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Hey, Emacs, -*- latex -*- , get it? +\documentclass[12pt,a4paper]{article} +\usepackage[francais]{babel} +\usepackage[utf8]{inputenc} +\usepackage[T1]{fontenc} +%\usepackage{ucs} +\usepackage{times} +% A tribute to the worthy AMS: +\usepackage{amsmath} +\usepackage{amsfonts} +\usepackage{amssymb} +\usepackage{amsthm} +% +\usepackage{mathrsfs} +\usepackage{wasysym} +\usepackage{url} +% +\usepackage{graphics} +\usepackage[usenames,dvipsnames]{xcolor} +\usepackage{tikz} +\usetikzlibrary{matrix,calc} +\usepackage{hyperref} +% +%\externaldocument{notes-accq205}[notes-accq205.pdf] +% +\theoremstyle{definition} +\newtheorem{comcnt}{Tout} +\newcommand\thingy{% +\refstepcounter{comcnt}\smallskip\noindent\textbf{\thecomcnt.} } +\newcommand\exercice{% +\refstepcounter{comcnt}\bigskip\noindent\textbf{Exercice~\thecomcnt.}\par\nobreak} +\renewcommand{\qedsymbol}{\smiley} +% +\newcommand{\id}{\operatorname{id}} +\newcommand{\alg}{\operatorname{alg}} +% +\DeclareUnicodeCharacter{00A0}{~} +% +\DeclareMathSymbol{\tiret}{\mathord}{operators}{"7C} +\DeclareMathSymbol{\traitdunion}{\mathord}{operators}{"2D} +% +\DeclareFontFamily{U}{manual}{} +\DeclareFontShape{U}{manual}{m}{n}{ <-> manfnt }{} +\newcommand{\manfntsymbol}[1]{% + {\fontencoding{U}\fontfamily{manual}\selectfont\symbol{#1}}} +\newcommand{\dbend}{\manfntsymbol{127}}% Z-shaped +\newcommand{\danger}{\noindent\hangindent\parindent\hangafter=-2% + \hbox to0pt{\hskip-\hangindent\dbend\hfill}} +% +\newcommand{\spaceout}{\hskip1emplus2emminus.5em} +\newif\ifcorrige +\corrigetrue +\newenvironment{corrige}% +{\ifcorrige\relax\else\setbox0=\vbox\bgroup\fi% +\smallbreak\noindent{\underbar{\textit{Corrigé.}}\quad}} +{{\hbox{}\nobreak\hfill\checkmark}% +\ifcorrige\par\smallbreak\else\egroup\par\fi} +% +% +% +\begin{document} +\ifcorrige +\title{ACCQ205\\Contrôle de connaissances — Corrigé\\{\normalsize Courbes algébriques}} +\else +\title{ACCQ205\\Contrôle de connaissances\\{\normalsize Courbes algébriques}} +\fi +\author{} +\date{14 avril 2021} +\maketitle + +\pretolerance=8000 +\tolerance=50000 + +\vskip1truein\relax + +\noindent\textbf{Consignes.} + +Ce contrôle est formé d'un unique problème. Les questions dépendent +les unes des autres, mais elles ont été formulées de manière à ce que +le fait de ne pas savoir répondre à l'une d'elles ne bloque pas toute +la suite (tout ce qu'il faut savoir pour la suite est toujours +explicité par l'énoncé). + +La difficulté des questions étant varié, il vaut mieux ne pas rester +bloqué trop longtemps. + +Si on ne sait pas répondre rigoureusement, une réponse informelle peut +valoir une partie des points. + +\medbreak + +L'usage de tous les documents (notes de cours manuscrites ou +imprimées, feuilles d'exercices, livres) est autorisé. + +L'usage des appareils électroniques est interdit. + +\medbreak + +Durée : 2h + +\ifcorrige +Ce corrigé comporte 9 pages (page de garde incluse). +\else +Cet énoncé comporte 4 pages (page de garde incluse). +\fi + +\vfill +{\noindent\tiny +\immediate\write18{sh ./vc > vcline.tex} +Git: \input{vcline.tex} +\immediate\write18{echo ' (stale)' >> vcline.tex} +\par} + +\pagebreak + + +% +% +% + +Soit $k$ un corps de caractéristique $\neq 2$ (c'est-à-dire qu'on +pourra librement diviser par $2$), dont on notera $k^{\alg}$ la +clôture algébrique. On rappelle qu'un « point géométrique » de +$\mathbb{P}^n$ désigne un point à coordonnées dans $k^{\alg}$, tandis +qu'un « point rationnel » désigne un point à coordonnées dans $k$. + +\medbreak + +\textbf{(1)} Montrer le fait suivant (théorème d'Euler sur les +polynômes homogènes) : si $h$ est un polynôme homogène de degré $\ell$ +en les variables $t_0,\ldots,t_n$ alors $\sum_{j=0}^n +t_j\,\frac{\partial h}{\partial t_j} = \ell h$ (égalité dans +$k[t_0,\ldots,t_n]$). Pour cela, on pourra justifier qu'il suffit de +le prouver lorsque $h$ est un monôme. + +\begin{corrige} +La formule énoncée étant linéaire, il suffit de la démontrer lorsque +$h$ est un monôme de degré total $\ell$ (un polynôme homogène de +degré $\ell$ étant combinaison linéaire de tels monômes). Or si $h = +t_0^{d_0}\cdots t_n^{d_n}$ avec $d_0+\cdots+d_n = \ell$, on a +$\frac{\partial h}{\partial t_j} = d_j\, t_0^{d_0}\cdots +t_j^{d_j-1}\cdots t_n^{d_n}$ d'où $t_j\,\frac{\partial h}{\partial + t_j} = d_j\, t_0^{d_0}\cdots t_j^{d_j}\cdots t_n^{d_n} = d_j\,h$ et +$\sum_{j=0}^n t_j\,\frac{\partial h}{\partial t_j} = (\sum_{j=0}^n +d_j)\, h = \ell h$. +\end{corrige} + +\medbreak + +Faisons la remarque introductive suivante (qui est une reformulation +projective du résultat bien connu sur les racines d'un polynôme de +degré $2$ sur la droite affine, et qu'on pourra librement utiliser +dans la suite) : si $q := c_0 x^2 + c_1 x y + c_2 y^2$ est un polynôme +homogène de degré $2$ non nul en deux variables $x,y$, alors le fermé +de Zariski $\{q = 0\}$ qu'il définit dans la droite projective +$\mathbb{P}^1$ est constitué d'exactement \emph{un ou deux} points +géométriques ; il y en a un seul si et seulement si le discriminant +$\Delta := c_1^2 - 4 c_0 c_2$ est nul, auquel cas le point $(x:y)$ en +question est $(c_1 : -2c_0) = (-2c_2 : c_1)$ (il est donc rationnel) ; +et lorsque $\Delta \neq 0$, \emph{soit} les deux points géométriques +sont tous les deux rationnels, \emph{soit} aucun des deux ne +l'est\footnote{Ceci résulte de la formule du trinôme : les deux points + sont $(c_1 \pm \sqrt{\Delta} : -2c_0) = (-2c_2 : c_1 \mp + \sqrt{\Delta})$, ils sont rationnels si et seulement si $\Delta$ est + un carré dans $k$, mais cette formule ne servira pas ici.}. + +\medbreak + +On va désormais s'intéresser à la courbe définie par une équation +homogène de degré $2$ dans le plan projectif. + +Plus précisément, on appelle \textbf{conique} plane sur $k$ une variété +algébrique projective (i.e., un fermé de Zariski) $C_q$ dans +$\mathbb{P}^2$ définie par une équation $q = 0$ où $q \in k[x,y,z]$ +est un polynôme homogène de degré $2$ (on dit aussi « forme +quadratique ») non nul\footnote{\label{nonsquare-footnote}On pourra + aussi librement faire l'hypothèse que $q$ n'est pas le carré d'un + polynôme $l$ (forcément homogène) de degré $1$ (= forme linéaire) ; + en effet, s'il l'est, la conique $\{q=0\}$ est simplement réduite à + la droite $\{l=0\}$ mais l'idéal $(q)$ n'est pas radical (il faut + imaginer la conique comme la droite « doublée ») : on ignorera donc + ce cas.} en trois variables $x,y,z$ qu'on identifie aux coordonnées +homogènes sur $\mathbb{P}^2$. À titre d'exemple, $\{x^2 + y^2 - z^2 = +0\}$ est une telle conique. + +En général, une conique s'écrit $\{q = 0\}$ où +\[ +q = a_x\, x^2 + a_y\, y^2 + a_z\, z^2 + b_x\, yz + b_y\, xz + b_z\, xy +\] +avec $a_x,a_y,a_z,b_x,b_y,b_z$ six coefficients dans $k$, non tous +nuls : on adoptera cette notation. + +\smallbreak + +\textbf{(2)} On rappelle qu'un point $(x_0:y_0:z_0)$ de $C_q$ est dit +\emph{singulier} lorsque $\frac{\partial q}{\partial x}$, +$\frac{\partial q}{\partial y}$ et $\frac{\partial q}{\partial z}$ +s'annulent simultanément en $(x_0,y_0,z_0)$. Expliquer pourquoi un +point vérifiant ces conditions est automatiquement sur $C_q$ (i.e., +pourquoi l'annulation de $\frac{\partial q}{\partial x}$, +$\frac{\partial q}{\partial y}$ et $\frac{\partial q}{\partial z}$ en +$(x_0,y_0,z_0)$ quelconque implique automatiquement celle de $q$). +Donner une condition pour que trois droites dans $\mathbb{P}^2$ soient +concourantes (condition sur les coefficients de leurs équations). En +déduire que la conique $C_q$ a un point singulier si et seulement si +ses coefficients vérifient +\[ +4 a_x a_y a_z - a_x b_x^2 - a_y b_y^2 - a_z b_z^2 + b_x b_y b_z = 0 +\] +et qu'il revient au même de dire qu'elle a un point singulier +géométrique ou rationnel. + +\begin{corrige} +On a vu en (1) que $q = \frac{1}{2}(x\,\frac{\partial q}{\partial x} + +y\frac{\partial q}{\partial y} + z\,\frac{\partial q}{\partial z})$. +Donc en un point $(x_0:y_0:z_0)$ où $\frac{\partial q}{\partial x}$, +$\frac{\partial q}{\partial y}$ et $\frac{\partial q}{\partial z}$ +s'annulent, $q$ s'annule aussi, et le point est sur $C_q$. + +Trois droites $\{ux+vy+wz=0\}$, $\{u'x+v'y+w'z=0\}$ et +$\{u''x+v''y+w''z=0\}$ dans $\mathbb{P}^2$ concourent si et seulement +si le déterminant +\[ +\left|\begin{matrix}u&v&w\\u'&v'&w'\\u''&v''&w''\\\end{matrix}\right| +\] +s'annule (en effet, il exprime le fait que la matrice dont il est le +déterminant a un noyau non trivial, ce qui revient exactement à +demander l'existence d'un point situé sur les trois droites à la +fois). + +Or chacune des conditions $\frac{\partial q}{\partial x}=0$, +$\frac{\partial q}{\partial y}=0$ et $\frac{\partial q}{\partial z}=0$ +définit une droite dans $\mathbb{P}^2$, à savoir $\{2 a_x\, x + b_z\, +y + b_y\, z = 0\}$, $\{b_z\, x + 2 a_y\, y + b_x\, z = 0\}$ et +$\{b_y\, x + b_x\, y + 2 a_z\, z = 0\}$, donc l'existence d'un point +singulier sur $C_q$ se traduit par l'annulation du déterminant +\[ +\left|\begin{matrix}2a_x&b_z&b_y\\b_z&2a_y&b_x\\b_y&b_x&2a_z\\\end{matrix}\right| +\] +qui (une fois développé ce déterminant, et divisé par $2$) est +exactement la condition proposée par l'énoncé. + +L'affirmation sur la rationalité vient du fait qu'un système +d'équations linéaires à coefficients dans $k^{\alg}$ (en l'occurrence +le système formé de $\frac{\partial q}{\partial x}=0$, $\frac{\partial + q}{\partial y}=0$ et $\frac{\partial q}{\partial z}=0$) a +automatiquement une solution dans $k$ (l'ensemble des solutions +sur $K$ étant un sous-$k$-espace vectoriel de $K^3$, et la dimension +d'un espace vectoriel ne dépendant pas du corps sur lequel on la +calcule). +\end{corrige} + +\medbreak + +On supposera maintenant, et jusqu'à la fin, que la conique est $C_q$ +\emph{lisse}, c'est-à-dire vérifie $4 a_x a_y a_z - a_x b_x^2 - a_y +b_y^2 - a_z b_z^2 + b_x b_y b_z \neq 0$ (cf. question (2)). + +\textbf{(3)} Sur $k^{\alg}$ (« géométriquement »), montrer que $C_q$ +ne contient aucune droite (i.e., montrer qu'il n'existe pas $l \in +k^{\alg}[x,y,z]$ homogène de degré $1$ tel que tous les points +géométriques de la droite $\{l=0\}$ soient dans $C_q$ ; indication : +si elle en contenait une alors on pourrait factoriser $q$ sous la +forme $ll'$, contredisant l'hypothèse qu'on vient de faire). En +déduire que $C_q$ ne peut jamais contenir trois points alignés +distincts. + +\begin{corrige} +Si $C_q$ contenait une droite $\{l=0\}$ avec $l$ un polynôme $l$ +homogène de degré $1$ (= forme linéaire) à coefficients +dans $k^{\alg}$, cela signifierait $q \in \mathfrak{I}(Z(l))$ (i.e., +« $q$ s'annule partout où $l$ s'annule »), donc $q$ appartiendrait à +l'idéal homogène (manifestement radical) engendré par $l$, donc $q$ +s'écrirait sous la forme $ll'$, avec $l'$ homogène de degré $1$, i.e., +la conique serait (géométriquement) réductible en une réunion de deux +droites. Or, dans cette condition, si $P$ est situé à l'intersection +des droites $\{l=0\}$ et $\{l'=0\}$, alors $\frac{\partial q}{\partial + x} = \frac{\partial (ll')}{\partial x} = l \frac{\partial + l'}{\partial x} + l' \frac{\partial l}{\partial x}$ s'annule en $P$, +et de même par rapport aux deux autres variables $y,z$. Le point $P$ +serait donc singulier, contredisant l'hypothèse de lissité sur $C_q$. + +La remarque introductive assure que si une conique coupe une droite en +trois points distincts, elle contient la droite tout entière, et on +vient de voir que ce n'est pas possible pour une conique lisse. Une +conique lisse ne contient donc jamais trois points alignés. +\end{corrige} + +\medbreak + +Dans les questions qui suivent, on va s'intéresser à une application +qui à un point de $\mathbb{P}^2$ associe une droite de $\mathbb{P}^2$ +dite « polarité » par rapport à la conique. + +Plus précisément, on appelle \textbf{droite polaire}, relativement +à $C_q$ (ou à $q$) d'un point $P_0 := (x_0:y_0:z_0)$ de $\mathbb{P}^2$ +(non nécessairement situé sur $C_q$) la droite $\{u_0 x + v_0 y + w_0 +z = 0\}$ dont les coefficients $u_0,v_0,w_0$ sont donnés par +$\frac{\partial q}{\partial x}$, $\frac{\partial q}{\partial y}$ et +$\frac{\partial q}{\partial z}$ respectivement, évalués en +$(x_0,y_0,z_0)$. + +\textbf{(4)} Pourquoi cette définition a-t-elle un sens ? (Autrement +dit, pourquoi $u_0,v_0,w_0$ ne s'annulent-ils pas simultanément, et +pourquoi la droite ne dépend-elle pas du choix des coordonnées +homogènes $(x_0,y_0,z_0)$ de $P_0$ ?) Montrer que, si $P_0$ et $P_1$ +sont deux points de $\mathbb{P}^2$, alors : + +\noindent\centerline{\fbox{\parbox{0.85\textwidth}{$P_1$ est sur la + droite polaire de $P_0$ si et seulement si $P_0$ est sur la + droite polaire de $P_1$}}} + +\noindent (« principe de réciprocité de la polarité ») ; on pourra +exprimer ce fait de comme une équation symétrique entre les +coordonnées homogènes $(x_0,y_0,z_0)$ de $P_0$ et celles +$(x_1,y_1,z_1)$ de $P_1$. Montrer que $P_0$ est sur $C_q$ si et +seulement si il est situé sur sa propre droite polaire. + +\begin{corrige} +Si $\frac{\partial q}{\partial x}$, $\frac{\partial q}{\partial y}$ et +$\frac{\partial q}{\partial z}$ s'annulent simultanément, on a vu +en (2) que $(x_0:y_0:z_0)$ est un point singulier de $C_q$, or on a +fait l'hypothèse qu'il n'y en a pas. Par ailleurs, si on change les +coordonnées homogènes du point $(x_0:y_0:z_0)$, cela revient à toutes +les multiplier par une constante non nulle, mais comme $\frac{\partial + q}{\partial x}$, $\frac{\partial q}{\partial y}$ et $\frac{\partial + q}{\partial z}$ sont des polynômes homogènes (en fait, des formes +linéaires...), cela multiplie chacun de $u_0,v_0,w_0$ par une +constante non nulle, et cela ne change pas la droite $\{u_0 x + v_0 y ++ w_0 z = 0\}$. La définition a donc bien un sens. + +Dire que $P_1 := (x_1:y_1:z_1)$ est sur la droite polaire de $P_0 := +(x_0:y_0:z_0)$ signifie que $2 a_x\, x_0\, x_1 + 2 a_y\, y_0\, y_1 + 2 +a_z\, z_0\, z_1 + b_x\, y_0\, z_1 + b_x\, z_0\, y_1 + b_y\, x_0\, z_1 ++ b_y\, z_0\, x_1 + b_z\, x_0\, y_1 + b_z\, y_0\, x_1 = 0$, ou, si on +préfère, +\[ +\left(\begin{matrix}x_1&y_1&z_1\\\end{matrix}\right) +\left(\begin{matrix}2a_x&b_z&b_y\\b_z&2a_y&b_x\\b_y&b_x&2a_z\\\end{matrix}\right) +\left(\begin{matrix}x_0\\y_0\\z_0\\\end{matrix}\right) = 0 +\] +et cette condition est manifestement symétrique en $P_0$ et $P_1$. + +Lorsque $P_1=P_0$, la condition devient $2a_x\, x_0^2 + 2a_y\, y_0^2 + +2a_z\, z_0^2 + 2b_x\, y_0\, z_0 + 2b_y\, x_0\, z_0 + 2b_z\, x_0\, y_0 += 0$, ce qui équivaut bien à $q=0$ en divisant par $2$ (ou, si on +préfère, on applique la question (1) pour la même conclusion). +\end{corrige} + +\textbf{(5)} Montrer que l'application envoyant un point de +$\mathbb{P}^2$ sur sa droite polaire définit une bijection des points +de $\mathbb{P}^2$ (géométriques ou rationnels) sur les droites de +$\mathbb{P}^2$ (géométriques ou rationnelles) : pour cela, on pourra +constater que l'application $(x_0,y_0,z_0) \mapsto (u_0,v_0,w_0)$ est +$k$-linéaire. Expliquer pourquoi cette application envoie trois +points alignés sur trois droites concourantes. + +\begin{corrige} +L'application +\[ +\left(\begin{matrix}x_0\\y_0\\z_0\\\end{matrix}\right) \mapsto +\left(\begin{matrix}2a_x&b_z&b_y\\b_z&2a_y&b_x\\b_y&b_x&2a_z\\\end{matrix}\right) +\left(\begin{matrix}x_0\\y_0\\z_0\\\end{matrix}\right) +\] +envoyant des coordonnées homogènes $(x_0,y_0,z_0)$ d'un point sur les +coefficients $(u_0,v_0,w_0)$ (soit $(\frac{\partial q}{\partial x}, +\frac{\partial q}{\partial y}, \frac{\partial q}{\partial z})$) +définissant sa droite polaire, est linéaire, et elle est bijective car +son déterminant est non nul, c'est justement l'hypothèse qu'on a +faite. Elle induit donc une bijection entre points de $\mathbb{P}^2$ +et droites de $\mathbb{P}^2$ (si $(x_0,y_0,z_0)$ et $(x_1,y_1,z_1)$ +ont la même droite polaire, alors $(u_0,v_0,w_0)$ et $(u_1,v_1,w_1)$ +sont proportionnelles, et quitte à multiplier par la bonne constante +on peut les supposer égales, donc $(x_0:y_0:z_0) = (x_1:y_1:z_1)$). +Par ailleurs, toujours parce qu'elle est linéaire, elle envoie trois +points alignés sur trois droites concourantes (puisque l'alignement +des points ou la concourance des droites s'exprime comme l'annulation +du déterminant $3\times 3$ de leurs coordonnées, et que les +déterminants se multiplient). +\end{corrige} + +\textbf{(6)} Montrer que si $P_0$ est un point géométrique situé sur +$C_q$, alors l'intersection de la droite polaire $D_0$ de $P_0$ avec +$C_q$ est réduite au seul point $P_0$. (S'il y avait un deuxième +point, on pourra montrer qu'il aurait forcément la même droite polaire +que $P_0$.) Expliquer pourquoi ce point $P_0$ est nécessairement +rationnel si $D_0$ l'est. + +\begin{corrige} +Soit $P_0$ sur $C_q$ et soit $D_0$ sa droite polaire. Supposons que +$D_0$ passe par un autre point $P_1$ de $C_q$ : alors le principe de +réciprocité assure que sa droite polaire $D_1$ passe par $P_0$, mais +aussi par $P_1$ puisque $P_1$ est sur $C_q$. Donc $D_0$ et $D_1$ +passent toutes les deux par $P_0$ et $P_1$, et comme deux points +distincts déterminent une droite, on a $D_0 = D_1$, donc $P_0 = P_1$ +puisqu'on a établi que la fonction envoyant un point sur sa droite +polaire est une bijection. + +Pour expliquer pourquoi le point $P_0$ est rationnel si $D_0$ l'est, +on peut soit se rappeler qu'on a défini une application $k$-linéaire +bijective $(x_0,y_0,z_0) \mapsto (u_0,v_0,w_0)$ à la question +précédente, ce qui montre que si $u_0,v_0,w_0$ sont dans $k$ alors +$x_0,y_0,z_0$ le sont, soit invoquer la remarque introductive (si une +équation quadratique à coefficients dans $k$ sur la droite projective +a un seul point géométrique, celui-ci est rationnel). +\end{corrige} + +\smallbreak + +On appelle \textbf{tangente} à $C_q$ en un point de $C_q$ la droite +polaire de ce point : on vient de voir qu'une droite tangente à $C_q$ +la rencontre en ce seul point. + +\textbf{(7)} Montrer qu'une droite $D$ de $\mathbb{P}^2$ est tangente +à $C_q$ si et seulement si elle la coupe en un seul point géométrique. +On pourra pour cela expliquer pourquoi on peut supposer que le point +est $(1{:}0{:}0)$ et la droite $\{z=0\}$, et simplifier l'équation la +conique dans ce cas. + +\begin{corrige} +On a vu dans la question précédente qu'une tangente à une conique +coupe celle-ci en un seul point. On veut montrer, réciproquement, que +si $D$ est une droite coupant $C_q$ en un seul point géométrique $P$, +alors elle lui est tangente. + +Or si $P$ est un point de $\mathbb{P}^2$ et $D$ une droite passant +par $P$, quitte à choisir un point $Q$ de $D$ différent de $P$ et à +compléter $P,Q$ en une base projective de $\mathbb{P}^2$, on peut +trouver une transformation projective envoyant $P$ sur $(1{:}0{:}0)$ +et $Q$ sur $(0{:}1{:}0)$ donc la droite $D$ sur $\{z=0\}$. Comme +cette transformation projective est une simple application linéaire +(inversible) sur les coordonnées homogènes et que la composition d'un +polynôme homogène de degré $2$ avec un tel changement de variables +linéaire est encore un polynôme homogène de degré $2$, elle transforme +une conique en une conique. De plus, elle agit sur le vecteur des +dérivées partielles de $q$ comme la matrice qui la représente +(notamment, une conique lisse est transformée en conique lisse). + +Bref, on peut montrer le résultat en supposant $P = (1{:}0{:}0)$ et $D += \{z=0\}$. L'intersection de $C_q$ avec $\{z=0\}$ est alors donnée, +en identifiant avec $\mathbb{P}^1$ la droite $\{z=0\}$ +de $\mathbb{P}^2$, par $a_x\, x^2 + b_z\, xy + a_y\, y^2 = 0$. Le +fait que $P$ soit situé sur $C_q$ se traduit par $a_x=0$. Il reste +donc simplement $b_z\, xy + a_y\, y^2 = 0$, soit $y(b_z\, x + a_y\, y) += 0$, qui définit la réunion du point $y=0$, soit exactement +$(1{:}0{:}0) = P$, et du point $b_z\, x + a_y\, y = 0$, soit +$(a_y:-b_z:0)$. Ce point coïncide avec $P$ exactement quand $b_z=0$, +ce qui revient exactement à dire que $\frac{\partial q}{\partial y}=0$ +en $(1,0,0)$, et comme par ailleurs $\frac{\partial q}{\partial x}=0$ +en $(1,0,0)$ (vu que $a_x=0$), cela revient bien à dire que la +tangente à $C_q$ en $P$ est la droite $D=\{z=0\}$. +\end{corrige} + +\textbf{(8)} Si $P_0$ est un point non situé sur $C_q$, montrer que +les droites tangentes à $C_q$ passant par $P_0$ sont +exactement\footnote{(Le sujet distribué comportait une faute de frappe + dans cette phrase : au lieu de « point d'intersection de $C_q$ avec + la droite polaire » il était écrit « point d'intersection de $P_0$ + avec la droite polaire ».)} les droites $P_0 M$ où $M$ est un point +d'intersection de $C_q$ avec la droite polaire $D$ de $P_0$. +Expliquer pourquoi il en existe, géométriquement, exactement deux. + +\begin{corrige} +Soit $D_0$ la droite polaire de $P_0$. Comme on a supposé que $P_0$ +n'est pas sur $C_q$, la droite $D_0$ n'est pas tangente à $C_q$ +(question (5)). Elle rencontre donc $C_q$ en deux points géométriques +distincts (question (7)), appelons-les $P_1$ et $P_2$. Soient +$D_1$ et $D_2$ les tangentes à $C_q$ par $P_1$ et $P_2$ +respectivement, c'est-à-dire, les droites polaires de $P_1$ et $P_2$ +respectivement. Elles sont distinctes l'une de l'autre par (5), et +distinctes de $D_0$ car $D_0$ n'est pas tangente à $C_q$. Comme +$P_1$ est sur $D_0$, par principe de réciprocité, $P_0$ est +sur $D_1$ : donc $D_1$ coïncide avec la droite $P_0 P_1$, et de même, +$D_2$ coïncide avec la droite $P_0 P_2$. Maintenant, s'il existait +une autre tangente $D$ à $C_q$ passant par $P_0$, en appelant $M$ le +point de tangente, $M$ serait sur $D_0$ puisque $P_0$ est sur $D$ +(principe de réciprocité), donc $M$ serait situé à la fois sur $C_q$ +et $D_0$, or on a dit que les deux points géométriques situés à la +fois sur $C_q$ et $D_0$ sont $P_0$ et $P_1$. +\end{corrige} + +\smallbreak + +On appelle \textbf{triangle autopolaire} (relativement à $C_q$ ou +à $q$) la donnée de trois points $P_0,P_1,P_2$ distincts de +$\mathbb{P}^2$ tels que la droite polaire de chacun soit la droite +reliant les deux autres. + +\textbf{(9)} Expliquer pourquoi on peut toujours trouver un triangle +autopolaire de points rationnels. À quelle condition sur les +coefficients de $q$ le triangle $(1{:}0{:}0),(0{:}1{:}0),(0{:}0{:}1)$ +est-il autopolaire ? En déduire que toute conique lisse s'écrit, +après une transformation projective (à coefficients dans $k$), sous la +forme $\{a_x\, x^2 + a_y\, y^2 + a_z\, z^2 = 0\}$ (on dit qu'elle est +\emph{diagonale}). + +\begin{corrige} +Soit $P_0$ un point rationnel de $\mathbb{P}^2$ \emph{non} situé +sur $C_k$ (un tel point existe d'après la question (3)) ; il n'est +donc pas situé sur sa droite polaire $D_0$. Soit $P_1$ un point +rationnel de la droite polaire $D_0$ de $P_0$ également \emph{non} +situé sur $C_k$ (même remarque) : il n'est donc pas situé sur sa +droite polaire $D_1$, et par ailleurs il est distinct de $P_0$ +(puisque situé sur $D_0$ alors que $P_0$ ne l'est pas) ; en revanche, +$P_0$ est situé sur $D_1$ puisque $P_1$ est sur $D_0$ (principe de +réciprocité). Soit enfin $P_2$ le point (rationnel) d'intersection +des droites (rationnelles) $D_0$ et $D_1$ : cette intersection est +bien définie car $D_0$ et $D_1$ sont distinctes (par (5)), et $P_2$ +est distinct à la fois de $P_0$ (car situé sur $D_0$ tandis que $P_0$ +ne l'est pas) et de $P_1$ (car situé sur $D_1$ tandis que $P_1$ ne +l'est pas) ; sa droite polaire $D_2$ passe par $P_0$ et $P_1$ car +$D_0$ et $D_1$ passent par $P_2$ (toujours par principe de +réciprocité), donc on a bien un triangle autopolaire. + +Dire que la droite polaire de $(1{:}0{:}0)$ passe par $(0{:}1{:}0)$ +signifie que $\frac{\partial q}{\partial y}$ s'annule en +$(1{:}0{:}0)$, c'est-à-dire $b_z = 0$. Pour les autres points on +trouve de même $b_x = 0$ et $b_y = 0$, et finalement le triangle +$(1{:}0{:}0),(0{:}1{:}0),(0{:}0{:}1)$ est autopolaire si et seulement +si $b_x = b_y = b_z = 0$ : c'est-à-dire que la forme quadratique $q$ +est diagonale (égale à $a_x\, x^2 + a_y\, y^2 + a_z\, z^2$). + +On a vu qu'on pouvait toujours trouver un triangle autopolaire. Comme +on peut par ailleurs (quitte à compléter n'importe comment en une base +projective) trouver une transformation projective l'envoyant sur +$(1{:}0{:}0),(0{:}1{:}0),(0{:}0{:}1)$, ceci met la conique sous forme +diagonale comme demandé. +\end{corrige} + +\textbf{(10)} Montrer le résultat suivant : si $A_0,A_1,A_2,A_3$ sont +quatre points distincts situés sur la conique $C_q$, et si on pose +$P_0 = A_0 A_3 \wedge A_1 A_2$ (c'est-à-dire : l'intersection de la +droite reliant $A_0$ et $A_3$ et de celle reliant $A_1$ et $A_2$) et +$P_1 = A_1 A_3 \wedge A_0 A_2$ et $P_2 = A_2 A_3 \wedge A_0 A_1$, +alors le triangle $P_0, P_1, P_2$ est autopolaire. Pour cela, on +pourra expliquer pourquoi on peut supposer que $A_0,A_1,A_2,A_3$ sont +$(1{:}0{:}0),(0{:}1{:}0),(0{:}0{:}1),(1{:}1{:}1)$ respectivement et +calculer à la fois les coordonnées de $P_0,P_1,P_2$ et des conditions +sur les coefficients de $q$. En déduire une construction, à la règle +seule. dans le plan projectif réel, de la droite polaire d'un point +par rapport à une conique donnée (en supposant qu'elle a effectivement +des points réels). + +\begin{corrige} +D'après la question (3), trois quelconques parmi les points +$A_0,A_1,A_2,A_3$ ne sont pas alignés. Ils forment donc une base +projective du plan. Quitte à appliquer une transformation projective, +on peut supposer que ce sont +$(1{:}0{:}0),(0{:}1{:}0),(0{:}0{:}1),(1{:}1{:}1)$. On calcule alors +$P_0=(0{:}1{:}1)$ et $P_1=(1{:}0{:}1)$ et $P_2=(1{:}1{:}0)$. Par +ailleurs, le fait que +$(1{:}0{:}0),(0{:}1{:}0),(0{:}0{:}1),(1{:}1{:}1)$ appartiennent +à $C_q$ impose les conditions $a_x = a_y = a_z = b_x+b_y+b_z = 0$ : +les dérivées partielles de $q$ sont alors $\frac{\partial q}{\partial + x} = b_z\, y + b_y\, z$ et $\frac{\partial q}{\partial y} = b_x\, z ++ b_z\, x$ et $\frac{\partial q}{\partial z} = b_y\, x + b_x\, y$. La +droite polaire de $P_0=(0{:}1{:}1)$ est alors donnée par $-b_x x + b_x +y + b_x z = 0$, autant dire $-x + y + z = 0$, qui est bien la droite +$P_1P_2$, et le calcul est le même pour les deux autres points (après +permutation cyclique des coordonnées). + +On en déduit la construction suivante de la droite polaire d'un +point $P_0$ (par rapport à une conique réelle ayant effectivement des +points réels) : tracer deux droites passant par $P_0$ et coupant la +conique en deux points réels chacune, appeler $A_0,A_3$ les points de +la conique sur l'une d'entre elles, et $A_1,A_2$ ceux sur l'autre ; +alors en appelant $P_1 = A_1 A_3 \wedge A_0 A_2$ et $P_2 = A_2 A_3 +\wedge A_0 A_1$, la droite polaire de $P_0$ est la droite $P_1 P_2$ +(c'est-à-dire $(A_1 A_3 \wedge A_0 A_2) \vee (A_2 A_3 \wedge A_0 +A_1)$). + +(Bien sûr, si on se permet de tracer des tangentes à la conique +passant par $P_0$, on peut faire plus simple : appeler $P_1,P_2$ les +deux points de tangence aux deux tangentes à $C_q$ par $P_0$, et alors +la polaire $D_0$ de $P_0$ est la droite les reliant, comme prouvé +en (8). Mais attention, ces points ne sont pas forcément réels : +imaginer le cas où $P_0$ est intérieur à un cercle.) +\end{corrige} + +\medbreak + +\textbf{(11)} Énumérer les points rationnels $(x:y:z)$ de la conique +$\{x^2 + y^2 + z^2 = 0\}$ dans $\mathbb{P}^2$ sur le corps fini +$\mathbb{F}_3$ à trois éléments. Combien y en a-t-il ? + +\begin{corrige} +Il est facile d'énumérer toutes les possibilités en se rappelant que +les seuls carrés dans $\mathbb{F}_3$ sont $0$ et $1$ : la seule +possibilité pour en avoir trois qui somment à $0$ est $1+1+1=0$ (vu +que $0+0+0=0$ ne donnera pas un point de l'espace projectif). Les +points de la conique sont alors +$(1{:}1{:}1),(1{:}1{:}2),(1{:}2{:}1),(1{:}2{:}2)$ (on se rappelle que +les points sont définis à multiplication près par une constante, donc +$(2{:}1{:}1)$, par exemple, coïncide avec $(1{:}2{:}2)$). Il y en a +quatre. + +(En fait, on peut utiliser un paramétrage rationnel pour montrer que +toute conique projective lisse sur un corps $k$ de +caractéristique $\neq 2$ est isomorphe à $\mathbb{P}^1$ dès qu'elle a +un point rationnel ; cette dernière hypothèse est toujours vérifiée +sur un corps fini $\mathbb{F}_q$, donc elle a toujours $q+1$ points +rationnels.) +\end{corrige} + + +% +% +% +\end{document} |