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authorDavid A. Madore <david+git@madore.org>2011-05-09 15:45:04 +0200
committerDavid A. Madore <david+git@madore.org>2011-05-09 15:45:04 +0200
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The Zariski topology, morphisms between quasi-affine varieties.
-rw-r--r--notes-geoalg-2011.tex260
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index cac3dcf..432c3a0 100644
--- a/notes-geoalg-2011.tex
+++ b/notes-geoalg-2011.tex
@@ -275,7 +275,7 @@ sur un corps ou sur $\mathbb{Z}$, est un anneau noethérien.
\end{cor}
%
-\subsection{Localisation}
+\subsection{Localisation}\label{subsection-localization}
On dit qu'une partie $S$ d'un anneau $A$ est \emph{multiplicative}
lorsque $1\in S$ et $s,s'\in S \limp ss'\in S$. Par exemple, le
@@ -628,7 +628,7 @@ clos, on a vu qu'il existe un unique idéal radical $I$
de $k[t_1,\ldots,t_d]$, à savoir l'idéal $I = \mathfrak{I}(X)$ des
polynômes s'annulant sur $X$, tel que $X = Z(I)$. Le quotient
$k[t_1,\ldots,t_d] / I$ (qui est donc un anneau réduit, et intègre ssi
-$X$ est irréductible) s'appelle l'\emph{anneau des fonctions
+$X$ est irréductible) s'appelle l'\textbf{anneau des fonctions
régulières} sur $X$ et se note $\mathcal{O}(X)$ (ou parfois $k[X]$).
Pourquoi fonctions régulières ? On peut considérer un élément $f \in
@@ -792,6 +792,9 @@ Ceci justifie partiellement la différence de terminologie entre
de $k^d$, tandis que dans le second cas on la considère \emph{à
isomorphisme près} de variété algébrique affine (sur $k$).
+Pour souligner qu'on parle de l'ensemble des points de $X$, plutôt que
+de $X$ comme variété algébrique affine, on écrit parfois $X(k)$.
+
\smallbreak
\textbf{Exemples :} Considérons la courbe d'équation $y^2 = x^3$,
@@ -863,6 +866,259 @@ le \textbf{spectre} de $R$, noté $\Spec R$. (Par exemple, $\Spec k[t]
\mathbb{A}^d_k$. Et bien sûr, $\Spec k$ est vu comme un point. Quant
à l'ensemble vide, c'est $\Spec 0$ où $0$ est l'anneau nul.)
+Abstraitement, on peut donc dire que les variétés algébriques affines
+sont les $\Spec R$ pour $R$ une $k$-algèbre réduite de type fini.
+
+%
+\subsection{La topologie de Zariski}
+
+On appelle \textbf{ouvert de Zariski} dans $k^d$ (toujours avec $k$ un
+corps algébriquement clos) le complémentaire d'un fermé de Zariski.
+Autrement dit, si $I$ est un idéal de $k[t_1,\ldots,t_d]$, on définit
+$U(I) = \{(x_1,\ldots,x_d) \in k^d :\penalty0 (\forall f\in I)\,
+f(x_1,\ldots,x_d) \neq 0\}$ le complémentaire de $Z(I)$ : un ouvert de
+Zariski de $k^d$ est un ensemble de la forme $U(I)$. Plus
+généralement, si $X$ est une variété algébrique affine, si $I$ est un
+idéal de $\mathcal{O}(X)$, on définit $U(I) = \{(x_1,\ldots,x_d) \in X
+:\penalty0 (\forall f\in I)\, f(x_1,\ldots,x_d) \neq 0\}$ le
+complémentaire de $Z(I)$ : on appelle ces ensembles ouverts de Zariski
+de $X$.
+
+Étant donné qu'une intersection quelconque ou une réunion finie de
+fermés sont des fermés, dualement, \emph{une réunion quelconque ou une
+ intersection finie d'ouverts sont des ouverts} (par ailleurs,
+l'ensemble vide et l'ensemble plein sont des ouverts) --- ces
+propriétés sont constitutives de la notion de \emph{topologie}, en
+l'occurrence la \textbf{topologie de Zariski} (sur l'ensemble $k^d$ ou
+$X(k)$).
+
+\smallbreak
+
+Si $X'$ est un fermé de Zariski de $X$, alors les fermés et ouverts de
+Zariski de $X'$ sont précisément les intersections avec $X'$ des
+fermés et ouverts de Zariski de $X$. (On dit que la topologie de $X'$
+est \emph{induite} par celle de $X$.)
+
+\smallbreak
+
+Si $I$ est engendré par les éléments $f_1,\ldots,f_r$, on peut écrire
+$U(I) = D(f_1) \cup \cdots \cup D(f_r)$ où $D(f_i) := U(\{f_i\})$ est
+l'ouvert où $f_i$ ne s'annule pas. Les $D(f)$ s'appellent parfois
+\emph{ouverts principaux}, on verra plus loin pourquoi il est utile de
+les distinguer ; ceci montre qu'ils forment une \emph{base d'ouverts}
+(un ensemble d'ouverts stable par intersections fines est dit former
+une base d'ouverts pour une topologie lorsque tout ouvert est une
+réunion d'une sous-famille d'entre eux).
+
+\begin{prop}\label{covering-by-principal-open-sets}
+Si $X$ est une variété algébrique affine et $f_i \in \mathcal{O}(X)$
+(pour $i \in \Lambda$ disons), alors $\bigcup_{i\in\Lambda} D(f_i) =
+X$ si et seulement si les $f_i$ engendrent l'idéal unité
+dans $\mathcal{O}(X)$ (c'est-à-dire ssi il existe des $g_i$, tous nuls
+sauf un nombre fini, tels que $\sum_{i\in\Lambda} g_i f_i = 1$).
+\end{prop}
+\begin{proof}
+Dire $\bigcup_{i\in\Lambda} D(f_i) = X$ équivaut à
+$\bigcap_{i\in\Lambda} Z(f_i) = \varnothing$, c'est-à-dire encore
+$Z(\{f_i\}) = \varnothing$, soit encore $Z(I) = \varnothing$ où $I$
+est l'idéal engendré par les $f_i$, et l'énoncé découle du
+Nullstellensatz faible.
+\end{proof}
+
+On aura besoin pour la suite de remarquer que $D(f) \cap D(f') =
+D(ff')$.
+
+\smallbreak
+
+Un peu de vocabulaire de topologie : dans ce qui suit, on suppose que
+$X$ est un ensemble muni d'une topologie (c'est-à-dire un ensemble de
+parties de $X$ dites « ouvertes » contenant $\varnothing$ et $X$ et
+telles qu'une réunion quelconque ou une intersection finie d'ouverts
+sont des ouverts), sachant qu'on s'intéresse évidemment au cas de la
+topologie de Zariski.
+
+Si $x \in U \subseteq V$ avec $U$ ouvert (et $V$ une partie quelconque
+de $X$), on dit que $V$ est un \textbf{voisinage} de $x$. (Un
+voisinage ouvert de $x$ est donc tout simplement la même chose qu'un
+ouvert contenant $x$.)
+
+Si $E \subseteq X$ est une partie quelconque, l'intersection de tous
+les fermés (=complémentaires des ouverts) contenant $E$, c'est-à-dire
+le plus petit fermé contenant $E$, s'appelle \textbf{adhérence}
+de $E$, parfois notée $\overline{E}$. Il s'agit de l'ensemble des $x
+\in X$ tels que tout voisinage de $x$ rencontre $E$. Lorsque
+l'adhérence de $E$ est $X$ tout entier, on dit que $E$ est
+\textbf{dense} dans $X$.
+
+On dit que $X$ est \textbf{irréductible} lorsque toute écriture $X =
+F' \cup F''$ avec $F',F''$ fermés impose $F' = X$ ou $F'' = X$ ; de
+façon équivalente, cela signifie que tout ouvert non vide de $X$ est
+dense.
+
+On dit que $X$ est \textbf{connexe} lorsque ($X$ est non vide et que)
+$\varnothing$ et $X$ sont les seuls ensembles à la fois ouverts et
+fermés dans $X$. (« Irréductible » est plus fort que « connexe », car
+si $X$ est irréductible, tout ouvert non vide est dense, et en
+particulier le seul ouvert fermé non vide est $X$ tout entier.)
+
+\smallbreak
+
+Dans le cas de la topologie de Zariski sur une variété algébrique
+affine $X$ sur un corps algébriquement clos $k$ (c'est-à-dire,
+sur $X(k)$) :
+\begin{itemize}
+\item $X$ est irréductible ssi $\mathcal{O}(X)$ est intègre
+ (cf. \ref{closed-irreducible-iff-prime-ideal}),
+\item l'adhérence de Zariski d'une partie $E \subseteq X(k)$ est
+ $Z(\mathfrak{I}(E))$ (en effet, ceci est un fermé de Zariski
+ contenant $E$, et si $Z(J) \supseteq E$ est un autre fermé de
+ Zariski contenant $E$ alors on a vu $J \subseteq \mathfrak{I}(E)$
+ donc $Z(J) \supseteq Z(\mathfrak{I}(E))$ --- ceci montre que
+ $Z(\mathfrak{I}(E))$ est bien le plus petit pour l'inclusion fermé
+ de Zariski contenant $E$).
+\end{itemize}
+
+Exemple (idiot) : On suppose $k$ de caractéristique zéro, disons $k =
+\mathbb{C}$ ; quelle est l'adhérence de Zariski de $\mathbb{Z}$ dans
+$\mathbb{A}^1(k)$ ? Réponse : L'ensemble $\mathfrak{I}(\mathbb{Z})$
+des polynômes s'annulant en chaque point de $\mathbb{Z}$ est réduit
+à $(0)$ puisqu'un polynôme en une variable ne peut avoir qu'un nombre
+fini de racines ; donc l'adhérence de Zariski de $\mathbb{Z}$ est
+$Z(\mathfrak{I}(\mathbb{Z})) = \mathbb{A}^1(k)$ tout entier,
+c'est-à-dire que $\mathbb{Z}$ est dense dans la droite affine pour la
+topologie de Zariski. Plus généralement, on peut facilement montrer
+que les seuls fermés de Zariski de $\mathbb{A}^1(k)$ sont la droite
+$\mathbb{A}^1(k)$ tout entière et les parties \emph{finies}.
+
+\medbreak
+
+\textbf{Composantes connexes.}
+
+\begin{prop}
+Si $X$ est une variété algébrique affine, alors $X$ est connexe si et
+seulement si les seuls éléments $e \in \mathcal{O}(X)$ vérifiant $e^2
+= e$ (appelés \textbf{idempotents}) sont $0$ et $1$.
+\end{prop}
+
+\begin{prop}
+Toute variété algébrique affine $X$ est réunion d'un nombre fini de
+fermés connexes. De plus, il existe une écriture $X = \bigcup_{i=1}^n
+X_i$ vérifiant $X_i \cap X_j = \varnothing$ pour $i \neq j$, et une
+telle écriture est unique (à l'ordre des facteurs près) : les $X_i$
+s'appellent les \textbf{composantes connexes} de $X$.
+\end{prop}
+
+\medbreak
+
+\textbf{Composantes irréductibles.}
+
+\begin{prop}
+Toute variété algébrique affine $X$ est réunion d'un nombre fini de
+fermés irréductibles. De plus, il existe une écriture $X =
+\bigcup_{i=1}^n X_i$ vérifie $X_i \not\subseteq X_j$ pour $i \neq j$,
+et une telle écriture est unique (à l'ordre des facteurs près) : les
+$X_i$ s'appellent les \textbf{composantes irréductibles} de $X$.
+\end{prop}
+
+\textbf{Exemple :} $Z(xy) \subseteq \mathbb{A}^2$ a pour composantes
+irréductibles $Z(x)$ et $Z(y)$. En revanche, il est connexe (=sa
+seule composante connexe est lui-même) : en effet, si $U$ est un
+ouvert fermé de $Z(xy)$, quitte à remplacer $U$ par son complémentaire
+on peut supposer que $U$ contient $(0,0)$, et alors $U$ est un ouvert
+fermé rencontrant $Z(x)$ et $Z(y)$ à la fois --- mais comme ceux-ci
+sont irréductibles, et en particulier connexes, $U \cap Z(x) = Z(x)$
+et $U \cap Z(y) = Z(y)$, ce qui montre $U = Z(xy)$.
+
+%
+\subsection{Fonctions régulières sur un ouvert, morphismes}
+
+Soit $X$ une variété algébrique affine sur $k$, et $f \in
+\mathcal{O}(X)$. On définira \textbf{l'anneau des fonctions
+ régulières} sur l'ouvert principal $D(f) = X \setminus Z(f)$ comme
+le localisé $\mathcal{O}(X)[\frac{1}{f}]$ inversant $f$ de l'anneau
+$\mathcal{O}(X)$ des fonctions régulières sur $X$. Autrement dit
+(cf. \ref{subsection-localization}), les fonctions régulières sont
+$D(f)$ sont définies comme des fractions de fonctions régulières
+sur $X$ admettant une puissance de $f$ au dénominateur.
+
+On peut bien les voir comme des fonctions : si $x \in D(f)$, cela
+signifie que $x \in X$ et que $f(x) \neq 0$, ce qui permet d'évaluer
+en $x$ une fonction de la forme $\frac{g}{f^n}$.
+
+\textbf{Exemple :} Les fonctions régulières sur
+$\mathbb{A}^1\setminus\{0\}$ (la droite affine privée de l'origine,
+c'est-à-dire $D(t)$ dans $\mathbb{A}^1 = \Spec k[t]$) sont les
+fonctions rationnelles de la forme $\frac{g}{t^n}$ avec $n\geq 0$
+(=les fonctions rationnelles n'ayant pas d'autre pôle qu'en zéro).
+Plus généralement, toute fonction rationnelle $h \in k(t)$ peut être
+considérée comme une fonction régulière sur un certain ouvert
+de $\mathbb{A}^1$, à savoir l'ouvert où le dénominateur de $h$ ne
+s'annule pas.
+
+\smallbreak
+
+Si $I = (f_1,\ldots,f_r)$ est un idéal de $\mathcal{O}(X)$, avec $X$
+une variété algébrique affine, on appelle \textbf{fonction régulière}
+sur $U := U(I) = D(f_1) \cup \cdots \cup D(f_r) = X \setminus Z(I)$ la
+donnée d'une fonction $h \colon X \to k$ telle que la restriction de
+$h$ à chaque $D(f_i)$ soit une fonction régulière. \emph{Fait :} Ceci
+ne dépend pas du choix des $f_i$ engendrant l'idéal $I$. Ces
+fonctions régulières forment un anneau, noté $\mathcal{O}(U)$.
+
+\smallbreak
+
+Si $U$ est un ouvert de Zariski d'une variété algébrique affine $X$,
+et $V$ un ouvert de Zariski d'une variété algébrique affine $Y
+\subseteq \mathbb{A}^e$, on appelle \textbf{morphisme} $U \to V$ une
+application $U \to V$ telle que chacune des $e$ coordonnées à
+l'arrivée soit une fonction régulière sur $U$. Autrement dit, il
+s'agit de la donnée de $e$ éléments $f_1,\ldots,f_e$ de
+$\mathcal{O}(U)$ tels que $(f_1(x),\ldots,f_e(x)) \in V$ pour tout $x
+\in U$. Comme précédemment, les fonctions régulières ne sont autres
+que les morphismes vers $\mathbb{A}^1$. On appellera
+\textbf{isomorphisme} entre $U$ et $V$ la donnée de morphismes $U \to
+V$ et $V \to U$ dont la composée chaque sens est l'identité.
+
+On appelle \textbf{variété algébrique quasi-affine}, un ouvert d'une
+variété algébrique affine (considérée à isomorphisme près) comme on
+vient de le décrire.
+
+\begin{prop}\label{morphisms-to-affines}
+Si $U$ est une variété algébrique \emph{quasi-affine} et $Y$ une
+variété algébrique \emph{affine}, alors les morphismes $U \to Y$ sont
+en correspondance avec les morphismes $\mathcal{O}(Y) \to
+\mathcal{O}(U)$ (de $k$-algèbres) en envoyant $f\colon U\to Y$ sur
+$f^* \colon \mathcal{O}(Y) \to \mathcal{O}(U)$ (défini comme le
+morphisme qui envoie une fonction régulière $h \colon Y \to
+\mathbb{A}^1$ sur $f^*(h) := h\circ f \colon U\to \mathbb{A}^1$).
+\end{prop}
+
+Les ouverts \emph{principaux} (les $D(f)$), en fait, n'apportent rien
+de nouveau :
+\begin{prop}
+Si $f\in \mathcal{O}(X)$ avec $X$ une variété algébrique affine, alors
+l'ouvert principal $D(f) = X \setminus Z(f)$ est isomorphe à la
+variété algébrique affine $\Spec \mathcal{O}(X)[\frac{1}{f}]$.
+\end{prop}
+
+En revanche, pour un ouvert quelconque, on obtient véritablement des
+choses nouvelles.
+
+\danger La proposition \ref{morphisms-to-affines} cesse d'être vraie
+si on considère des morphismes entre deux variétés algébriques
+quasi-affines quelconques. Par exemple, le plan affine $\mathbb{A}^2
+= \Spec k[x,y]$ et le complémentaire $\mathbb{A}^2\setminus\{(0,0)\}$
+de l'origine dans le plan affine ont exactement le même anneau des
+fonctions régulières, pourtant, ces deux variétés quasi-affines ne
+sont pas isomorphes.
+
+Si $U$ est une variété algébrique quasi-affine, il existe un morphisme
+naturel $\psi\colon U \to \Spec \mathcal{O}(U)$ d'après la
+proposition \ref{morphisms-to-affines}, à savoir celui qui correspond
+à l'identité sur $\mathcal{O}(U)$. On dit que la variété algébrique
+quasi-affine $U$ est \textbf{affine} lorsque $\psi$ est un
+isomorphisme (de façon équivalente, lorsque $U$ est isomorphe à une
+variété algébrique affine telle qu'on l'a définie précédemment).
%