From ba490667d8adb61cc6a68485ce46d177f8957136 Mon Sep 17 00:00:00 2001 From: "David A. Madore" Date: Wed, 7 Feb 2018 00:20:47 +0100 Subject: The correspondence between Zariski closed sets and ideals. --- notes-accq205-v2.tex | 171 +++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++ 1 file changed, 171 insertions(+) (limited to 'notes-accq205-v2.tex') diff --git a/notes-accq205-v2.tex b/notes-accq205-v2.tex index 82f70d9..31a9b55 100644 --- a/notes-accq205-v2.tex +++ b/notes-accq205-v2.tex @@ -766,6 +766,177 @@ morphisme d'anneaux). \end{proof} +% +% +% + +\section{Variétés algébriques affines sur un corps algé\-bri\-que\-ment clos} + +\thingy Dans cette section, sauf précision expresse du contraire, $k$ +sera un corps algébriquement clos. + +On notera $\mathbb{A}^d(k) = k^d$ l'ensemble des $d$-uplets à +coordonnées dans $k$. On l'appelle \index{affine (espace)|see{espace + affine}}\defin[espace affine]{espace affine de dimension $d$} +sur $k$ (on parle de droite ou plan affine lorsque $d=1,2$). Si $k$ +est clair d'après le contexte, il sera aussi parfois noté +$\mathbb{A}^d$. + +Si $x = (x_1,\ldots,x_d) \in \mathbb{A}^d(k)$ et si $f \in +k[t_1,\ldots,t_d]$ est un polynôme en autant de variables, on notera +simplement $f(x)$ (l'évaluation de $f$ en $x$) pour +$f(x_1,\ldots,x_d)$. On dit que $x$ est un zéro de $f$ lorsque $f(x) += 0$. + +% +\subsection{Correspondance entre fermés de Zariski et idéaux} + +\textbf{Comment associer une partie de $k^d$ à un idéal de + $k[t_1,\ldots,t_d]$ ?} + +\thingy Si $\mathscr{F}$ est une partie de $k[t_1,\ldots,t_d]$, on +définit un ensemble $Z(\mathscr{F}) = \{(x_1,\ldots,x_d) \in k^d +:\penalty0 (\forall f\in \mathscr{F})\, f(x_1,\ldots,x_d) = 0\}$, +autrement dit, l'ensemble des zéros communs à tous les éléments +de $\mathscr{F}$. + +Lorsque $\mathscr{F}$ est un ensemble fini $\{f_1,\ldots,f_m\}$, on +note simplement $Z(f_1,\ldots,f_m)$ cet ensemble de zéros communs à +$f_1,\ldots,f_m$. + +\thingy Remarques évidentes : si $\mathscr{F} \subseteq \mathscr{F}'$ +alors $Z(\mathscr{F}) \supseteq Z(\mathscr{F}')$ (la fonction $Z$ est +dite « décroissante pour l'inclusion ») ; on a $Z(\mathscr{F}) = +\bigcap_{f\in \mathscr{F}} Z(f)$. + +Si $I$ est l'idéal engendré par $\mathscr{F}$ +(cf. \ref{ideal-generated-by-elements}) alors $Z(I) = Z(\mathscr{F})$ +(car si tous les éléments de $\mathscr{F}$ s'annulent en $x$, alors +toute combinaison linéaire de tels éléments s'y annule aussi). S'il +s'agit d'étudier les $Z(\mathscr{F})$, on peut donc se contenter de +regarder les $Z(I)$ avec $I$ idéal de $k[t_1,\ldots,t_d]$. + +Mieux : si $\surd I = \{f : (\exists n)\,f^n\in I\}$ désigne le +radical de l'idéal $I$ (cf. \ref{radical-of-an-ideal}), on a $Z(\surd +I) = Z(I)$ (car si $f^n$ s'annule en $x$ alors $f$ s'y annule aussi). +On peut donc se contenter de considérer les $Z(I)$ avec $I$ idéal +radical. + +\thingy On appellera \textbf{fermé de Zariski} dans $k^d$ une partie +$E$ de la forme $Z(\mathscr{F})$ pour une certaine partie +$\mathscr{F}$ de $k[t_1,\ldots,t_d]$, dont on a vu qu'on pouvait +supposer qu'il s'agit d'un idéal radical. + +\thingy Le vide est un fermé de Zariski ($Z(1) = \varnothing$) ; +l'ensemble $k^d$ tout entier est un fermé de Zariski ($Z(0) = k^d$). + +Tout singleton est un fermé de Zariski : en effet, $Z(\mathfrak{m}_x) += \{x\}$, où $\mathfrak{m}_x$ est l'idéal $(t_1-x_1,\ldots,t_d-x_d)$ ; +on remarquera au passage que $\mathfrak{m}_x$ est un idéal maximal, le +quotient $k[t_1,\ldots,t_d]/\mathfrak{m}_x$ s'identifiant à $k$ par la +fonction $f \mapsto f(x)$ d'évaluation en $x$. + +Si $(E_i)_{i\in \Lambda}$ sont des fermés de Zariski, alors +$\bigcap_{i\in \Lambda} E_i$ est un fermé de Zariski : plus +précisément, si $(I_i)_{i\in \Lambda}$ sont des idéaux +de $k[t_1,\ldots,t_d]$, alors $Z(\sum_{i\in\Lambda} I_i) = +\bigcap_{i\in\Lambda} Z(I_i)$ (où $\sum_{i\in\Lambda} I_i$ désigne +l'idéal engendré par $\bigcup_{i\in\Lambda} I_i$). + +Si $E,E'$ sont des fermés de Zariski, alors $E \cup E'$ est un fermé +de Zariski : plus précisément, si $I,I'$ sont des idéaux +de $k[t_1,\ldots,t_d]$, alors $Z(I\cap I') = Z(I) \cup Z(I')$ +(l'inclusion $\supseteq$ est évidente ; pour l'autre inclusion, si $x +\in Z(I\cap I')$ mais $x \not\in Z(I)$, il existe $f\in I$ tel que +$f(x) \neq 0$, et alors pour tout $f' \in I'$ on a $f(x)\,f'(x) = 0$ +puisque $ff' \in I\cap I'$, donc $f'(x) = 0$, ce qui prouve $x \in +Z(I')$). + +(Le fait que le vide et le plein soient des fermés de Zariski, que +toute intersection de fermés de Zariski soit un fermé de Zariski, et +que la réunion de deux fermés de Zariski soit un fermé de Zariski +justifie le terme de « fermés », car ce sont là les axiomes demandés +sur les fermés d'un espace topologique.) + +\medbreak + +\textbf{Comment associer un idéal de $k[t_1,\ldots,t_d]$ à une partie + de $k^d$ ?} + +\thingy Réciproquement, si $E$ est une partie de $k^d$, on note +$\mathfrak{I}(E) = \{f\in k[t_1,\ldots,t_d] :\penalty0 (\forall +(x_1,\ldots,x_d)\in E)\, f(x_1,\ldots,x_d)=0\}$ l'ensemble des +polynômes s'annulant en tous les points de $E$. + +Il est clair c'est un idéal de $k[t_1,\ldots,t_d]$, et même un idéal +radical. + +\thingy Remarque évidente : si $E \subseteq E'$ alors $\mathfrak{I}(E) +\supseteq \mathfrak{I}(E')$ ; on a $\mathfrak{I}(E) = \bigcap_{x\in E} +\mathfrak{m}_x$ (où $\mathfrak{m}_x$ désigne l'idéal maximal +$\mathfrak{I}(\{x\})$ des polynômes s'annulant en $x$), et en +particulier $\mathfrak{I}(E) \neq k[t_1,\ldots,t_d]$ dès que $E \neq +\varnothing$. + +On a de façon triviale $\mathfrak{I}(\varnothing) = +k[t_1,\ldots,t_d]$. + +\medbreak + +\textbf{Le rapport entre ces deux fonctions} + +\thingy On a $E \subseteq Z(\mathscr{F})$ ssi $\mathscr{F} \subseteq +\mathfrak{I}(E)$, puisque les deux signifient « tout polynôme dans +$\mathscr{F}$ s'annule en tout point de $E$ ». Appelons ($*$) +cette équivalence. + +En particulier, en appliquant ($*$) à $\mathscr{F} = \mathfrak{I}(E)$, +on voit que $E \subseteq Z(\mathfrak{I}(E))$ pour toute partie $E$ +de $k^d$ : appelons ($\dagger$) cette observation. En appliquant +($*$) à $E = Z(\mathscr{F})$, on a $\mathscr{F} \subseteq +\mathfrak{I}(Z(\mathscr{F}))$ : appelons ($\ddagger$) cette +observation. + +Comme $\mathfrak{I}$ est décroissante pour l'inclusion, de +l'observation ($\dagger$) que $E \subseteq Z(\mathfrak{I}(E))$, on +déduit $\mathfrak{I}(E) \supseteq \mathfrak{I}(Z(\mathfrak{I}(E)))$. +Mais par ailleurs, en appliquant l'observation ($\ddagger$) que +$\mathscr{F} \subseteq \mathfrak{I}(Z(\mathscr{F}))$ à $\mathscr{F} = +\mathfrak{I}(E)$, on en déduit $\mathfrak{I}(E) \subseteq +\mathfrak{I}(Z(\mathfrak{I}(E)))$. On a donc montré $\mathfrak{I}(E) += \mathfrak{I}(Z(\mathfrak{I}(E)))$ pour toute partie $E$ de $k^d$. +De même (le raisonnement étant complètement symétrique entre $Z$ +et $\mathfrak{I}$), on a $Z(\mathscr{F}) = +Z(\mathfrak{I}(Z(\mathscr{F})))$ pour tout ensemble $\mathscr{F}$ de +polynômes. + +On a donc prouvé : + +\begin{prop} +Avec les notations ci-dessus : +\begin{itemize} +\item Une partie $E$ de $k^d$ vérifie $E = Z(\mathfrak{I}(E))$ si et + seulement si elle est de la forme $Z(\mathscr{F})$ pour un + certain $\mathscr{F}$ (=: c'est un fermé de Zariski), et dans ce cas + on peut prendre $\mathscr{F} = \mathfrak{I}(E)$, qui est un idéal + radical. +\item Une partie $I$ de $k[t_1,\ldots,t_d]$ vérifie $I = + \mathfrak{I}(Z(I))$ si et seulement si elle est de la forme + $\mathfrak{I}(E)$ pour un certain $E$, et dans ce cas on peut + prendre $E = Z(I)$, et $I$ est un idéal radical + de $k[t_1,\ldots,t_d]$. +\item Les fonctions $\mathfrak{I}$ et $Z$ se restreignent en des + bijections décroissantes réci\-proques entre l'ensemble des fermés + de Zariski $E$ de $k^d$ et l'ensemble des idéaux (forcément + radicaux) $I$ de $k[t_1,\ldots,t_d]$ tels que $I = + \mathfrak{I}(Z(I))$. +\end{itemize} +\end{prop} + +On va voir ci-dessous que les idéaux tels que $I = \mathfrak{I}(Z(I))$ +sont exactement (tous) les idéaux radicaux de $k[t_1,\ldots,t_d]$. + + % % -- cgit v1.2.3