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diff --git a/notes-accq205.tex b/notes-accq205.tex index 5ce7d3c..b475c64 100644 --- a/notes-accq205.tex +++ b/notes-accq205.tex @@ -135,7 +135,7 @@ autrement dit lorsque $\mathfrak{p}\neq A$ et que $ab \in \mathfrak{p}$ implique $a \in \mathfrak{p}$ ou $b \in \mathfrak{p}$ (la réciproque est toujours vraie). -\thingy Dans un anneau (toujours sous-entendu commutatif...), +\thingy\label{fields-and-maximal-ideals} Dans un anneau (toujours sous-entendu commutatif...), l'ensemble noté $A^\times$ des éléments inversibles est un groupe, aussi appelé groupe des \textbf{unités} de $A$. @@ -286,7 +286,8 @@ inversible. \subsection{Algèbre engendrée, extensions de corps} -\thingy Si $A$ est une $k$-algèbre (où $k$ est un anneau), et +\thingy\label{subalgebra-generated} Si $A$ est une $k$-algèbre (où $k$ +est un anneau), et $(x_i)_{i\in I}$ est une famille d'éléments de $A$, l'intersection de toutes les sous-$k$-algèbres de $A$ contenant les $x_i$ est encore une sous-$k$-algèbre de $A$ contenant les $x_i$, c'est-à-dire que c'est la @@ -295,7 +296,7 @@ $k$-algèbre \textbf{engendrée} (dans $A$) par les $x_i$ et on la note $k[x_i]_{i\in I}$. Lorsque les $x_i$ sont en nombre fini (le cas qui nous intéressera le plus), disons indicés par $1,\ldots,n$, on note $k[x_1,\ldots,x_n]$, et on dit que $k[x_1,\ldots,x_n]$ est une -$k$-algèbre \textbf{de type fini} (comme $k$-algèbre). +$k$-algèbre \textbf{de type fini} (en tant que $k$-\emph{algèbre}). \danger On prendra garde au fait que la même notation $k[x_1,\ldots,x_n]$ peut désigner soit la $k$-algèbre engendrée @@ -364,7 +365,7 @@ par les $x_i$ et on la note $k(x_i)_{i\in I}$. Lorsque les $x_i$ sont en nombre fini (le cas qui nous intéressera le plus), disons indicés par $1,\ldots,n$, on note $k(x_1,\ldots,x_n)$, et on dit que $k(x_1,\ldots,x_n)$ est une extension de $k$ \textbf{de type fini} -(comme extension de corps). +(en tant qu'extension de \emph{corps}). \danger On prendra garde au fait que la même notation $k(x_1,\ldots,x_n)$ peut désigner soit la sous-extension engendrée @@ -481,13 +482,13 @@ irréductibles dans $k[t]$ sont les $t-a$. À titre d'exemple, le corps $\mathbb{C}$ des nombres complexes est algébriquement clos (« théorème de D'Alembert-Gauß »). -\thingy Si $k\subseteq K$ est une extension de corps, on peut -considérer $K$ comme un $k$-espace vectoriel, et sa dimension (finie -ou infinie) est notée $[K:k]$ et appelée \textbf{degré} de -l'extension. Une extension de degré fini est aussi dite -\textbf{finie} (ainsi, on pourra dire simplement que $K$ est « fini -sur $k$ » pour dire que son degré est fini). Il va de soi qu'une -sous-extension d'une extension finie est encore finie. +\thingy\label{degree-and-finite-extensions} Si $k\subseteq K$ est une +extension de corps, on peut considérer $K$ comme un $k$-espace +vectoriel, et sa dimension (finie ou infinie) est notée $[K:k]$ et +appelée \textbf{degré} de l'extension. Une extension de degré fini +est aussi dite \textbf{finie} (ainsi, on pourra dire simplement que +$K$ est « fini sur $k$ » pour dire que son degré est fini). Il va de +soi qu'une sous-extension d'une extension finie est encore finie. Il résulte de l'identification de $k(x)$ à $k[t]/(\mu_x)$ que, si $x$ est un élément algébrique sur $k$, alors $[k(x):k]$ est fini et égal @@ -1229,10 +1230,11 @@ déjà dans $L$, et en fait $L = M$, ce qui montre que $L$ est algébriquement clos. \end{proof} -\thingy La fermeture algébrique d'un corps $K$ dans un corps -algébriquement clos $L$ qui le contient fournit une clôture algébrique -de $K$ (vérification facile). À titre d'exemple, puisque $\mathbb{C}$ -est algébriquement clos, la fermeture algébrique de $\mathbb{Q}$ +\thingy\label{algebraic-closure-in-algebraically-closed-field} La +fermeture algébrique d'un corps $K$ dans un corps algébriquement clos +$L$ qui le contient fournit une clôture algébrique de $K$ +(vérification facile). À titre d'exemple, puisque $\mathbb{C}$ est +algébriquement clos, la fermeture algébrique de $\mathbb{Q}$ dans $\mathbb{C}$, c'est-à-dire l'ensemble des nombres complexes algébriques sur $\mathbb{Q}$, est une clôture algébrique de $\mathbb{Q}$. @@ -1688,7 +1690,7 @@ algébrique de $k$ est séparable. \begin{prop}\label{separating-transcendence-basis-over-perfect-field} Soit $k$ un corps parfait et $k \subseteq K$ une extension de corps de -type fini (cf. \label{subfield-generated}). Alors il existe +type fini (cf. \ref{subfield-generated}). Alors il existe $x_1,\ldots,x_{d+1} \in K$ tels que $K = k(x_1,\ldots,x_{d+1})$ avec $x_1,\ldots,x_d$ algébriquement indépendants sur $k$ (cf. \ref{definition-transcendence-basis}) et $x_{d+1}$ séparable sur @@ -1889,9 +1891,83 @@ les résultats suivants : \section{Le Nullstellensatz et les fermés de Zariski} +\subsection{Anneaux noethériens} + +\thingy Un idéal $I$ d'un anneau $A$ est dit \textbf{de type fini} (en +tant qu'\emph{idéal}) lorsqu'il est engendré (en tant qu'idéal !, +c'est-à-dire en tant que sous-module de $A$) par un nombre fini +d'éléments, autrement dit, $I = (x_1,\ldots,x_n) := \{\sum_{i=1}^n a_i +x_i : (a_1,\ldots,a_n) \in A\}$ est l'ensemble des combinaisons +$A$-linéaires de $x_1,\ldots,x_n$ pour certains $x_1,\ldots,x_n \in +I$. Il revient à dire que $I$ est de type fini en tant que +sous-module de $A$. + +Si c'est le cas, en fait, de toute famille $(y_i)_{i\in I}$ d'éléments +qui engendrent $I$ on peut extraire une sous-famille finie qui +l'engendre. En effet, si $I$ est engendré par $x_1,\ldots,x_n$ et est +aussi engendré par $(y_i)_{i\in I}$, alors l'écriture de chaque $x_j$ +comme combinaison $A$-linéaire des $y_i$ ne fait intervenir qu'un +nombre fini de ceux-ci, donc un nombre fini des $y_i$ suffit à +exprimer tous les $x_j$ donc tous les éléments de $I$. + +\thingy Un anneau $A$ est dit \textbf{noethérien} lorsque tout idéal +$I$ de $A$ est de type fini. + +Remarquons qu'un \emph{quotient} d'un anneau noethérien est +noethérien. En effet, les idéaux de $A/J$ sont de la forme $I/J$ avec +$I$ un idéal de $A$ contenant $J$, et si $I$ est de type fini alors +$I/J$ l'est aussi. + +\begin{prop}[théorème de la base de Hilbert] +Si $A$ est un anneau noethérien, alors l'anneau $A[t]$ des polynômes à +une indéterminée sur $A$ est noethérien. +\end{prop} +\begin{proof} +Soit $I \subseteq A[t]$ un idéal. Supposons par l'absurde que $I$ +n'est pas de type fini. On construit par récurrence une suite +$f_0,f_1,f_2,\ldots$ d'éléments de $I$ comme suit. Si +$f_0,\ldots,f_{r-1}$ ont déjà été choisis, comme l'idéal +$(f_0,\ldots,f_{r-1})$ qu'ils engendrent n'est pas $I$, on peut +choisir $f_r$ de plus petit degré possible parmi les éléments de $I$ +non dans $(f_0,\ldots,f_{r-1})$. + +Appelons $c_i$ le coefficient dominant de $f_i$. Comme $A$ est +supposé noethérien, il existe $m$ tel que $c_0,\ldots,c_{m-1}$ +engendrent l'idéal $J$ engendré par tous les $c_i$. Montrons qu'en +fait $f_0,\ldots,f_{m-1}$ engendrent $I$ (ce qui constitue une +contradiction). + +On peut écrire $c_m = a_0 c_0 + \cdots + a_{m-1} c_{m-1}$. Par +ailleurs, le degré de $f_m$ est supérieur ou égal au degré de chacun +de $f_0,\ldots,f_{m-1}$ par minimalité de ces derniers. On peut donc +construire le polynôme $g = \sum_{i=0}^{m-1} a_i f_i t^{\deg f_m - + \deg f_i}$, qui a les mêmes degré et coefficient dominant que $f_m$, +et qui appartient à $(f_0,\ldots,f_{m-1})$. Alors, $f_m - g$ est de +degré strictement plus petit que $f_m$, il appartient à $I$ mais pas +à $(f_0,\ldots,f_{m-1})$ : ceci contredit la minimalité dans le choix +de $f_m$. +\end{proof} + +\begin{cor}\label{hilbert-basis-theorem-for-polynomials} +Soit $k$ un corps ou plus généralement un anneau noethérien. Alors +l'anneau $k[t_1,\ldots,t_n]$ des polynômes en $n$ indéterminées +sur $k$ est un anneau noethérien, et plus généralement toute +$k$-algèbre de type fini (comme $k$-algèbre !) $k[x_1,\ldots,x_n]$ est +un anneau noethérien. +\end{cor} +\begin{proof} +La proposition précédente montre que si $k$ est noethérien alors +$k[t]$ est noethérien, et une récurrence immédiate montre que +$k[t_1,\ldots,t_n]$ est noethérien. Or une $k$-algèbre de type fini +est un quotient de $k[t_1,\ldots,t_n]$ +(cf. \ref{subalgebra-generated-is-polynomials}), et on a expliqué +qu'un quotient d'un anneau noethérien est noethérien. +\end{proof} + + \subsection{Idéaux maximaux d'anneaux de polynômes} -\begin{lem} +\begin{lem}\label{zeros-over-extensions-of-algebraically-closed-fields} Soit $k$ un corps algébriquement clos et $k \subseteq K$ une extension. On suppose que $h_1,\ldots,h_m \in k[t_1,\ldots,t_n]$ ont un zéro commun dans $K$ (c'est-à-dire qu'il existe $z_1,\ldots,z_n \in @@ -1934,6 +2010,104 @@ ce polynôme, on trouve $0$. Ceci montre que $x_j := \tilde g_j(w)$ répond au problème posé $h_i(x_1,\ldots,x_n) = 0$. \end{proof} +\thingy À titre d'exemple, si $h_1,\ldots,h_m \in +\mathbb{Q}[t_1,\ldots,t_n]$ ont un zéro commun dans $\mathbb{C}$, +alors ils en ont un dans l'ensemble $\mathbb{Q}^{\alg}$ des complexes +algébriques sur $\mathbb{Q}$ (cf. \ref{relative-algebraic-closure} +et \ref{algebraic-closure-in-algebraically-closed-field}). + +\thingy Soit $k$ un corps. On va s'intéresser aux idéaux +\begin{align*} +\mathfrak{m}_{(x_1,\ldots,x_n)} &:= \{f \in k[t_1,\ldots,t_n] +: f(x_1,\ldots,x_n) = 0\}\\ +&= (t_1-x_1,\ldots,t_n-x_n) +\end{align*} +pour $(x_1,\ldots,x_n) \in k^n$, et on va expliquer qu'ils sont +maximaux (cf. \ref{fields-and-maximal-ideals}). + +Tout d'abord, expliquons pourquoi l'idéal +$\mathfrak{m}_{(x_1,\ldots,x_n)} := \{f \in k[t_1,\ldots,t_n] : +f(x_1,\ldots,x_n) = 0\}$ est bien l'idéal $(t_1-x_1,\ldots,t_n-x_n)$ +engendré par les $t_i-x_i$, puis on verra qu'il est maximal. Comme +$t_i-x_i$ s'annule sur $(x_1,\ldots,x_n)$, on a +$\mathfrak{m}_{(x_1,\ldots,x_n)} \supseteq (t_1-x_1,\ldots,t_n-x_n)$. +Mais si un morphisme $k[t_1,\ldots,t_n] \to R$ de $k$-algèbres envoie +chaque $t_i-x_i$ sur $0$, il envoie $t_i$ sur $x_i$ donc +$f(t_1,\ldots,t_n)$ sur $f(x_1,\ldots,x_n)$ donc son noyau contient +$\mathfrak{m}_{(x_1,\ldots,x_n)}$, et en particulier ceci s'applique +au morphisme de quotient par $(t_1-x_1,\ldots,t_n-x_n)$ : donc +$\mathfrak{m}_{(x_1,\ldots,x_n)} \subseteq (t_1-x_1,\ldots,t_n-x_n)$ +et on a égalité. De plus, comme le morphisme $k[t_1,\ldots,t_n] \to +k$ envoyant $f(t_1,\ldots,t_n)$ sur $f(x_1,\ldots,x_n)$ est surjectif +vers un corps et a pour noyau $\mathfrak{m}_{(x_1,\ldots,x_n)}$, ce +dernier est un idéal maximal. + +\begin{prop} +Soit $k$ un corps algébriquement clos. Les idéaux maximaux de +$k[t_1,\ldots,t_n]$ sont exactement les idéaux +$\mathfrak{m}_{(x_1,\ldots,x_n)} := \{f \in k[t_1,\ldots,t_n] : +f(x_1,\ldots,x_n) = 0\}$ pour $(x_1,\ldots,x_n) \in k^n$. +\end{prop} +\begin{proof} +Si $\mathfrak{M}$ est un idéal maximal de $k[t_1,\ldots,t_n]$, alors +$K := k[t_1,\ldots,t_n]/\mathfrak{M}$ est une extension du corps +algébriquement clos $k$. Par ailleurs, +d'après \ref{hilbert-basis-theorem-for-polynomials}, on peut écrire +$\mathfrak{M} = (h_1,\ldots,h_m)$ pour certains polynômes +$h_1,\ldots,h_m \in k[t_1,\ldots,t_n]$. En notant $z_j \in K$ la +classe de $t_j$ modulo $\mathfrak{M}$, on a $h_i(z_1,\ldots,z_n) = 0$ +dans $K$ par définition. +D'après \ref{zeros-over-extensions-of-algebraically-closed-fields}, il +existe donc $x_1,\ldots,x_n \in k$ tels que $h_i(x_1,\ldots,x_n) = 0$ +pour chaque $i$. Ceci signifie que $h_i \in +\mathfrak{m}_{(x_1,\ldots,x_n)}$ pour chaque $i$, donc que +$\mathfrak{M} \subseteq \mathfrak{m}_{(x_1,\ldots,x_n)}$. Par +maximalité de $\mathfrak{M}$, cette inclusion est en fait une égalité, +ce qu'on voulait prouver. +\end{proof} + +\begin{prop}[« lemme de Zariski »] +Soit $k$ un corps et $k \subseteq K$ une extension de type fini +\emph{comme $k$-algèbre} (cf. \ref{subalgebra-generated}) : alors $K$ +est en fait une extension \emph{finie} +(cf. \ref{degree-and-finite-extensions}). +\end{prop} +\begin{proof} +Soit $K^{\mathrm{alg}}$ une clôture algébrique de $K$ et +$k^{\mathrm{alg}}$ la fermeture algébrique de $k$ +dans $K^{\mathrm{alg}}$ (cf. \ref{relative-algebraic-closure}) qui est +donc algébriquement close +(cf. \ref{algebraic-closure-in-algebraically-closed-field}). Soient +$z_1,\ldots,z_n \in K$ tels que $K = k[z_1,\ldots,z_n]$. Considérons +le morphisme d'évaluation $k^{\alg}[t_1,\ldots,t_n] \to K^{\alg}$ +envoyant $f$ sur $f(z_1,\ldots,z_n)$ : son image est +$k^{\alg}[z_1,\ldots,z_n]$ +(cf. \ref{subalgebra-generated-is-polynomials}). + +Or $k^{\alg}[z_1,\ldots,z_n]$ est un \emph{corps}, ce qui peut se voir +d'après \ref{compositum-generated-by-products} (c'est le corps composé +$k^{\alg}.K$), ou bien directement (si $u \in +k^{\alg}[z_1,\ldots,z_n]$ n'est pas nul, les coefficients de son +écriture en fonction de $z_1,\ldots,z_n$ appartiennent à une extension +finie $k'$ de $k$ d'après \ref{basic-facts-algebraic-extensions}(1), +or $k'[z_1,\ldots,z_n]$ est un anneau intègre car il est inclus +dans $K^{\alg}$, et de dimension finie $\leq [k':k]$ sur +$k[z_1,\ldots,z_n] = K$ puisque engendré comme $K$-espace vectoriel +par n'importe quel système générateur de $k'$ comme $k$-espace +vectoriel, donc d'après \ref{finite-integral-algebra-is-a-field}, +$k'[z_1,\ldots,z_n]$ est un corps et ceci montre que $u$ y est +inversible). + +Le paragraphe précédent implique que le noyau $\mathfrak{M}$ du +morphisme d'évaluation est maximal. D'après la proposition +précédente, $\mathfrak{M} = \mathfrak{m}_{(x_1,\ldots,x_n)}$ pour +certains $(x_1,\ldots,x_n) \in k^{\alg}$, et le fait que $t_i - x_i +\in \mathfrak{M}$ signifie exactement que $z_i = x_i$ dans $K^{\alg}$, +c'est-à-dire que finalement $z_1,\ldots,z_n$ appartiennent +à $k^{\alg}$, et \ref{basic-facts-algebraic-extensions}(1) montre que +$K = k[z_1,\ldots,z_n]$ est fini sur $k$. +\end{proof} + % TODO: |