%% This is a LaTeX document. Hey, Emacs, -*- latex -*- , get it? \documentclass[12pt,a4paper]{article} \usepackage[a4paper,margin=2.5cm]{geometry} \usepackage[french]{babel} \usepackage[utf8]{inputenc} \usepackage[T1]{fontenc} %\usepackage{ucs} \usepackage{times} % A tribute to the worthy AMS: \usepackage{amsmath} \usepackage{amsfonts} \usepackage{amssymb} \usepackage{amsthm} % \usepackage{mathrsfs} \usepackage{wasysym} \usepackage{url} % \usepackage{graphics} \usepackage[usenames,dvipsnames]{xcolor} \usepackage{tikz} \usetikzlibrary{matrix,calc} \usepackage{hyperref} % %\externaldocument{notes-mitro206}[notes-mitro206.pdf] % \theoremstyle{definition} \newtheorem{comcnt}{Whatever} \newcommand\thingy{% \refstepcounter{comcnt}\smallskip\noindent\textbf{\thecomcnt.} } \newcommand\exercise{% \refstepcounter{comcnt}\bigskip\noindent\textbf{Exercice~\thecomcnt.}\par\nobreak} \renewcommand{\qedsymbol}{\smiley} % \newcommand{\outnb}{\operatorname{outnb}} \newcommand{\downstr}{\operatorname{downstr}} \newcommand{\precs}{\operatorname{precs}} \newcommand{\mex}{\operatorname{mex}} \newcommand{\id}{\operatorname{id}} \newcommand{\limp}{\Longrightarrow} \newcommand{\gr}{\operatorname{gr}} \newcommand{\rk}{\operatorname{rk}} \newcommand{\dur}{\operatorname{dur}} \newcommand{\fuzzy}{\mathrel{\|}} % \newcommand{\dblunderline}[1]{\underline{\underline{#1}}} % \renewcommand{\thefootnote}{\fnsymbol{footnote}} % \DeclareUnicodeCharacter{00A0}{~} % \DeclareMathSymbol{\tiret}{\mathord}{operators}{"7C} \DeclareMathSymbol{\traitdunion}{\mathord}{operators}{"2D} % \DeclareFontFamily{U}{manual}{} \DeclareFontShape{U}{manual}{m}{n}{ <-> manfnt }{} \newcommand{\manfntsymbol}[1]{% {\fontencoding{U}\fontfamily{manual}\selectfont\symbol{#1}}} \newcommand{\dbend}{\manfntsymbol{127}}% Z-shaped \newcommand{\danger}{\noindent\hangindent\parindent\hangafter=-2% \hbox to0pt{\hskip-\hangindent\dbend\hfill}} % \newcommand{\spaceout}{\hskip1emplus2emminus.5em} \newif\ifcorrige \corrigetrue \newenvironment{corrige}% {\ifcorrige\relax\else\setbox0=\vbox\bgroup\fi% \smallbreak\noindent{\underbar{\textit{Corrigé.}}\quad}} {{\hbox{}\nobreak\hfill\checkmark}% \ifcorrige\par\smallbreak\else\egroup\par\fi} % % % \begin{document} \ifcorrige \title{CSC-4MI06-TP / MITRO206\\Contrôle de connaissances — Corrigé\\{\normalsize Théories des jeux}} \else \title{CSC-4MI06-TP / MITRO206\\Contrôle de connaissances\\{\normalsize Théories des jeux}} \fi \author{} \date{2025-06-26} \maketitle \pretolerance=8000 \tolerance=50000 \vskip1truein\relax \noindent\textbf{Consignes.} Les exercices sont totalement indépendants. Ils pourront être traités dans un ordre quelconque, mais on demande de faire apparaître de façon très visible dans les copies où commence chaque exercice. \medbreak L'usage de tous les documents (notes de cours manuscrites ou imprimées, feuilles d'exercices, livres) est autorisé. L'usage des appareils électroniques est interdit. \medbreak Durée : 2h \ifcorrige Ce corrigé comporte \textcolor{red}{XXX} pages (page de garde incluse). \else Cet énoncé comporte \textcolor{red}{XXX} pages (page de garde incluse). \fi \vfill {\noindent\tiny \immediate\write18{sh ./vc > vcline.tex} Git: \input{vcline.tex} \immediate\write18{echo ' (stale)' >> vcline.tex} \par} \pagebreak % % % \exercise \textbf{(1)} On considère le jeu en forme normale symétrique à somme nulle défini par la matrice de gains suivante : \begin{center} \begin{tabular}{r|ccc} $\downarrow$Alice, Bob$\rightarrow$&Pierre&Papier&Ciseaux\\\hline Pierre&$0$&$-1$&$+1$\\ Papier&$+1$&$0$&$-1$\\ Ciseaux&$-1$&$+1$&$0$\\ \end{tabular} \end{center} (Seul le gain d'Alice a été inscrit dans chaque case car les gains des deux joueurs sont opposés.) Quels sont tous les équilibres de Nash de ce jeu ? \begin{corrige} On a vu en cours qu'une stratégie optimale pour l'un ou l'autre joueur est $\frac{1}{3}\text{Pierre} + \frac{1}{3}\text{Papier} + \frac{1}{3}\text{Ciseaux}$ : de fait, la valeur du jeu est nulle car il est à somme nulle et \emph{symétrique}, et cette stratégie mixte $\frac{1}{3}\text{Pierre} + \frac{1}{3}\text{Papier} + \frac{1}{3}\text{Ciseaux}$ réalise au moins la valeur du jeu contre n'importe quelle option de l'adversaire. Réciproquement, si $p\,\text{Pierre} + q\,\text{Papier} + r\,\text{Ciseaux}$ est une stratégie optimale d'un joueur (avec $p,q,r$ positifs de somme $1$), son gain contre les trois stratégies pures de l'adversaire (à savoir $q-r$ contre Pierre, $r-p$ contre Papier et $p-q$ contre Ciseaux) doit être positif à chaque fois. On a donc $q \geq r$ et $r \geq p$ et $p \geq q$, ce qui impose $p=q=r$ donc ils valent $\frac{1}{3}$. Ceci montre que $\frac{1}{3}\text{Pierre} + \frac{1}{3}\text{Papier} + \frac{1}{3}\text{Ciseaux}$ est la seule stratégie optimale à ce jeu (quel que soit le joueur). Enfin, les équilibres de Nash d'un jeu à somme nuls sont ceux où les deux joueurs jouent une stratégie optimale, donc il n'y a qu'un seul ici, c'est celui où Alice et Bob jouent chacun $\frac{1}{3}\text{Pierre} + \frac{1}{3}\text{Papier} + \frac{1}{3}\text{Ciseaux}$. \end{corrige} \smallskip \textbf{(2)} On souhaite maintenant ajouter une nouvelle option au jeu ci-dessus, c'est-à-dire qu'on considère le jeu en forme normale (toujours symétrique et à somme nulle) défini par la matrice de gains : \begin{center} \begin{tabular}{r|cccc} $\downarrow$Alice, Bob$\rightarrow$&Pierre&Papier&Ciseaux&Foobar\\\hline Pierre&$0$&$-1$&$+1$&$-x$\\ Papier&$+1$&$0$&$-1$&$-y$\\ Ciseaux&$-1$&$+1$&$0$&$-z$\\ Foobar&$x$&$y$&$z$&$0$\\ \end{tabular} \end{center} (Les trois sous-questions qui suivent sont indépendantes.) \textbf{\hphantom{(2)} (a)} À quelle condition (nécessaire et suffisante) sur $x,y,z$ les équilibres de Nash trouvés en (1) sont-ils encore des équilibres de Nash pour ce nouveau jeu ?\quad\textbf{(b)} À quelle condition (nécessaire et suffisante) sur $x,y,z$ y a-t-il un équilibre de Nash où les deux joueurs jouent l'option Foobar (de façon certaine) ?\quad\textbf{(c)} À quelle condition (nécessaire et suffisante) sur $x,y,z$ y a-t-il un équilibre de Nash où les deux joueurs jouent $\frac{1}{2}\text{Pierre} + \frac{1}{2}\text{Foobar}$ (i.e., Pierre ou Foobar chacun avec probabilité $\frac{1}{2}$) ? \begin{corrige} \textbf{(a)} En ajoutant une ligne et une colonne pour la stratégie mixte $M := \frac{1}{3}\text{Pierre} + \frac{1}{3}\text{Papier} + \frac{1}{3}\text{Ciseaux}$, le tableau devient : \begin{center} \begin{tabular}{r|cccc|c} $\downarrow$Alice, Bob$\rightarrow$&Pierre&Papier&Ciseaux&Foobar&$M$\\\hline Pierre&$0$&$-1$&$+1$&$-x$&$0$\\ Papier&$+1$&$0$&$-1$&$-y$&$0$\\ Ciseaux&$-1$&$+1$&$0$&$-z$&$0$\\ Foobar&$x$&$y$&$z$&$0$&$\frac{1}{3}(x+y+z)$\\\hline $M$&$0$&$0$&$0$&$-\frac{1}{3}(x+y+z)$&$0$\\ \end{tabular} \end{center} Le profil $(M,M)$ est un équilibre de Nash lorsque $0$ est le plus grand nombre de sa colonne et le plus petit de sa ligne, c'est-à-dire exactement lorsque $x+y+z \leq 0$. \textbf{(b)} Le profile $(\text{Foobar}, \text{Foobar})$ est un équilibre de Nash lorsque $0$ est le plus grand nombre de sa colonne et le plus petit de sa ligne, c'est-à-dire lorsque $x,y,z$ sont tous positifs. \textbf{(c)} En ajoutant une ligne et une colonne pour la stratégie mixte $N := \frac{1}{2}\text{Pierre} + \frac{1}{2}\text{Foobar}$, le tableau devient : \begin{center} \begin{tabular}{r|cccc|c} $\downarrow$Alice, Bob$\rightarrow$&Pierre&Papier&Ciseaux&Foobar&$N$\\\hline Pierre&$0$&$-1$&$+1$&$-x$&$-\frac{x}{2}$\\[0.7ex] Papier&$+1$&$0$&$-1$&$-y$&$-\frac{y-1}{2}$\\[0.7ex] Ciseaux&$-1$&$+1$&$0$&$-z$&$-\frac{z+1}{2}$\\[0.7ex] Foobar&$x$&$y$&$z$&$0$&$\frac{x}{2}$\\[0.7ex]\hline $N$&$\frac{x}{2}$&$\frac{y-1}{2}$&$\frac{z+1}{2}$&$-\frac{x}{2}$&$0$\\ \end{tabular} \end{center} Le profil $(N,N)$ est un équilibre de Nash lorsque $0$ est le plus grand nombre de sa colonne et le plus petit de sa ligne, c'est-à-dire exactement lorsque $x=0$ et $y\geq 1$ et $z\geq -1$. \end{corrige} \smallskip \textbf{(3)} On reprend maintenant la matrice de gains écrite en (1), mais cette fois les gains des deux joueurs seront \emph{égaux} au lieu d'être opposés (ce n'est donc plus un jeu à somme nulle ! les joueurs sont alliés et non plus adversaires). Le tableau donne la valeur du gain commun aux deux joueurs. \textbf{\hphantom{(3)} (a)} Montrer que les équilibres de Nash trouvés en (1) sont encore des équilibres de Nash de ce nouveau jeu.\quad\textbf{(b)} Donner au moins un équilibre de Nash différent de ceux-ci. Commenter brièvement quant à la différence de gain éventuelle entre ces équilibres de Nash. \begin{corrige} \textbf{(a)} En ajoutant une ligne et une colonne pour la stratégie mixte $M := \frac{1}{3}\text{Pierre} + \frac{1}{3}\text{Papier} + \frac{1}{3}\text{Ciseaux}$, le tableau devient : \begin{center} \begin{tabular}{r|ccc|c} $\downarrow$Alice, Bob$\rightarrow$&Pierre&Papier&Ciseaux&$M$\\\hline Pierre&$0$&$-1$&$+1$&$0$\\ Papier&$+1$&$0$&$-1$&$0$\\ Ciseaux&$-1$&$+1$&$0$&$0$\\\hline $M$&$0$&$0$&$0$&$0$\\ \end{tabular} \end{center} Le profil $(M,M)$ est bien un équilibre de Nash car $0$ est le plus grand nombre de sa colonne et le plus grand de sa ligne, ce qui est bien le cas ici. \textbf{(b)} Il y a des équilibres de Nash évidents en stratégies pures, à savoir tous les $+1$ du tableau : par exemple, si Alice joue Papier et Bob joue Pierre, ceci constitue bien un équilibre de Nash (car $+1$ est le plus grand nombre de sa colonne et le plus grand de sa ligne). L'équilibre de Nash trouvé en (a) correspond intuitivement à une situation où les joueurs ne sont pas synchronisés : ils jouent une stratégie équilibrée entre les trois options. Dans ce jeu coopératif, ce n'est pas du tout optimal, le gain espéré étant $0$, mais aucun n'a d'intérêt à privilégier unilatéralement une des options tant que l'autre continue à jouer cette stratégie. Dans le cas trouvé en (b), en revanche, les joueurs se sont synchronisés sur une stratégie qui les arrange tous les deux, réalisant le gain qui est visiblement le meilleur possible ici. \end{corrige} % % % \exercise On considère dans cet exercice le jeu suivant : Alice et Bob ont devant eux des piles de jetons, qui représentent l'état du jeu. Les piles sont numérotées $0$, $1$, $2$, etc. Chaque pile contient un certain nombre fini (entier naturel) de jetons. Il n'y a qu'un nombre fini de piles non vides (c'est-à-dire, ayant un nombre non-nul de jetons). Pour représenter la position mathématiquement, on utilisera la liste $(n_0, n_1, n_2, \ldots, n_k)$ où $n_i$ est le nombre de jetons de la pile numérotée $i$, et où ceci signifie implicitement que toutes les piles $\geq k$ sont vides. Un coup d'un joueur consiste à retirer \emph{exactement un} jeton d'une certaine pile $i$, de son choix, et d'ajouter \emph{autant qu'il le souhaite} (y compris $0$) jetons à chacune des piles $ji$ sont donc pairs). Le coup consistant à retirer un jeton de la pile $i$ (qui passe donc à $n_i-1$ jetons, lequel nombre est pair) et à en ajouter un à toutes les piles $ji$ par maximalité de $i$.) Définissons les $n'_j$ comme suit : on pose $n'_j = n_j$ si $j>i$, et $n'_i = n_i-1$, et enfin, pour $ji$ et $n'_i = n_i$ et $n'_j \geq n_j$ si $j\leq i$), le $(n'_0,n'_1,\ldots,n'_k)$ qu'on vient de définir est bien un voisin sortant de $(n_0,n_1,\ldots,n_k)$. Par ailleurs, $(n'_j\%2) = b_j$ : en effet, pour $j>i$ cela résulte de $b_j = (n_j\%2)$ et $n'_j = n_j$ ; pour $j=i$ cela résulte de $b_i = ((n_i-1)\%2)$ et $n'_i = n_i-1$ ; et pour $j\epsilon$ tel que $\gamma = \omega^\gamma$. \begin{corrige} Si $\eta$ est l'ordinal trouvé en (3), on a $\omega^\eta = \lim_{\xi\to\eta} \omega^\xi = \sup\{\omega^\xi : \xi<\eta\}$. D'après (2), ceci vaut aussi $\sup\{\omega^{\beta_n} : n\in\mathbb{N}\}$ (car tout $\xi<\eta$ est intérieur à un certain $\beta_n$, et réciproquement tout $\beta_n$ est un $\xi<\eta$). Or celui-ci n'est autre que $\sup\{\beta_{n+1} : n\in\mathbb{N}\}$, donc c'est bien $\eta$. Par ailleurs, si $\gamma>\varepsilon$ vérifie $\gamma = \omega^\gamma$, alors on a $\gamma \geq \varepsilon+1 = \beta_0$, et par récurrence sur $n$ on montre $\gamma \geq \beta_n$ : en effet, $\gamma = \omega^\gamma \geq \omega^{\beta_n} = \beta_{n+1}$. Par conséquent, $\gamma \geq \eta$ (vu que $\eta = \sup\{\beta_n\}$), et comme on a montré ci-dessus que $\eta = \omega^\eta$, il est bien le plus petit ordinal $\gamma>\epsilon$ tel que $\gamma = \omega^\gamma$. \end{corrige} % % % \exercise On se propose dans cet exercice de montrer qu'il existe une partie $A \subseteq \{0,1\}^{\mathbb{N}}$ tel que le jeu de Gale-Stewart $G(A) := G_{\{0,1\}}(A)$ ne soit pas déterminé (i.e., tel qu'aucun des deux joueurs n'ait de stratégie gagnante). (La démonstration a été découpées en questions admettant des réponses courtes, parfois d'une seule ligne. Aucune ne demande de raisonnement très compliqué.) \textbf{(1)} Montrer qu'il existe une bijection $h_{\mathrm{A}}$ (resp. $h_{\mathrm{B}}$) entre $\{0,1\}^{\mathbb{N}}$ et l'ensemble des stratégies d'Alice (resp. de Bob) au jeu $G(A)$. (\emph{Indication :} on pourra expliquer rapidement pourquoi il existe une bijection entre $\mathbb{N}$ et l'ensemble des positions où c'est à Alice, resp. à Bob, de jouer.) \begin{corrige} L'ensemble $P_{\mathrm{A}}$ des positions où c'est à Alice de jouer sont les suites binaires finies de longueur paires : on peut les énumérer dans l'ordre de longueur et, pour chaque longueur, dans l'ordre lexicographique ($()$, $00$, $01$, $10$, $11$, $0000$, $0001$, $0010$, etc.). Ceci fournit une bijection $g_{\mathrm{A}}\colon \mathbb{N} \to P_{\mathrm{A}}$ : on en déduit une bijection $h_{\mathrm{A}}\colon \{0,1\}^{P_{\mathrm{A}}} \to \{0,1\}^{\mathbb{N}}$ par $h_{\mathrm{A}}(u) = (n \mapsto u(g_{\mathrm{A}}(n)))$. Or $\{0,1\}^{P_{\mathrm{A}}}$ est exactement l'ensemble des stratégies d'Alice (ce sont les fonctions qui à une position où c'est à Alice de jouer associent un coup d'Alice). Exactement le même raisonnement fournit le résultat pour $h_{\mathrm{B}}$ : il faut simplement considérer cette fois l'ensemble $P_{\mathrm{B}}$ des positions où c'est à Bob de jouer, qui sont les suites binaires finies de longueur paires ($0$, $1$, $000$, $001$, etc.). \end{corrige} \textbf{(2)} On \emph{admet}\footnote{Plus généralement, on peut montrer qu'il existe une relation de bon ordre sur n'importe quel ensemble (théorème du bon ordre).} qu'il existe une relation de bon ordre $\preceq$ sur $\{0,1\}^{\mathbb{N}}$. En déduire qu'il existe un ordinal $\gamma$ et une bijection $\xi \mapsto u_\xi$ entre l'ensemble $\{\xi < \gamma\}$ des ordinaux plus petits que $\gamma$ et l'ensemble $\{0,1\}^{\mathbb{N}}$ (autrement dit, les $u_\xi$ sont deux à deux distincts et $\{u_\xi : \xi < \gamma\} = \{0,1\}^{\mathbb{N}}$). \begin{corrige} Soit $W$ l'ensemble $\{0,1\}^{\mathbb{N}}$ muni du bon ordre $\preceq$ qu'on a supposé exister, et soit $\gamma = \#W$ son ordinal. À tout élément $w$ de $W$ on associe un ordinal $\#w$ qui est l'ordinal de l'ensemble $\{x \in W : x \prec w\}$ des prédécesseurs stricts de $w$ : ceci constitue une bijection strictement croissante entre $W$ et l'ensemble $\{\xi < \gamma\}$ des ordinaux $<\gamma$ ; on appelle alors $\xi \mapsto u_\xi$ la bijection réciproque. (Si on préfère : l'ordinal de $W$ est le même que l'ordinal de $\{\xi < \gamma\}$, à savoir $\gamma$, donc il y a une — unique — bijection croissante entre les deux, et on appelle $\xi \mapsto u_\xi$ sa réciproque.) \end{corrige} \textbf{(3)} Expliquer en une ligne, pourquoi il existe un plus petit ordinal $\gamma$ tel qu'il existe une surjection $\xi \mapsto u_\xi$ de l'ensemble $\{\xi < \gamma\}$ des ordinaux plus petits que $\gamma$ sur l'ensemble $\{0,1\}^{\mathbb{N}}$. \begin{corrige} En une ligne : on vient de montrer qu'un tel $\gamma$ existe, donc il y en a un plus petit. (En un tout petit peu plus détaillé : comme les ordinaux sont bien-ordonnés, dès qu'il existe un ordinal tel que (quelque chose), alos il y en a un plus petit ; or il existe un ordinal tel que $\{\xi < \gamma\}$ se surjecte sur $\{0,1\}^{\mathbb{N}}$ — on vient de voir l'existence d'une telle bijection —, donc il en existe un plus petit.) \end{corrige} \textbf{Définition :} On notera\footnote{Il s'agit ici d'un ‘c’ gothique (cet ordinal s'appelle le « cardinal du continu ») ; si on ne veut pas écrire de ‘c’ gothique on pourra, par exemple, faire un ‘c’ souligné.} $\mathfrak{c}$ l'ordinal dont on vient de justifier l'existence (i.e., le plus petit $\gamma$ tel qu'on puisse écrire $\{u_\xi : \xi < \gamma\} = \{0,1\}^{\mathbb{N}}$ pour une certaine fonction $\xi \mapsto u_\xi$). \textbf{(4)} \textbf{(a)} Si $(v_\xi)_{\xi<\alpha}$ sont des éléments quelconques de $\{0,1\}^{\mathbb{N}}$, où $\alpha < \mathfrak{c}$, expliquer en une ligne pourquoi il existe un élément $x$ de $\{0,1\}^{\mathbb{N}}$ différent de tous les $v_\xi$.\quad\textbf{(b)} Si $w$ est encore un élément de $\{0,1\}^{\mathbb{N}}$, expliquer pourquoi on peut aussi trouver $x$ différent de $w$. \begin{corrige} \textbf{(a)} En une ligne : $\xi \mapsto v_\xi$ n'est pas surjective par minimalité de $\mathfrak{c}$. \textbf{(b)} Si $\alpha$ est fini, il est évident qu'on peut trouver $x$ différent de tous les $v_\xi$ et de $w$ (qui sont en nombre fini). Si $\alpha$ est infini, alors $\alpha = 1 + \alpha$ donc on n'a qu'à poser $v'_0 = w$ et $v'_{1+\xi} = v_\xi$ pour tout $\xi < \alpha$, et appliquer (a). \end{corrige} \textbf{Définition :} Si $\sigma$ est une stratégie d'Alice au jeu $G(A)$ et $y \in \{0,1\}^{\mathbb{N}}$, on note $\sigma \ast y$ la confrontation dans laquelle Alice joue selon $\sigma$ et Bob joue simplement les termes successifs de $y$ (indépendamment de ce que fait Alice ; i.e., $\sigma \ast y$ est une suite binaire dont la suite des termes impairs, ceux joués par Bob, est donnée par $y$, tandis qu'Alice joue les termes pairs selon la stratégie $\sigma$). Symétriquement, si $\tau$ est une stratégie de Bob et $z \in \{0,1\}^{\mathbb{N}}$, on définit $z \ast \tau$ comme la confrontation dans laquelle Alice joue les termes de la suite $z$ et Bob joue selon $\tau$. \textbf{(5)} Si $\sigma$ est une stratégie d'Alice, expliquer en une ligne pourquoi la fonction $y \mapsto \sigma \ast y$ (de $\{0,1\}^{\mathbb{N}}$ vers $\{0,1\}^{\mathbb{N}}$) est injective. \begin{corrige} En une ligne : si $\sigma \ast y = \sigma \ast y'$, ils ont les mêmes termes impairs, donc $y = y'$. (Si on préfère : $y$ se retrouve à partir de $\sigma \ast y$ comme la suite de ses termes impairs.) \end{corrige} \textbf{(6)} Si $(a_\xi)_{\xi<\alpha}$ sont des éléments quelconques de $\{0,1\}^{\mathbb{N}}$, où $\alpha < \mathfrak{c}$, déduire de (4)(a) et (5) pourquoi il existe $y \in \{0,1\}^{\mathbb{N}}$ tel que $\sigma \ast y$ soit différent de tous les $a_\xi$. \begin{corrige} Pour chaque $\xi < \alpha$, si $a_\xi$ est de la forme $\sigma \ast v$, appelons $v_\xi$ le $v$ en question (qui est unique d'après (5)), et sinon, soit $v_\xi$ quelconque (par exemple la suite nulle). (Ou, si on préfère, on peut appeler $v_\xi$ la suite des termes impairs de $a_\xi$.) D'après (4)(a), il existe $y \in \{0,1\}^{\mathbb{N}}$ qui est différent de tous les $v_\xi$ pour $\xi < \alpha$. Alors $\sigma \ast y$ ne peut pas être égal à $a_\xi$, car si c'était le cas, c'est-à-dire $a_\xi = \sigma \ast y$, on aurait $\sigma \ast v_\xi = \sigma \ast y$, donc $v_\xi = y$ par (5), contredisant la définition de $y$. \end{corrige} \textbf{Supposition :} Dans les questions (7) à (9), on suppose que $(\sigma_\xi)_{\xi<\mathfrak{c}}$ sont des stratégies d'Alice et $(\tau_\xi)_{\xi<\mathfrak{c}}$ des stratégies de Bob. On les définira après la question (9), mais on n'a pas besoin d'en savoir plus pour l'instant. \textbf{(7)} En supposant préalablement définis des éléments $(a_\xi)_{\xi<\alpha}$ et $(b_\xi)_{\xi<\alpha}$ de $\{0,1\}^{\mathbb{N}}$, où $\alpha < \mathfrak{c}$, déduire en une ligne des questions précédentes qu'il existe $b_\alpha$ qui soit de la forme $\sigma_\alpha \ast y$ (pour un certain $y \in \{0,1\}^{\mathbb{N}}$), mais qui soit différent de tous les $a_\xi$. Expliquer pourquoi il existe $a_\alpha$ aussi qui soit de la forme $z \ast \tau_\alpha$ (pour un certain $z \in \{0,1\}^{\mathbb{N}}$), mais différent de tous les $b_\xi$ pour $\xi<\alpha$ mais aussi du $b_\alpha$ qu'on vient de trouver. \begin{corrige} On pose $b_\alpha = \sigma_\alpha \ast y$, où l'existence de $y$ a été prouvée en (6) (pour $\sigma = \sigma_\alpha$). La construction de $a_\alpha$ est symétrique, il n'y a qu'à remarquer que $z \mapsto z \ast \tau$ est injective, car si $z \ast \tau = z' \ast \tau$, ils ont les mêmes termes pairs, donc $z = z'$, tout le reste est presque pareil. La seule chose qui diffère est qu'on a un élément de plus à éviter ($b_\alpha$), mais la question (4)(b) donne justement ce point \end{corrige} On \emph{admettra} qu'il ne pose pas de problème pour choisir\footnote{Ceci constitue une utilisation de l'axiome du choix (qui a d'ailleurs déjà été utilisé dans ce qu'on a admis à la question (2)).} de tels $a_\alpha$ et $b_\alpha$ en fonction de tous les autres paramètres. \textbf{(8)} Déduire de tout ce qui précède qu'il existe $(a_\xi)_{\xi < \mathfrak{c}}$ et $(b_\xi)_{\xi < \mathfrak{c}}$ tels que : \begin{itemize} \item aucun des $a_\xi$ n'est égal à aucun des $b_\zeta$ (i.e., pour tous $\xi<\mathfrak{c}$ et tout $\zeta<\mathfrak{c}$, on a $a_\xi \neq b_\zeta$), \item pour tout $\xi < \mathfrak{c}$, on a $b_\xi = \sigma_\xi \ast y$ pour un certain $y \in \{0,1\}^{\mathbb{N}}$, \item pour tout $\xi < \mathfrak{c}$, on a $a_\xi = z \ast \tau_\xi$ pour un certain $z \in \{0,1\}^{\mathbb{N}}$. \end{itemize} (C'est tout ce qu'on aura besoin de savoir pour la suite.) \begin{corrige} On définit $(a_\xi)_{\xi < \mathfrak{c}}$ et $(b_\xi)_{\xi < \mathfrak{c}}$ par induction transfinie sur $\xi$ : si $(a_\xi)_{\xi < \alpha}$ et $(b_\xi)_{\xi < \alpha}$ ont déjà été définis, alors on choisit $a_\alpha$ et $b_\alpha$ comme l'existence a été montrée en (7). Pour vérifier le premier point, on distingue les cas $\xi < \zeta$ et $\zeta \leq \xi$. Dans le premier cas, la définition même de $b_\zeta$ était d'être différent de tous les $a_\xi$ pour $\xi < \zeta$ ; dans le second cas, la définition même de $a_\xi$ était d'être différent de tous les $b_\zeta$ pour $\zeta < \xi$ et aussi de $b_\xi$. Les deux points suivants font partie de la définition des $b_\xi$ et des $a_\xi$, il n'y a rien de plus à dire. \end{corrige} \textbf{Définition :} Appelons maintenant $A = \{a_\xi : \xi < \mathfrak{c}\}$ l'ensemble des $a_\xi$ qu'on vient de construire en (8). \textbf{(9)} Montrer que, quel que soit $\xi$, la stratégie $\tau_\xi$ n'est pas gagnante pour Bob au jeu $G(A)$. Montrer que la stratégie $\sigma_\xi$ n'est pas gagnante pour Alice à ce même jeu (attention, ce n'est pas exactement symétrique vu que $A$ est l'ensemble des $a_\alpha$). \begin{corrige} Supposons par l'absurde que la stratégie $\tau_\xi$ soit gagnante pour Bob : mais on a vu que $a_\xi = z \ast \tau_\xi$ pour un certain $z$, donc $z \ast \tau_\xi$ est dans $A$, c'est-à-dire qu'Alice gagne la confrontation, ce qui contredit le fait que $\tau_\xi$ soit gagnante pour Bob. Supposons par l'absurde que la stratégie $\sigma_\xi$ soit gagnante pour Alice : mais on a vu que $b_\xi = \sigma_\xi \ast y$ pour un certain $y$ ; or $b_\xi$ ne peut pas être dans $A$ car il serait alors égal à l'un des $a_\zeta$ et on a vu que ce n'était pas le cas. C'est-à-die que Bob gagne la confrontation, ce qui contredit le fait que $\sigma_\xi$ soit gagnante pour Bob. \end{corrige} \textbf{Définition :} Posons maintenant $\sigma_\xi := h_{\mathrm{A}}(u_\xi)$ où $h_{\mathrm{A}}$ a été définie en (1) et $u_\xi$ en (3), et de même $\tau_\xi := h_{\mathrm{B}}(u_\xi)$. \textbf{(10)} Montrer que ni Alice ni Bob n'ont de stratégie gagnante au jeu $G(A)$. \begin{corrige} La fonction $h_{\mathrm{A}}$ est surjective par définition, c'est-à-dire que n'importe quel stratégie d'Alice est de la forme $h_{\mathrm{A}}(u)$ pour un certain $u \in \{0,1\}^{\mathbb{N}}$ ; mais $\xi \mapsto u_\xi$ est surjective, c'est-à-dire que tout $u \in \{0,1\}^{\mathbb{N}}$ est de la forme $u_\xi$ pour un certain $\xi$. Autrement dit, n'importe quelle stratégie d'Alice est une des $\sigma_\xi$. Symétriquement, n'importe quelle stratégie de Bob est une des $\tau_\xi$. On vient de voir que ni $\sigma_\xi$ ni $\tau_\xi$ ne peut être une stratégie gagnante pour le joueur concerné : donc il n'y a aucune stratégie gagnante à ce jeu. \end{corrige} \textbf{(11)} Pourquoi ceci ne contredit pas les résultats vu en cours ? \begin{corrige} Les résultats du cours concernent les parties ouvertes, fermées, ou plus généralemnt boréliennes de $\{0,1\}^{\mathbb{N}}$. Ici on doit conclure que la partie $A$ n'est pas borélienne. \end{corrige} % % % \end{document}