From 93775a1388f4558f0594aff252e96c4dcd15f402 Mon Sep 17 00:00:00 2001 From: "David A. Madore" Date: Fri, 3 Feb 2017 13:50:19 +0100 Subject: Copy exercises from last year's exam to course notes. --- notes-accq205.tex | 542 +++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++- 1 file changed, 541 insertions(+), 1 deletion(-) diff --git a/notes-accq205.tex b/notes-accq205.tex index 9e6a688..71e4c44 100644 --- a/notes-accq205.tex +++ b/notes-accq205.tex @@ -30,7 +30,7 @@ \newcommand\thingy{% \refstepcounter{comcnt}\smallbreak\noindent\textbf{\thecomcnt.} } \newcommand\exercice{% -\refstepcounter{comcnt}\bigbreak\noindent\textbf{Exercice~\thecomcnt.}} +\refstepcounter{subsection}\bigbreak\noindent\textbf{Exercice~\thesubsection.}} \newtheorem{defn}[comcnt]{Définition} \newtheorem{prop}[comcnt]{Proposition} \newtheorem{lem}[comcnt]{Lemme} @@ -52,6 +52,7 @@ \newcommand{\divis}{\operatorname{div}} \newcommand{\Pic}{\operatorname{Pic}} \newcommand{\ord}{\operatorname{ord}} +\newcommand{\norm}{\operatorname{N}} % \DeclareUnicodeCharacter{00A0}{~} % @@ -6010,6 +6011,545 @@ $C_{k'}$ a le même genre que $C$. + + +% +% +% + +\section{Exercices}\label{section-exercises} + + +\exercice\label{equation-with-no-solutions} + +Soit $K$ un corps de fonctions sur un corps $k$ (c'est-à-dire, une +extension de type fini de $k$ de degré de transcendance $1$), soit $P$ +une place de $K$ au-dessus de $k$ (dont on pourra noter $v$ +ou $\ord_P$ la valuation), et soit $z$ une uniformizante en $P$ +(autrement dit, $v(z) = 1$). Soit enfin $d \geq 2$ un entier naturel. + +En raisonnant sur la valuation des $x_i$, montrer qu'il n'existe pas +de solution autre que $(0,\ldots,0)$ à l'équation $x_0^d + z x_1^d + +z^2 x_2^d + \cdots + z^{d-1} x_{d-1}^d = 0$ (algébrique homogène de +degré $d$ en $d$ inconnues $(x_0,\ldots,x_{d-1})$) dans $K$. + +\begin{corrige} +On remarque que si $x \in K^\times$, alors $v(x^d) = d\,v(x)$ est un +multiple de $d$. Par conséquent, $v(z^i x^d) = i + d\,v(x)$ est +congru à $i$ modulo $d$. Par conséquent, dans la somme $x_0^d + z +x_1^d + z^2 x_2^d + \cdots + z^{d-1} x_{d-1}^d$, il est impossible que +deux termes aient la même valuation (puisqu'elles sont congrues à des +valeurs différentes modulo $d$) sauf si cette valuation est $\infty$, +c'est-à-dire que les termes sont nuls. Donc dès lors que tous les +termes ne sont pas nuls, il y en a un qui a une valuation +\emph{strictement} plus petite que tous les autres. +D'après \ref{remark-on-sums-in-valuation-rings}, la somme ne peut pas +être nulle, ce qui prouve le résultat voulu. +\end{corrige} + + +% +% +% + +\exercice\label{basic-dimension-fact} + +Soit $k$ un corps \emph{algébriquement clos}. On considère +$f_1,\ldots,f_m \in k[t_1,\ldots,t_n]$ des polynômes \emph{homogènes} +de degrés totaux respectifs $d_1,\ldots,d_m > 0$ en les indéterminées +$t_1,\ldots,t_n$. Le but de l'exercice est de montrer que si $n>m$ +alors il existe dans $k^n$ un zéro commun non-trivial à +$f_1,\ldots,f_m$ (c'est-à-dire une solution de $f_1=\cdots=f_m=0$ dans +$k^n$, différente de $(0,\ldots,0)$). On suppose donc par l'absurde +que l'ensemble $Z(f_1,\ldots,f_m)$ des zéros communs à +$f_1,\ldots,f_m$ est réduit à $\{(0,\ldots,0)\}$ et on va montrer $n +\leq m$. + +(1) Montrer qu'il existe $r \in \mathbb{N}$ tel que tout monôme de +degré total $\geq r$ en $t_1,\ldots,t_n$ appartienne à l'idéal $I$ +engendré par $f_1,\ldots,f_m$ dans $k[t_1,\ldots,t_n]$. On pourra +pour cela observer que chaque $t_i$ s'annule sur $Z(f_1,\ldots,f_m)$ +et chercher à en conclure qu'une puissance de $t_i$ appartient à $I$. + +\begin{corrige} +L'hypothèse faite est que le fermé de Zariski $Z(I)$ défini par +$f_1=\ldots=f_m=0$ est le même que celui défini par +$t_1=\ldots=t_n=0$, notamment, chaque $t_i$ s'annule sur $Z(I)$ (soit +$t_i \in \mathfrak{I}(Z(I))$). Le Nullstellensatz fort +(\ref{strong-nullstellensatz}) permet de conclure que pour chaque $i$ +il existe $r_i$ tel que $t_i^{r_i}$ appartienne à l'idéal $I$ engendré +par $f_1,\ldots,f_m$ dans $k[t_1,\ldots,t_n]$. Si on appelle $r$ la +somme des $r_i$ alors tout monôme de degré total au moins $r$ comporte +nécessairement un facteur $t_i^{r_i}$ pour un certain $i$, et +appartient donc à $I$. +\end{corrige} + +\smallbreak + +(2) Déduire du (1) que tout monôme $q$ de degré total $\geq r$ en +$t_1,\ldots,t_n$ s'écrit sous la forme $q = h_1 f_1 + \cdots + h_m +f_m$ où $h_1,\ldots,h_m$ sont eux-mêmes homogènes de degré total $\deg +q - d_j$ (ou bien nuls, notamment lorsque $\deg q < d_j$). On pourra +pour cela ne conserver que les monômes de bon degré total dans $h_j$. + +\begin{corrige} +La conclusion du (1) montre que pour tout monôme $q$ de degré total +$\geq r$ en les $t_i$ il existe $h_1,\ldots,h_m \in k[t_1,\ldots,t_n]$ +tels que $q = h_1 f_1 + \cdots + h_m f_m$. Observons à présent qu'en +remplaçant $h_j$ par sa composante homogène de degré total $\deg q - +d_j$, c'est-à-dire la somme des monômes ayant ce degré total (ou zéro +si $\deg q < d_j$), puisque $f_j$ est homogène de degré total $d_j$ et +que $q$ est également homogène (c'est un monôme !) de degré total +$\deg q$, on a toujours l'égalité $q = h_1 f_1 + \cdots + h_m f_m$ (en +effet, on n'a pas changé les monômes de degré total $\deg q$ dans +cette égalité, et on a retiré tous ceux d'un autre degré). +\end{corrige} + +\smallbreak + +Soit $K = k(f_1,\ldots,f_m)$ le sous-corps de $k(t_1,\ldots,t_n)$ +engendré par $f_1,\ldots,f_m$ au-dessus de $k$. + +(3) Déduire du (2) que tout polynôme $q$ de degré total $s \geq r$ en +$t_1,\ldots,t_n$ s'écrit comme combinaison $K$-linéaire de monômes en +$t_1,\ldots,t_n$ chacun de degré total $< s$. En déduire la même +conclusion avec maintenant des monômes chacun de degré $< r$. + +\begin{corrige} +Soit $q$ un monôme de degré total $\deg q \geq r$. En décomposant +chaque $h_j$ comme somme de monômes de degré total $\deg q - d_j$, +l'égalité $q = h_1 f_1 + \cdots + h_m f_m$ obtenue en (2) signifie que +le monôme $q$ est combinaison linéaire à coefficients dans $K$ des +monômes de degré total $< \deg q$, i.e., strictement plus petit que +lui. + +Si maintenant $q$ est un polynôme de degré total $s \geq r$, chacun de +ses monômes est soit déjà de degré $ 0$ en les indéterminées $t_1,\ldots,t_n$, +on peut conclure à l'existence d'un zéro commun non-trivial à +$f_1,\ldots,f_m$ dans $K^n$ sous une certaine hypothèse sur +$d_1,\ldots,d_m$. Sans réécrire les démonstrations, indiquer quelle +serait cette condition. + +\begin{corrige} +Si on reprend les questions précédentes avec maintenant $m$ polynômes, +dans la question (1), on obtiendra maintenant un système de +$\sum_{j=1}^m (N d_j + \delta + 1) = N(d_1+\cdots+d_m) + m\delta + m$ +équations en $n(N+1)$ variables, qui a donc une solution pour $N$ +grand lorsque $d_1 + \cdots + d_m < n$. Les arguments des questions +(2) et (4) ne sont essentiellement pas modifiés, et on arrive à la +conclusion que : + +Si $K$ est le corps des fonctions d'une courbe sur un corps $k$ +algébriquement clos et si $f_1,\ldots,f_m \in k[t_1,\ldots,t_n]$ sont +des polynômes homogènes de degrés totaux respectifs $d_1,\ldots,d_m > +0$ en les indéterminées $t_1,\ldots,t_n$, qui vérifient +$d_1+\cdots+d_m < n$, alors $f_1,\ldots,f_m$ ont un zéro commun +non-trivial dans $K^n$. + +(Ce résultat s'appelle le théorème de Tsen. On pourra remarquer que +l'exercice \ref{equation-with-no-solutions} montre que l'inégalité est +optimale sur n'importe quel corps de fonctions de courbe, puisqu'on y +a trouvé un polynôme homogène de degré $d$ en $n=d$ variables sans +zéro non-trivial.) +\end{corrige} + + +% +% +% + +\exercice + +Soit $k$ un corps parfait de caractéristique $\neq 2,5$. On considère +la courbe $C$ plane sur $k$ d'équation $y^2 = x^5 - 1$. On admettra +sans vérification que le polynôme $h := y^2 - x^5 + 1 \in k[x,y]$ est +géométriquement irréductible, et on posera $K := k(C) = k(x)[y]/(h)$. + +(1) Si $w$ est une valuation de $K$ au-dessus de $k$, montrer qu'on a +$w(x)<0$ si et seulement si $w(y)<0$. Exprimer le rapport entre +$w(y)$ et $w(x)$ si c'est le cas. + +\begin{corrige} +Si $w(x)<0$ alors $w(x^5 - 1) = 5 w(x)$ (puisque $w(x^5) < w(1)$), +autrement dit $w(y^2) = 5 w(x)$, d'où on déduit $w(y) = \frac{5}{2} +w(x) < 0$. Réciproquement, si $w(x) \geq 0$ alors $w(x^5 - 1) \geq +0$, autrement dit $w(y^2) \geq 0$, d'où on déduit $w(y) \geq 0$. On a +bien montré l'équivalence entre $w(x)<0$ et $w(y)<0$ et, de plus, +$w(y) = \frac{5}{2} w(x)$ lorsque ces propriétés sont vérifiées. +\end{corrige} + +\smallbreak + +(2) Rappeler pourquoi tout élément de $K$ s'écrit de façon unique sous +la forme $f_0 + f_1 y$ avec $f_0,f_1 \in k(x)$. + +\begin{corrige} +Le corps $K$ est le corps de rupture de $h := y^2 - x^5 + 1$ sur le +corps $k(x)$ des fractions rationnelles en l'indéterminée $x$. Tout +élément de $K = k(x)[y]/(h)$ est donc représenté de façon unique sous +la forme d'un polynôme de degré $<2$ en $y$, à savoir le reste de la +division euclidienne par $h$ (dans $k(x)[y]$) de n'importe quel +représentant, ce qui est bien la forme demandée. +\end{corrige} + +\smallbreak + +(3) En déduire qu'il existe une et une seule valuation $w$ de $K$ +au-dessus de $k$ telle que $w(x) < 0$ (on pourra considérer la +restriction de $w$ à $k(x)$ et montrer que c'est, à une constante +près, la valuation $v_\infty$ à l'infini ; puis déduire de (2) que $w$ +est complètement déterminé par la donnée de $w(x)$ et en conclure ce +qu'elle vaut). + +\begin{corrige} +La restriction de $w$ à $k(x)$ vérifie les propriétés (o), (i) et (ii) +de \ref{valuation-ring-versus-valuation-function} qui définissent une +valuation : c'est donc \emph{à multiplication près par un entier + $e\geq 1$} une valuation sur $k(x)$, au-dessus de $k$ ; et puisque +$w(x) < 0$, cette valuation est la valuation à l'infini. Autrement +dit, en notant $w(x) = -e$, on a $w(f_0) = e\,v_\infty(f_0)$ pour +tout $f_0 \in k(x)$. Mais on sait aussi que $w(y) = \frac{5}{2} w(x) += -\frac{5}{2} e$, donc dans une forme $f_0 + f_1 y$, le premier terme +a une valuation multiple de $e$ et le second en a une qui vaut +$-\frac{5}{2}e$ plus un multiple de $e$, et notamment les deux termes +sont forcément de valuations \emph{différentes} : ainsi, $w(f_0 + f_1 +y)$ est complètement déterminé par la donnée de $e$, à savoir $e\, +\min(v_\infty(f_0), v_\infty(f_1) - \frac{5}{2})$. Mais puisque +l'image de $w$ doit être $\mathbb{Z} \cup \{\infty\}$ (condition de +normalisation), on a forcément $e = 2$, c'est-à-dire $w(x) = -2$ et +$w(y) = -5$, et en général $w(f_0 + f_1 y) = \min(2 v_\infty(f_0), 2 +v_\infty(f_1) - 5)$. + +Il existe forcément une telle valuation, car $x$ n'est pas constant +(il est transcendant sur $k$), donc il a un pôle, ce qui signifie +exactement qu'il existe une place $w$ comme on vient de le décrire. +\end{corrige} + +\smallbreak + +(4) On note $M$ la place de $C$ qui a été trouvée (c'est-à-dire que $w += \ord_M$ est l'unique valuation de $K$ au-dessus de $k$ pour laquelle +$w(x) < 0$). Montrer que pour tout $r \geq 3$ entier, les fonctions +$1,x,x^2,\ldots,x^r,\penalty0 y,xy,\ldots,x^{r-3}y$ sont dans l'espace +de Riemann-Roch $\mathscr{L}(2r(M))$ et sont linéairement indépendants +sur $k$. En déduire un minorant de $\ell(2r(M))$. En prenant $r$ +grand, en déduire un majorant sur le genre $g$ de $C$. + +\begin{corrige} +On vient de voir que $\ord_M(x) = -2$ et $\ord_M(y) = -5$. Par +conséquent, $\ord_M(x^i) = -2i$ et $\ord_M(x^i y) = -2i-5$. Ces +quantités sont $\geq -2r$ lorsque respectivement $i\leq r$ et $i\leq +r-\frac{5}{2}$ (c'est-à-dire en fait $i \leq r-3$ puisque $i,r$ sont +entiers). En toute autre place $P$ que $M$, on sait que +$\ord_P(x)\geq 0$ et $\ord_P(y)\geq 0$ d'après la question (3). +On a bien montré que $1,x,x^2,\ldots,x^r,\penalty0 +y,xy,\ldots,x^{r-3}y$ sont dans $\mathscr{L}(2r(M))$. Ils sont +linéairement indépendants sur $k$ car d'une part les puissances +de $x$, qui sont dans $k(x)$, sont linéairement indépendantes sur $k$, +et d'autre part $1$ et $y$ sont linéairement indépendants sur $k(x)$ +(cf. question (2)). Bref, on a trouvé $(r+1) + (r-2) = 2r-1$ éléments +$k$-linéairement indépendants dans $\mathscr{L}(2r(M))$, donc +$\ell(2r(M)) \geq 2r-1$. + +Or on sait par \ref{degree-of-canonical-divisor}(B) que si $r$ est +assez grand (à savoir $2r > 2g - 2$ mais peu importe), on a +$\ell(2r(M)) = 2r + 1 - g$. On en déduit $2r + 1 - g \geq 2r-1$, +c'est-à-dire $g \leq 2$. +\end{corrige} + + + % % % -- cgit v1.2.3