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diff --git a/notes-accq205.tex b/notes-accq205.tex index a2e5eb0..a41407b 100644 --- a/notes-accq205.tex +++ b/notes-accq205.tex @@ -382,7 +382,7 @@ polynômes à coefficients dans $k$ évalués en des $x_i$. Pour dire les choses de façon plus sophistiquée, en supposant les $x_i$ en nombre fini pour simplifier (et indicés par $1,\ldots,n$), il existe un unique morphisme $k[t_1,\ldots,t_n] \to A$ envoyant $t_i$ sur $x_i$, à -savoir le \index{évaluation (morphisme d')}morphisme « d'évaluation » qui à un $P \in +savoir le \index{évaluation}morphisme « d'évaluation » qui à un $P \in k[t_1,\ldots,t_n]$ associe $P(x_1,\ldots,x_n)$, et $k[x_1,\ldots,x_n]$ est l'\emph{image} de ce morphisme. On peut donc dire qu'une $k$-algèbre de type fini $k[x_1,\ldots,x_n]$ est la même chose qu'un @@ -478,7 +478,7 @@ anglais). On se pose la question de mieux comprendre cette extension. Pour cela, on introduit l'unique morphisme $\varphi\colon k[t] \to K$, où $k[t]$ est l'anneau des polynômes en une indéterminée $t$ sur $k$, qui -envoie $t$ sur $x$, c'est-à-dire, le \index{évaluation (morphisme d')}morphisme « d'évaluation » +envoie $t$ sur $x$, c'est-à-dire, le \index{évaluation}morphisme « d'évaluation » envoyant $P$ sur $P(x)$ pour chaque $P \in k[t]$. Le noyau de $\varphi$ est un idéal de $k[t]$. Exactement l'un des deux cas suivants se produit : @@ -860,7 +860,7 @@ $x_1,\ldots,x_n$ d'éléments de $K$ est dite \defin[algébriquement indépendan k[t_1,\ldots,t_n]$ à coefficients dans $k$ et tel que $P(x_1,\ldots,x_n) = 0$ (relation de « dépendance algébrique » sur $k$ entre les $x_i$) est le polynôme nul ; autrement dit, lorsque le -\index{évaluation (morphisme d')}morphisme « d'évaluation » $k[t_1,\ldots,t_n] \to K$ (avec +\index{évaluation}morphisme « d'évaluation » $k[t_1,\ldots,t_n] \to K$ (avec $k[t_1,\ldots,t_n]$ l'anneau des polynômes en $n$ indéterminées) envoyant $P$ sur $P(x_1,\ldots,x_n)$ est injectif. En particulier, chacun des $x_i$ est transcendant sur $k$ ; et un unique élément $x$ @@ -3161,12 +3161,12 @@ Il faut imaginer les éléments de $k(t)$ comme des fonctions rationnelles sur la droite affine : on verra plus loin comment définir les points de la droite, mais on peut au moins dire ceci : si $x$ est un élément de $k$ ou bien le symbole spécial $\infty$, et si $f \in -k(t)$, on définit $f(x)$ comme l'évaluation (=la valeur) de $f$ en $x$ -ou bien le symbole spécial $\infty$ si $f$ a un pôle en $x$ (lorsque -$x = \infty$, l'évaluation de $f$ en $x$ peut se définir comme celle -de la fraction rationnelle $f(\frac{1}{t})$ en $0$ ; sur les réels ou -les complexes, c'est simplement la limite de $f$ en $\infty$ ou bien -$\infty$ si $f$ n'est pas borné). +k(t)$, on définit $f(x)$ comme l'\defin{évaluation} (=la valeur) de +$f$ en $x$ ou bien le symbole spécial $\infty$ si $f$ a un pôle en $x$ +(lorsque $x = \infty$, l'évaluation de $f$ en $x$ peut se définir +comme celle de la fraction rationnelle $f(\frac{1}{t})$ en $0$ ; sur +les réels ou les complexes, c'est simplement la limite de $f$ +en $\infty$ ou bien $\infty$ si $f$ n'est pas borné). Rappelons que tout élément $f$ non nul de $k(t)$ possède une écriture unique sous la forme $c \prod_{h \in \mathscr{P}} h(t)^{v_h}$ où $c @@ -4039,16 +4039,17 @@ on a donc $u = r\cdot 1$, ce qu'on voulait montrer. \thingy La propriété (C) du lemme \ref{key-lemma-on-valuations-of-a-curve} montre que, pour toute place $v$ d'un corps de fonctions $K$ de courbe sur $k$, le corps -résiduel $\kappa_v$ est une extension finie, donc algébrique, de $k$. -Le degré $[\kappa_v : k]$ s'appelle aussi \defin[degré (d'une - place)]{degré} de la place $v$. S'il vaut $1$, c'est-à-dire si -$\kappa_v = k$, la place $v$ est dite \defin[rationnelle +résiduel $\varkappa_v$ est une extension finie, donc algébrique, +de $k$. Le degré $[\varkappa_v : k]$ s'appelle aussi \defin[degré + (d'une place)]{degré} de la place $v$. S'il vaut $1$, c'est-à-dire +si $\varkappa_v = k$, la place $v$ est dite \defin[rationnelle (place)]{rationnelle}. C'est notamment le cas si $k$ est \emph{algébriquement clos}. \thingy Toujours pour $K$ un corps de fonctions de courbe sur $k$, si $f\in K$ et si $v \in \mathscr{V}_K$ (i.e., $v$ est une place de $K$), -on peut définir $f(v) \in \varkappa_v$ comme valant : +on peut définir $f(v) \in \varkappa_v$ (l'\defin{évaluation} de $f$ en +la place $v$) comme valant : \begin{itemize} \item la classe de $f \in \mathcal{O}_v$ modulo $\mathfrak{m}_v$, lorsque $v(f) \geq 0$, @@ -4062,7 +4063,7 @@ on peut définir $f(v) \in \varkappa_v$ comme valant : \end{itemize} Ceci permet de voir un élément de $K$ comme une fonction sur $\mathscr{V}_K$ (mais comme elle prend des valeurs dans des ensembles -$\kappa_v$ différents, ce n'est pas très agréable, sauf si $k$ est +$\varkappa_v$ différents, ce n'est pas très agréable, sauf si $k$ est algébriquement clos auquel cas on a bien affaire à une fonction $\mathscr{V}_K \to k\cup\{\infty\}$). @@ -4107,7 +4108,7 @@ places — chose qui n'était pas triviale \textit{a priori} !) En général, $\tilde k$ peut être strictement plus grand que $k$ : un exemple de ce phénomène a été donné en \ref{example-curve-irreducible-but-not-geometrically} (où $\tilde k -= k[\sqrt{-1}]$, par exemple $k=\mathbb{R}$ et $\tilde k=\mathbb{C}$). += k(\sqrt{-1})$, par exemple $k=\mathbb{R}$ et $\tilde k=\mathbb{C}$). On sera souvent amené à faire l'hypothèse que $\tilde k = k$, c'est-à-dire que $k$ est \emph{algébriquement fermé} (cf. \ref{relative-algebraic-closure}) dans $K$ ; ceci se produit @@ -4123,6 +4124,98 @@ sous-corps $K$ et $k^{\alg}$ sont linéairement disjoints sur $k$ et en particulier, leur intersection $\tilde k$ est égale à $k$. +\subsection{Les places de la droite projective}\label{subsection-places-of-the-projective-line} + +\thingy On a vu en \ref{function-field-of-the-line} comment fabriquer +des valuations non-triviales (au-dessus de $k$) du corps $k(t)$ des +fractions rationnelles en une indéterminée sur $k$ : à savoir, si $h$ +est un polynôme unitaire irréductible de $k[t]$, on appelle $v_h(f)$ +l'exposant de $h$ dans la factorisation de $f$ en polynômes +irréductibles (si $f \in k[t]$, c'est bien l'exposant de la +décomposition en produit d'irréductibles, et pour une fraction +rationnelle $f/g$ on peut définir $v_h(f/g) = v_h(f) - v_h(g)$ sachant +qu'au plus un de ces termes sera non-nul lorsque $f/g$ est en forme +irréductible). Si on préfère, on peut aussi le noter $v_\xi(f)$ où +$\xi$ est une racine quelconque de $h$ dans une clôture algébrique +$k^{\alg}$ fixée. + +Il est facile de vérifier que ces $v_h$ sont bien des valuations au +sens de \ref{valuation-ring-versus-valuation-function} (il suffit par +exemple de vérifier les propriétés définissant une valuation sur des +polynômes, ce qui est immédiat, et de les déduire pour les fractions +rationnelles). On peut aussi vérifier directement que $R_h := \{f \in +k(t) : v_h(f) \geq 0\}$ (c'est-à-dire l'ensemble des fractions +rationnelles dont $h$ ne divise pas le dénominateur réduit) est bien +un anneau de valuation. + +Le corps résiduel $\varkappa_h$ de la place $v_h$ n'est autre que le +corps de rupture $k[t]/(h)$ de $h$ sur $k$ (si $\deg h = 1$, c'est +simplement $k$) : en effet, \textit{a priori} $\varkappa_h = R_h/(h)$, +mais en fait tout élément de $R_h$ peut s'écrire sous la forme $f/g$ +avec $g$ non multiple de $h$, et quitte à utiliser une relation de +Bézout $u g + w h = 1$ (avec $u,w \in k[t]$), on voit que $f/g$ est la +somme de $uf \in k[t]$ et de $w\frac{f}{g} h \in h R_h$, si bien que +finalement $R_h/(h) = k[t]/(h)$. Ce qu'on a appelé degré de la place +$v_h$ est donc simplement le degré de $h$ ; et les places rationnelles +sont les $v_h$ avec $\deg h = 1$, c'est-à-dire, en fait, l'évaluation +en un certain point $x \in k$ (si $h(t) = t-x$ : on rappelle que le +reste de la division euclidienne de $f\in k[t]$ par $t-x$ est +simplement $f(x)$). La valeur de $f$ en la place $v_\xi$ définie par +un $\xi \in k^{\alg}$ (c'est-à-dire par son polynôme minimal $h$) peut +s'identifier à la valeur $f(\xi)$ dans le corps $k(\xi) = k[t]/(h)$. + +\thingy Il existe une autre valuation non-triviale de $k(t)$ au-dessus +de $k$, à savoir celle qui à une fraction rationnelle $f/g$ associe la +différence $\deg(g) - \deg(f)$ du degré du dénominateur et du degré du +numérateur. On la notera $v_\infty$. + +L'anneau de valuation $R_\infty$ associé est l'anneau des fractions +rationnelles dont le degré du dénominateur est supérieur ou égal à +celui du numérateur, et le corps résiduel est simplement $k$, le +morphisme d'évaluation $R_\infty/(\frac{1}{t})$ étant donné par la +valeur de la fraction rationnelle en $\infty$ (telle que définie +en \ref{function-field-of-the-line}). On peut s'en convaincre en +remplaçant $t$ par $\frac{1}{t}$, ce qui définit un automorphisme de +$k(t)$ transformant la place $v_0$ en $v_\infty$ et vice versa. + +On vient de construire un certain nombre de places de $k(t)$ : en +fait, ce sont les seules : + +\begin{prop}\label{places-of-the-projective-line} +Soit $k$ un corps. Alors les places (=valuations non-triviales +au-dessus de $k$) du corps $k(t)$ des fractions rationnelles en une +indéterminée sont exactement les places $v_h$ (associant à $f \in +k(t)$ l'exposant de $h$ dans la factorisation de $f$ en polynômes +irréductibles) et $v_\infty$ (qui à une fraction rationnelle associe +le degré du dénominateur moins le degré du numérateur). +\end{prop} +\begin{proof} +On a vu que les places qu'on a dites en sont bien, et elles sont +visiblement distinctes. Soit maintenant $v$ une place de $k(t)$. + +Considérons d'abord le cas $v(t) \geq 0$. Alors $v(f) \geq 0$ pour +tout polynôme $f \in k[t]$ (puisque $R_f$ est un anneau). Il existe +nécessairement un $f \in k[t]$ tel que $v(f) > 0$ sans quoi la +valuation serait triviale. Mais si $v(f) > 0$, l'un de ses facteurs +(unitaires) irréductibles, disons $h$, vérifie aussi $v(h) > 0$. On a +nécessairement $v(q) = 0$ pour tout autre polynôme unitaire +irréductible $q$ car si $v(q)$ était strictement positif, une relation +de Bézout $u q + w h = 1$ avec $u,w \in k[t]$ donnerait $v(1) > 0$ ce +qui est absurde. Bref, $h$ est le seul polynôme unitaire irréductible +dont la valuation est non-nulle, et il est alors clair que, $v(f)$ +pour $f\in K$ quelconque, est le produit de $v(h)$ par l'exposant de +$h$ dans la factorisation de $f$ en polynômes irréductibles. Puisque +la valeur $1$ doit être atteinte par la valuation, on a forcément +$v(h) = 1$, et on a fini. + +Considérons maintenant le cas $v(t) < 0$. Alors $v(f) = \deg f\cdot +v(t)$ pour tout polynôme $f$ (puisque le terme dominant a une +valuation strictement plus petite que n'importe quel autre terme de la +somme). On a donc $v(f/g) = (\deg f-\deg g)\,v(t)$ pour toute +fraction rationnelle $f/g$, et nécessairement $v(t) = -1$ puisque la +valeur $1$ doit être atteinte. +\end{proof} + % TODO: |