valuation normalisée. On note également $\div$ le morphisme $\div_X$. \subsubsection{} L'application $\div_U:K^×_𝐀 → \Div(U)$ est surjective, de noyau $K^×_𝐀(U)= ∏_{u ∈ U} 𝒪_{K_u}^× × ∏_{y ∈ Σ(K)-U} K_y^×$. (Si $U=X$, on note aussi $𝒪_{K_𝐀}^×$ ce sous-groupe de $K^×_𝐀$.) Les diviseurs dans le sous-groupe $\div_U(K^×)$ de $\Div(U)$ sont appelés \textbf{diviseurs principaux} (sur $U$). On appelle \textbf{groupe de Picard} de $U$, le quotient \[ \Pic(U)=\Div(U)∕\div_U(K^×)=\mathtextrm{coker}(K^× → ⨁_u 𝐙). \] D'après ce qui précède, on a un isomorphisme naturel, induit par $\div_U$, \[ K^× \backslash K^×_𝐀∕K^×_𝐀(U) ⥲ \Pic(U), \] ou encore \[ C_K/C_K(U) ⥲ \Pic(U), \] où l'on note $C_K(U)$ l'image de $K^×_𝐀(U)$ dans le groupe $C_K$ des classes d'idèles. \begin{remarque2} \XXX On a une classification des fibrés de rang $n$ comme un double quotient $\GL_n(K) ∖ \GL_n(K_𝐀) ∕ \GL_n(𝒪_{K_𝐀})$. \end{remarque2} \subsubsection{} \label{formule du produit additive} Si $K$ est de caractéristique \mbox{$p>0$} de corps des constantes $k$, il est intéressant de considérer l'application \textbf{degré} \[ \deg:\Div(X) → 𝐙 \] \[ ∑_x n_x ⋅ x ↦ ∑_x n_x [κ(x):k]. \] En d'autres termes, on étend la fonction $\deg(x)=[κ(x):k]$ à $\Div(X)$ par additivité. La formule du produit (\ref{formule du produit}) se traduit en la « formule des résidus » suivante : \[\deg ∘ \div =0.\] Le morphisme degré se factorise donc en un morphisme $\Pic(X) → 𝐙$, on note $\Pic⁰(X)$ le noyau, constitué des \textbf{classes de diviseurs de degré nul}. La description adélique précédente devient \[ K^× \backslash K^{×,=1}_𝐀∕𝒪^×_{K_𝐀} ⥲ \Pic⁰(X), \] ou encore \[ C^{=1}_K/C^{=1}_K(X) ⥲ \Pic⁰(X), \] où l'on note $C^{=1}_K(X)$ l'image de $K^×_𝐀(X)$ dans le groupe $C^{=1}_K$ des classes d'idèles. \begin{théorème2} Soit $K$ un corps global. \begin{enumerate} \item Si $K$ est un corps de fonctions, $\Pic⁰(X)$ est fini. \item Si $K$ est un corps de nombres, $\Pic(X)$ est fini. \end{enumerate} \end{théorème2} \begin{démo} (i) On a vu en \ref{theoreme-unites-abstrait} que le groupe $C^{=1}_K$ est compact. Le sous-groupe $K_𝐀^×(X)$ de $K^{×,=1}_𝐀$ étant ouvert, il en est de même de $C^{=1}_K(X)$ dans $C^{=1}_K$. Le quotient $C^{=1}_K ∕ C^{=1}_K(X)$ est donc à la fois compact et discret donc fini (\ref{discrétion et séparation quotient}). (ii) Pour la même raison que précédemment, le quotient $C_K ∕ C_K(X)$ est discret. Pour montrer qu'il est fini, il suffit de montrer que le morphisme continu $C^{=1}_K → C_K ∕ C_K(X)$ est \emph{surjectif}. Montrons plus précisément que le morphisme $K^{×,=1}_𝐀 → K^×_𝐀 / K^×_𝐀(X)$ est surjectif, c'est-à-dire que l'on a l'égalité $K^×_𝐀 = K^{×,=1}_𝐀 K^×_𝐀(X)$, ou encore, par translation multiplicative, qu'il existe des idèles dans $ K^×_𝐀(X)$ de norme arbitraire. Cela résulte de l'existence d'une place archimédienne $∞ ∈ Σ^{\mathtextrm{arch}}(K)$ et de la surjectivité de la norme $K^×_∞ → 𝐑_{>0}$. [détailler \XXX] \end{démo} \subsubsection{} Soient $K$ un corps global et $U$ un ouvert dense \emph{affine} de $K$ de sorte que $𝒪_K(U)$ est un anneau de Dedekind de corps des fractions $K$ (cf. \ref{normalité triviale}, \ref{OKU Dedekind}). L'application $U ⥲ \Specmax(𝒪_K(U))$ (cf. \emph{loc. cit.}), s'étend par linéarité en une application surjective $\Div(U) → \Pic(𝒪_K(U))$, où le terme de droite est le groupe de Picard défini en \refext{AVD-D}{définition groupe Picard Dedekind}, quotient du groupe des idéaux fractionnaires inversibles de $𝒪_K(U)$ par le sous-groupe de ses idéaux fractionnaires principaux. Le noyau de $\Div(U) → \Pic(𝒪_K(U))$ étant $\div_U(K^×)$ [détailler \XXX], on a : \begin{proposition2} Soient $K$ un corps global et $U$ un ouvert dense affine de $K$. Le morphisme naturel $\Pic(U) → \Pic(𝒪_K(U))$ est un \emph{isomorphisme}. \end{proposition2} \begin{corollaire2} Soit $K$ un corps de nombres. Le groupe $\Pic(𝒪_K)$ est fini. \end{corollaire2} \begin{démo}[Seconde démonstration] Rappelons (\XXX) que la norme d'un idéal non nul $𝔞$ de $𝒪_K$ est le cardinal $N(𝔞)$ du quotient $𝒪_K/𝔞$. Commençons par établir un premier résultat de finitude : \emph{pour tout entier $n$ il existe un nombre fini d'idéaux $𝔞$ de norme $n$}. En effet, si $𝔞$ est un tel idéal, on a $(n) ⊆ 𝔞$, car $n ⋅ 1_{𝒪_K}$ est d'image nulle dans le quotient $𝒪_K/𝔞$. Comme le quotient $𝒪_K/(n)$ de l'anneau de Dedekind $𝒪_K$ est fini, le nombre de possibilités pour $𝔞$ est également fini. Soit maintenant $ℬ=\{x₁,…,x_d\}$ une base de $𝒪_K$ sur $𝐙$. Posons \[ μ_ℬ = ∏_{σ ∈ \Hom_𝐐(K,𝐂)} ∑_{x ∈ ℬ} |σ(x)|. \] Vérifions que pour chaque idéal non nul $𝔞$ de $𝒪_K$, il existe un élément $a ≠ 0$ tel que \[ |N_{K \bo 𝐐}(a) ≤ N(𝔞) × μ_ℬ. \] Soit $r$ un entier tel que $r^d ≤ N(𝔞) < (r+1)^d$. Comme $N(𝔞)$ est le cardinal du quotient $𝒪_K/𝔞$, il existe par le principe des tiroirs deux éléments $b=∑_{x ∈ ℬ} n_x x$ et $b′=∑_{x ∈ ℬ} m_x x$, où $0 ≤ n_x,m_x ≤ r$, tels que $a=b-b′=∑_x a_x x$ appartienne à  l'idéal $𝔞$. Par construction, on a $N_{K \bo 𝐐}(a)=∏_σ |σ(a)| ≤ r^d μ_ℬ$ car chaque coefficient $|a_x|$ est majoré par $r$ et $\# \Hom_{𝐐}(K,𝐂)=d$. Pour achever la démonstration du corollaire, il suffit de vérifier que tout idéal non nul $𝔞$ de $𝒪_K$ est dans la classe d'un idéal de norme inférieure ou égale à $μ_ℬ$. Soit $𝔞$ un tel idéal non nul et $𝔟$ un idéal de $𝒪_K$ dans la classe de $𝔞^{-1}$. D'après ce qui précède, il existe $b ∈ 𝔟$ non nul tel que $N_{K \bo 𝐐}(b)=N((b))$ soit inférieur ou égal à $N(𝔟) μ_ℬ$. Comme $(b) ⊆ 𝔟$, on a $(b)=𝔟 𝔠$ pour un idéal $𝔠$, nécessairement dans la classe de $𝔞$. D'autre part, on a $N((b))=N(𝔟)N(𝔠)$ d'où $N(𝔠) ≤ μ_ℬ$. CQFD. \end{démo} \subsubsection{} \label{définition diviseur effectif} On appelle \textbf{diviseur effectif}\footnote{On évite la terminologie « diviseur positif » qui peut prêter à confusion dans un contexte plus général.} sur $U$ tout élément du sous-monoïde $\Div_+(U)$ de $\Div(U)$ des diviseurs à coordonnées toutes positives ou nulles. À ce sous-monoïde est associé une relation d'ordre : on dit que $D=∑_u n_u ⋅ u$ est supérieur ou égal à $D′ = ∑_u n_u′ ⋅ u$ si et seulement si $D - D′ ∈ \Div_+(U)$, c'est-à-dire si et seulement si $n_u ≥ n_u′$ pour chaque $u ∈ U$. \section{Formule de Poisson et théorème de Riemann-Roch} Dans tout ce paragraphe, $K$ désigne un corps global. \subsection{Caractères et transformation de Fourier adéliques} \subsubsection{Notations} \label{produit externe restreint} À toute collection $(f_x:K_x → 𝐂)_{x ∈ Σ(K)}$ de fonctions continues telles que pour presque tout $x ∈ Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)$ on ait $f_x(𝒪_{K,x})=\{1\}$, on peut associer la fonction $\mathop{\bigboxtimes\nolimits′}\limits_{x ∈ Σ(K)} f_x$ de $K_𝐀$ dans $𝐂$, produit externe restreint des $(f_x)$, c'est-à-dire envoyant un adèle $(a_x)$ sur le produit $∏_{x ∈ Σ(K)} f_x(a_x)$. C'est une fonction continue, que l'on notera aussi simplement $f_𝐀=(f_x)$, tout en gardant à l'esprit que la donnée de la fonction produit externe restreint $f_𝐀$ ne permet bien évidemment pas de retrouver les facteurs $f_x$. (Voir cependant \ref{caractères additifs QA} ci-dessous dans le cas de caractères.) Il est parfois commode de considérer la partie archimédienne $f_{𝐀}^{\mathtextrm{arch}}:K_𝐀^{\mathtextrm{arch}} → 𝐂$, produit externe fini des $f_x$ pour $x ∈ Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)$, et son analogue ultramétrique $f_𝐀^{\mathtextrm{ultr}}:K_𝐀^{\mathtextrm{ultr}} → 𝐂$. Par construction, on a $f_𝐀=f_𝐀^{\mathtextrm{arch}} ⊠ f_𝐀^{\mathtextrm{ultr}}$. \subsubsection{Espace de Bruhat-Schwartz adélique} \commentaire{Bonne définition ? Kudla [Tate]/Weil [1964b]} \label{Bruhat-Schwartz adélique} On note $𝒮(K_𝐀)$ l'ensemble des combinaisons linéaires à coefficients complexes de produits externes restreints $f_𝐀=(f_x)$ où chaque $f_x$ appartient à l'espace de Schwartz $𝒮(K_x)$ du corps local $K_x$ (\ref{BS-local}), et $f_x = 𝟭_{𝒪_{K,x}}$ pour presque tout $x ∈ Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)$. % cf. Kudla, « Tate's thesis » %p. 125, ces fonctions seraient en général seulement %\emph{denses} dans l'espace de Bruhat-Schwartz. %L'inclusion stricte ne pouvant se produire que pour %des corps de nombres différents de $𝐐$, cf. Weil, [1964b] %p. 178 et p. 189. \XXX Ainsi, la fonction $f_𝐀^{\mathtextrm{ultr}}$ est combinaison linéaire de fonctions $\mathop{\bigboxtimes\nolimits′}\limits_{x ∈ Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)} 𝟭_{a_x + 𝔪_x^{n_x} 𝒪_{K,x}}$ où $(a_x) ∈ K_𝐀^{\mathtextrm{ultr}}$ et les entiers relatifs $n_x$ sont presque tous nuls. Si $K$ est un corps de nombres, il résulte de \ref{cocompacité} (i) qu'il existe un élément $a ∈ K$ tel que $a-a_x$ appartienne à $𝒪_{K,x}$ pour chaque $x ∈ Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)$. Dans ce cas, toute fonction $f_𝐀 ∈ 𝒮(K_𝐀)$ est combinaison linéaire de fonctions $f^{\mathtextrm{arch}} ⊠ f^{\mathtextrm{ultr}}$, où $f^{\mathtextrm{ultr}}$ est de la forme $𝟭_{a+𝔫𝒪_{K_𝐀}}$, avec $a ∈ K$ et $𝔫=∏_{x ∈ Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)} 𝔪_x^{n_x}$ ($n_x=0$ pour presque tout $x$). \subsubsection{Caractères additifs $𝐐_𝐀$} \label{caractères additifs QA} Notons $ψ_𝐐$ le produit externe restreint des caractères $𝐞_{p}$ définis en \ref{caractère corps local} et satisfaisant la condition $𝐞_p(𝐙_p)=\{1\}$ pour tout nombre premier $p$. Explicitement : $ψ_𝐐$ envoie $a_𝐀=(a_p)$ sur le produit (à support fini) $∏_p 𝐞_p(a_p)=𝐞(∑_{p \text{premier}} \{a_p\}_p -a_∞)$, où $𝐞(λ)=\exp(2πiλ)$ pour chaque $λ ∈ 𝐑$. C'est un caractère additif de $𝐐_𝐀$, trivial sur $𝐐$ par la formule du produit (\ref{formule du produit}). Pour chaque $p ∈ Σ(𝐐)$, notons $a_p↦ a_p^𝐀$ la section additive évidente du morphisme $𝐐_𝐀 ↠ 𝐐_p$ : $a_p^𝐀=(a_ℓ)_{ℓ ∈ Σ(𝐐)} ∈ 𝐐_𝐀$, où $a_ℓ$ vaut $0$ si $ℓ ≠ p$ et $a_p$ sinon ; par construction, $(a_p b_p)^𝐀=a_p^𝐀 b_p^𝐀$ et $ψ_𝐐(a_p^𝐀)=𝐞_p(a_p)$. Montrons que le morphisme $a_𝐀↦ [×a_𝐀]^*ψ_𝐐$, $𝐐_𝐀 → \chap{𝐐_𝐀}$ est un \emph{isomorphisme}, où $\chap{𝐐_𝐀}$ désigne le groupe additif des caractères \emph{continus} de $𝐐_𝐀$ à valeurs dans $𝐔=\{z ∈ 𝐂:|z|=1\}$. L'injectivité de $𝐐_𝐀 → \chap{𝐐_𝐀}$ résulte de \ref{dual corps local} et de l'égalité $𝐞_p(a_p b_p)=ψ_𝐐(a_𝐀 b_p^𝐀)$ pour tout $p ∈ Σ(𝐐)$ et tout $b_p ∈ 𝐐_p$. Pour démontrer la surjectivité, il suffit d'après \emph{loc. cit.} de vérifier que tout caractère $ψ ∈ \chap{𝐐_𝐀}$ est un produit restreint de caractères $ψ_p$, triviaux sur $𝐙_p$ pour presque tout $p$. Or, $ψ$ induit un caractère \emph{continu} $Ψ$ du produit $G=∏_{p \text{ premier}} 𝐙_p$, c'est-à-dire du complété profini $\lim_n 𝐙/n$ de $𝐙$. C'est un groupe \emph{profini} (cf. \refext{Krull}{}). \commentaire{déplacer dans [Krull] ?} (Le groupe $G$ est habituellement noté $\chap{𝐙}$.) Soit $V ⊆ 𝐔$ un voisinage ouvert de $1$ ne contenant pas de sous-groupe non trivial, par exemple $V=\{z ∈ 𝐂: |z-1|<1\} ∩ 𝐔$. Alors $Ψ^{-1}(V)$ est ouvert, contient un \emph{sous-groupe} ouvert compact $C=nG$ de $G$ — car ceux-ci forment une base de la topologie de $G$ — et $\Ker(Ψ) ⊆ C$. Le caractère $Ψ$ est donc trivial sur les $𝐙_p$ pour chaque $p$ ne divisant pas $n$. CQFD. Montrons maintenant que $𝐐$ est orthogonal à lui-même, c'est-à-dire qu'un élément $a_𝐀$ de $𝐐_𝐀$ appartient à $𝐐$ si et seulement si $ψ_𝐐(a_𝐀  b)=1$ pour tout $b∈𝐐 ⊆ 𝐐_𝐀$, ou encore si et seulement si la restriction de $[×a_𝐀]^*ψ_𝐐$ à $𝐐$ est triviale. Soit $a_𝐀 ∈ 𝐐^⊥$ ; on peut le décomposer en une somme $a_𝐀=λ + c_𝐀$ où $λ$ appartient à $𝐐$ (plongé diagonalement) et $c_𝐀=(c_p)_p ∈ C=[-½,½]× ∏_{p \text{ premier}} 𝐙_p$ (voir \ref{cocompacité} (i), démonstration). Naturellement, $c_𝐀$ appartient également à $𝐐^⊥$ car l'orthogonal $𝐐^⊥$ est un sous-$𝐐$-espace vectoriel des adèles. En particulier, $1=ψ_𝐐(c_𝐀)$. Comme $ψ_𝐀(c_𝐀)=𝐞_{∞}(-c_∞)$, on a $c_∞=0$. Ainsi, $[×c_𝐀]^*ψ_𝐐$ est trivial sur $𝐐_∞ × ∏_p 𝐙_p$ et $𝐐$ donc (\emph{loc. cit.}) sur $𝐐_𝐀$ tout entier. Ainsi, $c_𝐀=0$. CQFD\footnote{En utilisant un peu la théorie de la dualité, on pourrait montrer que le quotient $𝐐^⊥ \bo 𝐐$ est discret. Comme il est compact, car $𝐐_𝐀 \bo 𝐐$ l'est, il est fini donc trivial car c'est un $𝐐$-espace vectoriel.}. % note : cf. [Lang] \begin{remarque2} On peut montrer que tout caractère continu d'un produit de groupes compacts a presque tous ses facteurs triviaux. \end{remarque2} \subsubsection{Caractères additifs de $𝐤_𝐀$, où $𝐤=𝐅_p(t)$, $p>0$ premier} \label{caractères additifs kA} Notons $∞$ la place correspondant à l'idéal premier $(t^{-1})$ du sous-anneau $𝐅_p[t^{-1}]$ de $𝐤$ et $ψ_∞$ le caractère additif du corps local $𝐤_∞$, construit en \ref{exemples caractères additifs locaux} : si $f ∈ 𝐤_∞$ s'écrit $f= ∑_{-∞}^{i = n} c_i t^i$, avec $c_i ∈ 𝐅_p$ et $n ∈ 𝐙$, \[ ψ_∞(f)=𝐞_{𝐤_∞,dt}(f)=ψ_{𝐅_p}(c_{-1}). \] Notons $𝔪_∞=(t^{-1})𝐅_p[[t^{-1}]]$ l'idéal maximal de l'anneau $𝒪_{𝐤_∞}$ des entiers de $𝐤_∞$. On a $ψ_∞(𝔪_∞²)=\{1\}$ mais $ψ_∞(𝔪_∞) ≠ \{1\}$ : le niveau (\ref{niveau caractère}) de $ψ_∞$ est égal à $-2$. Rappelons (\ref{cocompacité}, démonstration) que le morphisme canonique du compact $C=∏_x 𝒪_{𝐤,x}$ vers le quotient $𝐤_𝐀 \bo 𝐤$ est une surjection. Comme le caractère $ψ_∞$ est trivial sur $𝐤 ∩ 𝒪_{𝐤,∞}$, le caractère composé $∏_x 𝒪_{𝐤,x} ↠ 𝒪_{𝐤,∞} \dessusdessous{ψ_∞}{→} 𝐂^×$ induit un caractère additif (continu) $ψ_𝐤=(ψ_{𝐤,x})_x$ des adèles, trivial sur $𝐤$. Pour chaque $x ≠ ∞$, le caractère local $ψ_{𝐤,x}$ est par construction trivial sur $𝒪_{𝐤,x}$. Montrons qu'il est de niveau nul. Notons $ϖ_x$ le générateur unitaire de l'idéal maximal de $𝐅_p[t]$ correspondant à $x$, que l'on peut écrire sous la forme $ϖ_x=t^{δ_x}u$, où $δ_x=\deg(ϖ)$ et $u ∈ 1+t^{-1}𝐅_p[t^{-1}]$ est de degré inférieur ou égal à $δ_x$ en $t^{-1}$. Tout élément $f$ du complété $ϖ_x$-adique $𝐤_x$ s'écrit de manière unique $∑_{i ≥ -r} c_i(t) ϖ_x^i$, où $r ∈ 𝐙$ et $c_i(t) ∈ 𝐅_p[t]$ est un polynôme de degré strictement inférieur à $δ_x=\deg(ϖ_x)$. On peut décomposer $f$ en la somme d'un élément $f_+$ de $𝒪_{𝐤,x}$ et d'un élément \[ f_-=\frac{λ_{\max }t^{r δ_x -1} + \cdots + λ₀}{(t^{δ_x}u)^r} \] pour un entier $r>0$ et des $λ_i$ dans $𝐅_p$. Par construction $ψ_∞(f_-)=ψ_{𝐅_p}(λ_{\max})$ et $1=ψ_𝐤(f_-)=ψ_∞(f_-)ψ_{𝐤,x}(f_-)$ car $f_-$ appartient à $𝒪_{𝐤,y}$ pour chaque $y ∉ \{x,∞\}$. Ainsi le nombre $ψ_{𝐤,x}(f)$, qui coïncide avec $ψ_{𝐤,x}(f_-)$, est égal à $ψ_{𝐅_p}(-λ_{\max})$. % itou pour 𝐞_{𝐤_x,dt} — car $dt ∈ 𝒪_{𝐤_x}d ϖ_x$ —, En particulier, $ψ_{𝐤,x}(t^{δ_x-1}/ϖ_x)$, égal à $ψ_{𝐤,x}(ϖ_x^{-1})$ car $t^{δ_x-1}$ est une unité en $x ≠ ∞$, vaut $ψ_{𝐅_p}(-1) ≠ 0$. Ceci montre bien que le niveau de $ψ_{𝐤,x}$ est nul. Montrons maintenant que le morphisme $𝐤_𝐀 → \chap{𝐤_𝐀}$, $a↦ [×a]^* ψ_𝐤$ est un isomorphisme. L'injectivité résulte, comme dans le cas du corps des rationnels, de la dualité locale \ref{dual corps local} et du fait que les $ψ_{𝐤,x}$ sont non triviaux. La surjectivité se démontre comme ci-dessus, le groupe profini $G$ remplacé par le produit $∏_x 𝒪_{𝐤,x}$, en utilisant le fait que les $ψ_{𝐤,x}$ sont de niveau nul pour $x ≠ ∞$. (Qu'ils le soient presque tous suffirait.) Vérifions enfin que $𝐤$ est orthogonal à lui-même pour cet accouplement. Soit $a_𝐀 ∈ 𝐤^⊥ =\{b_𝐀 ∈ 𝐤_𝐀 : ψ_𝐤(b_𝐀 𝐤)=\{1\}\}$. On peut écrire $a_𝐀=f + c_𝐀$ où $f$ appartient à $𝐤$ (plongé diagonalement) et $c_𝐀=(c_x)_x ∈ C=∏_x 𝒪_{𝐤,x}$ (\ref{cocompacité}). Quitte à translater par une constante dans $𝐅_p$, on peut supposer que $c_∞$ appartient à $𝔪_∞$. Naturellement, $c_𝐀 ∈ k^⊥$ et $1=ψ_𝐤(c)=𝐞_{∞}(c_∞)$, si bien que $c_∞ ∈ 𝔪_∞²$. Ainsi, $[×c]^*ψ_𝐤$ est trivial sur $C$ et $𝐤$ donc (\emph{loc. cit.}) sur $𝐤_𝐀$ tout entier. Finalement, $c_𝐀=0$ et $a_𝐀 ∈ 𝐤$. CQFD. \begin{exercice2} Montrer que pour tout $x ≠ ∞$, $ψ_{𝐤,x}=[×±1]^*𝐞_{𝐤_x,dt}$. \XXX \end{exercice2} \begin{théorème2}[Dualité de Pontrâgin pour les adèles] \label{Pontrâgin pour adèles} Soit $K$ un corps global. Il existe un caractère (additif) non trivial $ψ$ de $K_𝐀$, trivial sur $K$ % dire que OPS ψ_x tous non triviaux ? et (pour chaque tel $ψ$) le morphisme $K_𝐀 → \chap{K_𝐀}$, $a↦ [×a]^*ψ$ est un isomorphisme. De plus, $K$ est orthogonal à lui-même : si $a_𝐀 ∈ K_𝐀$ et $ψ(λ a_𝐀)=1$ pour tout $λ ∈ K$, on a $a_𝐀 ∈ K$. \end{théorème2} Un mot sur la terminologie : le caractère $ψ$ induit une application linéaire de $𝐙$-modules $K_𝐀 ⊗_𝐙 K_𝐀 → 𝐂^×$, $x ⊗ y↦ ψ(xy)$. L'ensemble orthogonal considéré dans l'énoncé n'est autre que l'ensemble $K^⊥$ relativement à cet accouplement. \begin{démo} Si $K$ est $𝐐$ ou un corps $𝐤=𝐅_p(t)$ ($p>0$), cela résulte de ce qui précède. D'après \ref{toute courbe est revêtement ramifié de P1}, il suffit donc de vérifier que si le théorème est vrai pour un corps global $K$, il l'est également pour une extension étale $L$ de $K$. Fixons une telle extension et un caractère additif non trivial $ψ_{K}$ de $K_𝐀$, trivial sur $K$. On peut également supposer que ses composantes locales sont toutes non triviales car c'est le cas pour $K=𝐐$ ou $𝐤$. \emph{Existence d'un caractère adélique non trivial.} Il résulte de la surjectivité de la trace adélique (\ref{adèles et cb}) que le caractère $ψ_L:=ψ_{K} ∘ \Tr_{L_𝐀 \bo K_𝐀}$ est également non trivial. Comme $\Tr_{L_𝐀 \bo K_𝐀}(L)=K$, ce caractère est trivial sur $L$. \emph{Injectivité du morphisme $L_𝐀 → \chap{L_𝐀}$.} Soient $a_𝐀 ∈ L_𝐀$ un adèle de $L$ et $x$ une place de $K$. Si  $ψ_L(a_𝐀 L_𝐀)=\{1\}$, on a en particulier $ψ_{K,x}(\Tr_{L_x \bo K_x}(a_x L_x))=\{1\}$, où $a_x=(a_y)_{y↦ x}$. Comme $ψ_{K,x}$ est supposé non trivial et que $\Tr_{L_x \bo K_x}(a_xL_x)=K_x$ sauf si $a_x=0$. Ceci permet de conclure. \emph{Surjectivité du morphisme $L_𝐀 → \chap{L_𝐀}$.} Soit $ψ ∈ \chap{L_𝐀}$ et fixons un isomorphisme de $K_𝐀$-algèbres $ι:L_𝐀 ⥲ K_𝐀^n$ comme en \ref{adèles et cb}. Il résulte de la dualité pour $K_𝐀$ qu'il existe un vecteur adélique $v_𝐀 ∈ K_𝐀^n$ tel que $ψ(b_𝐀)=ψ_K(⟨v_𝐀, ι(b_𝐀)⟩)$ pour chaque $b_𝐀 ∈ L_𝐀$. \commentaire{un peu moche...} D'après \emph{loc. cit.}, il existe un élément $a_𝐀$ tel que la forme linéaire $b_𝐀↦ ⟨v_𝐀, ι(b_𝐀)⟩$ soit $\Tr_{L_𝐀 \bo K_𝐀} ∘ [× a_𝐀]$. CQFD. \emph{Orthogonalité.} Si $ι(a_𝐀)=({a₁}_𝐀,…,{a_n}_𝐀) ∈ K_𝐀^n$, $\Tr_{L_𝐀 \bo K_𝐀}(a_𝐀 L)=∑_i {a_i}_𝐀 K$. En conséquence, $ψ_L(a_𝐀 L)=\{1\}$ si et seulement on a $ψ_K({a_i}_𝐀 K)=\{1\}$ pour chaque $i$. Ceci ne se produit que si chaque ${a_i}_𝐀$ est dans $K$. \commentaire{mini-doute} L'isomorphisme $ι$ envoyant $L$ sur $K^n$, on a le résultat. \end{démo} Question : si non trivial et trivial sur $K$, non trivialité partout n'est-elle pas automatique (par approximation) ? \XXX \begin{corollaire2} \label{dual des classes de adèles} Soient $K$ un corps global et $ψ=(ψ_x)$ un caractère non trivial de $K_𝐀 ∕ K$. Le morphisme canonique $K ⥲ \chap{K_𝐀/K}$, $λ↦ [× λ]^* ψ$ est un \emph{isomorphisme}. De plus, le niveau des caractères locaux $ψ_x$ est nul pour presque tout $x$. \end{corollaire2} \begin{démo} Vérifions la première assertion. Si $ψ′$ est un caractère de $K_𝐀$, il existe un unique $a_𝐀 ∈ K_𝐀$ tel que $ψ′=[×a_𝐀]^* ψ$. Si $ψ′_{|K}$ est trivial, on a $a_𝐀 ∈ K^⊥=K$. CQFD. Vérifions maintenant que le niveau des composantes locales est presque toujours nul. D'après l'isomorphisme précédent et le fait qu'un élément de $K^×$ est une unité en presque toute place, il suffit de vérifier l'énoncé pour un seul caractère non trivial $ψ$ des classes d'adèles. Soit $L\bo K$ une extension séparable, $x$ une place de $K$ nette dans $L$, et $ψ_x$ un caractère additif de $K_x$ de niveau nul. Pour chaque $y↦ x$, le caractère $ψ_y =ψ_x ∘ \Tr_{L_y \bo K_x}$ de $L_y$ est de niveau nul (\ref{niveau reste nul si extension nette}). Comme presque tous les points sont nets (\refext{AVD-D}{extension est presque partout nette} [résulte aussi de \ref{adèles et cb} \XXX]), on constate que si le résultat à démontrer est vrai pour un caractère $ψ$ sur $K$, il l'est également pour $ψ ∘ \Tr_{L_𝐀 \bo K_𝐀}$. D'après \ref{caractères additifs QA} et \ref{caractères additifs kA}, il en est ainsi lorsque $K$ est $𝐐$ ou $𝐤$. Ceci suffit pour conclure. (Voir \cite[IV.§2, corollaire 1]{BNT@Weil} pour un argument topologique n'utilisant pas cette réduction au cas particuliers des corps $𝐐$ et $𝐤$.) \end{démo} \begin{corollaire2} \label{caractères séparent les points} Soit $K$ un corps global. Les caractères du groupe abélien compact $K_𝐀∕K$ \emph{séparent les points} : pour toute paire $x,y ∈ K_𝐀∕K$ de points distincts, il existe un caractère $ψ_{x,y} ∈ \chap{K_𝐀∕K}$ tel que $ψ_{x,y}(x) ≠ ψ_{x,y}(y)$. \end{corollaire2} \begin{démo} Par translation, on peut supposer $y=0$. Soit $ψ$ un caractère non trivial de $K_𝐀 ∕ K$. D'après le corollaire précédent, il faut montrer qu'il existe un $λ ∈ K$ tel que $ψ(λ x) ≠ 1$. Ceci résulte du fait que $x ∉ K$ et de l'égalité $K^⊥=K$ (\ref{Pontrâgin pour adèles}). \end{démo} \begin{remarque2} \XXX \label{niveaux forme différentielle presque tous nuls} On peut montrer que si $K$ un corps global de caractéristique $p>0$ et $ω$ une forme différentielle non nulle, pour presque tout $x ∈ Σ(K)$, $𝐞_{K_x,ω_x}(𝒪_{K,x})=\{1\}$. De plus, on peut identifier $K^⊥$ à $Ω¹_{K \bo 𝐅_p}$. \XXX % cf. Tate, cours à Harvard. \end{remarque2} \subsubsection{Transformation de Fourier sur $K_𝐀$} \label{définition Fourier adélique} Soient $K$ un corps global et $ψ= (ψ_x)_x$ un caractère non trivial de $K_𝐀$, trivial sur $K$. Pour chaque place $x$ de $K$, considérons la transformée de Fourier locale autoduale $ℱ_{ψ_x}$ (\ref{Fourier et mesure locaux}). Si $f=\mathop{\bigboxtimes\nolimits′}\limits_x f_x$ appartient à l'espace de Bruhat-Schwartz (\ref{Bruhat-Schwartz adélique}), les fonctions $ℱ_{ψ_x}(f_x)$ sont presque toutes égales à $𝟭_{𝒪_{K,x}}$ : cela résulte du fait que le niveau $n(ψ_x)$ sont presque tous nuls (\ref{dual des classes de adèles}) et de la dualité locale (\ref{Fourier et mesure locaux}, (i) et (v)). La fonction $ℱ_ψ(f):= \mathop{\bigboxtimes\nolimits′}\limits_x ℱ_{ψ_x}(f_x)$ appartient donc également à $𝒮(K_𝐀)$ ; on étend cette définition à $𝒮(K_𝐀)$ tout entier par linéarité. On peut réécrire cette définition de la transformation de Fourier $ℱ_ψ$ sous une forme globale. Notons $μ^{\mbox{\minus $+$}}_ψ$ la mesure de Radon produit restreint des mesures $μ^{\mbox{\minus $+$}}_{ψ_x}$ sur $K_x$ (\ref{mesure produit-colimite}), de sorte que si $f$ est une fonction continue sur $K_𝐀$ prolongement par zéro d'une fonction $f_U$ sur l'ouvert $K_𝐀(U)$ (\ref{définition adèles}), on a \[ μ^{\mbox{\minus $+$}}_ψ(f)= ∫_{K_𝐀(U)} f_U μ^{\mbox{\minus $+$}}_{ψ_U} = ∏_{u ∈ U} \Big( ∫_{K_u} f_u μ^{\mbox{\minus $+$}}_{ψ_u} \Big), \] où le terme de droite est une définition du terme central. Avec ces notations, il est tautologique que pour chaque $f ∈ 𝒮(K_𝐀)$ et chaque adèle $a ∈ K_𝐀$, on a \[ ℱ_ψ(f)(a_𝐀)=∫_{K_𝐀} f ψ_{a}   dμ^{\mbox{\minus $+$}}_ψ, \] où $ψ_{a}=[× a]^* ψ$. Explicitons maintenant cette construction dans deux cas particuliers. — Transformation de Fourier sur $𝐐_𝐀$. Considérons une fonction $f^{\mathtextrm{arch}} ∈ 𝒮(𝐑)=𝒮(𝐐_∞)$, un entier relatif $N∈ 𝐙-\{0\}$ et un rationnel $o ∈ 𝐐$. Il résulte des égalités $𝟭_{o_p+ N 𝐙_p}=[-o_p]^* [×\frac{1}{N}]^* 𝟭_{𝐙_p}$, du formulaire \ref{Fourier et mesure locaux} (ii--iii) et de la formule du produit $∏_p |N|_p=1/|N|$ que l'on a l'égalité \[ ℱ_{ψ_𝐐}(f^{\mathtextrm{arch}} ⊠ 𝟭_{o+N \chap{𝐙}})= \big( \frac{1}{|N|} ℱ_{𝐑}(f^{\mathtextrm{arch}}) \big) ⊠ \big( [×o]^* ψ_𝐐^{\mathtextrm{ultr}} ⋅ 𝟭_{N^{-1} \chap{𝐙}}\big) \tag{$⋆$}, \] où $ψ_𝐐^{\mathtextrm{ultr}}=(𝐞_p)_p$ désigne le caractère additif des adèles finis déduit de $ψ_𝐐$ et l'on rappelle que l'on note $\chap{𝐙}$ le complété profini $∏_p 𝐙_p = \lim_n 𝐙/n$ de $𝐙$. Il en résulte qu'une telle fonction $f=f^{\mathtextrm{arch}} ⊠ 𝟭_{o+N \chap{𝐙}}$ satisfait la \emph{formule de Poisson adélique} \[ ∑_{λ ∈ 𝐐} f(λ)=∑_{λ ∈ 𝐐} ℱ_{ψ_𝐐}(f)(λ), \tag{$⋆⋆$} \] En effet, compte tendu du calcul $(⋆)$ de la transformée de Fourier, la formule de Poisson à établir se réécrit : \[ ∑_{λ ∈ o+N 𝐙} f^{\mathtextrm{arch}}(λ)=\frac{1}{|N|} ∑_{λ ∈ N^{-1} 𝐙} 𝐞_∞(-λ o) \chap{f^{\mathtextrm{arch}}}(λ). \] Cette dernière résulte de la formule de Poisson archimédienne classique appliquée à la fonction $φ(λ)=f^{\mathtextrm{arch}}(N λ + o)$, dont la transformée de Fourier est $λ↦ \frac{1}{|N|} 𝐞_∞(-λ o/N)\chap{f^{\mathtextrm{arch}}}(\frac{λ}{N})$. Par linéarité et l'observation faite en (\ref{Bruhat-Schwartz adélique}), la formule de Poisson $(⋆⋆)$ est valable pour toute fonction $f ∈ 𝒮(𝐐_𝐀)$ ; c'est aussi un cas particulier de la formule \ref{Fourier adélique} établie ci-dessous. —- Transformation de Fourier sur $𝐤_𝐀$. Notons $𝐤$ le corps $𝐅_p(t)$, pour un nombre premier $p$ fixé, et considérons maintenant une fonction $f^∞ ∈ 𝒮(𝐅_p((t^{-1}))=𝒮(𝐤_∞)$, un élément $N ∈ 𝐅_p[t]-\{0\}$, et un élément $o$ de $𝐤$. Comme ci-dessus, on établit sans peine l'égalité \[ ℱ_{ψ_𝐤}(f^∞ ⊠ 𝟭_{o+N \chap{𝐅_p[t]}})= \big( \frac{1}{p^{\deg(N)}} ℱ_{ψ_∞}(f^∞) \big) ⊠ \big( [×o]^* ψ_𝐤^{ ≠ ∞} ⋅ 𝟭_{N^{-1} \chap{𝐅_p[t]}}\big), \] où $ψ_𝐤^{ ≠ ∞}=(ψ_{𝐤_x})_{x ≠ ∞}$ désigne le caractère additif du produit restreint des $𝐤_x$, $x≠ ∞$, déduit de $ψ_𝐤$ (\ref{caractères additifs kA}), et $\chap{𝐅_p[t]}=\lim_P 𝐅_p[t]/P ⥲ ∏_{x ≠ ∞} 𝒪_{𝐤_x}$. Le formulaire \ref{Fourier et mesure locaux} permet le calcul explicite de $ℱ_{ψ_∞}(f^∞)$ par dévissage ; par exemple, $ℱ_{ψ_∞}(𝟭_{𝐅_p[[t^{-1}]]})= p𝟭_{t^{-2}𝐅_p[[t^{-1}]]}$. \commentaire{Rapport avec \ref{mesure quotient adélique} ?} On en tire en particulier que la valeur en zéro de $ℱ_{ψ_𝐤}(𝟭_{𝒪_{𝐤_𝐀}})$, qui coïncide par définition avec la mesure $μ^{\mbox{\minus $+$}}_{ψ_𝐤}(𝒪_{𝐤_𝐀})$ de $𝒪_{𝐤_𝐀}$, est égale à $p$. D'autre part, on vérifie immédiatement la formule $∑_{λ ∈ 𝐤} 𝟭_{𝒪_{𝐤_𝐀}}(λ)= ∑_{λ ∈ 𝐤} ℱ_{ψ_𝐤}\big(𝟭_{𝒪_{𝐤_𝐀}}\big)(λ)$. Le terme de gauche est le cardinal, égal à $p$, de $𝒪_{𝐤_𝐀} ⋂ 𝐤=𝐅_p$ (fonctions rationnelles sans pôle) ; le terme de droite est $p$ fois le nombre, égal à $1$, de fonctions rationnelles $f ∈ 𝐤$ sans pôle hors de l'infini et ayant un zéro (au moins) double en l'infini. Dans le cas d'une fonction générale $f ∈ 𝒮(𝐤_𝐀)$, la formule de Poisson adélique est moins immédiate : la méthode esquissée ci-dessus dans le cas du corps des rationnels nous ramène essentiellement à une forme théorème de Riemann-Roch (\ref{Riemann-Roch}). \subsection{Formules d'inversion et de Poisson} Ce paragraphe est consacré à la démonstration du théorème suivant. \begin{théorème2} \label{Fourier adélique} Soit $ψ=(ψ_x)$ un caractère non trivial de $K_𝐀/K$ et soit $μ^{\mbox{\minus $+$}}_ψ$ la mesure sur $K_𝐀$ associée aux mesures auto-duales $μ^{\mbox{\minus $+$}}_{ψ_x}$ (\ref{définition Fourier adélique}). \begin{enumerate} \item La mesure $μ^{\mbox{\minus $+$}}_ψ$ est indépendante du choix de $ψ$ et coïncide l'unique mesure de Haar $μ^{\mbox{\minus $+$}}_{玉}$, dite \emph{mesure de Tamagawa}, telle que $μ^{\mbox{\minus $+$}}_{玉}$ soit le produit (au sens de \ref{module et mesure quotients}) de la mesure de comptage sur le groupe discret $K$ par la mesure de Haar normalisée sur le groupe \emph{compact} $K_𝐀/K$. \item $ℱ_ψ ∘ ℱ_ψ = [-1]^*$. \item Pour $f ∈ 𝒮(K_𝐀)$, \[ ∑_{λ ∈ K} f(λ)=∑_{λ ∈ K} ℱ_ψ(f)(λ). \] \item \label{Poisson-Riemann-Roch} Pour tout idèle $ι$ et toute fonction $f ∈ 𝒮(K_𝐀)$, on a : \[ ∑_{λ ∈ K} f( λ ι )=\frac{1}{|ι|} ∑_{λ ∈ K} ℱ_ψ(f)(λ /ι). \] \end{enumerate} \end{théorème2} Prendre garde de ne pas confondre la mesure de Tamagawa avec la mesure de Haar (globale) $μ^{\mbox{\minus $+$}}_{1}$ produit des mesures de Haar locales définies en \ref{mesures Tamagawa locales}. \subsubsection{}D'après la dualité de Pontrâgin (\ref{Pontrâgin pour adèles}), tout caractère non trivial des classes d'adèles est de la forme $[×a]^*ψ$ (noté également $ψ_a$) pour un unique $a ∈ K^×$. Il résulte de la formule \ref{Fourier et mesure locaux} (vi) appliquée aux composantes locales et de la formule du produit (\ref{formule du produit}) que $μ^{\mbox{\minus $+$}}_ψ=μ^{\mbox{\minus $+$}}_{ψ_a}$. (On montre également, en utilisant la formule $ℱ_{ψ_a}(f)=[× a^{-1}]^* ℱ_{ψ}(f)$ que le terme de droite de l'égalité (iii) ne dépend pas de $ψ$, comme attendu.) Le fait que la mesure induite par $μ^{\mbox{\minus $+$}}_{玉}$ sur le quotient $K_𝐀/K$ soit \emph{normalisée} sera établi à la fin de la démonstration. \subsubsection{Formule d'inversion} Rappelons que $ℱ_ψ(\mathop{\bigboxtimes\nolimits′} f_x):= \mathop{\bigboxtimes\nolimits′} ℱ_{ψ_x}(f_x)$, lorsque les fonctions $f_x$ sont dans $𝒮(K_x)$ et presque toutes égales à $𝟭_{𝒪_{K,x}}$. La formule d'inversion globale résulte donc, par linéarité, des formules d'inversion locales (\ref{Fourier et mesure locaux}, (iv) \& (v)). \subsubsection{Formule de Poisson : convergence normale sur les compacts} \label{lemme de convergence normale sur compacts} \newcommand{\Supp}{\mathop{\mathtextrm{Supp}}} Soit $f ∈ 𝒮(K_𝐀)$ une fonction et soit $C$ un compact de $K_𝐀$. Vérifions que la somme de fonctions $a_𝐀 ∈ K_𝐀 ↦ ∑_{λ ∈ K} |f(a_𝐀+λ)|$ converge uniformément sur $C$. On peut supposer que la fonction est un produit restreint $f=(f_x)$. Nous traitons séparément corps de fonctions et corps de nombres. ❧ Cas des corps de fonctions. Soit $U$ un ouvert dense de $K$ tel que le support de $f$ soit contenu dans $K_𝐀(U)=∏_{u ∈ U} 𝒪_{k,u} × ∏_{x ∉ U} K_x$. Considérons le compact $D=∏_x D_x$ de $K_𝐀$, où $D_x$ est le support $\Supp(f_x)$ de $f_x$ si $x ∉ U$, ou bien $𝒪_{k,x}$ si $x ∈ U$. (En présence de points archimédiens, la compacité de $\Supp(f_x)$ et, \emph{a fortiori}, celle de $D$ ne sont pas garanties.) La fonction $f$ est nulle hors de $D$. Il en résulte que chaque terme $f(a_𝐀+λ)$ de la somme est nul sauf peut-être si $λ$ appartient à l'intersection de $K$ avec l'image \emph{compacte} l'application $D×C → K_𝐀$, $(d,a)↦ d-a$. L'intersection de $K$ avec tout compact étant \emph{finie} (\ref{cocompacité}), la somme considérée, restreinte au compact $C$, est une somme finie. ❧ Cas des corps de nombres. D'après \ref{Bruhat-Schwartz adélique}, on peut supposer $f$ de la forme $f^{\mathtextrm{arch}} ⊠ f^{\mathtextrm{ultr}}$, où $f^{\mathtextrm{ultr}}$ est la fonction caractéristique $𝟭_{o+𝔫𝒪_{K_𝐀}}$ de $o+𝔫𝒪_{K_𝐀}$, pour un $o ∈ K$ et un produit cartésien $𝔫=∏_x 𝔪_x^{n_x}$ ($n_x=0$ pour presque tout $x$). Lorsque $a_𝐀$ appartient à $C$, les termes $f(a_𝐀+λ)$ de la somme sont nuls sauf peut-être si $λ ∈ K ∩ \big((o+𝔫𝒪_{K_𝐀}) - C^{\mathtextrm{ultr}}\big)$, où $C^{\mathtextrm{ultr}}$ est la projection (compacte) de $C$ dans l'ensemble $K_𝐀^{\mathtextrm{ultr}}$ des adèles ultramétriques (\ref{définition adèles ultramétriques}). (On note ici $(o+𝔫𝒪_{K_𝐀}) - C^{\mathtextrm{ultr}}$ l'image de l'application soustraction, et non la différence ensembliste.) L'application $λ↦ o+𝔫 λ$ induisant une bijection de $K$ ainsi que de l'ensemble des compacts de $K_𝐀^{\mathtextrm{ultr}}$, on peut supposer que $f^{\mathtextrm{ultr}}=𝟭_{𝒪_{K_𝐀}}$. Comme d'autre part cette fonction est majorée par $1$ en valeur absolue, il nous suffit de montrer la convergence uniforme de la somme \[ a_𝐀^{\mathtextrm{arch}} ↦ ∑_{λ ∈ K ∩ (𝒪_{K_𝐀}-C^{\mathtextrm{ultr}})} |f^{\mathtextrm{arch}}(a_𝐀^{\mathtextrm{arch}}+λ^{\mathtextrm{arch}})| \] sur le compact $C^{\mathtextrm{arch}}$ image de $C$ dans $K_𝐀^{\mathtextrm{arch}}=∏_{x ∈ Σ^{\mathtextrm{arch}}(K)} K_x$. (On note ici $λ^{\mathtextrm{arch}}$ l'image de $λ$ dans $K_𝐀^{\mathtextrm{arch}}$ par le plongement diagonal et on rappelle que $K_𝐀^{\mathtextrm{arch}}=K ⊗_𝐐 𝐑$ est isomorphe, en tant que $𝐑$-algèbre, à $𝐑^N$ où $N=r_𝐂 + 2 r_𝐂$.) Il existe une famille $n_x$ d'entiers négatifs presque tous nuls tels que le compact $C^{\mathtextrm{ultr}}$ de $𝒪_{K_𝐀}=∏_{x ∈ Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)} 𝒪_{K,x}$ soit contenu dans le produit cartésien $∏_x 𝔪_x^{n_x}$. L'intersection $K ∩ (𝒪_{K_𝐀}-C^{\mathtextrm{ultr}})$ est donc contenue dans l'idéal fractionnaire produit $I=∏_x 𝔪_x^{n_x}$ de $K$. On s'est donc ramené à montrer que pour toute fonction $φ ∈ 𝒮(K_𝐑)$, la série de fonctions $a ↦ ∑_{λ ∈ I} |φ(a+λ)|$ converge uniformément sur tout compact de $K_𝐑$. Puisqu'un multiple rationnel (non nul) de $I$ est contenu dans l'anneau des entiers $𝒪_K$ on peut supposer, quitte à changer $φ$, que $I=𝒪_K$. L'anneau des entiers $𝒪_K$ étant un \emph{réseau} dans $K_𝐑$ (\ref{cocompacité} (ii)) (c'est-à-dire : son image (par le plongement diagonal) est isomorphe à $𝐙^N$, où $N=\dim_𝐑 K_𝐑$) la conclusion résulte du fait élémentaire suivant : pour tout entier $N$ et toute fonction $φ ∈ 𝒮(𝐑^N)$, la série $a↦ ∑_{λ ∈ 𝐙^n} |φ(a+λ)|$ est uniformément convergente sur tout compact de $𝐑^N$. La définition \ref{BS-local} nous ramène à la convergence de la série $∑_{k ∈ 𝐙^N} \frac{1}{1+|k|^{s}}$ un $s$ suffisamment grand ; chaque $s>N$ convient. \subsubsection{Formule de Poisson : démonstration} Notons $G$ le groupe localement compact $K_𝐀$, $Γ$ son sous-groupe discret cocompact $K$ et $X$ le groupe abélien compact $G ∕ Γ$. Munissons $G$ d'une mesure de Haar $μ_G$ et $X$ de la mesure quotient $μ_X$ associée (\ref{module et mesure quotients}). Fixons $f ∈ 𝒮(K_𝐀)$ et considérons sa périodisée $F : X → 𝐂$, déduite de la fonction (continue) \[ g ∈ G ↦ ∑_{γ ∈ Γ} f(g + γ) \] par passage au quotient $G ↠ X=G ∕ Γ$. Notons $v_μ$ le volume $μ_{X}(X)$ de $X$ et $μ′_X=v_μ^{-1} μ_X$ la mesure de probabilité sur $X$ déduite de $μ_X$. Les caractères continus de $X$ constituent une famille orthonormée de l'espace de Hilbert $L²(X,μ′_X)$ (\ref{Fourier et mesure locaux}, (ii), démonstration). Il résulte d'autre part de \ref{caractères séparent les points} et du théorème de densité de Stone-Weierstraß (\cite[\textbf{TG}, X, §4, nº2, th. 3]{Bourbaki}) que toute fonction continue sur $X$ à valeurs complexes peut être uniformément approchée par des combinaisons linéaires de caractères (continus) de $X$. La famille des caractères (continus) de $X$ est donc une \emph{base hilbertienne} de $L²(X,μ′_X)$. On peut donc écrire, dans cet espace, \[ F = ∑_{\chap{x} ∈ \chap{X}} c_{\chap{x}}(F) \chap{x}, \] où $\chap{X}$ désigne l'ensemble des caractères continus $\chap{x}$ de $X$ (à valeurs dans $𝐔$) et la famille des coefficients $c_{\chap{x}}(F)=⟨F,\chap{x}⟩_{L²(X,μ′_X)}$ appartient à $ℓ²(\chap{X})$. Nous allons montrer que cette famille appartient à $ℓ¹(\chap{X})$, de sorte que la décomposition précédente de $F$ est également valable dans l'espace de Banach $𝒞(X,𝐂)$ et que l'on a, en évaluant en l'identité $0$ de $X$, l'égalité \[ ∑_{γ ∈ Γ} f(γ)=F(0)=∑_{\chap{x} ∈ \chap{X}} c_{\chap{x}}(F), \] qui s'avère être l'égalité désirée (\emph{a priori} à une constante multiplicative près). Calculons : \[ c_{\chap{x}}(F) =∫_X F(x) \sur{\chap{x}(x)} d μ′_X(x) =v_μ ^{-1} ∫_G f(g) \sur{\chap{x}(g)}d μ_G(g) =:v_μ ^{-1} ℱ_μ(f)(\chap{x}), \] où la seconde égalité est conséquence de \ref{module et mesure quotients} — car on a choisi la mesure de comptage sur $Γ$ —, et la dernière est une définition du terme de droite. Appliquons ce qui précède lorsque $μ$ est la mesure $μ^{\mbox{\minus $+$}}_ψ$ associée à un caractère non trivial $ψ$. D'après \ref{dual des classes de adèles}, chaque caractère $\chap{x}$ est de la forme $[× λ]^* ψ$ pour un unique $λ ∈ K$ et, par définition (\ref{définition Fourier adélique}), on a $ℱ_{μ^{\mbox{\minus $+$}}_ψ}(f)(\chap{x})= ℱ_ψ(f)(λ)$. Comme on l'a vu précédemment (\ref{définition Fourier adélique} et \ref{lemme de convergence normale sur compacts}), $ℱ_ψ(f) ∈ 𝒮(K_𝐀)$ et $λ↦ ℱ_ψ(f)(λ)$ appartient à $ℓ¹(K)$. On a donc montré l'égalité \[ ∑_{λ ∈ K} f(λ) =c ⋅ ∑_{λ ∈ K} ℱ_ψ(f)(λ) \] pour chaque fonction $f ∈ 𝒮(K_𝐀)$, où $c$ %=v_{μ^{\mbox{\minus $+$}}_ψ} ^{-1}$ est une constante positive. Il résulte immédiatement de la formule d'inversion (ii) et de l'égalité $-K=K$ dans $K_𝐀$ que l'on a $c²=1$, d'où $c=1$. CQFD. \subsubsection{Formule de Poisson-Riemann-Roch} La formule (iv) résulte de la formule de Poisson que l'on vient d'établir, appliquée à la fonction $[×ι]^*f$, et de l'égalité $ℱ_ψ([×ι]^*f)=|ι|^{-1}[× ι^{-1}]^* ℱ_ψ(f)$, elle-même conséquence immédiate de \ref{Fourier et mesure locaux}, (iii.a). \begin{remarque2} Mentionner des généralités d'analyse harmonique. \cite[\textbf{TS}, II]{Bourbaki} ; cf. notes à la fin. \XXX \end{remarque2} \subsection{Le théorème de Riemann-Roch} \subsubsection{} \label{définition classe canonique} Soient $K$ un corps global de caractéristique \mbox{$p>0$}, $k$ son corps des constantes, de cardinal $q$, et $X$ l'ensemble des points. Pour chaque caractère $ψ=(ψ_x)_{x ∈ Σ(K)}$ non trivial de $K_𝐀\bo K$, considérons le diviseur $\div(ψ)=∑_x n(ψ_x) ⋅ x$, où $n(ψ_x)$ désigne le niveau du caractère $ψ_x$ (\ref{niveau caractère}). Il résulte de la dualité de Pontrâgin (\ref{dual des classes de adèles}), de la formule triviale $n([× f]^* ψ_x)=x(f)+n(ψ_x)$, et de la formule des résidus (\ref{formule du produit additive}) que la classe de $\div(ψ)$ dans le groupe de Picard $\Pic(X)$ est bien définie ; on l'appelle \emph{classe canonique}\index{classe canonique} et on la notera $𝔠$. \subsubsection{} \label{Poisson implique RR} Appliquons la formule de Poisson-Riemann-Roch (\ref{Fourier adélique}, \ref{Poisson-Riemann-Roch}) à la fonction caractéristique, notée ici $𝟭_𝒪$, du sous-anneau compact maximal $𝒪_{K_𝐀}$. Fixons un caractère additif non trivial $ψ$ de $K_𝐀 ∕ K$. Il résulte des formules locales \ref{Fourier et mesure locaux} que l'on a l'égalité : \[ ℱ_ψ(𝟭_𝒪) = \mathop{\bigboxtimes\nolimits′}\limits_x q_x^{-½n(ψ_x)} 𝟭_{𝔪_x^{-n(ψ_x)}} = q^{-½\deg(𝔠)} \mathop{\bigboxtimes\nolimits′}\limits_x 𝟭_{𝔪_x^{-n(ψ_x)}}. \] Fixons un idèle $ι ∈ K^×_𝐀$, dont on note $𝔞$ le diviseur $\div(ι)$. Le terme de droite de l'égalité tautologique $∑_{f ∈ K} 𝟭_𝒪(f ι)=\# \big( K ∩ ι^{-1}𝒪_{K_𝐀}\big)$ (dont la finitude, qui résulte de \ref{lemme de convergence normale sur compacts}, a été observée en \ref{finitude K inter O sur a}), n'est autre que l'ensemble \[ L(𝔞):=\{f ∈ K: \div(f) ≥ - 𝔞\}, \] où $\div(f)=∑_x x(f)x$ est le diviseur d'une fonction $f ∈ K^×$ (\ref{définition diviseur}) et, par convention, $\div(0) ≥ -𝔞$. Notons \[ l(𝔞)=\dim_k L(𝔞) \] la dimension (finie) sur $k$ de $L(𝔞)$, de sorte que $\# L(𝔞) = q^{l(𝔞)}$. Pour chaque $f ∈ K$, on a $\mathop{\bigboxtimes\nolimits′}\limits_x 𝟭_{𝔪_x^{-n(ψ_x)}}(f/ι)=1$ si et seulement si $f ∈ L(𝔠-𝔞)$. Compte tenu de l'égalité $|ι|=q^{-\deg(ι)}=q^{-\deg(𝔞)}$, la formule de Poisson-Riemann-Roch appliquée à $𝟭_𝒪$ et $ι$ se réécrit  \[ q^{l(𝔞)}=q^{\deg(𝔞)}q^{-½\deg(𝔠)}q^{l(𝔠-𝔞)}. \] Toute classe de diviseur $𝔞 ∈ \Pic(X)$ étant de la forme $\div(ι)$ pour un idèle $ι ∈ K^×_𝐀$, on en déduit le théorème fondamental suivant. \begin{théorème2}[Riemann-Roch] \label{Riemann-Roch} Soient $K$ un corps global de caractéristique \mbox{$p>0$}, $k$ son corps des constantes, et $𝔠$ la classe canonique définie en \ref{définition classe canonique}. Pour tout classe de diviseur $𝔞$, on a l'égalité \[ l(𝔞)=l(𝔠-𝔞)+\deg(𝔞)-g+1, \] où $g=½\deg(𝔠)+1$ est un entier appelé \emph{genre} \index{genre} de $K$ et \[ l(𝔞)=\dim_k   \{f ∈ K: \div(f) ≥ -𝔞\}. \] \end{théorème2} \begin{remarque2} Le théorème précédent est valide sous des hypothèses plus générales. Voir \cite[I.§2]{AAF@Lang} et \cite[II.nº9]{GACC@Serre} pour le cas des corps de fonctions sur un corps algébriquement clos, et \cite[p. 101]{BNT@Weil} pour une remarque sur une approche semblable à celle suivie ici. % Et peut-être même que le cas des corps finis entraîne le % cas général… ? \XXX \end{remarque2} \begin{remarque2} La principale application que nous ferons de ce théorème est la démonstration de la rationalité de la fonction zêta d'une courbe algébrique sur un corps fini, cf. \emph{infra}. \XXX \end{remarque2} \begin{exemple2} \label{genre droite projective} Soit $p$ un nombre premier. Le genre du corps $𝐅_p(t)$ des fractions rationnelles est \emph{nul}. En effet, le diviseur $𝔠=\div(ψ_{𝐤_𝐀})$ du caractère additif construit en \ref{caractères additifs kA} est $-2⋅∞$ ; en particulier, son degré est $-2$ et le genre $g=½\deg(𝔠)+1$ est nul. \end{exemple2} \begin{corollaire2} \label{RR et existence de fonctions} Si $\deg(𝔞) > 2g-2$, \[l(𝔞)=\deg(𝔞)-g+1.\] \end{corollaire2} \begin{démo} D'après le théorème de Riemann-Roch (\ref{Riemann-Roch}), il suffit de montrer que $l(𝔠-𝔞)=0$ si $\deg(𝔞)>\deg(𝔠)$ ou encore, de façon équivalente, que $l(𝔞)=0$ si $\deg(𝔞)<0$. Or, si $f ∈ L(𝔞)-\{0\}$ pour un tel idéal, on a $\div(f) + 𝔞 ≥ 0$, d'où $\deg(𝔞)=\deg(\div(f)+𝔞)≥ 0$. Absurde. \end{démo} \begin{corollaire2} \label{RR et croissance l} Si $\deg(𝔟) ≥ 0$ \[l(𝔞) ≤ l(𝔞+𝔟) ≤ l(𝔞)+\deg(𝔟).\] \end{corollaire2} \begin{démo} La première inégalité — croissance de $l$ — résulte immédiatement de la définition : si $𝔡 ≥ 𝔡′$ alors $L(𝔡′) ⊆ L(𝔡)$. D'après le théorème de Riemann-Roch, on a également l'égalité $l(𝔞+𝔟)=l(𝔞)+\deg(𝔟)+\big(l(𝔠-(𝔞+𝔟))-l(𝔠-𝔞)\big)$. Le dernier terme est négatif d'après ce qui précède. \end{démo} \begin{corollaire2} \label{existence de fonctions ayant pôles imposés} Soient $K$ un corps global de fonctions et $Y ⊆ Σ(K)$ un sous-ensemble \emph{fini}. Il existe une fonction $f ∈ K$ dont l'ensemble des pôles est exactement $Y$. \end{corollaire2} \begin{démo} Supposons $Y$ non vide, sans quoi l'énoncé est trivial. Pour chaque $y ∈ Y$, il résulte du théorème de Riemann-Roch qu'il existe une fonction $f_y ∈ L((n+1)y)-L(n y)$, pour un entier positif $n$ suffisamment grand. Une telle fonction a un pôle en $y$ et seulement en ce point. La fonction $f = ∑_{y ∈ Y} f_y$ convient. \end{démo} %Cf. Mittag-Leffler, problème de Cousin etc. \XXX \begin{corollaire2} \label{RR implique Dedekind de type fini} Soient $K$ un corps global de fonctions, de corps des constantes $k$, et $U$ un ouvert dense. Le sous-anneau $𝒪_K(U)$ de $K$ est un anneau de Dedekind de type fini sur $k$. De plus, son corps des fractions est $K$ sauf si $U=Σ(K)$, auquel cas c'est le corps des constantes $k$ de $K$. \end{corollaire2} \begin{démo} Supposons $U ≠ Σ(K)$. D'après \ref{existence de fonctions ayant pôles imposés}, il existe une fonction non constante $f ∈ K$ dont l'ensemble des pôles est exactement $Σ(K)-U$. Ainsi, notant $K₀$ le sous-corps $k(f)$ de $K$ des fractions rationnelles en $f$, l'image $U₀$ de $U$ dans $Σ(K₀)$ n'est autre que $Σ(K₀)-\{∞₀\}$, où $∞₀$ est la « place à l'infini » du corps $K₀$ (isomorphe à $k(t)$ par $t ↦ f$). D'après \ref{fonctorialité anneau des Uentiers} (i), l'anneau $𝒪_K(U)$ est le normalisé dans $K$ de $𝒪_{K₀}(U₀)=k[f]$, ce dernier anneau étant de type fini sur $k$. Il résulte du théorème \refext{AC}{k-algèbre-tf-est-japonaise} (resp. du théorème de Krull-Akiduki, \refext{AVD-D}{Krull-Akiduki}) que l'anneau $𝒪_K(U)$ est de type fini sur $k$ (resp. nœthérien, de dimension $1$). Puisqu'il est normal, c'est un anneau de Dedekind. Supposons maintenant $U=Σ(K)$. Soit $f ∈ K-k$ et $K₀=𝐅_p(f)$ un sous-corps global premier de $K$. L'application $Σ(K) → Σ(K₀)$ étant surjective (\refext{AVD-D}{fonctorialité valeurs absolues}), l'anneau $𝒪_K(Σ)$ est la clôture intégrale de $𝒪_{K₀}(Σ₀)$ dans $K$ (\ref{fonctorialité anneau des Uentiers}, (i)). Or, on a vu en \ref{sections globales droite projective} que $𝒪_{K₀}(Σ₀)=𝐅_p$ : les fonctions rationnelles sans pôles sont les constantes. La conclusion en résulte. \end{démo} De plus, $\Spec(𝒪_K(U))=U ∪ \{(0)\}$. Cf. [Rosen, p. 247] \XXX \subsection{Calculs de volumes} \subsubsection{Idèle différentiel} \label{idèle différentiel} Soient $K$ un corps global et $ψ$ un caractère de $K_𝐀∕K$. Il résulte des généralités sur la transformée de Fourier locale (\ref{Fourier et mesure locaux}) que pour chaque place $x ∈ Σ(K)$, il existe un élément (non canonique) $d_{ψ,x} ∈ K_x^×$ tel que \[ μ^{\mbox{\minus $+$}}_{ψ_x}=|d_{ψ,x}|^{½} μ^{\mbox{\minus $+$}}_{x,1}, \] où $μ^{\mbox{\minus $+$}}_{ψ_x}$ est la mesure de Haar auto-duale associée à $ψ_x$ sur le groupe additif du corps local $K_x$ et $μ^{\mbox{\minus $+$}}_{x,1}$ est la mesure de Tamagawa locale définie en \ref{mesures Tamagawa locales} sur ce même corps. Lorsque $x$ est ultramétrique, une condition nécessaire et suffisante sur $d_{ψ,x}$ est que sa valuation $x(d_{ψ,x})$ soit égale au niveau $n_x(ψ_x)$. En particulier (\ref{dual des classes de adèles}), $|d_{ψ,x}|=1$ pour presque tout $x ∈ Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)$ de sorte qu'il existe un idèle $d_ψ ∈ K^×_𝐀$, appelé \textbf{idèle différentiel attaché à $ψ$}, \index{idèle différentiel} tel que $d_ψ=(d_{ψ,x})$. \subsubsection{}Lorsque $x$ est une place ultramétrique, on a vu au cours de la démonstration de \ref{Fourier et mesure locaux} (orthogonalité des caractères) que la fonction $ℱ_{ψ_x}(𝟭_{𝒪_{K,x}})$ est égale à la fonction $μ^{\mbox{\minus $+$}}_{ψ_x}(𝒪_{K,x}) 𝟭_{𝒪_{K,x}^{⊥}}$, où $𝒪_{K,x}^{⊥}$ est l'orthogonal $\{ f ∈ K_x: ψ_x(f   𝒪_{K,x}) =\{1\}\}$ de $𝒪_{K,x}$ relativement à l'accouplement défini par $ψ_x$. On en tire \[ 𝒪_{K,x}^{⊥}=d_{K,x}^{-1}𝒪_{K,x}, \] car on a l'égalité (\emph{loc. cit.}, (ii)) \[ ℱ_{ψ_x}(𝟭_{𝒪_{K,x}})=|d_{K,x}|^{½}[× d_{K,x}]^* 𝟭_{𝒪_{K,x}}. \tag{$†$} \] \subsubsection{}Lorsque la place $x$ est archimédienne, il résulte de \ref{Fourier et mesure locaux} (v) et que l'on peut prendre pour $d_{ψ,x}$ l'unique élément de $K_x^×$ tel que $ψ_x=[× d_{ψ,x}]^* 𝐞_{K_x}$, où le caractère $𝐞_{K_x}$ est défini en \ref{caractère corps local}. La formule $(†)$ admet l'analogue suivant : $ℱ_{ψ_x}(g_{K_x})=|d_{ψ,x}|^{½}[× d_{ψ,x}]^* g_{K_x}$, où les fonctions gaussiennes $g_{K_x}$ sont comme en \ref{Mellin local archimédien}. D'après \ref{dépendance Fourier local en caractère}, elle est équivalente à la formule bien connue \[ \Big( ℱ_{𝐑}(g_𝐑) : x↦ ∫_𝐑 e^{-πt²-2πitx}dt \Big) =\Big( g_𝐑 : x↦ e^{-π x²}\Big) \] et son analogue complexe $ℱ_{𝐂}(g_𝐂)=\big(g_𝐂:z↦ \frac{1}{π}e^{-2 π z \sur{z}}\big)$. \subsubsection{} \label{Tamagawa et idèle différentiel} L'égalité locale $μ^{\mbox{\minus $+$}}_{ψ_x}=|d_{ψ,x}|^{½} μ^{\mbox{\minus $+$}}_{x,1}$ entraîne l'égalité \[ μ^{\mbox{\minus $+$}}_{玉}=|d_ψ|^{½} μ^{\mbox{\minus $+$}}₁. \] Le module $|d_ψ|$ ne dépendant pas du choix de $ψ$, on le note dorénavant $|d_K|$. Il résulte des calculs effectués en \ref{Poisson implique RR} et, en caractéristique nulle, de la proposition \ref{niveau et différente} %— car on peut supposer $ψ=𝐞_K$ — que l'on a : \[ |d_K| = \begin{cases} \displaystyle |𝔡_K|^{-1} & \text{si } \car(K)=0\\ \displaystyle q^{2-2g} & \text{si } \car(K)>0, \end{cases} \] où $𝔡_K$ est la différente (\refext{AVD-D}{différente}) du corps de nombres $K$ sur $𝐐$ et $g$ est le genre (\ref{Riemann-Roch}) du corps de fonctions $K$, de corps des constantes de cardinal $q$. \subsubsection{} \label{Fourier de 1} Soit $K$ un corps global et posons \[ 𝟭_𝒪= \big(\mathop{\bigboxtimes\nolimits′}\limits_{x ∈ Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)} 𝟭_{𝒪_{K,x}}\big) ⊠ \big(\mathop{\bigboxtimes\nolimits}\limits_{x ∈ Σ^{\mathtextrm{arch}}(K)} g_{K_x}\big). \] Il résulte de ces formules locales précédentes que l'on a la formule (globale) \[ ℱ_ψ(𝟭_𝒪)=|d_K|^{½} [×d_K]^*𝟭_𝒪. \] Cette égalité est le pendant adélique de l'équation fonctionnelle $θ(t)=\frac{1}{\sqrt{t}} θ(\frac{1}{t})$ considérée en \ref{équation-fonctionnelle-thêta}. Elle nous servira également à établir les équations fonctionnelles des fonctions $ζ$ de corps globaux. \subsubsection{} \label{mesure quotient adélique} Pour toute mesure de Haar $μ$ sur $K_𝐀$, notons ici $\sur{μ}$ l'unique mesure de Haar sur $K_𝐀/K$ telle que $μ$ soit le produit (au sens de \ref{module et mesure quotients}) de $\sur{μ}$ par la mesure de comptage sur le sous-groupe discret $K$. Compte tenu des égalités $\sur{μ}^{\mbox{\minus $+$}}_{玉}(K_𝐀 ∕ K)=1$ (\ref{Fourier adélique}, (i)), et $μ^{\mbox{\minus $+$}}_{玉}=|d_K|^{½} μ^{\mbox{\minus $+$}}₁$ (\ref{Tamagawa et idèle différentiel}), on a : \[ \sur{μ}^{\mbox{\minus $+$}}_{1}(K_𝐀 \bo K) = \begin{cases} \displaystyle \sqrt{|𝔡_K|} & \text{si } \car(K)=0\\ \displaystyle \sqrt{q^{2g-2}} & \text{si } \car(K)>0, \end{cases} \] où l'on rappelle que $μ^{\mbox{\minus $+$}}_{1}$ est la mesure de Haar sur $K_𝐀$ produit restreint des mesures locales $μ^{\mbox{\minus $+$}}_{x,1}$. (Lorsque $K$ est un corps de fonctions, c'est l'unique mesure de Haar pour laquelle le compact $∏_x 𝒪_{K,x}$ est de mesure $1$.) Pour une démonstration directe de cette seconde formule à partir du théorème de Riemann-Roch, cf. \cite[2.1.3.b)]{Adeles@Weil}. \subsubsection{}Définissons de même la mesure $\sur{μ}^{\mbox{\minus $×$}}_{1}$ sur les classes d'idèles $C_K=K_𝐀^×/K^×$ comme étant l'unique mesure dont $μ^{\mbox{\minus $×$}}₁$ est le produit par la mesure de comptage sur le sous-groupe discret (non cocompact) $K^×$. \begin{théorème2} \label{calcul volume idélique} Soit $K$ un corps global. Notons $w$ le nombre de racines de l'unité dans $K$ et $h$ le cardinal du groupe de Picard. Alors, \[ \sur{μ}^{\mbox{\minus $×$}}_{1}(C^{=1}_K) = \frac{h}{w}× \begin{cases} \displaystyle 2^{r_𝐑}(2 π)^{r_𝐂} R & \text{si } \car(K)=0\\ \displaystyle 1 & \text{si } \car(K)>0, \end{cases} \] où $C_K^{=1}=K^{×,=1}_𝐀/K^×$ et $R$ est le \emph{régulateur} défini en \ref{définition-régulateur}. \end{théorème2} \begin{remarque2} On verra plus tard que, dans le langage des fonctions $ζ$, ce théorème devient — dans le cas des corps de nombres — : $\Res_{s=0} \frac{ζ_K(s)}{s^{r_𝐑+r_𝐂}}=-\frac{hR}{w}$. \XXX \end{remarque2} \begin{démo} Le groupe de Picard étant isomorphe au quotient $C_K^{=1}/C_K^{=1}(X)$, où $X$ est l'ensemble des points ultramétriques de $K$ et $C_K^{=1}(X)=K^×K_𝐀^{×,=1}(X)/K^×$, il suffit de démontrer l'égalité $\sur{μ}^{\mbox{\minus $×$}}_{1}(C_K^{=1}(X))=1/w$ si $K$ est un corps de fonctions et $2^{r_𝐑}(2 π)^{r_𝐂} R/w$ sinon. Le noyau $K^× ∩ K_𝐀^{×,=1}(X)$ du morphisme $K_𝐀^{×,=1}(X) ↠ C_K^{=1}(X)$ étant l'ensemble $𝒪_K(X)^×$ des unités de $K$ entières en chaque place ultramétrique, on a $K_𝐀^{×,=1}(X)/𝒪_K(X)^× ⥲ C_K^{=1}(X)$. Cas d'un corps de fonctions. La condition sur la norme (globale) est automatiquement satisfaite, $K^×_𝐀(X)=∏_x 𝒪_{K,x}^×$ et $𝒪_K(X)^×= k^×$. Le cardinal de $k^×$ étant $w$ et, par définition, $μ^{\mbox{\minus $×$}}_{1}(∏_x 𝒪_{K,x}^×)=1$, la conclusion est acquise dans ce cas. Cas d'un corps de nombres. Pour calculer le volume du quotient $K^{×,=1}_𝐀/𝒪_K^×$, nous utilisons maintenant l'application logarithme $\log_𝐀:K^×_𝐀 → ∏_{y ∈ Σ^{\mathtextrm{arch}}(K)} 𝐑$ définie en \ref{theoreme-unites-Dirichlet} et $μ^{\mathtextrm{arch}}$ la mesure image directe de $μ^{\mbox{\minus $×$}}_{1}$ par $\log_𝐀$. Le noyau de la restriction à $𝒪_K^×$ de $\log_𝐀$ étant l'ensemble des racines de l'unité, de cardinal $w$, on a l'égalité \[ w ⋅ \sur{μ}^{\mbox{\minus $×$}}_{1}\big(K_𝐀^{×,=1}(X)/𝒪_K^×\big)= \sur{μ}^{\mathtextrm{arch}}\Big(\big(∏_{y ∈ Σ^{\mathtextrm{arch}}(K)} 𝐑\big)⁰)/\log_𝐀 𝒪_K^×\Big). \] (Raisonner par exemple en terme de domaines fondamentaux.) Il résulte des définitions locales \ref{sorites mesures multiplicatives locales} ainsi que d'un calcul élémentaire immédiat \footnote{Précisément : $∫_{𝐑^×} f(\log(|x|))\frac{dx}{x}=2×∫_𝐑 f(y)dy$ et $∫_{𝐂^×} f(\log(|z|²))\frac{2dxdy}{|z|²} = 2π×∫_𝐑 f(r)dr$.} que la mesure $μ^{\mathtextrm{arch}}$ est égale à $2^{r_𝐑}(2π)^{r_𝐂}$ fois la mesure de Lebesgue usuelle sur l'espace euclidien $𝐑^{Σ^{\mathtextrm{arch}}(K)}=𝐑^{r_𝐑 + r_𝐂}$. Pour conclure, il nous faut vérifier que le covolume (usuel) de $\log_𝐀(𝒪_K^×)$ dans $\big(∏_{y ∈ Σ^{\mathtextrm{arch}}(K)} 𝐑\big)⁰$ est égal au régulateur $R$. C'est essentiellement la définition. \end{démo} %Cf. [Swinnerton-Dyer, p. 53]. \section{Fonctions zêta} \subsection{Fonctions zêta de Dedekind : définitions} \subsubsection{} \label{définition zêta Dedekind} Soit $K$ un corps global, dont on note $X$ l'ensemble des points ultramétriques. Pour chaque $x ∈ X$ notons $q_x$ — ou parfois $N(x)$ — le cardinal du corps fini $k_x=𝒪_{K,x}/𝔪_x$. La \textbf{fonction zêta de Dedekind} \index{fonction zêta de Dedekind} de $K$ est la fonction \[ ζ_K(s)= ∏_{x ∈ X} ζ_{K_x}(s)=∏_{x ∈ X} \frac{1}{1-q_x^{-s}}. \] Ce produit converge absolument sur le demi-plan $\Re(s)>1$. Comme c'est un cas particulier d'un énoncé démontré ci-dessous (\ref{}), nous n'en donnons pas la démonstration ici. \XXX % cf. Weil p. 102-103. \subsubsection{}On rappelle (\ref{calcul explicite intégrale quasi-caractère}, \ref{Matchett}) que pour chaque $x$, le facteur local $ζ_{K_x}(s) = \frac{1}{1-q_x^{-s}}$ est la transformée de Mellin (locale) $ζ_{ψ_x}(𝟭_{𝒪_{K_x}},1,s)$ relativement à un caractère additif $ψ_x$ de niveau nul de $K_x$. Cette observation est cruciale. \subsubsection{} \label{zeta Dedekind via Hasse} Si $U$ est un \emph{ouvert affine} de $K$, c'est-à-dire un ensemble cofini $U ⊆ X$ tel que l'anneau $𝒪_K(U)$ des $U$-entiers soit de corps des fractions $K$ (\ref{normalité triviale}, \ref{OKU Dedekind}), on a l'égalité tautologique \[ ζ_K(s) = ζ_{𝒪_K(U)}^{\mathtextrm{Hasse}}(s) × ∏_{x ∈ X-U} ζ_{K_x}(s), \] où l'on note $ζ_{A}^{\mathtextrm{Hasse}}(s)=∏_{𝔪 ∈ \Specmax(A)} \frac{1}{1- \# κ(𝔪)^{-s}}$ est la fonction zêta de Hasse d'un anneau $A$ et $κ(𝔪)$ le corps résiduel $A/𝔪$ (\refext{AC}{définition fonction zêta Hasse}). Cette égalité est conséquence formelle du fait que l'application $x↦ 𝔪_x$ induit une bijection entre $U$ et le spectre maximal $\Specmax(𝒪_K(U))$ de $𝒪_K(U)$, telle que $q_x = N(𝔪_x)$. \subsubsection{Réécriture : corps de nombres} Si $K$ est un corps de nombres, on a l'égalité \[ ζ_K(s)=ζ_{𝒪_K}^{\mathtextrm{Hasse}}(s)=∑_{𝔞} N(𝔞)^{-s}, \] où $𝔞$ parcourt l'ensemble des idéaux non nuls de l'anneau des entiers $𝒪_K$ et $N(𝔞)$ est le cardinal du quotient (fini) $𝒪_K ∕ 𝔞$. La seconde égalité est l'analogue de la formule d'Euler $∏_p \frac{1}{1-p^{-s}} = ∑_{n ≥ 1} n^{-s}$ (\cite[théorème 8]{Variae@Euler}). Elle résulte des égalités $(1-N(𝔪)^{-s})^{-1}=∑_{r ≥ 1} N(𝔪^r)^{-s}$, et du fait que chaque $𝔞$ s'écrit de manière unique (à l'ordre des facteurs près) comme un produit $𝔪_{x₁} \cdots 𝔪_{x_r}$, dont la norme est $N(𝔪_{x₁} \cdots 𝔪_{x_r})=N(x₁)\cdots N(x_r)$. \subsubsection{Réécriture : corps de fonctions} \label{réécriture Zêta corps de fonctions} Si $K$ est un corps de fonctions, notons $q$ le cardinal de son corps des constantes. Pour chaque $x ∈ X$, le cardinal $q_x$ est donc égal à $q^{\deg(x)}$, où $\deg(x)$ est le degré de l'extension $κ(x) \bo k$ (\ref{formule du produit additive}). Il en résulte que l'on a, du moins formellement, \[ ζ_K(s) = Z_K(q^{-s}) \text{, où } \] \[ Z_K(T)=∏_{x ∈ X} \frac{1}{1-T^{\deg(x)}} ∈ 𝐙[[T]]. \] L'égalité $(1-T)^{-1}=∑_{n ≥ 0} T^n$ nous permet d'une part de calculer la dérivée logarithmique \[ T \frac{Z′_K}{Z_K} = ∑_{n ≥ 1} N_K(n) T^n, \] où $\displaystyle N_K(n)=∑_{\substack{x ∈ X \\ \deg(x)|n}} \deg(x)$ et également d'exprimer la fonction Zêta sous la forme d'une série génératrice \[ Z_K(T)= ∑_{n ≥ 0} E_K(n) T^n, \] où $E_K(n)$ est le nombre de \emph{diviseur effectifs} (\ref{définition diviseur effectif}) de $K$ de degré $n$\footnote{En termes plus expressifs, $N_K(n)$ est le \emph{nombre de $𝐅_{q^n}$-points de la courbe projective lisse sur $𝐅_q$ associée à $K$}.}. Notons que l'expression de la dérivée logarithmique est équivalente à la formule : \[ Z_K(T)=\exp(∑_{n ≥ 1} N_K(n)\frac{T^n}{n}). \tag{††} \] \subsubsection{} \label{notation-Xk} Pour chaque extension $k′$ du corps des constantes $k$ de $K$, notons $X(k′)$ l'ensemble des $k$-places de $K$ à valeurs dans $k′$ (\refext{AVD-D}{définition-place}). Comme expliqué dans \emph{loc. cit.}, on a une application naturelle $X(k′) → X$, envoyant une place $φ:K → k′ ∪ \{∞\}$ sur l'anneau de valuation $φ^{-1}(k′)$, correspondant à son tour à une classe de valuations $|⋅|_φ$ sur $K$ ; on a \mbox{$\{f ∈ K: |f|_φ<1\}=φ^{-1}(0)$}. Si l'extension $k′ \bo k$ est finie de degré $n$, l'image cette application est l'ensemble $\{x ∈ X: \deg(x)|n\}$ et la fibre au-dessus de $x$ est exactement de cardinal $\deg(x)$. Il en résulte que l'entier $N_K(n)$ ci-dessus n'est autre que le cardinal de $X(k_n)$, où $k_n$ désigne une extension de $k$ de degré $n$ (unique à isomorphisme près) et que pour toute fonction $f ∈ K^×$, l'ensemble des places $φ ∈ X(\sur{k})$ telles que $φ(f)=0$ est de cardinal $\deg \div₀(f)=\displaystyle ∑_{x:|f|_x<1} \deg(x)$. \subsubsection{} \label{action-sur-Xk} On conserve les notations précédentes. Si $σ$ est un $k$-automorphisme de $K$, il agit (à gauche) sur $X$ en envoyant (la classe d')une valeur absolue $|⋅|$ sur (la classe de) la valeur absolue $f↦ |σ^{-1}(f)|$. De même, pour toute extension $k′\bo k$, $σ$ agit sur $X(k′)$ via $σ ⋅ φ = φ ∘ σ^{-1}$. Ces actions sont compatibles : le morphisme $X( k′) → X$ est $\Aut_k(K)$-équivariant. Dualement, le groupe de Galois $G_k=\Gal(\sur{k}/k)$ agit sur $X(\sur{k})$ : un élément $σ ∈ G_k$ agit sur $φ : K → \sur{k} ∪ \{∞\}$ par la formule $σ ⋅ φ = σ ∘ φ$. (On décide que $σ(∞)=∞$.) L'application naturelle $X(\sur{k}) → X$ induit une bijection \[ {}_{G_k ∖}X(\sur{k}) ⥲ X. \] \begin{remarque2} Dans le langage de la géométrie algébrique, l'ensemble $X(\sur{k})$ peut s'interpréter de la façon suivante : c'est l'ensemble des points fermés de la courbe algébrique projective lisse sur $\sur{k}$ de corps des fonctions $K ⊗_k \sur{k}$. \end{remarque2} \subsubsection{Extension du corps des constantes} \label{extension des scalaires pour Zêta} Fixons un corps de fonctions $K$ de corps des constantes $k$ et un entier $e ≥ 1$. Notons $k_e$ l'extension (cyclique) de degré $e$ de $k$ (unique à isomorphisme près), $K_e$ le corps produit tensoriel $K ⊗_k k_e$ obtenu à partir de $K$ par extension des scalaires de $k$ à $k_e$, et $X_e$ l'ensemble de ses points (ultramétriques). Les faits suivant résultent des résultats exposés en \refext{AVD-D}{} \XXX : \begin{enumerate} \item le corps des constantes de $K_e$ est $k_e$ ; \item l'application $X_e → X$ est surjective ; \item si $x ∈ X$, tout $y ∈ X_e$ s'envoyant sur $x$ est de corps résiduel $κ(y)$ un corps composé de $k_e$ et de $κ(x)$ et, par conséquent, de degré $(e,\deg(x))$ sur $k$ ; \item si $x ∈ X$, la fibre au-dessus de $x$ est de cardinal $\frac{e}{(e,\deg(x))}$. \end{enumerate} Il résulte formellement de tout ceci que l'on a $N_{K_e}(n)=N_K(n)$ pour chaque entier $n ≥ 1$. En termes de fonctions Zêta, cela se traduit par l'égalité \[ Z_{K_e}(T^e)= ∏_{μ ∈ μ_e(𝐂)} Z_K(μT). \] (Utiliser la formule $(††)$.) \subsubsection{Fonction zêta complétée} \label{fonction zêta complétée} Lorsque $K$ est un corps de nombres, il est commode d'introduire la \textbf{fonction zêta (de Dedekind) complétée} \[ \sur{ζ}_K(s)=∏_{\clap {$\scriptstyle a ∈ Σ^{\mathtextrm{arch.}}(K)$}} ζ_{K_a} ⋅ ζ_K(s), \] où les fonctions zêta archimédiennes $ζ_𝐑$ et $ζ_𝐂$ sont les \textbf{facteurs Gamma} modifiés considérés en \ref{Mellin local archimédien}. Nous étendons cette définition au cas où $K$ est un corps de fonctions en posant $\sur{ζ}_K(s)=ζ_K(s)$ (cf. $Σ^{\mathtextrm{arch.}}(K)=∅$). Nous verrons ci-dessous que cette fonction zêta se prolonge analytiquement en une fonction méromorphe satisfaisant l'équation fonctionnelle \[ \sur{ζ}_K(s)=|d_K|^{s-½} \sur{ζ}_K(1-s), \] où $|d_K|$ désigne la norme d'un idèle différentiel (\ref{idèle différentiel}). La fonction zêta complétée est parfois notée $Ξ_K$ ou $\chap{ζ}_K$ dans la littérature. Prendre également garde au fait que certains auteurs (comme \cite{Neukirch}) incluent le facteur correctif supplémentaire $|d_K|^{-s/2}$ dans la définition de $\sur{ζ}_K$ de façon à avoir une parfaite invariance $s ↔ 1-s$. \subsubsection{}Nous verrons dans d'autres chapitres des applications arithmétique de l'étude analytique des fonctions zêta (au sens large). Voici une chronologie non exhaustive \XXX : \begin{itemize} \item 1737, Euler (\cite[théorème 19]{Variae@Euler})\footnote{Voir par exemple \cite{Euler@Kurokawa} pour un panorama des résultats d'Euler.} : $∑_{p \text{ premier}} \frac{1}{p} = \log ζ(1) = +∞$. \item 1838, Dirichlet : « Sur l′usage des séries infinies dans la théorie des nombres » [...]. \item 1859, Riemann : utilisation de la variable complexe, lien fin entre $π(x)$ et les zéros de $ζ$. \item 1896, Hadamard et de la Vallée-Poussin : $ζ_{|\Re =1} ≠ 0 ↔ π(x) ∼ \frac{x}{\log(x)}$. % Frobenius \XXX \item 1925, Čebotarëv : théorème d'équidistribution \end{itemize} \subsection{Exemples} \subsubsection{Corps des rationnels} \label{exemple zêta rationnels} La fonction zêta $ζ_𝐐$ du corps $𝐐$ est la fonction zêta de Riemann\index{fonction zêta de Riemann} \[ ζ(s)=∑_{n ≥ 1} n^{-s}=∏_p (1-p^{-s})^{-1}, \] et, par définition, \[ \sur{ζ}_𝐐=ζ ⋅ ζ_𝐑 \text{, où } ζ_𝐑(s)=π^{-½s}Γ(½s). \] Comme on l'a vu en \ref{exemple Mellin réel}, la fonction $\sur{ζ}_𝐐(s)$ est la transformée de Mellin (\ref{transformation Mellin réelle}) $ζ(ψ,\frac{s}{2})$ de la fonction $ψ(t)=∑_{n ≥ 1} e^{-π n² t}$, où l'on suppose par exemple $s>1$. Cette égalité, jointe à la formule de Poisson, est le point clef de la démonstration classique de l'équation fonctionnelle de la fonction zêta de Riemann (\ref{propriétés zêta Euler-Riemann}). (Rappelons que le norme d'un idèle différentiel de $𝐐$ est  $1$.) Nous verrons ci-après des généralisations, pour un corps global quelconque, de ce fait, démontrées par voie adélique. \begin{exercice2}[Démonstration de $ζ(2k) ∈ π^k 𝐐$ par récurrence] Soit $k ≥ 4$ un nombre pair. Considérons la fraction rationnelle \[ f_k(X,Y)=\frac{2}{X Y^{k-1}}+\frac{1}{X² Y^{k-2}} + \cdots + \frac{1}{X^{k-2}Y²} + \frac{2}{X^{k-1} Y}. \] \begin{enumerate} \item Montrer que \[ f(X,Y)-f(X,X+Y)-f(X+Y,Y) =2 ∑_{\substack{0 < j < k \\ j \text{ pair}}} \frac{1}{X^j Y^{k-j}} \] \item En déduire que \[ \frac{k+1}{2} ζ(k) = ∑_{n>0} f_k(n,n) = ∑_{\substack{0 < j < k \\ j \text{ pair}}} ζ(j) ζ(k-j). \] \item En déduire que $ζ(k) ∈ 𝐐 P^k$ où $P=\sqrt{6 ζ(2)}$. \item Montrer que \[ ∫_{[0,1]²} (1-x²y²)^{-1} dxdy= (1-¼)ζ(2). \] Vérifier que la substitution $(x,y)=(\frac{\sin(u)}{\cos(v)},\frac{\sin(v)}{\cos(u)})$ a pour jacobien $(1-x²y²)$ et envoie le triangle \[T=\{u,v ∈ 𝐑_{>0}: u + v < π/2\}\] bijectivement sur l'intérieur du carré de sorte que $∫_{[0,1]²} (1-x²y²)^{-1} dxdy= \mathtextrm{Aire}(T)$. En déduire que $ζ(2)=\frac{π²}{6}$, c'est-à-dire $P=π$. \end{enumerate} %Cf. Zagier, « Quelques conséquences surprenantes de la %cohomologie de $\mathtextrm{SL}₂(𝐙)$ » et exposé au CEM. %Calcul de $ζ(2)$ du à Calabi : cf. « Sums of generalized %harmonic series and volumes », 1993. \nocite{Sums@BCK} \end{exercice2} \subsubsection{Corps $𝐅_p(t)$ des fonctions rationnelles} \label{exemple zêta fonctions} Par définition et description des points de $𝐅_p(t)$, on a \[ ζ_{𝐅_p(t)}(s)= \Big(∏_{P ∈ 𝒫_p} \frac{1}{1-|P|^{-s}}\Big) ⋅ (1-p^{-s})^{-1}, \] où $𝒫_p$ est l'ensemble des polynômes irréductibles unitaires de $𝐅_p[t]$ et $|f|=p^{-\deg(f)}$. Notons que le premier facteur s'identifie à la fonction zêta de Hasse de l'anneau $𝐅_p[t]$ des fractions rationnelles entières hors de la place à l'infini $∞$. (Rappelons que la valuation correspondante est définie par le degré (en $t$) des fractions rationnelles.) Ce facteur se réécrit \[ ∑_{\substack{f ∈ 𝐅_p[t] \\ \text{unitaire}}} \frac{1}{|f|^s}= ∑_{d ≥ 0} \frac{p^d}{p^{ds}}=(1-p ⋅ p^{-s})^{-1} \] car il y a exactement $p^{d}$ polynômes unitaires de degré $d$ dans $𝐅_p$. Ainsi, \[ ζ_{𝐅_p(t)}(s)=\frac{1}{(1-p^{-s})(1-p^{1-s})} \text{\quad et \quad} Z_{𝐅_p(t)}(T)=\frac{1}{(1-T)(1-pT)}. \] Comme d'autre part le genre $g_{𝐅_p(t)}$ de $𝐅_p(t)$ est nul (\ref{genre droite projective}), on a $|d_{𝐅_p(t)}|=p²$ (\ref{Tamagawa et idèle différentiel}) de sorte que, notant $K=𝐅_p(t)$, on a $|d_K|^{-s/2} ⋅ ζ_{K}(s)=\frac{-1}{(1-p^s)(1-p^{1-s})}$. Cette fonction est visiblement invariante par la substitution $s ↔ 1-s$, s'étend en une fonction méromorphe sur $𝐂$ — c'est même une fonction rationnelle en $p^{-s}$ — à pôles simples en $0$ et $1$ uniquement, et ayant un résidu en $s=1$ égal à $\frac{-1}{1-p}$. % colle bien avec le $-h_K/(1-q)$. \begin{exercice2} Déduire de l'égalité \[ (1-p ⋅ p^{-s})^{-1}=∏_{P ∈ 𝒫_p} \frac{1}{1-|P|^{-s}} \] la formule $p^n=∑_{d|n} d ⋅ \#𝒫_{p,d}$, où $𝒫_{p,d}=\{P ∈ 𝒫_p:\deg(P)=d\}$. (Indication : on pourra poser $T=p^{-s}$ et considérer la dérivée logarithmique relativement à $X$ des deux termes.) Cette formule a été précédemment démontrée en \refext{Fin}{denombrement-polynomes-irreductibles-corps-finis}. \end{exercice2} \subsection{Prolongement analytique et équation fonctionnelle des fonctions zêta de Dedekind} \begin{théorème2} \label{équation fonctionnelle zêta} Soit $K$ un corps global. On note $q$ le cardinal du corps des constantes si $K$ est un corps de fonctions et $1$ sinon. \begin{enumerate} \item La fonction zêta $ζ_K$ de Dedekind de $K$ (\ref{définition zêta Dedekind}) converge absolument pour pour $\Re(s)>1$ et se prolonge en une fonction méromorphe sur $𝐂$ à pôles simples uniquement en les complexes congrus à $0$ ou $1$, \emph{modulo $2πi/\!\log(q)$} (en faisant la convention que $2πi/\!\log(1)=0$). \item Soit $|d_K|$ la norme d'un idèle différentiel de $K$, égale à $|𝔡_K|^{-1}$ ou $q^{2-2g}$ suivant que $K$ est un corps de nombres de discriminant $𝔡_K$ ou un corps de fonctions de genre $g$. Alors, la fonction zêta complétée $\sur{ζ}_K$ (\ref{fonction zêta complétée}) satisfait l'équation fonctionnelle \[ \sur{ζ}(s)=|d_K|^{s-½}\sur{ζ}(1-s) \] et l'on a \[ \Res₀ \sur{ζ}_K = \begin{cases} \displaystyle -κ/\!\log(q)& \text{si $K$ est un corps de fonctions}\\ \displaystyle -κ/π^{r_𝐂} & \text{si $K$ est un corps de nombres}, \end{cases} \] où $κ$ est la constante calculée en \ref{calcul volume idélique} et $r_𝐂$ est le nombre de plongements de $K$ dans $𝐂$. \item Si $K$ est un corps de fonctions, on a de plus \[ ζ_K(s)=Z_X(q^{-s}), \quad \text{où} \quad Z_X(T)=\frac{P_K(T)}{(1-T)(1-qT)} \] et $P_K(T) ∈ 𝐙[T]$ est un polynôme de degré $2g_K$. La fonction Zêta $Z_X$ satisfait les propriétés suivantes : \begin{enumerate} \item $Z_K$ a pour uniques pôles des pôles simples en $1$ et $q^{-1}$ ; \item $Z_K(T)=q^{-χ_K/2}T^{-χ_K}Z_K(1/qT)$, où $χ_K=2-2g_K$ et $g_K$ est le \emph{genre} de $K$. \item $P_K(0)=1$ et $P_K(1)=h_K$, où $h_K$ est le nombre de classes de diviseurs de degré $0$ de $K$. \end{enumerate} \end{enumerate} \end{théorème2} \begin{remarque2} Les énoncés (a)—(c) sur la fonction Zêta $Z_X$ sont conséquence immédiate des énoncés (i)—(ii) sur la fonction zêta $ζ_K$. L'entier $χ_K$ est appelé « caractéristique d'Euler-Poincaré » du corps $K$ (ou plutôt, de la courbe projective lisse correspondante). \end{remarque2} \subsubsection{}La démonstration de ce théorème occupe la suite de cette section. Suivant une méthode globale (adélique) due indépendamment à \textsc{Iwasawa} K. et J. \textsc{Tate}\footnote{Voir \cite{note@Iwasawa}, \cite{Lettre@Iwasawa}, \cite{Collected@Iwasawa}, \cite{Fourier@Tate}.}, on interprète le produit eulérien (qui est aussi \emph{grosso modo} une somme sur les idéaux) comme une intégrale sur les idèles, plus précisément comme une transformée de Mellin adélique, puis on utilise le lien avec la transformation de Fourier pour établir l'équation fonctionnelle. Procédant ainsi, il est plus naturel d'établir d'abord l'énoncé général \ref{pôles et équation fonctionnelle Iwasawa-Tate} puis de vérifier que le théorème \ref{équation fonctionnelle zêta} en est conséquence. \subsubsection{} On fixe dorénavant un caractère additif non trivial $ψ=(ψ_x)$ de $K_𝐀/K$, auquel est associée la transformation de Fourier (autoduale) $ℱ_ψ$ (\ref{définition Fourier adélique}, \ref{Fourier adélique}). Comme dans le cas additif, il résulte de la formule du produit que la mesure de Haar multiplicative globale produit restreint des mesures $μ^{\mbox{\minus $×$}}_{ψ_x}$ est indépendante de $ψ$ ; elle est égale à $|d_K|^{½} μ^{\mbox{\minus $×$}}₁$. \subsubsection{Transformation de Mellin adéliques}Soient $f ∈ 𝒮(K_𝐀)$ et $χ$ un quasi-caractère de $K^×_𝐀/K^×$ (\ref{quasi-caractères globaux}). Pour chaque signe de comparaison $?$, notons $K^{×,? 1}_𝐀$ l'ensemble des idèles $ι$ tels que $|ι| ? 1$ et $c$ la fonction continue $K^×_𝐀 → 𝐑$ valant $1$ sur $K^{×, >1}_𝐀$, $0$ sur $K^{×, <1}_𝐀$ et $½$ sur $K^{×, =1}_𝐀=K^{×, ≤1}_𝐀 ∩ K^{×, ≥1}_𝐀$. Sous réserve de convergence ou d'existence d'un prolongement méromorphe (cf. \emph{infra}), définissons les fonctions zêta suivantes, obtenues par transformation de Mellin : \[ \begin{array}{rcl} ζ_{≤ 1}(f,χ,s) & = & \displaystyle ∫_{K^×_𝐀} (1-c) ⋅ f χ ω_s dμ^{\mbox{\minus $×$}}_{1} ; \\ ζ_{≥ 1}(f,χ,s) & = & \displaystyle ∫_{K^×_𝐀} c ⋅ f χ ω_s dμ^{\mbox{\minus $×$}}_{1} ; \\ ζ(f,χ,s) & = & \displaystyle ∫_{K^×_𝐀} f χ ω_s dμ^{\mbox{\minus $×$}}_{1} = ζ_{≥ 1}(f,χ,s)+ζ_{≤ 1}(f,χ,s). \end{array} \] %Quitte à remplacer $χ$ par un « translaté » $χ ω_s$, on peut %supposer que $\Re(χ)=0$, c'est-à-dire que $χ$ est un \emph{caractère}. Dans les deux premiers cas, on peut restreindre le domaine d'intégration à $K^{×, ≥1}_𝐀$ et $K^{×, ≤1}_𝐀$ respectivement. Notons également que lorsque $K$ est un \emph{corps de nombres}, l'introduction des facteurs correctifs $c$ et $1-c$ est inutile : la mesure de $K^{×, =1}_𝐀$ est nulle. \emph{A contrario}, si $K$ est un corps de fonctions, le groupe des idèles $K^×_𝐀$ est une union \emph{dénombrable} de translatés de $K^{×, =1}_𝐀$. \begin{remarque2} Comme dans le cas local (\ref{quasi-caractères=variété}), l'introduction de la variable $s$ est essentiellement inutile : si l'on pose $ζ(f,χ)=ζ(f,χ,0)$, on a $ζ(f,χ,s)=ζ(f,χ ω_s)$. Moyennant une légère abstraction/géométrisation, il serait possible (et loisible) de considérer $χ$ comme une \emph{variable} (analytique), parcourant la « surface de Riemann » des quasi-caractères de $K^×_𝐀/K^×$. \end{remarque2} \subsubsection{Convergence} Vérifions que la transformée de Mellin $ζ(f,χ,s)$ d'une fonction $f ∈ 𝒮(K_𝐀)$ est holomorphe (en la variable $s$) sur le demi-plan $\Re(s)>1-\Re(χ)$. (\emph{A fortiori}, il en sera ainsi des deux transformées de Mellin tronquées.) Par définition de la mesure idélique, on a — sous réserve de convergence du terme de droite — $ζ(f,χ,s)=|d_K|^{-½}∏_x ζ_{ψ_x}(f_x,χ_x,s)$. Or, quitte à décomposer $f$ en une somme finie, il existe un ouvert dense $U$ tel que, pour chaque $x ∈ U$, on ait : \begin{enumerate} \item $f_x=𝟭_{𝒪_{K,x}}$ (cf. \ref{Bruhat-Schwartz adélique}) ; \item $ψ_x$ est de niveau nul (cf. \ref{dual des classes de adèles}) ; \item $χ_x$ est net (cf. \ref{décomposition et partie réelle quasi-caractère global}). \end{enumerate} Pour un tel $x$, la transformée de Mellin locale $ζ_{ψ_x}(f_x,χ_x,s)$ (définie en \ref{fonction zêta locale}) est égale à ${(1-χ_x(ϖ_x)|ϖ_x|_x^s)^{-1}}$ (\ref{Matchett}), où $ϖ_x$ est une uniformisante de $K_x$. (On rappelle que $|ϖ_x|_x=1/q_x$ où $q_x$ est le cardinal du corps résiduel.) Pour $x ∉ U$, les autres facteurs locaux sont homolomorphes pour $\Re(s)>-\Re(χ)$ (cf. \ref{prolongement méromorphe et équation fonctionnelle cas local}, (i) et \ref{décomposition et partie réelle quasi-caractère global}). Comme d'autre part $|χ_x(ϖ_x)|=q_x^{-\Re(χ)}$, il suffit finalement de montrer la convergence absolue pour $σ>1$ du produit ${∏_{x ∈ U}(1-q_x^{-σ})^{-1}}$, ce qui revient à montrer la convergence absolue du produit eulérien définissant $ζ_K(s)$ dans ce domaine. À nouveau, nous procédons par réduction au cas d'un corps global premier. Choisissons un plongement de $𝐐$ ou $𝐤=𝐅_p(t)$ dans $K$ ; le morphisme induit sur l'ensemble des points est à fibres de cardinaux majorés par le degré $d$ de l'extension et, si une place $x$ de $K$ s'envoie sur $y$, on a $q_x ≥ q_y$. Il en résulte que $ζ_K(s)$ est majorée respectivement par $ζ_𝐐(s)^d$ ou $ζ_𝐤(s)^d$. On a vu précédemment (\ref{exemple zêta rationnels}, \ref{exemple zêta fonctions}) que les produits eulériens définissant $ζ_𝐐$ et $ζ_𝐤$ convergent absolument si $\Re(s)>1$. Ceci démontre la convergence et l'holomorphie de $ζ(f,χ,s)$. Il en résulte formellement que la transformée de Mellin \emph{tronquée} $ζ_{≥ 1}(f,χ,s)$ est convergente et \emph{entière} (c'est-à-dire holomorphe sur $𝐂$ entier). En effet, sur $K^{×, ≥ 1}_𝐀$, plus $\Re(s)$ est petit, $ω_s$ est petit. \subsubsection{} Notons $\dot{f}$ la fonction $ι↦ ∑_{λ ∈ K} f(λ ι)=f(0)+∑_{λ ∈ K^×} f(λ ι)$ sur les classes d'idèles $C_K=K^×_𝐀/K^×$ et $\dot{μ}^{\mbox{\minus $×$}}_{1}$ l'unique mesure de Haar sur les classes d'idèles pour laquelle $∫_{K^×_𝐀} φ d{μ}^{\mbox{\minus $×$}}_{1}=∫_{C_K} \big(∑_{λ ∈ K^×} [× λ]^*φ\big)d\dot{μ}^{\mbox{\minus $×$}}_{1}$ (cf. \ref{module et mesure quotients}). Les fonctions $χ,ω_s$ et $c$ étant invariantes par multiplication par $λ ∈ K^×$, on a l'égalité \[ ζ_{≤1}(f,χ,s) = \dot{ζ}_{≤ 1}(\dot{f},χ,s) - f(0) \dot{ζ}_{≤ 1}(1,χ,s), \] où $\dot{ζ}_{≤ 1}(\dot{f},χ,s)=∫_{C_K^{≤1}} \dot{f} c χ ω_s d\dot{μ}^{\mbox{\minus $×$}}_{1}$, etc. Il résulte de la formule de Poisson (\ref{Fourier adélique} \ref{Poisson-Riemann-Roch}) et de la formule $\mathtextrm{inv}^* c=1-c$, où $\mathtextrm{inv}(ι)=ι^{-1}$, que l'on a : \[ ζ_{≤ 1}(f,χ,s) + f(0)\dot{ζ}_{≤ 1}(1,χ,s) = ζ_{≥ 1}(\chap{f},\chap{χ},-s) + \chap{f}(0)\dot{ζ}_{≥ 1}(1,\chap{χ},-s), \] où $\chap{f}=ℱ_ψ(f)$ (transformée de Fourier autoduale). Comme on l'a vu, le terme $ζ_{≥ 1}(\chap{f},\chap{χ},-s)$ est une fonction entière. Nous allons voir dans le paragraphe suivant que $\dot{ζ}_{≥ 1}(1,\chap{χ},-s)$ est holomorphe sur $\Re(s)>0$ et s'étend en une fonction méromorphe. Il en résulte le fait remarquable que $ζ_{≤1}(f,χ,s)$ \emph{a priori} holomorphe sur le demi-espace $\{s:\Re(s)>1-\Re(χ)\}$, s'étend en une fonction méromorphe sur $𝐂$. \subsubsection{Calcul de $\dot{ζ}_{? 1}(1,χ,s)$, $? ∈ \{≤, ≥ \}$} \label{calcul zeta1khis} Le changement de variable $ι′=ι^{-1}$ entraîne la formule \[ \dot{ζ}_{ ≥ 1}(1,χ,s)=\dot{ζ}_{≤1}(1,χ^{-1},-s)=\dot{ζ}_{≤1}(1,\chap{χ},1-s), \] qui nous ramène à calculer $\dot{ζ}_{≤ 1}(1,χ,s)$. Lorsque $χ$ est le quasi-caractère trivial (noté ici également $1$), on a convergence pour ${\Re(s)>0}$ et égalité : \[ \begin{array}{rcll} \dot{ζ}_{≤ 1}(1,1,s) & = & \frac{κ}{s} & \text{si $K$ est un corps de nombres ;}\\ & = & \frac{κ}{2} \frac{1+q^{-ds}}{1-q^{-ds}} & \text{si $K$ est un corps de fonctions,} \end{array} \] où $κ=\sur{μ}^{\mbox{\minus $×$}}_{1}(C^{=1}_K)$ est la constante calculée en \ref{calcul volume idélique}, et, dans le second cas, $d$ est l'unique entier naturel tel que $|K^×_𝐀|=q^{d 𝐙}$ c'est-à-dire le plus petit degré $>0$ d'un diviseur de $K$ (cf. \ref{quasi-caractères globaux}). En effet, par définition de la transformation de Mellin et des mesures, il résulte du théorème de Fubini que le terme de gauche est égal à l'intégrale \[ κ ∫₀¹ t^s \frac{dt}{t} \] ou la somme \[ κ \big( ½ + ∑_{n ∈ 𝐙_{>0}} q^{-nds} \big). \] Lorsque, plus généralement, $χ$ est supposé trivial sur $K^{×,=1}_𝐀$, il est de la forme $ω_σ$ si bien que le calcul se déduit du précédent par translation (en $s$). Lorsque $χ$ est non trivial sur $K^{×,=1}_𝐀$, on a $\dot{ζ}_{≤ 1}(1,χ,s)=0$. C'est une incarnation de l'orthogonalité des caractères que l'on démontre en effectuant le changement de variable $ι′= xι$, pour un $x$ dans $K^{×,=1}_𝐀$ tel que $χ(x) ≠ 1$. Il résulte de l'égalité $\dot{ζ}_{ ≤ 1}(1,1,s)=-\dot{ζ}_{ ≤ 1}(1,1,-s)$ et des résultats précédent que pour chaque $χ$, on a \[ \dot{ζ}_{≤1}(1,χ,s)+\dot{ζ}_{≥1}(1,χ,s)=0. \] \commentaire{Détailler ?} \subsubsection{}Ainsi, la fonction $ζ(f,χ)$ est égale à \[ \big( ζ_{ ≥ 1}(f,χ) + ζ_{ ≥ 1}(\chap{f},\chap{χ})\big)- \big(f(0)\dot{ζ}_{≤ 1}(1,χ) + \chap{f}(0)\dot{ζ}_{≤ 1}(1,\chap{χ})\big) \] où le second terme est nul sauf si $χ$ est de la forme $ω_σ$. Notons que les deuxième et quatrième termes de la somme ci-dessus ne dépendent pas de $ψ$. En effet, d'une part $\chap{f}=ℱ_ψ(f)$ est changée en une translatée multiplicative lorsque l'on change $ψ$ et, d'autre part, on a l'égalité \[ ζ([× ι]^*g,χ)=χ(ι)^{-1}ζ(g,χ) \tag{†} \] (ainsi que pour les variantes tronquées) pour chaque fonction $g$ et $ι ∈ K^×_𝐀$, car $μ^{\mbox{\minus $×$}}_{1}$ est une mesure de Haar multiplicative. Lorsque $ι ∈ K^×$, on a donc invariance $ζ([× ι]^*g,χ)=ζ(g,χ)$ car $χ$ est supposé trivial sur $K^×$. Il résulte également de cette formule que $ζ(ℱ_ψ²(f),χ)=ζ(f,χ)$ car $ℱ_ψ ∘ ℱ_ψ =[×-1]^*$. Enfin, le caractère involutif de $χ ↦ \chap{χ}$ nous permet de déduire de ce qui précède le théorème suivant, qui est un analogue global du théorème local \ref{prolongement méromorphe et équation fonctionnelle cas local}. \begin{théorème2} \label{pôles et équation fonctionnelle Iwasawa-Tate} Soient $K$ un corps global, $ψ=(ψ_x)$ un caractère non trivial des classes d'adèles $K_𝐀/K$ et $χ$ un quasi-caractère multiplicatif des idèles $K^×_𝐀$. Soit $f:K_𝐀 → 𝐂$ une fonction dans $𝒮(K_𝐀)$. \begin{enumerate} \item L'intégrale $∫_{K^×_𝐀} f χ ω_s dμ^{\mbox{\minus $×$}}_{玉}$ est absolument convergente et définit une fonction holomorphe $ζ(f,χ,s)$ sur le demi-plan $\Re(s)>1-\Re(χ)$. Dans ce domaine, elle s'exprime comme un produit « eulérien » absolument convergent \[ ζ(f,χ,s)= ∏_{x ∈ Σ(K)} ζ_{x}(f_x,χ_x,s) = |d_K|^{-½} ∏_{x ∈ Σ(K)} ζ_{ψ_x}(f_x,χ_x,s), \] où $ζ_x(f_x,χ_x,s):= ∫_{K^×_x} f_x χ_x |⋅|_x^s d μ^×_{1,x}$. \item La fonction $s↦ ζ(f,χ,s)$ admet un prolongement méromorphe à $𝐂$. \item Elle satisfait l'équation fonctionnelle \[ ζ(f,χ,s)=ζ(\chap{f},\chap{χ},-s), \] où $\chap{f}=ℱ_ψ(f)$. \item Si $χ$ n'est pas de la forme $ω_σ$, pour $σ ∈ 𝐂$, c'est une fonction entière. \item Les pôles de $ζ(f,1,s)$ sont simples et égaux (resp. congrus) à $0$ ou $1$ (resp. modulo $2πi/\!\log(q)𝐙$), où $q$ est cardinal du corps des constantes de $K$) selon que $K$ est un corps de nombres ou un corps de fonctions. Les résidus sont $-f(0)κ′$ si $s$ est égal (resp. congru) à $0$ et $\chap{f}(0)κ′$ si $s$ est égal (resp. congru) à $1$, où $κ′ = κ$ (resp. $κ′ = κ /\!\log(q)$) selon que $K$ est un corps de nombres ou un corps de fonctions. La constante $κ$ est le volume calculé en \ref{calcul volume idélique}. \end{enumerate} \end{théorème2} \begin{démo} Ces énoncés sont conséquences des calculs précédents, à ceci près que, lorsque $K$ est un corps de fonctions, il faut \emph{a priori} remplacer $q$ par $q^d$ dans (v) (localisation des pôles et le calcul des résidus), où l'on rappelle que $d$ est le plus petit degré $>0$ d'un diviseur de $K$. Nous verrons en \ref{existence diviseur degré 1} que l'on a $d=1$. \end{démo} \begin{remarque2} Lorsque $χ=ω_σ$, la formule $ζ(f,ω_σ,s)=ζ(f,1,s+σ)$ ramène l'étude des pôles de cette fonction zêta à celle faite en (v). \end{remarque2} \subsubsection{Fonction zêta de Dedekind (suite)} Déduisons maintenant le théorème \ref{équation fonctionnelle zêta} du théorème \ref{pôles et équation fonctionnelle Iwasawa-Tate}. Comme en \ref{Fourier de 1}, considérons la fonction \[ 𝟭_𝒪= \big(\mathop{\bigboxtimes\nolimits'}\limits_{x ∈ Σ^{\mathtextrm{ultr}}(K)} 𝟭_{𝒪_{K,x}}\big) ⊠ \big(\mathop{\bigboxtimes}_{x ∈ Σ^{\mathtextrm{arch}}(K)} g_{K_x}\big) \] On a d'une part $ζ(𝟭_𝒪,ω_s)=\sur{ζ}_K(s)$ et, d'autre part, ${\chap{𝟭_𝒪}=|d_K|^{½} [×d_K]^* 𝟭_𝒪}$ (« formule de Riemann-Roch »). Par changement de variable ($†$), l'égalité $ζ(𝟭_𝒪,ω_s)=ζ(\chap{𝟭_𝒪},\chap{ω_s})$ se réécrit $\sur{ζ}(s)=|d_K|^{s-½}\sur{ζ}(1-s)$. L'énoncé sur le résidu en $0$ de $\sur{ζ}_K$ est conséquence de la formule (v) du théorème précédent et des égalités $g_𝐑(0)=1$ et $g_𝐂(0)=1/π$. Il reste à démontrer \ref{équation fonctionnelle zêta}, (iii). Si $K$ est un corps de fonctions, il résulte de la définition \ref{définition zêta Dedekind} qu'il existe une fonction $Z_X$ définie sur voisinage épointé de $0$ dans $𝐂$ telle que $ζ_K(s)=Z_X(q^{-s})$, pour $\Re(s)$ grand. D'après ce qui précède, cette fonction Zêta est en fait une fonction méromorphe sur $𝐂^×$ satisfaisant les propriétés suivantes : \begin{enumerate} \item $Z_K$ a pour uniques pôles des pôles simples en $0$ et $q^{-1}$ ; \item $Z_K$ a une limite, égale à $1$, en $0$. \item $Z_K(T)=q^{g_K-1}T^{2g_K-2}Z_K(1/qT)$, où $g_K$ est le \emph{genre} de $K$. \end{enumerate} (Le fait (ii) est conséquence de l'égalité $\lim_{\Re(s) → +∞} ζ_K(s)=1$.) Il résulte de (i) et (ii) que $Z_K(T)=\frac{P_K(T)}{(1-T)(1-qT)}$, où $P_K$ est une fonction \emph{entière} telle que $P_K(0)=1$. Compte tenu du fait que la fraction rationnelle $\frac{1}{(1-T)(1-qT)}$ satisfait (iii) avec $g=0$, le polynôme $P_K$ satisfait l'équation $P_K(T)=q^{g_K}T^{2g_K}P_K(1/qT)$ ; c'est donc un \emph{polynôme} de degré $2g_K$. Enfin, on a déjà établi que $\Res₀ ζ_K=-\frac{h_K}{(q-1)\log(q)}$. Comme $\Res₀ \frac{1}{1-q^{-s}}=\frac{1}{\log(q)}$, on a bien $P_K(1)=h_K$. \subsubsection{Existence d'un diviseur de degré $1$} \label{existence diviseur degré 1} Pour achever la démonstration du théorème \ref{pôles et équation fonctionnelle Iwasawa-Tate} (et par conséquent, du théorème \ref{équation fonctionnelle zêta}), il nous faut vérifier que, pour tout corps de fonctions $K$, il existe un diviseur de degré $1$. Nous avons vu ci-dessus que si $d$ est le degré $>0$ minimal d'un diviseur de $K$, la fonction $Z_K(T)$ est une fraction rationnelle $Q(T^d)$, où $Q$ a un pôle simple en $1$ (cf. $h_K ≠ 0$). Il en résulte que pour tout corps de fonctions $L$ et tout entier $n ≥ 1$, la fonction rationnelle $Z_L(T^n)$ un pôle simple en $1$. Appliquons cette remarque au corps $K_d$ obtenu à partir de $K$ par extension des scalaires de degré $d$ (cf. \ref{extension des scalaires pour Zêta}) Comme $Z_K$ ne dépend que de $T^d$, la formule établie en \emph{loc. cit.} devient $Z_{K_d}(T^d)=Z_K(T)^d$. Le terme de gauche a un pôle simple en $T=1$ et le terme de droite un pôle de multiplicité $d$. On a donc $d=1$. CQFD. Pour référence ultérieure, écrivons explicitement le résultat obtenu. \begin{théorème2}[F. K. Schmidt] \label{théorème FKSchmidt} Tout corps de fonctions possède un diviseur de degré $1$. Plus précisément, pour corps de fonctions $K$ et tout entier $n ≥ 1$, il existe exactement $h_K>0$ diviseurs de degré $n$. \end{théorème2} \begin{center} ⁂ \end{center} \begin{corollaire2}[Pôle simple en $1$] \label{pôle simple en 1 cdn} Soit $K$ un corps de nombres. Pour toute classe $\mathsf{C}\in \Pic(𝒪_K)$, il existe une constante $N_{\mathsf{C}}\neq 0$ telle que pour chaque $t\in \RR^+$, l'ensemble $$ \{\mathfrak{a}\subset 𝒪_K, \text{tel que } \mathfrak{a}\in \mathsf{C}\text{ et } \N(\mathfrak{a})\leq t\} $$ soit de cardinal fini, équivalent à $N_{\mathsf{C}}\cdot t$ pour $t→ +\infty$. \end{corollaire2} Ce corollaire est le point clef permettant d'établir le théorème de Frobenius \ref{} du chapitre [...]. \subsubsection{Exemple : $𝐐(i)$} $ζ_{𝐐(\sqrt{-1})}=ζ(s)L(s,χ_{-1})$ et plus généralement $ζ_{𝐐(\sqrt{m})}=ζ(s)L(s,χ_m)$. % cf. Katô-Saitô, chap. 7 \section{Fonctions $L$} Cf. Tate ou Swinnerton-Dyer. [...] \section{Théorèmes de Minkowski, Riemann-Hurwitz et applications} \subsection{Le théorème de Minkowski} Notation : $K ⊗_𝐐 𝐑 ≃ 𝐑^{r_𝐑(K)}×𝐂^{r_𝐂(K)}$. On note $K_𝐑$ la $𝐑$-algèbre $K ⊗_𝐐 𝐑$. \begin{théorème2}[Minkowski] Soit $K\bo 𝐐$ une extension finie de degré $d$. \[ \sqrt{\mathfrak{d}_{K/\QQ}}\geq (\frac{\pi}{4})^{r_{\CC}(K)}\frac{d^d}{d!}. \] \end{théorème2} \begin{corollaire2} Il n'existe pas d'extension finie non triviale de $\QQ$ partout non ramifiée. De façon équivalente, si $A$ est une $\ZZ$-algèbre finie étale connexe alors $\ZZ⥲ A$. \end{corollaire2} \begin{démo} \XXX %La démonstration consiste en un raffinement de la démonstration de la finitude du %groupe de Picard. Notons avec des $x$ (resp. $y$) les coordonnées réelles (resp. complexes) de $K_{\RR}$. Soit $$ A:=\{x\in K_{\RR}, |x_1|+\cdots+|x_{r_\RR}|+2\big(|y_1|+\cdots+|y_{r_\CC}|\big)\leq n\} $$ le sous-ensemble compact, convexe, symmétrique par rapport à l'origine, de $K_\RR$. L'inégalité arithmético-géométrique montre que tout point de $A$ a une norme inférieure à $1$. Admettons que $$\mathtextrm{vol}(A)=\frac{n^n}{n!}2^{r_\RR}(\frac{\pi}{2})^{r_{\CC}}.$$ Le lemme de Minkowski affirme que si, pour un $t>0$, $$t^d \frac{n^n}{n!}2^{r_\RR}(\frac{\pi}{2})^{r_{\CC}}=\mathtextrm{vol}(tA) \geq 2^n \mathtextrm{covol}(𝒪_K)=2^n 2^{-r_{\CC}}\sqrt{\mathfrak{d}_{K/\QQ}},$$ il existe un élément non nul de $tA\cap 𝒪_K$, nécessairement de supérieure à $1$ mais inférieure à $t$. L'inégalité en résulte immédiatement. Effectuons le calcul volumique. Posons $$ f_{r_{\RR},r_\CC}(t)=\mathtextrm{vol}\Big(\{x\in \RR^n, |x_1|+\cdots+|x_{r_\RR}|+ 2\big(\sqrt{x_{r_{\RR}+1}^2+x_{r_{\RR}+2}^2}+\cdots+ \sqrt{x_{n-1}^2+x_{n}^2}\big)\leq t\}\Big)=t^n f_{r_{\RR},r_\CC}(1), $$ où $n=r_{\RR}+2r_\CC$. En utilisant de façon répétée, pour $r_{\RR}>0$, l'égalité $$ f_{r_{\RR},r_\CC}(t)=2\int_0^t f_{r_{\RR-1},r_\CC}(u)\mathrm{d} u= 2\int_0^t u^{n-1} f_{r_{\RR-1},r_\CC}(1)\mathrm{d} u, $$ on trouve : $$ f_{r_{\RR},r_\CC}(1)=\frac{2^{r_\RR}}{n\cdots (n-r_{\RR}+1)}f_{0,r_\CC}(1). $$ Soit $$g_{r_{\CC}}(t)=\mathtextrm{vol}\Big(\{y\in \RR^{2r_{\CC}}, \sqrt{x_{r_{\RR}+1}^2+x_{r_{\RR}+2}^2}+\cdots+ \sqrt{x_{n-1}^2+x_{n}^2}\leq t\}\Big),$$ de sorte que l'on ait $f_{0,r_\CC}(t)=g_{r_{\CC}}(t/2)$. Calculons $g$ : $$\begin{array}{ll} g_{r}(1)& =\int_0^1 g_{r-1}(1-u)2\pi u \mathrm{d}u\\ & = 2\pi g_{r-1}(1) \underbrace{\int_0^1 (1-u)^{2r-2}u \mathrm{d}u}_{\frac{1}{2r-1}-\frac{1}{2r}}\\ & = ... \\ & = \frac{(2\pi)^{r_\CC}}{2r_\CC!}. \end{array} $$ Finalement, $$f_{r_{\RR},r_\CC}(n)=n^n\frac{2^{r_\RR}}{n\cdots (n-r_{\RR}+1)}(\frac{1}{2})^{2r_\CC} \frac{(2\pi)^{r_\CC}}{2r_\CC!}=\frac{n^n}{n!}2^{r_\RR}(\frac{\pi}{2})^{r_{\CC}},$$ comme annoncé. \end{démo} \subsection{Le théorème de Riemann-Hurwitz} \begin{théorème2} \label{Riemann-Hurwitz} Riemann-Hurwitz. \end{théorème2} (Cf. Lang ; Weil, VIII.§4.) \begin{corollaire2} \XXX Il n'existe pas d'extension finie non triviale de $𝐅_p(t)$ partout non ramifiée. \end{corollaire2} \subsection{Un théorème de Selmer} \begin{proposition2}[Selmer] \XXX Soit $n ≥ 1$. Le polynôme $f_n(X)=X^n-X-1$ est irréductible dans $𝐐[X]$. \end{proposition2} \begin{démo} \XXX Soit $n\geq 2$ un entier et $f_n=X^n-X-1\in \ZZ[X]$. Soient $x_1,\dots,x_n$ les racines, non nulles, de $f$. Considérons : $$ S(f_n):=\sum_1^n(x_i-x_i^{-1}), $$ et de même pour tout diviseur potentiel non trivial $g\in \ZZ[X]$ de $f_n$. Il est immédiat que si $f_n=g_1 g_2$, on a $S(f_n)=S(g_1)+S(g_2)$. Comme $S(f_n)$ est symétrique en les racines, et que $f_n$ est unitaire, on a $(x_1\dots x_n)S(f_n)\in \ZZ$ ; comme le produit des racines est ici une unité, on a donc $S(f_n)\in \ZZ$ ; il en est ansi de tout diviseur $g\in \ZZ[X]$ de $f_n$. En fait, $S(f_n)=1$ : pour $n\geq 3$, $\sum x_i=\sigma_1=0$ tandis que $\sum x_i^{-1}=\sigma_{n-1}/\sigma_n=-1$. Remarquons maintenant que pour chaque $x_j$, si l'on écrit $x_j=r e^{i\varphi}$, on a $\mathtextrm{Re}\big(x_i - x_i^{-1}\big)=(r-r^{-1})\cos(\varphi)=\frac{r^2-1}{r}\cos(\varphi)$. Comme $r^n\cos(\varphi)=r\cos(\varphi)+1$ et $r^n\sin(\varphi)=r\sin(\varphi)$, en sommant le carré des deux égalités on trouve : $$\cos(\varphi)=\frac{r^{2n}-r^2-1}{2r}.$$ En particulier $r\neq 1$ car sinon $\cos(\varphi)=-\frac{1}{2}$ et les racines primitives cubiques de l'unité seraient des racines de $f_n$, ce qui n'est pas le cas. Enfin, comme pour tout $1\neq a>0$, $(a-1)(a^n-a-1)=1-a+(a-1)(a^n-1)> 1-a$, on en déduit, en posant $a=r^2$ et en divisant par $a$ l'égalité ci-dessus, $$ \mathtextrm{Re}\big(x_i - x_i^{-1}\big)> \frac{1}{2}\big(|x_i|^{-2}-1\big). $$ Soient $g\in \ZZ[X]$ est un diviseur présumé non trivial de $f_n$, et $(x_j)_{i\in J}$ ses racines. Comme $g(0)=\pm 1$, et $g$ est unitaire, $\prod_{j\in J} |x_j|^{-2}=1$ donc, la moyenne arithmétique est supérieure à $1$, c'est-à-dire $\sum |x_j|^{-2}\geq \#J$. Il s'ensuit que $S(g)>0$ ; comme d'autre par $S(g)\in \ZZ$, on a $S(g)\geq 1$. Cette inégalité appliquée au quotient $f_n/g$ contredit l'additivité de $S$ et le fait que $S(f_n)=1$. CQFD. \end{démo} \begin{théorème2} \XXX Le groupe de Galois du polynôme $f_n$ est $𝔖_n$ tout entier. \end{théorème2} \begin{démo} \XXX Soient $K_n$ un corps de décomposition de $f_n$ et $A_n$ son anneau des entiers. Supposons que le nombre premier $p$ soit ramifié dans $K_n$ ; d'après [sorites] il est alors ramifié dans le corps de rupture $\QQ[X]/f_n$ de $f_n$ puisque $K_n$ est le composé de tels corps. Compte tenu de [calcul différente], $f_n$ et $f_n'$ ont une racine commune modulo $p$ ; il en est de même de $nf_n=nX^n-nX-n$ et $Xf_n'=nX^n-X$. Il en résulte que $p$ est premier à $n(n-1)$, que la racine est congrue à $\frac{n}{n-1}$ modulo $p$ et enfin qu'elle est au plus double : $f_n''(\frac{n}{n-1})\neq 0$. Il en résulte [sorites à dégager] que le groupe d'inertie en $p$ est soit trivial soit engendré par une transposition. Ainsi, le groupe de Galois de $f_n$ est un sous-groupe transitif de $𝔖_n$, engendré par des transpositions. C'est $𝔖_n$ tout entier [facile]. \end{démo} \section{Hypothèse de Riemann pour les courbes} \label{HR courbes} Dans cette section, $K$ désigne un corps de fonctions de corps des constantes $k$, de cardinal $q$ et de caractéristique $p$. On note $g$ le genre de $K$. \subsection{Énoncé} D'après \ref{équation fonctionnelle zêta} (iii), la fonction Zêta de $K$ est une fraction rationnelle de la forme $\frac{P(T)}{(1-T)(1-qT)}$, où $P$ est un polynôme à coefficients entiers de degré $2g$ satisfaisant $P(0)=1$. Un tel polynôme se factorise de façon unique, à l'ordre des facteurs près, en un produit $P(T)=∏_{i=0}^{2 g_K} (1-α_i T)$ : les $α_i$ sont les inverses des racines de $P$ dans le corps $𝐂$ des nombres complexes. En identifiant la dérivée logarithmique de la fraction rationnelle $Z$ avec l'expression établie en \ref{réécriture Zêta corps de fonctions}, on trouve immédiatement le fait suivant. \begin{proposition2} \label{formule-des-traces} Il existe $2g$ nombres algébriques $α₁,…,α_{2g}$ tels que pour chaque entier $n ≥ 1$, on ait \[ N(n)=1-\big(∑₁^{2g} α_i^n\big)+q. \] De plus, l'ensemble des nombres $α$ est stable par $α↦ q/α$. %et satisfait la relation $∏_1^{2g} α_i=q^g$. \end{proposition2} \begin{démo} Seul le complément est à vérifier. La stabilité par $α↦ q/α$ est conséquence de l'équation fonctionnelle $P(q^{-1}T^{-1})=q^{-χ/2}T^{-χ_K}P(T)$ (\ref{équation fonctionnelle zêta} (iii,b)), qui entraîne la stabilité de l'ensemble des zéros de $P$ par $z↦ q^{-1}z^{-1}$. %Il en résulte également que $∏_i α_i = ∏_i q/α_i$ d'où %$∏_i α_i = ± q^g$. On laisse le soin au lecteur de vérifier %que l'égalité $∏_i α_i = -q^g$ contredit l'équation fonctionnelle (et l'égalité %$P(0)=1$) \XXX. Nous n'utiliserons pas ce fait. \end{démo} \begin{corollaire2} La connaissance des entiers $N(1),…,N(g)$ détermine les valeurs de $N(n)$ pour $n$ arbitraire. \end{corollaire2} \begin{démo} Commençons par observer que la connaissance de tous les $N(n)$ est équivalente à la connaissance de la fonction Zêta, qui est égale à $\exp(∑_{n=1}^∞ N(n)\frac{T^n}{n})$ (cf. \ref{réécriture Zêta corps de fonctions}, ($††$)). Écrivons $P(T)=∑₀^{2g} c_n T^n$. D'après l'équation fonctionnelle satisfaite par $P$, on a $c_{2g-n}=q^{g-n}c_n$ pour chaque $0 ≤ n ≤ g$. Il en résulte que la fonction Zêta $Z=P (1-T)^{-1}(1-qT)^{-1}$ est déterminée par $c₁,…,c_g$. Or, l'égalité $1+c₁T+c₂T²+\cdots+c_g T^g ≡ (1-T)(1-qT)\exp(∑_{n=1}^∞ N(n)\frac{T^n}{n})) \module (T^{g+1})$ montre que ces coefficients $c₁,…,c_g$ sont déterminés par les $N(n)$, $1 ≤ n ≤ g$. \end{démo} L'objectif de cette section est de démontrer le théorème suivant. \begin{théorème2}[Weil] Pour chaque $1 ≤ i ≤ 2g$, le module (usuel) du nombre complexe $α_i$ est $\sqrt{q}$. De façon équivalente, on a \[ |N(n)-(1+q^n)| ≤ 2g q^{n/2} \] pour chaque entier $n ≥ 1$. \end{théorème2} D'après \ref{formule-des-traces}, la majoration de la différence $|N(n)-(1+q^n)|$ est conséquence immédiate des égalités $|α_i|=q^{½}$. La réciproque est élémentaire (cf. \ref{} ci-dessous). \XXX \subsection{Stratégie et majoration fondamentale} \subsubsection{}Fixons une clôture algébrique $\sur{k}$ du corps des constantes $k$ et, pour chaque entier $n ≥ 1$, notons $k_n$ l'unique sous-extension de $\sur{k} \bo k$ de degré $n$. On veut estimer la taille — notée $N(n)$ ci-dessus — des ensembles $X(k_n)$ définis en \ref{notation-Xk}. Il est tautologique que $X(k_n)$ s'identifie à l'ensemble $\Fix\big(\Frob_k|X(\sur{k})\big)$ des points fixes de l'automorphisme de Frobenius $\Frob_k ∈ \Gal(\sur{k}\bo k)$ agissant sur $X(\sur{k})$ comme expliqué en \ref{action-sur-Xk}. \subsubsection{}Supposons que le corps $K$ soit une extension galoisienne de groupe $G$ du corps $k(t)$, corps dont on note $𝐏¹_k$ le foncteur des $k$-places ultramétriques (\ref{notation-Xk}). Si $\sur{x} ∈ X(\sur{k})$ s'envoie sur un point $k$-rationnel $y ∈ 𝐏¹_k(k)$ et si le morphisme correspondant est net, il existe un unique $σ ∈ G$ tel que $\Frob_k(\sur{x})=σ(\sur{x})$. Il en résulte que \[ 1+q=\# 𝐏¹_k(k)=\frac{1}{\# G} ∑_{σ ∈ G} \#\Fix\big(σ^{-1}\Frob_k|X(\sur{k})\big)+ 𝖮(1), \] où le terme supplémentaire est la contribution des points de ramification, en nombre fini. En conséquence, si l'on sait \emph{majorer} le cardinal des ensembles $ \Fix\big(σ^{-1}\Frob_k|X(\sur{k})\big)$ pour $σ ≠ \Id$, on sait également minorer celui de $\Fix\big(\Frob_k|X(\sur{k})\big)=X(k)$. Notons également qu'une $k$-place $φ:K → \sur{k} ∪ \{∞\}$ est fixe par $σ^{-1}\Frob_k$ si et seulement si $\Frob_k ∘ φ = φ ∘ σ$. Il en résulte que si $φ,φ′$ ont même image dans $X$, $φ$ est fixe si et seulement si $φ′$ l'est. (En effet, $φ$ et $φ′$ diffèrent par l'action du Frobenius $\Frob_k$.) \begin{théorème2}[Bombieri] Supposons que $q$ est un carré ${q′}²$, satisfait l'inégalité $q′>(g+1)²$, et qu'il existe un \emph{point rationnel} $x ∈ X(k)$. Alors pour tout $σ ∈ \Aut(K\bo k)$, on a la majoration \[ \# \Fix \big(\Frob^σ_k|X(\sur{k})\big) -(1+q) < (2g+1) \sqrt{q}, \] où l'on note $\Frob^σ_k=σ^{-1}\Frob_k$. En particulier, $\# X(k) ≤ 1+q+(2g+1)\sqrt{q}$. \end{théorème2} L'existence d'une $k$-place dans $X(k)$ est équivalente à l'existence d'un diviseur \emph{effectif} de degré $1$ sur $X$ (\ref{définition diviseur effectif}). %(Un tel diviseur est également appelé \emph{diviseur premier de degré $1$}.) \commentaire{introduire « échange tordu du $½$-Frobenius » pour motiver ?} \begin{démo} Notons $ℒ_n$ l'ensemble $L(nx)$ des fonctions $f ∈ K$ telles que $\div(f) ≥ - n x$, et $l_n$ sa dimension sur $k$ (cf. \ref{Poisson implique RR}). D'après \ref{RR et croissance l}, la suite $(l_n)_{n ≥ 0}$ est lentement croissante : \mbox{$l_{n-1} ≤ l_n ≤ l_{n-1}+1$}. Notons $S$ l'ensemble des indices $n ∈ 𝐍$ pour lesquels $l_n=l_{n-1}+1$ (« saut »), et choisissons pour chaque $s ∈ S$ une fonction $f_s ∈ ℒ_s - ℒ_{s-1}$. On a donc $\div(f_s)=-sx$ et si $S_{≤ N}$ est l'ensemble des indices de sauts inférieurs à un entier donné $N$, les fonctions $f_s$, pour $s ∈ S_{≤ N}$, forment une \emph{base} de $ℒ_N$. Appliquons ce qui précède aux entiers $N=q′-1$ et $M=N+(2g+1)$. Vérifions le fait suivant : \begin{quote} \emph{les fonctions $f_s  {f_{t}}^{q′}$, pour $s ∈ S_{≤ N}$ et $t ∈ S_{≤ M}$, sont $k$-linéairement indépendantes.} \end{quote} Il suffit de vérifier que les fonctions $f_s ∈ K$ sont linéairement indépendantes sur $K′=K^{q′}$. Or, si $∑_s λ_s^{q′} f_s=0$, où les coefficients $λ_s$ sont non nuls et dans $K$, il existe deux indices distincts $s₁,s₂$ dans $S_{≤ N}$ tels que $v_x( λ_{s₁}^{q′} f_{s₁})=v_x(λ_{s₂}^{q′} f_{s₂})$. Or, une telle égalité entraîne la congruence $s₁ ≡ s₂ \module q′$, ce qui est exclu car $s₁$ et $s₂$ sont majorés par $N=q′ -1$. Il résulte de ce qui précède que le sous-$k$-espace vectoriel $ℒ_{N,M}$ de $K$ image de $ℒ_N ⊗_k ℒ_M^{q′}$ par l'application produit est de dimension $l_{N,M}=l_N ⋅l_M$. Par le théorème de Riemann-Roch, on a donc la minoration \[ l_{N,M} ≥ (N-g+1)(M-g+1)=(q′-g)(q′+g+1)=q+q′-g(g+1) . \] Considérons d'autre part le sous-$k$-espace vectoriel $ℒ_{M,N;σ}$ de $K$ image de $ℒ_M ⊗_k \big(σℒ_N\big)^{q′}$ par l'application produit. \commentaire{re-vérifier $σ ↔ σ^{-1}$…} Il résulte de l'inclusion $ℒ_{M,N;g} ⊆ ℒ\big(Mx+Nq′σ(x)\big)$, de l'inégalité $\deg(Mx+N q′ σ(x))=q+2g>2g-2$ et du théorème de Riemann-Roch que l'on a la majoration \[ l_{M,N;σ}=\dim_k ℒ_{M,N;σ} ≤ (q+2g)-g+1=q+g+1. \] Comme $q′>(g+1)²$, on a $l_{N,M} > l_{M,N;σ}$ si bien que l'application $k$-linéaire $ℒ_{N,M} → ℒ_{M,N;σ}$, envoyant $f_s f_{t}^{q′}$ sur $f_t (σf_s)^{q′}$ — « échange tordu du demi-Frobenius » — est de noyau non trivial. Il existe donc des fonctions $h_s$ dans $ℒ_M$ telles \[ f ≔ ∑_{s ∈ S_{≤ N}} h_s^{q′} f_s ≠ 0 \] mais \[ F ≔ ∑_{s ∈ S_{≤ N}} h_s (σf_s)^{q′}=0. \] Soit $φ$ une $k$-place dans $\Fix \big(\Frob^σ_k | X(\sur{k})\big)$ non localisée en $x$ de sorte que $φ$ est défini sur les espaces $ℒ_n$. Comme $φ(f_s)=φ(σf_s)^{q}$, on a $φ(f)=∑_s φ(h_s)^{q′} φ(σf_s)^q=φ(F)^{q′} =0$. D'après \ref{notation-Xk}, le cardinal de $\Fix \big(\Frob^σ _k | X(\sur{k})\big)$ est donc majoré par $\deg(\div₀(f))$. Comme $\deg(\div₀(f))=\deg(\div_∞(f))$ et $f ∈ ℒ_{N+q′ M}$, le cardinal recherché est donc inférieur ou égal à $1+(N+q′M)=(1+q)+(2g+1)q′-1$. CQFD. \end{démo} \subsection{Minoration et fin de l'argument} \begin{proposition2} \label{formule de la moyenne} Soit $L\bo K$ une extension finie galoisienne de groupe $G$ et utilisons la lettre $Y$ pour désigner les points du corps global $L$ et le foncteur des $k$-places. Si le corps des constantes de $L$ égal à $k$ alors, pour tout $σ ∈ \Aut(L \bo k)$ stabilisant $K$, on a la formule de la moyenne : \[ \# \Fix\big(\Frob_k^σ|X(\sur{k})\big) =\frac{1}{\# G} ∑_{γ ∈ G} \# \Fix\big(\Frob_k^{γ σ}|Y(\sur{k})\big). \] \end{proposition2} L'énoncé de [Fried-Jarden] n'a pas de sens. L'énoncé ci-dessus est peut-être bon... ? :( \XXX \begin{démo} Soit $\sur{x} ∈ X(\sur{k})$, d'image $x$ dans $X$, et considérons la fibre du morphisme $Y(\sur{k}) → X(\sur{k})$ au-dessus de $\sur{x}$, dont on note $r_x$ le cardinal. Il existe un entier $f_x$ tel que chaque $y ∈ Y$ au-dessus de $x$ induise une extension résiduelle de degré $f_x$. Enfin, notons $e_x$ l'indice de ramification de $x$ dans $L$. On a $\#G=e_x f_x r_x$. \end{démo} \subsubsection{} \begin{center} ⁂ \end{center} Utiliser astuce $σ ∘ \Frob = \Frob ′$ pour simplifier ? (cas $σ=1$ ?). \begin{corollaire2} $B_K(n) = q^n/n + O(q^{n/2})$ [cf. Gauß]. \end{corollaire2} \subsection{Dévissage} Il suffit donc de démontrer le théorème après extension des scalaires. \begin{lemme2} Il suffit de démontrer l'existence de $A,B,N$ tels que \[ |X(k_d)-(1+q^d)| ≤ A + B q^{d/2}. \] pour $d ≫ 0$ divisible par $N$. \end{lemme2} \section{Fonction zêta de Hasse de l'équation homogène $X³+Y³+Z³=0$} \begin{théorème2} \XXX Soit $D=27$ et posons $\chap{L}(s)=D^{\frac{s}{2}} Γ_𝐂(s) L(E,s)$. Alors : \[ \chap{L}(E,s)=\chap{L}(E,2-s). \] \end{théorème2} \begin{remarque2} \XXX Courbe elliptique à multiplication complexe. \end{remarque2} Cf. cours à Hyères (2008). Utilise : — $𝐐(j)=𝐐(\sqrt{3})$ est euclidien ; — construction ad hoc caractère de Hecke via sommes de Jacobi ; — transformée de Mellin + formule de Poisson pour démontrer équation fonctionnelle. \section{Courbes algébriques}Si l'on munit l'ensemble $Σ$ des places d'un corps global de caractéristique positive la topologie de Zariski (cf. \refext{AC}{espace-topologique-SpecA}), en décrétant qu'un ensemble $U$ est ouvert si et seulement si il est cofini ou vide, le foncteur $𝒪_K:U↦ 𝒪_K(U)$ est un \emph{faisceau} d'anneaux et la paire $(Σ,𝒪_K)$ est \textbf{espace annelé} d'un type particulier, appelé \textbf{schéma}. Plus précisément, c'est une courbe projective lisse sur $k$. \XXX Les résultats de la proposition précédente ont été établis en \ref{sections globales droite projective} lorsque $K=𝐅_p(t)$. \XXX Attention : il existe des anneaux de Dedekind dont un ouvert affine n'est pas un ouvert principal. (Cf. torsion dans le groupe de Picard.) %(Cf. Joël Riou, forum 2007.) \begin{proposition2} Soient $k$ un corps fini et $f ∈ k[X,Y]$ un polynôme géométriquement irréductible. Notons $X_f$ l'anneau intègre $k[X,Y]/(f)$ et $K_f$ son corps des fractions. \begin{enumerate} \item Le corps $K_f$ est un corps global de corps des constantes $k$. \item $Σ(K_f) ∼ \Specmax X_f$ (birationnel : bijection à ensemble fini près). Plus précisément, il existe un ouvert dense $U$ de $K$ et un élément non nul $a ∈ X_f$ tels que $𝒪_K(U)$ soit $k$-isomorphe à $X_f[a^{-1}]$. \end{enumerate} \end{proposition2} \begin{démo} (i) Le corps $K_f$ est de type fini et de degré de transcendance $1$ sur $k$. (Le polynôme $f$ est irréductible donc non constant.) C'est donc un corps global. L'anneau $K_f ⊗_k k\alg$ est isomorphe à un localisé de l'anneau $X_f ⊗_k k\alg$. Le polynôme $f$ étant \emph{géométriquement} irréductible), l'anneau $X_f ⊗_k k\alg$ est intègre (et réciproquement), et par conséquent $K_f ⊗_k k\alg$ aussi. D'après \refext{AC}{}, le corps $k$ est intégralement clos dans $K_f$ : c'est son corps des constantes. (ii) Soit $U$ un ouvert arbitraire strict de $Σ(K)$. Les $k$-algèbres $A=X_f$ et $B=𝒪_{K_f}(U)$ sont de type fini et ont même corps des fractions. Il en résulte (\XXX) qu'il existe $a ∈ A-\{0\}$ et $b ∈ B-\{0\}$ tels que $A[a^{-1}]$ et $B[b^{-1}]$ soient $k$-isomorphes. Soit $S$ le support (fini) de $\div₀(b)$. Le sous-anneau $B[b^{-1}]$ de $K_f$ est inclus dans $𝒪_{K_f}(U - S)$. Cette inclusion est une égalité car si $g ∈ 𝒪_{K_f}(U - S)$, il existe un entier $n$ tel que la fonction $b^n g$ n'ait pas de pôle en les points de $S$ et, partant, appartienne à $𝒪_{K_f}(U)$. \end{démo} \section{Notes} Pour la transformation de Fourier : \cite{Bushnell-Henniart} (d'où on a tiré la seconde démonstration de l'équation fonctionnelle locale), \cite{Bernstein-Zelevinski}, \cite[appendice F]{Elements@Colmez} (notamment pour la formule de Poisson adélique). Pour l'analyse harmonique, on trouvera de beaux survols historiques dans \cite{scope@Mackey}. Pontrâgin : \cite[§6]{Pontryagin@Morris} et \cite[§12]{representations@Kirillov}. Analyse harmonique : \cite{harmonic@Loomis}. Hypothèse de Riemann : \cite{Fried-Jarden} (eux-même inspirés par Bombieri). \ifx\danslelivre\undefined \bibliography{../biblio/bibliographie-livre} \bibliographystyle{../biblio/style-bib-livre} \end{document} \else \endgroup \fi