%% This is a LaTeX document. Hey, Emacs, -*- latex -*- , get it? \documentclass[12pt,a4paper]{article} \usepackage[francais]{babel} \usepackage[utf8]{inputenc} \usepackage[T1]{fontenc} %\usepackage{ucs} \usepackage{times} % A tribute to the worthy AMS: \usepackage{amsmath} \usepackage{amsfonts} \usepackage{amssymb} \usepackage{amsthm} % \usepackage{mathrsfs} \usepackage{wasysym} \usepackage{url} % \usepackage{graphics} \usepackage[usenames,dvipsnames]{xcolor} \usepackage{tikz} \usetikzlibrary{matrix,calc} \usepackage{hyperref} % %\externaldocument{notes-mitro206}[notes-mitro206.pdf] % \theoremstyle{definition} \newtheorem{comcnt}{Tout} \newcommand\thingy{% \refstepcounter{comcnt}\smallskip\noindent\textbf{\thecomcnt.} } \newcommand\exercice{% \refstepcounter{comcnt}\bigskip\noindent\textbf{Exercice~\thecomcnt.}\par\nobreak} \renewcommand{\qedsymbol}{\smiley} % \newcommand{\outnb}{\operatorname{outnb}} \newcommand{\downstr}{\operatorname{downstr}} \newcommand{\precs}{\operatorname{precs}} \newcommand{\mex}{\operatorname{mex}} \newcommand{\id}{\operatorname{id}} \newcommand{\limp}{\Longrightarrow} \newcommand{\gr}{\operatorname{gr}} \newcommand{\rk}{\operatorname{rk}} \newcommand{\fuzzy}{\mathrel{\|}} % \DeclareUnicodeCharacter{00A0}{~} % \DeclareMathSymbol{\tiret}{\mathord}{operators}{"7C} \DeclareMathSymbol{\traitdunion}{\mathord}{operators}{"2D} % \DeclareFontFamily{U}{manual}{} \DeclareFontShape{U}{manual}{m}{n}{ <-> manfnt }{} \newcommand{\manfntsymbol}[1]{% {\fontencoding{U}\fontfamily{manual}\selectfont\symbol{#1}}} \newcommand{\dbend}{\manfntsymbol{127}}% Z-shaped \newcommand{\danger}{\noindent\hangindent\parindent\hangafter=-2% \hbox to0pt{\hskip-\hangindent\dbend\hfill}} % \newcommand{\spaceout}{\hskip1emplus2emminus.5em} \newif\ifcorrige \corrigetrue \newenvironment{corrige}% {\ifcorrige\relax\else\setbox0=\vbox\bgroup\fi% \smallbreak\noindent{\underbar{\textit{Corrigé.}}\quad}} {{\hbox{}\nobreak\hfill\checkmark}% \ifcorrige\par\smallbreak\else\egroup\par\fi} % % % \begin{document} \ifcorrige \title{MITRO206\\Contrôle de connaissances — Corrigé\\{\normalsize Théories des jeux}} \else \title{MITRO206\\Contrôle de connaissances\\{\normalsize Théories des jeux}} \fi \author{} \date{8 avril 2019} \maketitle \pretolerance=8000 \tolerance=50000 \vskip1truein\relax \noindent\textbf{Consignes.} Les exercices sont totalement indépendants. Ils pourront être traités dans un ordre quelconque, mais on demande de faire apparaître de façon très visible dans les copies où commence chaque exercice. La longueur du sujet ne doit pas effrayer : d'une part, l'énoncé est long parce que des rappels ont été faits et que la rédaction des questions cherche à éviter toute ambiguïté ; d'autre part, il ne sera pas nécessaire de tout traiter pour obtenir la totalité des points (cf. barème). \medbreak L'usage de tous les documents (notes de cours manuscrites ou imprimées, feuilles d'exercices, livres) est autorisé. L'usage des appareils électroniques est interdit. \medbreak Durée : 2h Barème \emph{indicatif} : exercice 1 : $9$ points ; exercice 2 : $9$ points ; exercice 3 : $4$ points. \ifcorrige Ce corrigé comporte 10 pages (page de garde incluse). \else Cet énoncé comporte 6 pages (page de garde incluse). \fi \vfill {\noindent\tiny \immediate\write18{sh ./vc > vcline.tex} Git: \input{vcline.tex} \immediate\write18{echo ' (stale)' >> vcline.tex} \par} \pagebreak % % % \exercice On s'intéresse dans cet exercice à des jeux à deux joueurs (que l'on appellera Alice et Bob) de la forme suivante : \begin{itemize} \item Alice et Bob sont autour d'une table sur laquelle se trouvent un certain nombre (fini) de \emph{jetons} ; chaque jeton porte un entier naturel qu'on appellera son \emph{type} ; il peut y avoir plusieurs jetons de même type (par exemple, trois jetons de type $0$, deux jetons de type $1$ et un jeton de type $1729$) ; le nombre (fini) de jetons de jetons de chaque type constitue l'état du jeu, et il est visible de tous ; \item Alice et Bob jouent tour à tour, et chacun, quand vient son tour, doit retirer un jeton de la table et le \emph{remplacer} éventuellement par des jetons de type(s) strictement plus petit(s) : les règles exactes de remplacement seront différentes d'une question à l'autre, mais prendront toujours la forme « un joueur peut remplacer un jeton de type $n$ par telle ou telle combinaison de jetons de types $\cdots>n_r$ l'ordinal $\omega^{n_1} + \cdots + \omega^{n_r}$ ; ou, ce qui revient au même, s'il y a $r_n := \#\{i : n_i = n\}$ jetons de type $n$, on considère l'ordinal $\omega^N r_n + \cdots + \omega^2 r_2 + \omega\, r_1 + r_0$ où $N := \max\{n_i\}$ est le plus grand type d'un jeton sur la table. Par la comparaison des ordinaux écrits en forme normale de Cantor, cet ordinal décroît à chaque coup (puisqu'on remplace un $\omega^n$ par des $\omega^{n'}$ avec $n' < n$, la suite $(r_n,\ldots,r_0)$ décroît lexicographiquement). Le jeu termine donc en temps fini. \end{corrige} \medskip (2)(a) En notant $J(n_1,\ldots,n_r)$ l'état du jeu dans lequel $r$ jetons se trouvent sur la table et ont les types $n_1,\ldots,n_r$ (éventuellement répétés, p.ex. $J(0,0,0,1,1,1729)$), expliquer pourquoi $J(n_1,\ldots,n_r)$ peut s'identifier à la somme de nim des positions $J(n_1),\ldots,J(n_r)$ (où $J(n)$ désigne l'état du jeu ayant un unique jeton de type $n$).\quad(b) En déduire la valeur de Grundy $\gr J(n_1,\ldots,n_r)$ de $J(n_1,\ldots,n_r)$ en fonction de celles des $J(n_i)$.\quad(c) Qui a une stratégie gagnante dans une position du type $J(n,n)$ ? Expliciter une telle stratégie en termes simples. (\emph{Convention :} $J()$ est le jeu nul dans lequel il ne reste plus aucun jeton sur la table. Notamment, on a $\gr J() = 0$. On ne le confondra pas avec $J(0)$ où il reste un jeton de type $0$.) \begin{corrige} (a) Il s'agit simplement d'observer que les différents jetons n'interagissent pas du tout. Jouer à la somme de nim de $J(n_1),\ldots,J(n_r)$ revient à jouer sur $r$ tables différentes à partir d'un jeton de type $n_i$ sur chacune, c'est équivalent à jouer à $J(n_1,\ldots,n_r)$. (b) On en déduit que $\gr J(n_1,\ldots,n_r) = \gr(J(n_1) \oplus \cdots \oplus J(n_r)) = \gr J(n_1) \oplus \cdots \oplus \gr J(n_r)$ (la première égalité par (a), la seconde d'après le fait que la valeur de Grundy d'une somme de nim est la somme de nim des valeur de Grundy). (c) Le second joueur a une stratégie gagnante à $J(n,n)$ (ceci se voit par le fait que sa valeur de Grundy vaut $0$). Cette stratégie consiste à reproduire systématiquement les coups de son adversaire (ce qui maintiendra un nombre pair de jetons de chaque type à la fin de son coup). \end{corrige} \medskip (3)(a) Pour une règle de remplacement donnée, expliquer comment se calcule $\gr J(n)$ si on suppose connus tous les $\gr J(n')$ pour $n'0$ il ajoute ensuite, optionnellement, le nombre qu'il souhaite de jetons de type $n-1$. Par exemple, on peut remplacer un jeton de type $1729$ par $42$ jetons de type $1728$ ; on peut aussi le retirer sans remplacement.)\quad(a) Dans ces conditions, que vaut $\gr J(n)$ ? (On pourra par exemple commencer par calculer $\gr J(n)$ pour $n=0,1,2,3$, conjecturer une formule générale, et la démontrer par récurrence sur $n$.)\quad(b) Exprimer de façon simple la stratégie gagnante du jeu considéré dans cette question. \begin{corrige} (a) On a vu en (3)(b) que $\gr J(0,\ldots,0)$ vaut $0$ ou $1$ selon que le nombre de jetons est pair ou impair ; on en déduit que $\gr J(1) = \mex\{0,1\} = 2$, et alors (en se rappelant que $2\oplus 2=0$) on trouve que $\gr J(1,\ldots,1)$ vaut $0$ ou $2$ selon que le nombre de jetons est pair ou impair ; on en déduit que $\gr J(2) = \mex\{0,2\} = 1$, et donc $\gr J(2,\ldots,2)$ vaut $0$ ou $1$ selon que le nombre de jetons est pair ou impair ; par conséquent, $\gr J(3) = \mex\{0,1\} = 2$. En général on imagine facilement que $\gr J(n)$ vaut $1$ ou $2$ selon que $n$ est pair ou impair, et ceci se démontre par une récurrence immédiate avec exactement le même argument qu'on vient de faire. (b) La valeur de Grundy de $\gr J(n_1,\ldots,n_r)$ est le XOR (= la somme de nim) de $r$ valeurs $1$ si $r$ est le nombre de jetons de type pair, et $r'$ valeurs $2$ si $r'$ est le nombre de jetons de type impair : ce nombre vaut $0$, $1$, $2$ ou $3$ selon que $r$ et $r'$ sont tous les deux pairs, que $r$ est impair et $r'$ pair, qu'on a le contraire, ou qu'ils sont tous les deux impairs. La stratégie gagnante consiste donc à jouer de façon que le nombre $r$ de jetons de type pair et le nombre $r'$ de jetons de type impair soient tous les deux pairs (de façon à annuler Grundy). \end{corrige} \medskip (5) On suppose dans cette question que la règle de remplacement est la suivante : un joueur peut remplacer un jeton de type $n$ par un nombre quelconque (y compris $0$) de jetons de type $k0$ il ajoute ensuite, optionnellement, le nombre qu'il souhaite de jetons d'un même type $k\leq n-1$. Par exemple, on peut remplacer un jeton de type $1729$ par $42$ jetons de type $1728$ ou $1728$ jetons de type $42$ ; on peut aussi le retirer sans remplacement.) Dans ces conditions, que vaut $\gr J(n)$ ? (On pourra par exemple commencer par calculer $\gr J(n)$ pour $n=0,1,2,3$, conjecturer une formule générale, et la démontrer par récurrence sur $n$.) \begin{corrige} On a vu en (3)(b) que $\gr J(0,\ldots,0)$ vaut $0$ ou $1$ selon que le nombre de jetons est pair ou impair ; on en déduit que $\gr J(1) = \mex\{0,1\} = 2$, et alors (en se rappelant que $2\oplus 2=0$) on trouve que $\gr J(1,\ldots,1)$ vaut $0$ ou $2$ selon que le nombre de jetons est pair ou impair ; on en déduit que $\gr J(2) = \mex\{0,1,2\} = 3$ (la différence avec (4)(a) est que maintenant on peut aussi aller en $\gr J(0,\ldots,0)$ donc $1$ apparaît dans le $\mex$), et donc $\gr J(2,\ldots,2)$ vaut $0$ ou $3$ selon que le nombre de jetons est pair ou impair ; par conséquent, $\gr J(3) = \mex\{0,1,2,3\} = 4$. En général on imagine facilement que $\gr J(n)$ vaut $n+1$, et ceci se démontre par une récurrence immédiate avec exactement le même argument qu'on vient de faire. \end{corrige} \medskip (6) On suppose dans cette question que la règle de remplacement est la suivante : un joueur peut remplacer un jeton de type $n$ par un nombre quelconque (y compris $0$) de jetons de types $0$ il ajoute ensuite, optionnellement, le nombre qu'il souhaite de jetons de n'importe quels types $ \cdots > \gamma_r$ sont des ordinaux en ordre strictement décroissant et $n_1,\ldots,n_r$ des entiers naturels non nuls (c'est-à-dire qu'il s'agit de la forme normale de Cantor de $\alpha$), alors on a $\alpha = (\omega^{\gamma_1} \boxdot n_1) \boxplus \cdots \boxplus (\omega^{\gamma_r} \boxdot n_r)$\par} \noindent (ceci est à comparer au fait, démontré en cours, que si $\alpha = 2^{\gamma_1} + \cdots + 2^{\gamma_r}$, où $\gamma_1 > \cdots > \gamma_r$ sont des ordinaux en ordre strictement décroissant, c'est-à-dire qu'il s'agit de l'écriture binaire de $\alpha$, alors on a $\alpha = 2^{\gamma_1} \oplus \cdots \oplus 2^{\gamma_r}$). On pourrait démontrer (*) par induction transfinie sur $\alpha$. Comme c'est notationnellement un peu fastidieux, on va seulement, dans la question suivante, montrer un cas particulier assez représentatif de l'idée générale : \medskip (3)(a) Pour $n_0,n_1 \in \mathbb{N}$, montrer que $(\omega\boxdot n_1) \boxplus n_0 = \sup^+ \big( \{(\omega\boxdot n'_1) \boxplus n_0' : n'_1 < n_1 \;\hbox{et}\; n'_0 \in\mathbb{N}\} \penalty0 \cup \penalty0 \{(\omega\boxdot n_1) \boxplus n_0' : n'_0 < n_0\}\big)$.\quad (b) En déduire par induction transfinie sur $\alpha$ que si $\alpha = \omega\, n_1 + n_0$ où $n_0,n_1 \in \mathbb{N}$, alors $\alpha = (\omega \boxdot n_1) \boxplus n_0$ (ceci est un cas particulier de (*)). \begin{corrige} (a) D'après ce qu'on a admis ci-dessus, $(\omega\boxdot n_1) \boxplus n_0$, qui est une somme naturelle de $n_1$ copies de $\omega$ et $n_0$ fois $1$, est le plus petit ordinal strictement supérieur à toutes les sommes naturelles obtenues en remplaçant un des ($n_1+n_0$) termes par un terme strictement plus petit, c'est-à-dire à tous les $(\omega\boxdot (n_1-1)) \boxplus b \boxplus n_0$ pour $b<\omega$ (cas où on remplace un $\omega$ par $b$) et à $(\omega\boxdot n_1) \boxplus (n_0-1)$ (cas où on remplace un $1$ par $0$). En se rappelant que $b \boxplus n_0 = b + n_0$ (qui prend donc toutes les valeurs $\geq n_0$) et qu'on a le droit d'insérer dans un ensemble dont on prend le $\sup^+$ des nouveaux éléments qui sont majorés par des éléments déjà dedans (et comme $\boxplus$ est croissante en chaque variable d'après (2)(c)), on peut écrire $(\omega\boxdot n_1) \boxplus n_0 = \sup^+ \big( \{(\omega\boxdot n'_1) \boxplus n_0' : n'_1 < n_1 \;\hbox{et}\; n'_0 \in\mathbb{N}\} \penalty0 \cup \penalty0 \{(\omega\boxdot n_1) \boxplus n_0' : n'_0 < n_0\}\big)$ comme annoncé. (b) On procède par induction transfinie sur $\alpha = \omega n_1 + n_0$. On veut montrer que $\alpha = (\omega \boxdot n_1) \boxplus n_0$. Or, d'après ce qu'on vient de voir, $(\omega\boxdot n_1) \boxplus n_0 = \sup^+ \big( \{(\omega\boxdot n'_1) \boxplus n_0' : n'_1 < n_1 \;\hbox{et}\; n'_0 \in\mathbb{N}\} \penalty0 \cup \penalty0 \{(\omega\boxdot n_1) \boxplus n_0' : n'_0 < n_0\}\big)$. D'après l'hypothèse d'induction, et en utilisant le fait que les formes normales de Cantor des ordinaux se comparent lexicographiquement, ceci vaut encore $\sup^+ \big( \{\omega\, n'_1 + n_0' : n'_1 < n_1 \;\hbox{et}\; n'_0 \in\mathbb{N}\} \penalty0 \cup \penalty0 \{\omega\, n_1 + n_0' : n'_0 < n_0\}\big)$, qui est bien $\omega\, n_1 + n_0$ comme souhaité (il s'agit précisément du $\sup^+$ de l'ensemble des ordinaux $<\omega\, n_1 + n_0$). \end{corrige} \medskip (4)(a) On admet maintenant l'affirmation (*) en toute généralité. En déduire la manière dont on calcule $\alpha\boxplus\beta$ à partir des formes normales de Cantor de $\alpha$ et $\beta$.\quad(b) En particulier, calculer $(\omega+1)\boxplus(\omega+1)$, et comparer avec $(\omega+1) + (\omega+1)$. \begin{corrige} (a) Soient $\alpha = \omega^{\gamma_1} p_1 + \cdots + \omega^{\gamma_r} p_r$ et $\beta = \omega^{\gamma_1} q_1 + \cdots + \omega^{\gamma_r} q_r$ (quitte à insérer des $p_i$ et $q_i$ nuls dans la forme normale de Cantor) avec $\gamma_1 > \cdots > \gamma_r$. En utilisant (*), on peut écrire $\alpha = (\omega^{\gamma_1} \boxdot p_1) \boxplus \cdots \boxplus (\omega^{\gamma_r} \boxdot p_r)$ et $\beta = (\omega^{\gamma_1} \boxdot q_1) \boxplus \cdots \boxplus (\omega^{\gamma_r} \boxdot q_r)$. En utilisant la commutativité et l'associativité de $\boxdot$ et en regroupant les puissances égales de $\omega$, on obtient $\alpha \boxplus \beta = (\omega^{\gamma_1} \boxdot (p_1+q_1)) \boxplus \cdots \boxplus (\omega^{\gamma_r} \boxdot (p_r+q_r))$. Et quitte à utiliser de nouveau (*), on trouve $\alpha \boxplus \beta = \omega^{\gamma_1} (p_1+q_1) + \cdots + \omega^{\gamma_r} (p_r+q_r)$. On a ainsi montré que la somme naturelle se fait en ajoutant simplement terme à terme les formes normales de Cantor, i.e., on ajoute les chiffres (=coefficients) de chaque puissance de $\omega$. (b) En particulier, $(\omega+1)\boxplus(\omega+1) = \omega\,2 + 2$ (qui est aussi $(\omega\boxdot 2)\boxplus 2$ comme on l'a vu), alors que $(\omega+1) + (\omega+1) = \omega + (1+\omega) + 1 = \omega + \omega + 1 = \omega\,2 + 1$ est strictement plus petit. \end{corrige} \medskip (La question qui suit ne fait pas appel aux questions (3) et (4).) (5) On considère le jeu à deux joueurs suivant : les deux joueurs s'appellent Blaise et Roxane, et ils jouent tour à tour (on ne précise pas qui commence) ; l'état du jeu est défini par trois ordinaux, qu'on notera $(\alpha,\beta,\rho)$, et il est visible de tous ; les coups possibles de Blaise consistent à diminuer strictement soit l'ordinal $\alpha$ soit l'ordinal $\beta$ (c'est-à-dire passer de $(\alpha,\beta,\rho)$ à $(\alpha',\beta,\rho)$ avec $\alpha'<\alpha$ ou à $(\alpha,\beta',\rho)$ avec $\beta'<\beta$), tandis que les coups possibles de Roxane consistent à diminuer strictement l'ordinal $\rho$ (c'est-à-dire passer de $(\alpha,\beta,\rho)$ à $(\alpha,\beta,\rho')$ avec $\rho'<\rho$) ; le joueur qui ne peut plus jouer a perdu. Montrer que, dans ce jeu, Blaise possède une stratégie gagnante lorsque $\rho < \alpha\boxplus\beta$, que Roxane possède une stratégie gagnante lorsque $\rho > \alpha\boxplus\beta$, et que le second joueur possède une stratégie gagnante lorsque $\rho = \alpha\boxplus\beta$. \begin{corrige} On procède par induction transfinie (sur $\alpha\boxplus\beta\boxplus\rho$, si l'on veut) : on peut supposer la conclusion déjà connue pour tous les $(\alpha',\beta,\rho)$, $(\alpha,\beta',\rho)$ et $(\alpha,\beta,\rho')$ tels que dans la question. Si Blaise joue en premier : si $\rho < \alpha\boxplus\beta$, alors par définition de $\alpha\boxplus\beta$, il existe un $\alpha'\boxplus\beta$ avec $\alpha'<\alpha$ ou $\alpha\boxplus\beta'$ avec $\beta'<\beta$ qui majore $\rho$ (au sens large), et Blaise peut faire le coup correspondant $(\alpha',\beta,\rho)$ ou $(\alpha,\beta',\rho)$ auquel cas il aura une stratégie gagnante comme second joueur par hypothèse d'induction ; si $\rho \geq \alpha\boxplus\beta$, alors quel que soit le coup $(\alpha',\beta,\rho)$ ou $(\alpha,\beta',\rho)$ fait par Blaise, on aura $\rho > \alpha'\boxplus\beta$ ou $\rho > \alpha\boxplus\beta'$ donc Roxane aura une stratégie gagnante par hypothèse d'induction. Si Roxane joue en premier : si $\rho > \alpha\boxplus\beta$, alors elle peut jouer vers $(\alpha,\beta,\rho')$ avec $\rho' = \alpha\boxplus\beta$, auquel cas elle comme second joueur aura une stratégie gagnante par hypothèse d'induction. Si $\rho \leq \alpha\boxplus\beta$, alors quel que soit le coup qu'elle fait, elle arrivera à un $(\alpha,\beta,\rho')$ avec $\rho' < \alpha\boxplus\beta$ auquel cas Blaise a une stratégie gagnante par hypothèse d'induction. \end{corrige} {\footnotesize Autrement dit, on a montré que l'addition des « nombres (surréels) » de Conway coïncide, dans le cas particulier des ordinaux, avec l'opération $\boxplus$ de somme naturelle.\par} % % % \exercice Soit $n\geq 3$ un entier naturel. On considère le jeu suivant : Alice et Bob choisissent chacun en secret un entier naturel $0\leq i\leq n-1$ et le révèlent simultanément. Si les deux nombres sont égaux, la partie est nulle ; sinon, le gagnant est celui qui a choisi le plus grand, \emph{sauf} dans le cas où un joueur a choisi $n-1$ et l'autre joueur a choisi $0$, et alors c'est celui qui a choisi $0$ qui gagne. (On considérera qu'un gain apporte une valeur de $+1$ à celui qui gagne, une perte une valeur de $-1$ à celui qui perd, et qu'une partie nulle a une valeur de $0$ pour les deux joueurs.) (1) De quelle sorte de jeu s'agit-il ? Écrire explicitement sa matrice de gains dans le cas $n=5$. Pour des raisons de symétrie, quelle est la valeur du jeu ? \begin{corrige} Il s'agit d'un jeu en forme normale et à somme nulle. Pour $n=5$, la matrice des gains d'Alice vaut : \begin{center} \begin{tabular}{r|ccccc} $\downarrow$Alice, Bob$\rightarrow$&${0}$&${1}$&${2}$&${3}$&${4}$\\\hline ${0}$&$0$&$-1$&$-1$&$-1$&$+1$\\ ${1}$&$+1$&$0$&$-1$&$-1$&$-1$\\ ${2}$&$+1$&$+1$&$0$&$-1$&$-1$\\ ${3}$&$+1$&$+1$&$+1$&$0$&$-1$\\ ${4}$&$-1$&$+1$&$+1$&$+1$&$0$\\ \end{tabular} \end{center} Pour des raisons de symétrie (la matrice étant antisymétrique, c'est-à-dire que les deux joueurs sont dans la même situation vis-à-vis du jeu), la valeur du gain vaut $0$. \end{corrige} (2) On considère la stratégie mixte consistant à jouer chacune des options $0$, $n-2$ et $n-1$ avec probabilité $\frac{1}{3}$ (et jamais les autres). On l'appellera $s_0$. Si Alice joue selon cette stratégie $s_0$ et si Bob joue l'option $i$, quel est le gain espéré d'Alice en fonction de $i$ ? \begin{corrige} Si Bob joue $0$, Alice obtient le gain espéré $\frac{1}{3}(0 + 1 - 1) = 0$. Si Bob joue une option entre $1$ et $n-3$ inclus, Alice obtient le gain espéré $\frac{1}{3}(-1 + 1 + 1) = \frac{1}{3} > 0$. Si Bob joue $n-2$, Alice obtient le gain espéré $\frac{1}{3}(-1 + 0 + 1) = 0$. Si Bob joue $n-1$, Alice obtient le gain espéré $\frac{1}{3}(+1 - 1 + 0) = 0$. \end{corrige} (3) Pourquoi $s_0$ est-elle une stratégie optimale ? \begin{corrige} Pour vérifier que $s_0$ est optimale, il s'agit de vérifier qu'elle réalise au moins la valeur du jeu contre toute option (=stratégie pure) de l'adversaire. C'est ce qu'on vient de faire puisque la valeur du jeu est $0$. \end{corrige} (4) Déduire de (2) qu'aucune stratégie optimale ne peut avoir une option autre que $0$, $n-2$ ou $n-1$ dans son support. (On pourra faire jouer une telle stratégie contre $s_0$.) \begin{corrige} Si $t$ est une stratégie ayant une autre option que $0$, $n-2$ et $n-1$ dans son support, les espérances trouvées en (2) montrent que son espérance de gain contre $s_0$ est strictement négative (strictement positive pour le joueur qui applique $s_0$, donc strictement négative pour celui qui applique $t$). Donc $t$ ne peut pas être optimale. \end{corrige} (5) Montrer que la stratégie $s_0$ décrite en (2) est la seule stratégie optimale de ce jeu. \begin{corrige} On vient de voir que toute stratégie optimale $s$ a un support inclus dans $\{0, n-2, n-1\}$. Si on appelle $p_0, p_{-2}, p_{-1}$ les probabilités respectives de ces options dans $s$, on sait que $s$ doit avoir une espérance de gain nulle contre $s_0$, donc contre chacune des options pures $0$, $n-2$ et $n-1$, ce qui donne $p_{-2} = p_{-1}$, $p_{-1} = p_0$ et $p_0 = p_{-2}$, bref, la seule possibilité est $p_0 = p_{-2} = p_{-1} = \frac{1}{3}$. \end{corrige} % % % \end{document}