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diff --git a/notes-accq205.tex b/notes-accq205.tex index 806fdf0..1659922 100644 --- a/notes-accq205.tex +++ b/notes-accq205.tex @@ -1944,7 +1944,8 @@ les résultats suivants : \end{itemize} \end{thm} -\thingy La partie la plus importante du résultat ci-dessus est la +\thingy\label{rational-is-stable-under-galois} +La partie la plus importante du résultat ci-dessus est la suivante : \emph{si un élément de $L$ (séparable et normal sur $K$) est fixé par le groupe $G$ de tous les $K$-automorphismes de $L$, alors cet élément appartient à $K$}. Il s'agit donc d'une @@ -2611,7 +2612,8 @@ les ensembles qu'on a dit, et on a observé qu'elles sont décroissantes. \end{proof} -\thingy On aurait pu être tenté de définir $Z(\mathscr{F})$ comme +\thingy\label{rational-points-of-zariski-closed-sets} +On aurait pu être tenté de définir $Z(\mathscr{F})$ comme l'ensemble des zéros dans $k^d$, plutôt que $(k^{\alg})^d$, des éléments de $\mathscr{F}$ : le problème avec ce point de vue est qu'on peut avoir $Z(I) \cap k^d = \varnothing$ alors que $I$ n'est pas @@ -2623,6 +2625,20 @@ Avec le point de vue choisi ici, on a $Z(t^2+1) = \{\pm i\} \subseteq de Zariski défini sur $\mathbb{R}$ (c'est, en revanche, un fermé de Zariski défini sur $\mathbb{C}$). +Lorsqu'on a besoin de désigner les éléments de $Z(I) \cap k^d$, +c'est-à-dire les solutions dans $k^d$, on dira que ce sont les +\textbf{points rationnels} du fermé de Zariski $Z(I)$ : cette +terminologie vient de la situation $k=\mathbb{Q}$ et a été étendue à +n'importe quel corps. (À titre d'exemple, $(\frac{4}{5},\frac{3}{5})$ +est un point rationnel du « cercle » $Z(x^2+y^2-1)$ sur $\mathbb{Q}$.) +D'après le théorème \ref{main-results-galois-theory} +(cf. surtout \ref{rational-is-stable-under-galois}), si $k$ est +parfait +(cf. \ref{definition-perfect-field} et \ref{field-is-perfect-iff-every-algebraic-is-separable}), +on peut dire que les points rationnels de $Z(I)$ sont ceux qui sont +fixés par le groupe de Galois absolu, i.e., par tous les +automorphismes de $k^{\alg}$ au-dessus de $k$. + \thingy\label{regular-functions-on-a-zariski-closed-set} Si $I$ est un idéal radical de $k[t_1,\ldots,t_d]$ si bien que $\mathfrak{I}(Z(I)) = I$ comme on vient de le voir en \ref{zeros-and-ideals-bijections}, on @@ -2652,9 +2668,10 @@ régulière est donc simplement la restriction d'un polynôme). \section{Corps de courbes algébriques} -\subsection{Définition} +\subsection{Définition et premiers exemples} -\thingy Soit $k$ un corps. On appelle \textbf{corps de fonctions de +\thingy\label{definition-function-field} +Soit $k$ un corps. On appelle \textbf{corps de fonctions de dimension $n$} sur $k$ une extension de corps de $k$ qui soit de type fini (cf. \ref{subfield-generated}) et de degré de transcendance $n$ sur $k$ (cf. \ref{definition-transcendence-degree}). @@ -2683,12 +2700,13 @@ raison, ce que nous appelons « courbe » s'appellerait « courbe normale projective » chez d'autres auteurs), et \textbf{(b)} les hypothèses effectuées ne sont pas forcément les mêmes (notamment, beaucoup d'auteurs restreignent les courbes à ce qu'on appellera plus bas les -courbes « géométriquement intègres »). +courbes « géométriquement intègres »). On sera éventuellement amené à +restreindre la définition qui vient d'être donnée. \thingy La courbe la plus simple est donnée par le corps $k(t)$ des fractions rationnelles en une indéterminée $t$ : on l'appelle -\textbf{droite projective} sur $k$ et on peut la noter -$\mathbb{P}^1_k$ ou simplement $\mathbb{P}^1$ (ainsi, +\textbf{droite projective} (ou simplement « droite ») sur $k$ et on +peut la noter $\mathbb{P}^1_k$ ou simplement $\mathbb{P}^1$ (ainsi, $k(\mathbb{P}^1_k) := k(t)$). Il faut imaginer les éléments de $k(t)$ comme des fonctions @@ -2742,7 +2760,96 @@ la première coordonnée. \thingy La proposition \ref{separating-transcendence-basis-over-perfect-field} montre que, au moins si $k$ est un corps parfait, on peut toujours se -ramener à la situation qui vient d'être décrite. +ramener à la situation qui vient d'être décrite. (Et si $k$ n'est pas +parfait, on peut défendre l'idée que la définition donnée +en \ref{definition-function-field} n'est pas la bonne et qu'on devrait +supposer $K$ algébrique \emph{séparable} sur une extension +transcendante pure $k(x)$.) En un certain sens, donc, toutes les +courbes algébriques sont « planes » (mais de nouveau, ceci dépend +hautement du point de vue choisi pour étudier les courbes). + +Donnons quelques exemples plus précis, puis discutons ce qui se passe +dans des cas adjacents. + +\thingy Considérons l'exemple de $P = x^2 + y^2 - 1$ sur un corps $k$ +de caractéristique $\neq 2$ (on pensera notamment au corps des réels). + +Le polynôme $P$ est irréductible dans $k[x,y]$. En effet, comme il +est de degré total $2$, une factorisation non triviale serait +nécessairement en degrés $1+1$ ; en considérant les termes de plus +haut degré (i.e., $1$) des facteurs, dont le produit doit être $x^2 + +y^2$, on voit qu'ils doivent être de la forme $x+\sqrt{-1}\,y$ et +$x-\sqrt{-1}\,y$ (en notant $\sqrt{-1}$ une racine carrée de $-1$ +dans $k$, qui doit exister pour que la factorisation soit possible) ; +or avoir $(x+\sqrt{-1}\,y+c)(x-\sqrt{-1}\,y+c') = x^2+y^2-1$ impose +simultanément $c+c' = 0$ et $c-c' = 0$ et $cc' = -1$, conditions +manifestement impossibles à satisfaire en caractéristique $\neq 2$. +On est donc dans le cadre considéré plus haut. + +La courbe plane $C$ d'équation $P=0$ est le « cercle unité », dont le +corps des fonctions est le corps $\Frac(k[x,y]/(x^2+y^2-1)) = k(x,y : +x^2+y^2=1)$ de rupture de $x^2+y^2-1$ sur $k(x)$. En fait, il s'avère +que ce corps est \emph{isomorphe} au corps $k(t)$ des fractions +rationnelles en une indéterminée : ceci résulte du « paramétrage + rationnel du cercle » représenté géométriquement par la figure +suivante + +\begin{center} +\begin{tikzpicture}[scale=3] +\draw[step=.2cm,help lines] (-1.25,-1.25) grid (1.25,1.25); +\draw[->] (-1.15,0) -- (1.15,0); \draw[->] (0,-1.15) -- (0,1.15); +\draw (0,0) circle (1cm); +\draw (1,-1.15) -- (1,1.15); +\coordinate (P) at (0.8,0.6); +\coordinate (Q) at (1,0.6666666667); +\draw (0.8,0) -- (P); +\draw (-1,0) -- node[sloped,auto] {$\scriptstyle\mathrm{pente}=t$} (Q); +\fill[black] (P) circle (.5pt); +\fill[black] (Q) circle (.5pt); +\fill[black] (-1,0) circle (.5pt); +\node[anchor=west] at (Q) {$\scriptstyle (1,2t)$}; +\node[anchor=north east] at (-1,0) {$\scriptstyle (-1,0)$}; +\node[anchor=north west] at (1,0) {$\scriptstyle (1,0)$}; +\node[anchor=east] at (P) {$\scriptstyle (\frac{1-t^2}{1+t^2},\frac{2t}{1+t^2})$}; +\end{tikzpicture} +\end{center} + +Un petit calcul d'inspiration géométrique (cf. les formules exprimant +$(\cos\theta,\sin\theta)$ en fonction de $\tan\frac{\theta}{2}$), +valable en fait sur tout corps $k$ de caractéristique $\neq 2$, montre +que toute solution $(x,y)$ de $x^2+y^2=1$ autre que $(-1,0)$ peut +s'écrire de la forme $(\frac{1-t^2}{1+t^2},\frac{2t}{1+t^2})$ avec $t +\in k$ (uniquement défini, et vérifiant $t^2\neq -1$), qui peut être +réciproquement calculé comme $t = \frac{y}{x+1}$. + +Mais ces mêmes formules peuvent s'interpréter comme définissant un +\emph{isomorphisme} entre $k(C) := k(x,y : x^2+y^2=1)$ et +$k(\mathbb{P}^1) = k(t)$, à savoir l'isomorphisme envoyant $x$ et $y$ +(maintenant des éléments de $k(C)$) sur $\frac{1-t^2}{1+t^2}$ et +$\frac{2t}{1+t^2}$ (éléments de $k(t)$) respectivement : le fait qu'on +ait bien $\big(\frac{1-t^2}{1+t^2}\big)^2 + +\big(\frac{2t}{1+t^2}\big)^2 = 1$ assure que ce morphisme est bien +défini (rappel : pour définir un morphisme de $k(x)[y]/(P)$ vers un +anneau $B$ quelconque il suffit de définir un morphisme de $k(x)[y]$ +vers $B$ qui annule l'image de $P$), et en vérifiant que $t \mapsto +\frac{y}{x+1}$ est sa réciproque, on voit que c'est un isomorphisme. + +Toute cette situation se résume en disant que le cercle $C = +\{x^2+y^2=1\}$ est une courbe \textbf{rationnelle} (sur le corps $k$ +quelconque de caractéristique $\neq 2$), ou rationnellement +paramétrée. Le cadre dans lequel nous considérons les courbes fait +qu'on « ne voit pas » la différence entre les courbes rationnelles et +la droite. + +De façon générale, le même raisonnement va fonctionner pour une +conique « non-dégénérée » sur un corps de caractéristique $\neq 2$, +i.e., la courbe définie par un polynôme de degré $2$ qui ne se +factorise pas même sur la clôture algébrique (géométriquement, ceci +signifie que la conique ne sera pas réunion de deux droites, même sur +la clôture algébrique), \emph{à condition d'avoir un point rationnel} +(cf. \ref{rational-points-of-zariski-closed-sets}) qui puisse jouer le +rôle de $(-1,0)$ dans le paramétrage par des droites de pente +variable. |