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diff --git a/exercices.tex b/exercices.tex new file mode 100644 index 0000000..ec90648 --- /dev/null +++ b/exercices.tex @@ -0,0 +1,1122 @@ +%% This is a LaTeX document. Hey, Emacs, -*- latex -*- , get it? +\documentclass[12pt,a4paper]{article} +\usepackage[francais]{babel} +\usepackage[utf8]{inputenc} +\usepackage[T1]{fontenc} +%\usepackage{ucs} +\usepackage{times} +% A tribute to the worthy AMS: +\usepackage{amsmath} +\usepackage{amsfonts} +\usepackage{amssymb} +\usepackage{amsthm} +% +\usepackage{mathrsfs} +\usepackage{wasysym} +\usepackage{url} +% +\usepackage{graphics} +\usepackage[usenames,dvipsnames]{xcolor} +\usepackage{tikz} +\usetikzlibrary{matrix,calc} +\usepackage{hyperref} +% +%\externaldocument{notes-accq205}[notes-accq205.pdf] +% +\theoremstyle{definition} +\newtheorem{comcnt}{Tout} +\newcommand\thingy{% +\refstepcounter{comcnt}\smallskip\noindent\textbf{\thecomcnt.} } +\newcommand\exercice{% +\refstepcounter{comcnt}\bigskip\noindent\textbf{Exercice~\thecomcnt.}\par\nobreak} +\renewcommand{\qedsymbol}{\smiley} +% +\newcommand{\id}{\operatorname{id}} +\newcommand{\alg}{\operatorname{alg}} +\newcommand{\ord}{\operatorname{ord}} +\newcommand{\val}{\operatorname{val}} +\newcommand{\divis}{\operatorname{div}} +% +\DeclareUnicodeCharacter{00A0}{~} +% +\DeclareMathSymbol{\tiret}{\mathord}{operators}{"7C} +\DeclareMathSymbol{\traitdunion}{\mathord}{operators}{"2D} +% +\DeclareFontFamily{U}{manual}{} +\DeclareFontShape{U}{manual}{m}{n}{ <-> manfnt }{} +\newcommand{\manfntsymbol}[1]{% + {\fontencoding{U}\fontfamily{manual}\selectfont\symbol{#1}}} +\newcommand{\dbend}{\manfntsymbol{127}}% Z-shaped +\newcommand{\danger}{\noindent\hangindent\parindent\hangafter=-2% + \hbox to0pt{\hskip-\hangindent\dbend\hfill}} +% +\newcommand{\spaceout}{\hskip1emplus2emminus.5em} +\newif\ifcorrige +\corrigetrue +\newenvironment{corrige}% +{\ifcorrige\relax\else\setbox0=\vbox\bgroup\fi% +\smallbreak\noindent{\underbar{\textit{Corrigé.}}\quad}} +{{\hbox{}\nobreak\hfill\checkmark}% +\ifcorrige\par\smallbreak\else\egroup\par\fi} +% +% +% +\begin{document} +\ifcorrige +\title{ACCQ205\\Exercices — Corrigé\\{\normalsize Courbes algébriques}} +\else +\title{ACCQ205\\Exercices\\{\normalsize Courbes algébriques}} +\fi +\author{David A. Madore} +\maketitle + +{\footnotesize +\immediate\write18{sh ./vc > vcline.tex} +\begin{center} +Git: \input{vcline.tex} +\end{center} +\immediate\write18{echo ' (stale)' >> vcline.tex} +\par} + +\pretolerance=8000 +\tolerance=50000 + +\exercice + +Dans $\mathbb{P}^2(\mathbb{R})$, quelle est l'intersection de la +droite reliant les points $(1{:}1{:}1)$ et $(1{:}2{:}3)$ et de celle +reliant les points $(0{:}1{:}3)$ et $(1{:}0{:}0)$ ? + +Traduire cette même question et son résultat dans le plan affine +$\mathbb{A}^2(\mathbb{R})$ (c'est-à-dire $\mathbb{R}^2$) vu comme +l'ensemble des points $(1:x:y)$ de $\mathbb{P}^2(\mathbb{R})$. + +\begin{corrige} +En notant $[u:v:w]$ (pour $u,v,w$ non tous nuls) la droite d'équation +$ux+vy+wz = 0$ dans $\mathbb{P}^2$, on rappelle que la droite reliant +$(x:y:z)$ et $(x':y':z')$ distincts est $[yz'-zy' : zx'-xz' : + xy'-yx']$, et que l'intersection des droites distinctes $[u:v:w]$ et +$[u':v':w']$ est $[vw'-wv' : wu'-uw' : uv'-vu']$. + +Avec ces formules, on trouve que $(1{:}1{:}1) \vee (1{:}2{:}3) = +[1{:}-2{:}1]$ (on note $p \vee q$ pour la droite reliant $p$ et $q$) +et que $(0{:}1{:}3) \vee (1{:}0{:}0) = [0{:}3{:}-1]$ et finalement que +le point recherché est $[1{:}-2{:}1] \wedge [0{:}3{:}-1] = +(-1{:}1{:}3)$ (en notant $\ell \wedge m$ pour l'intersection des +droites $\ell$ et $m$). Ce point est bien sûr aussi égal, par +exemple, à $(1{:}-1{:}-3)$ ou $(-2{:}2{:}6)$. + +En affine, la question demande l'intersection de la droite reliant +$(1,1)$ et $(2,3)$ et de la droite de pente $3$ passant par $(0,0)$. +(La « pente » de la droite affine $y = ax+b$ est le nombre $a$, qu'on +peut voir comme le point à l'infini $(0:1:a)$ de sa complétée +projective.) La réponse est que les droites en question se coupent +en $(-1,-3)$. +\end{corrige} + + +% +% +% + +\exercice + +Donner l'équation de l'homographie (= transformation projective) $f +\colon \mathbb{P}^1 \to \mathbb{P}^1$ sur, disons, les réels, qui +envoie $0$ sur $0$ et $1$ sur $1$ et $2$ sur $3$. Quelle est l'image +de $\infty$ par cette homographie, et quel point s'envoie sur $\infty$ +par elle ? + +\begin{corrige} +L'énoncé suppose implicitement qu'on identifie $\mathbb{P}^1$ au +complété de $\mathbb{A}^1$ par l'ajout d'un point à l'infini. Notons +$t$ la coordonnée sur $\mathbb{A}^1$ et fixons les coordonnées de +$\mathbb{P}^1$ en identifiant le point $t$ de $\mathbb{A}^1$ avec le +point $(t{:}1)$ de $\mathbb{P}^1$ et le point à l'infini avec +$(1{:}0)$ (c'est-à-dire que $(u:v)$ de $\mathbb{P}^1$ s'identifie avec +$u/v$ dans $\mathbb{A}^1$ sauf lorsque $v=0$ auquel cas on le +note $\infty$). + +On cherche un élément de $\mathit{PGL}_2$, c'est-à-dire une matrice +inversible $\begin{pmatrix}a&b\\c&d\\ \end{pmatrix}$ (modulo +homothéties). Compte tenu de l'identification qu'on vient de faire, +cela signifie qu'on cherche $f$ sous la forme $f(t) = +\frac{at+b}{ct+d}$ (avec $ad-bc \neq 0$ pour assurer l'inversibilité, +et en gardant à l'esprit que ceci ne fixera $a,b,c,d$ qu'à +multiplication près par une constante). + +La contrainte $f(0)=0$ se traduit alors par $b=0$, la contrainte +$f(1)=1$ se traduit par $a+b=c+d$, et la contrainte $f(2)=3$ se +traduit par $2a+b=3(2c+d)$. En résolvant le système (avec une +contrainte arbitraire pour fixer l'homogénéité sans importance), on +trouve $\begin{pmatrix}3&0\\-1&4\\ \end{pmatrix}$ (modulo +multiplication par constantes), soit $f(t) = 3t/(-t+4)$. Le point +$\infty$ s'envoie alors sur $-3$ (c'est-à-dire que $(1{:}0)$ s'envoie +sur $(3{:}-1)$), et $4$ s'envoie sur $\infty$ (c'est-à-dire que +$(4{:}1)$ s'envoie sur $(1{:}0)$). +\end{corrige} + + +% +% +% + +\exercice + +(a) Combien y a-t-il de points dans $\mathbb{P}^3(\mathbb{F}_q)$ ? +(b) Combien y a-t-il de couples de points distincts de +$\mathbb{P}^3(\mathbb{F}_q)$ ? (c) Étant donnée une droite $\ell$ de +$\mathbb{P}^3(\mathbb{F}_q)$, combien de couples de points distincts +sont situés dessus ? (d) En déduire le nombre de droites dans +$\mathbb{P}^3(\mathbb{F}_q)$. (e) Indépendamment des questions +(b) à (d), combien y a-t-il de plans dans +$\mathbb{P}^3(\mathbb{F}_q)$ ? + +\begin{corrige} +(a) On a vu que c'est $\frac{q^4-1}{q-1} = q^3 + q^2 + q + 1$ (ce qui + s'écrit encore, si on préfère, $(q+1) (q^2+1)$). + +(b) On en déduit que c'est $(q^3 + q^2 + q + 1) (q^3 + q^2 + q)$ (ce + qui s'écrit encore, si on préfère, $q(q+1)(q^2+1)(q^2+q+1)$). + +(c) Chaque droite de $\mathbb{P}^3(\mathbb{F}_q)$ est elle-même un + $\mathbb{P}^1(\mathbb{F}_q)$, donc elle a $q+1$ points, et $q(q+1)$ + couples de points distincts. + +(d) Chaque couple de points distincts de $\mathbb{P}^3(\mathbb{F}_q)$ + détermine une unique droite, laquelle s'obtient de $q(q+1)$ manières + différentes : il y a donc $[q(q+1)(q^2+1)\penalty0 + (q^2+q+1)]/[q(q+1)] = (q^2+1)(q^2+q+1) = q^4 + q^3 + 2q^2 + q + 1$ + droites distinctes dans $\mathbb{P}^3(\mathbb{F}_q)$. + +(e) La dualité projective met en correspondance les plans de + $\mathbb{P}^2$ avec les points du $\mathbb{P}^2$ dual. Notamment, + les plans de $\mathbb{P}^3(\mathbb{F}_q)$ sont en même nombre que + ses points, c'est-à-dire $q^3 + q^2 + q + 1$. +\end{corrige} + + +% +% +% + +\exercice + +On souhaite démontrer de façon calculatoire le théorème suivant +(théorème de Desargues) : si $A,B,C$ et $A',B',C'$ sont deux triangles +(= triplets de points non alignés) dans $\mathbb{P}^2$ tels que $AA'$, +$BB'$ et $CC'$ concourent en un point $O$, alors les points $U := BC +\wedge B'C'$ (point d'intersection des droites $BC$ et $B'C'$) et $V +:= CA \wedge C'A'$ et $W := AB \wedge A'B'$ sont alignés. (Comme +d'habitude en géométrie projective, on suppose tacitement que les +points sont en position suffisamment générale, c'est-à-dire que toutes +les paires de points qu'on a reliés pour former une droite sont +distinctes, et que toutes les paires de droites qu'on a intersectées +sont aussi distinctes.) + +\begin{figure}[h] +\begin{center} +\begin{tikzpicture}[line cap=round,line join=round,x=1.0cm,y=1.0cm,extended line/.style={shorten >=-#1,shorten <=-#1},extended line/.default=0.5cm] +%% \clip(-3.43,-5.04) rectangle (4.25,0.85); +%% \draw [domain=-3.43:4.25] plot(\x,{(-0-1.69*\x)/-1.38}); +%% \draw [domain=-3.43:4.25] plot(\x,{(-0-1.96*\x)/1.19}); +%% \draw [domain=-3.43:4.25] plot(\x,{(-0-2.4*\x)/-0.02}); +%% \draw [domain=-3.43:4.25] plot(\x,{(-4.73-0.27*\x)/2.57}); +%% \draw [domain=-3.43:4.25] plot(\x,{(--2.9-0.44*\x)/-1.21}); +%% \draw [domain=-3.43:4.25] plot(\x,{(--3.28--0.71*\x)/-1.36}); +%% \draw [domain=-3.43:4.25] plot(\x,{(-14.02--1.17*\x)/4.67}); +%% \draw [domain=-3.43:4.25] plot(\x,{(--6.32-1.33*\x)/-1.62}); +%% \draw [domain=-3.43:4.25] plot(\x,{(--11.99--0.15*\x)/-3.05}); +%% \draw [domain=-3.43:4.25] plot(\x,{(--9.7-2.9*\x)/-0.07}); +\begin{scriptsize} +\coordinate (O) at (0,0); +\coordinate (A) at (-1.38,-1.69); +\coordinate (B) at (1.19,-1.96); +\coordinate (C) at (-0.02,-2.4); +\coordinate (Aprime) at (-3.08,-3.78); +\coordinate (Bprime) at (1.59,-2.61); +\coordinate (Cprime) at (-0.03,-3.93); +\coordinate (W) at (3.29,-2.18); +\coordinate (U) at (3.31,-1.19); +\coordinate (V) at (3.24,-4.1); +\draw[extended line=0.5cm] (O)--(Aprime); +\draw[extended line=0.5cm] (O)--(Bprime); +\draw[extended line=0.5cm] (O)--(Cprime); +\draw[color=black!50!red,extended line=0.5cm] (A)--(W); +\draw[color=black!50!red,extended line=0.5cm] (Aprime)--(W); +\draw[color=black!50!red,extended line=0.5cm] (A)--(V); +\draw[color=black!50!red,extended line=0.5cm] (Aprime)--(V); +\draw[color=black!50!red,extended line=0.5cm] (C)--(U); +\draw[color=black!50!red,extended line=0.5cm] (Cprime)--(U); +\draw[color=black!50!blue,extended line=0.5cm] (U)--(V); +\fill [color=blue] (O) circle (1.5pt); +\draw[color=blue] (0.11,0.17) node {$O$}; +\fill [color=red] (A) circle (1.5pt); +\draw[color=red] (-1.27,-1.52) node {$A$}; +\fill [color=red] (B) circle (1.5pt); +\draw[color=red] (1.3,-1.79) node {$B$}; +\fill [color=red] (C) circle (1.5pt); +\draw[color=red] (0.09,-2.23) node {$C$}; +\fill [color=red] (Aprime) circle (1.5pt); +\draw[color=red] (-2.97,-3.61) node {$A'$}; +\fill [color=red] (Bprime) circle (1.5pt); +\draw[color=red] (1.7,-2.43) node {$B'$}; +\fill [color=red] (Cprime) circle (1.5pt); +\draw[color=red] (0.09,-3.76) node {$C'$}; +\fill (W) circle (1.5pt); +\draw (3.41,-2) node {$W$}; +\fill (U) circle (1.5pt); +\draw (3.42,-1.01) node {$U$}; +\fill (V) circle (1.5pt); +\draw (3.35,-3.92) node {$V$}; +\end{scriptsize} +\end{tikzpicture} +\end{center} +\end{figure} + +(a) Expliquer pourquoi on peut trouver des coordonnées telles que +$A=(1{:}0{:}0)$, $B=(0{:}1{:}0)$, $C=(0{:}0{:}1)$ et $O=(1{:}1{:}1)$. + +(b) Expliquer pourquoi les coordonnées de $A',B',C'$ sont alors de la +forme $A' = (a:u:u)$, $B' = (v:b:v)$ et $C' = (w:w:c)$. + +(c) Calculer les coordonnées de $U,V,W$. + +(d) Conclure. + +(e) Indépendamment de ce qui précède, quel est l'énoncé dual du +théorème de Desargues ? + +\begin{corrige} +(a) On a supposé $ABC$ non alignés, $OAB$ non alignés (implicitement + en disant que $AA'$ et $BB'$ concourent), $OBC$ non alignés et $OCA$ + non alignés. On a donc affaire à une base projective + de $\mathbb{P}^2$, et quitte à choisir les coordonnées, on peut + supposer qu'il s'agit de la base standard. + +(b) Le point $A'$ est sur la droite $OA = [0{:}1{:}-1]$, c'est-à-dire + que ses deux dernières coordonnées sont égales : on peut donc + l'écrire $(a:u:u)$ (avec $a,u$ non simultanément nuls). Les deux + autres cas sont symétriques. + +(c) La droite $BC$ est $[1{:}0{:}0]$, et la droite $B'C'$ est $[bc - + vw : -cv + vw : -bw + vw]$ (on peut se dispenser de calculer la + première coordonnée), ce qui donne $U := BC \wedge B'C' = (0 : bw - + vw : -cv + vw)$. Les deux autres s'obtiennent alors en appliquant + la permutation cyclique évidente, soit $V = (-aw + wu : 0 : cu - + wu)$ et $W = (av - uv : -bu + uv : 0)$. + +(d) Il s'agit de vérifier l'annulation du déterminant +\[ +\left| +\begin{matrix} +0&-aw+wu&av-uv\\ +bw-vw&0&-bu+uv\\ +-cv+vw&cu-wu&0\\ +\end{matrix} +\right| +\] +ce qui peut se faire directement ou en remarquant que $u$ fois les +coordonnées trouvées pour $U$ plus $v$ fois celles pour $V$ plus $w$ +fois celles pour $W$ donne zéro. + +(e) L'énoncé dual obtenu en échangeant mécaniquement points et droites +est : si $\alpha,\beta,\gamma$ et $\alpha',\beta',\gamma'$ sont deux +triangles dans $\mathbb{P}^2$ donnés par des triplets de droites cette +fois, tels que les points d'intersection $\alpha\wedge\alpha'$, +$\beta\wedge\beta'$ et $\gamma\wedge\gamma'$ soient alignées selon une +droite $\ell$, alors les droites $p := (\beta\wedge\gamma) \vee +(\beta'\wedge\gamma')$ (droite reliant les points d'intersection +$\beta\wedge\gamma$ et $\beta'\wedge\gamma'$) et $q := +(\gamma\wedge\alpha) \vee (\gamma'\wedge\alpha')$ et $r := +(\alpha\wedge\beta) \vee (\alpha'\wedge\beta')$ sont concourantes. + +Mais on peut le reformuler : en appelant $A,B,C$ les sommets du +triangle de côtés $\alpha,\beta,\gamma$, c'est-à-dire $A := +\beta\wedge\gamma$ et $B := \gamma\wedge\alpha$ et $C := +\alpha\wedge\beta$, et de même $A',B',C'$ les sommets de +$\alpha',\beta',\gamma'$, alors l'énoncé de Desargues dual est : si +$A,B,C$ et $A',B',C'$ sont deux triangles dans $\mathbb{P}^2$ tels que +les points $U := BC \wedge B'C'$ (point d'intersection des droites +$BC$ et $B'C'$) et $V := CA \wedge C'A'$ et $W := AB \wedge A'B'$ +soient alignés, alors $AA'$, $BB'$ et $CC'$ concourent en un +point $O$. Il s'agit précisément de la réciproque du théorème de +Desargues tel que nous l'avons énoncé. + +Autrement dit, en démontrant le théorème de Desargues, nous avons +aussi démontré sa réciproque (puisque celle-ci s'obtient en appliquant +Desargues dans le plan projectif dual). +\end{corrige} + + +% +% +% + +\exercice + +Donner des équations (c'est-à-dire, écrire comme un fermé de Zariski) +de la droite de $\mathbb{P}^3$ sur $\mathbb{R}$ qui passe par les +points $(1{:}2{:}3{:}4)$ et $(4{:}1{:}2{:}3)$. (On notera +$(t{:}x{:}y{:}z)$ les coordonnées homogènes sur $\mathbb{P}^3$.) Le +point $(3{:}4{:}1{:}2)$ est-il situé dessus ? + +\begin{corrige} +Traduisons le problème comme un problème d'algèbre linéaire : on +considère $V$ le plan vectoriel (= sous-espace vectoriel de +dimension $2$) engendré par les deux vecteurs $(1,2,3,4)$ et +$(4,1,2,3)$ de $\mathbb{R}^4$, et on cherche à trouver un système +générateur (et tant qu'à faire, une base) de l'ensemble $V^\perp$ des +formes linéaires sur $\mathbb{R}^4$ s'annulant sur $V$ (qu'on peut +voir comme des polynômes homogènes de degré $1$ en $t,x,y,z$ si l'on +veut). Si on note $s,u,v,w$ les coordonnées (coefficients devant +$t,x,y,z$) d'une telle forme linéaire, on cherche donc à résoudre +$s+2u+3v+4w=0$ et $4s+u+2v+3w=0$, ce système étant évidemment +sous-déterminé (puisque $V^\perp$ est de dimension $2$) mais on +cherche à trouver une base de son espace de solutions. On peut par +exemple trouver pour $(s,u,v,w)$ les solutions $(1,0,13,-10)$ et +$(0,1,-2,1)$ ou encore $(-\frac{1}{7}, -\frac{10}{7}, 1, 0)$ et +$(-\frac{2}{7}, -\frac{13}{7}, 0, 1)$ (par exemple calculées en +mettant la matrice $\begin{pmatrix}1&2&3&4\\4&1&2&3\\ \end{pmatrix}$ +sous forme échelonnée), ou n'importe quels deux vecteurs non +colinéaires vérifiant le système qu'on a écrit (tout autre élément +étant alors combinaison des deux qu'on a choisis). + +Mettons qu'on prenne $(1,0,13,-10)$ et $(0,1,-2,1)$ : ceci permet +d'écrire que la droite passant par $(1{:}2{:}3{:}4)$ et +$(4{:}1{:}2{:}3)$ a pour équations $t + 13y - 10z = 0$ et $x - 2y + z += 0$ (encore une fois, n'importe quelle autre équation sera dans le +sous-$\mathbb{R}$-espace vectoriel, et \emph{a fortiori} dans l'idéal, +engendré par ces deux équations choisies). + +Savoir si le point $(3{:}4{:}1{:}2)$ est situé sur la droite en +question se vérifie alors sur ces équations : la réponse est +manifestement non. (On pouvait aussi tester directement l'alignement +de $(3{:}4{:}1{:}2)$ avec $(1{:}2{:}3{:}4)$ et $(4{:}1{:}2{:}3)$ en +testant si le vecteur $(3,4,1,2)$ apartient à l'image de la matrice +$4\times 2$ transposée de +$\begin{pmatrix}1&2&3&4\\4&1&2&3\\ \end{pmatrix}$, ou encore si la +matrice $4\times 3$ ayant ces trois vecteurs comme colonnes a un +rang $\leq 2$, et la réponse est non quelle que soit la manière dont +la question est tournée.) +\end{corrige} + + +% +% +% + +\exercice\label{exercice-circular-points-at-infinity} + +Soient $x_0,y_0,r$ des réels avec $r>0$. Soit $C := \{(x,y) \mid +(x-x_0)^2 + (y-y_0)^2 = r^2\} \subseteq \mathbb{A}^2$ le cercle de +centre $(x_0,y_0)$ et de rayon $r$ vu comme un fermé de Zariski de +$\mathbb{A}^2$ sur $\mathbb{R}$. On voit maintenant $\mathbb{A}^2$ +dans $\mathbb{P}^2$, dont les coordonnées seront notées $(T:X:Y)$ en +identifiant le point $(x,y)$ de $\mathbb{A}^2$ avec $(1:x:y)$ de +$\mathbb{P}^2$. Déterminer l'équation du complété projectif $C^+ +\subseteq \mathbb{P}^2$ de $C$. Quels sont les points à l'infini +de $C^+$ (« à l'infini » s'entendant par rapport au $\mathbb{A}^2$ +dont on est parti) ? + +Commenter l'affirmation : « en géométrie projective, tous les cercles +euclidiens passent par deux mêmes points géométriques situés à +l'infini (les \emph{points cycliques}) ». + +\begin{corrige} +Il s'agit d'homogénéiser l'équation $(x-x_0)^2 + (y-y_0)^2 - r^2 = 0$. +Pour cela, on remplace $x$ par $X/T$ et $y$ par $Y/T$ et on multiplie +par $T^2$ pour chasser les dénominateurs. On obtient ainsi l'équation +projective : $(X-x_0 T)^2 + (Y-y_0 T)^2 - r^2 T^2 = 0$, ou, si on +préfère, $X^2 + Y^2 - 2 x_0 TX - 2 y_0 TY + (x_0^2+y_0^2-r^2) T^2 = +0$ ($*$). Le fermé de Zariski $C^+ \subseteq \mathbb{P}^2$ est celui +défini par l'équation qu'on vient d'écrire. + +Ses points à l'infini sont le fermé de Zariski défini par les deux +équations ($*$) et $T=0$ (cette dernière définissant la droite à +l'infini). L'idéal qu'elles engendrent est donc aussi celui engendré +par $T=0$ et $X^2 + Y^2 = 0$ (autrement dit, on peut remplacer $T$ +par $0$ dans l'équation ($*$)). Sur les complexes (où l'équation $X^2 ++ Y^2 = 0$ se factorise en $(X+iY)(X-iY) = 0$, donc réunion de deux +droites complexes conjuguées), on obtient les deux points conjugués $I +:= (0{:}1{:}i)$ et $J := (0{:}1{:}-i)$ (ce sont bien sûr les mêmes que +$I = (0{:}i{:}-1)$ et $J = (0{:}i{:}1)$ respectivement, ou toutes +sortes d'autres manières de les écrire). + +Ces points (\emph{points cycliques}) ne dépendent pas du cercle dont +on est parti. Il est donc légitime de dire que tous les cercles +passent par deux mêmes points géométriques $I,J$ situés à l'infini +(points à l'infini de pente $i$ et $-i$ respectivement), même si c'est +un léger abus d'identifier le cercle euclidien avec le complété +projectif qu'on a pris. +\end{corrige} + + +% +% +% + +\exercice + +L'idéal $I$ de $\mathbb{C}[x,y]$ engendré par $xy,y^2$ est-il +radical ? Si non, calculer $\sqrt{I}$. (On pourra chercher à savoir +quel est $Z(I) \subseteq \mathbb{A}^2$.) + +\begin{corrige} +On peut soit raisonner algébriquement, soit raisonner géométriquement. + +Le raisonnement algébrique est le suivant. On a $y \not\in I$ car $y$ +ne peut pas s'écrire sous la forme $g xy + h y^2$ comme on le voit en +considérant le terme en $y$ dans ce produit ; pourtant, $y^2 \in I$ : +ceci montre que $I$ n'est pas radical. Le radical $\sqrt{I}$ doit +contenir $y$ (puisqu'une certaine puissance $y^2$ de $y$ appartient +à $I$), autrement dit, $\sqrt{I} \supseteq (y)$. Mais par ailleurs on +a $(y) \supseteq I$ car les générateurs de $I$ sont tous dans $(y)$. +Or $(y)$ est un idéal radical (car le quotient $\mathbb{C}[x,y]/(y) = +\mathbb{C}[x]$ est un anneau de polynômes sur un corps, donc intègre, +et notamment réduit) ; bref, $(y)$ est un idéal radical contenant $I$, +mais comme le radical de $I$ est le \emph{plus petit} idéal radical +contenant $I$, on a $(y) \supseteq \sqrt{I}$. Bref, on a $\sqrt{I} = +(y)$. + +Faisons maintenant le raisonnement géométrique. L'ensemble $Z(I)$ des +$(x,y) \in \mathbb{C}^2$ tels que $xy=0$ et $y^2=0$ coïncide +manifestement avec la droite $y=0$ : en effet, $y=0$ implique $xy=0$ +et $y^2=0$, mais réciproquement, $y^2=0$ implique $y=0$. Donc $Z(I) +:= Z(xy,y^2) = Z(y)$ est l'axe des abscisses $\{y=0\}$, que nous +noterons désormais $D$. L'idéal $\mathfrak{I}(D)$ des polynômes +s'annulant sur $D$ est radical (comme $\mathfrak{I}$ de quelque chose) +et il vaut $(y)$ (la restriction du polynôme à $D$ revient à oublier +les termes en $y$). C'est donc que $I$ n'est pas radical (le +Nullstellensatz fort assure qu'il n'y a qu'un seul idéal radical $J$ +qui puisse vérifier $Z(J) = D$, à savoir $\mathfrak{I}(D)$). Mais on +peut a mieux : $\mathfrak{I}(D)$ est le plus petit idéal radical +contenant $I$ (puisque $I \subseteq J$ implique $D = Z(I) \supseteq +Z(J)$ donc $\mathfrak{I}(D) \subseteq \mathfrak{I}(Z(J))$ c'est-à-dire +$\mathfrak{I}(D) \subseteq J$ si $J$ est radical par le +Nullstellensatz) ; bref, $\sqrt{I} = \mathfrak{I}(D) = (y)$. +\end{corrige} + + +% +% +% + +\exercice + +Soit $M \in \mathit{PGL}_3(\mathbb{R})$ une transformation projective +du plan projectif $\mathbb{P}^2$ sur les réels. On appellera $I := +(0{:}1{:}i)$ et $J := (0{:}1{:}-i)$ les « points cycliques à +l'infini » (cf. exercice \ref{exercice-circular-points-at-infinity}, +qu'il n'est pas nécessaire d'avoir traité), deux points complexes +de $\mathbb{P}^2$. On voit $\mathbb{A}^2$ dans $\mathbb{P}^2$ en +identifiant le point $(x,y)$ de $\mathbb{A}^2$ au point $(1:x:y)$ +de $\mathbb{P}^2$ ; et on munit $\mathbb{A}^2$ sur les réels de sa +structure euclidienne usuelle pour les coordonnées qu'on vient de +dire, c'est-à-dire que le carré de la distance entre $(x_1,y_1)$ et +$(x_2,y_2)$ est $(x_1-x_2)^2 + (y_1-y_2)^2$. + +Montrer qu'il y a équivalence entre : +\begin{itemize} +\item la transformation projective $M$ fixe le point $I$, +\item la transformation projective $M$ fixe chacun des points + complexes $I$ et $J$, +\item la transformation projective $M$ définit une similitude directe + du plan euclidien (c'est-à-dire, préserve les angles et + l'orientation). +\end{itemize} + +\begin{corrige} +Supposons d'abord que $M$ fixe $I$. Elle doit alors fixer aussi le +point $J$ puisque ce dernier est le conjugué complexe de $I$ et que +$M$ est à coordonnées réelles. Ceci démontre l'équivalence entre les +deux premières propriétés. Par ailleurs, si elles sont vérifiées, +alors $M$ doit aussi envoyer la droite $\ell_\infty := IJ$ sur +elle-même, qui est la « droite à l'infini » (caractérisée par +l'annulation de la première coordonnée homogène) complémentaire du +$\mathbb{A}^2$ qu'on a fixé ; cette condition d'envoyer $\ell_\infty$ +sur elle-même est aussi impliquée par la troisième condition (puisque +$M$ est supposée être une bijection de $\mathbb{P}^2$ sur lui-même qui +se restreint à une bijection de $\mathbb{A}^2$ sur lui-même, donc +aussi de son complémentaire $\ell_\infty$). + +Autrement dit, sous n'importe laquelle des conditions indiquées, $M$ +envoie $\ell_\infty$ sur lui-même, c'est-à-dire que c'est une +transformation \emph{affine}. On peut l'écrire sous la forme : +\[ +\begin{pmatrix}x\\y\\\end{pmatrix} +\mapsto +\begin{pmatrix}a&b\\c&d\\\end{pmatrix} +\begin{pmatrix}x\\y\\\end{pmatrix} ++ +\begin{pmatrix}u\\v\\\end{pmatrix} +\] +c'est-à-dire en coordonnées homogènes +\[ +\begin{pmatrix}T\\X\\Y\\\end{pmatrix} +\mapsto +\begin{pmatrix}1&0&0\\u&a&b\\v&c&d\\\end{pmatrix} +\begin{pmatrix}T\\X\\Y\\\end{pmatrix} +\] +Le fait d'avoir $MI = I$ signifie que $(0:a+ib:c+id) = (0:1:i)$, ou, +si on préfère, $c+id = i(a+ib) = -b+ia$, ce qui équivaut à $b = -c$ et +$d = a$. + +Or la condition $b = -c$ et $d = a$ caractérise les similitudes +directes euclidiennes. Une façon de le voir est de décrire les +similitudes directes par leur action sur le plan complexe : une +similitude directe est une transformation envoyant le point d'affixe +$z := x+iy \in \mathbb{C}$ sur sur $mz+p$ pour certains +$m,p\in\mathbb{C}$ (on peut la voir comme la composée de la rotation +d'angle $\arg m$ autour de l'origine, de l'homothétie de rapport $|m|$ +centrée en l'origine, et de la translation par $p$) ; via +l'identification $m = a+ic$ et $p = u+iv$, cette description coïncide +bien avec la condition qu'on bient d'obtenir. Une autre façon de le +voir consiste à remarquer que les vecteurs +$\begin{pmatrix}a\\c\\ \end{pmatrix}$ et +$\begin{pmatrix}b\\d\\ \end{pmatrix}$ images de +$\begin{pmatrix}1\\0\\ \end{pmatrix}$ et +$\begin{pmatrix}0\\1\\ \end{pmatrix}$ sur deux vecteurs orthogonaux ce +qui signifie $ab+cd=0$, de même norme ce qui siginifie $a^2+c^2 = +b^2+d^2$, et de même orientation ce qui signifie $ad - bc > 0$ ; on +peut ensuite manipuler ces équations de différentes manières pour +arriver au résultat voulu, par exemple en écrivant $(ac+bd)(ab+cd) - +ad(a^2+c^2 -b^2-d^2) = -(a^2-d^2)(ad-bc)$ ce qui montre que +$a^2-d^2=0$ et donc $b^2-c^2=0$, après quoi il est facile de vérifier +que des quatre combinaisons de signes $d=\pm a$ et $b=\pm c$, seule +$b=-c$ et $d=a$ conduit bien à satisfaire les équations avec le signe +voulu sur le discriminant, et donne bien une similitude directe. +\end{corrige} + + +% +% +% + +\exercice + +Si $\ell$ est une droite de $\mathbb{P}^2$ (sur un corps quelconque), +on note $\ell^*$ le point correspondant du $\mathbb{P}^2$ +dual\footnote{Si on veut être tout à fait formel : si $V = k^3$ où $k$ + est le corps de base, et si $V^*$ est l'espace vectoriel « dual » + des formes $k$-linéaires sur $V$, et si la droite $\ell$ de + $\mathbb{P}^2 := \mathbb{P}(V)$ est définie par une équation + $\varphi_\ell = 0$ où $\varphi_\ell$ est une forme $k$-linéaire + sur $V$, alors $\ell^*$ est le point de $\mathbb{P}^{2*} := + \mathbb{P}(V^*)$ défini par la classe de $\varphi_\ell$ modulo la + relation « être colinéaire ». Ou, en termes de coordonnées, si + $\ell$ est la droite $[u_\ell:v_\ell:w_\ell]$ définie par une + équation $u_\ell x + v_\ell y + w_\ell z = 0$ sur le $\mathbb{P}^2$ + de coordonnées $(x:y:z)$, alors $\ell^*$ est le point + $(u_\ell:v_\ell:w_\ell)$ du $\mathbb{P}^2$ dit « dual », + $\mathbb{P}^{2*}$, de coordonnées $(u:v:w)$.} qu'on pourra noter +$\mathbb{P}^{2*}$. + +On fixe un point $O$ de $\mathbb{P}^2$. + +(1) Rappeler pourquoi les points $\ell^*$ où $\ell$ est une droite +passant par $O$ dans $\mathbb{P}^2$, forment une droite de +$\mathbb{P}^{2*}$, qu'on pourra noter $O^*$. + +(2) Si $m$ est une droite de $\mathbb{P}^2$ ne passant pas par $O$, +expliquer pourquoi l'application $m \to O^*$ envoyant un point $P$ +de $m$ vers $(OP)^*$ est une bijection de réciproque l'application +$O^* \to m$ envoyant $\ell^*$ sur le point d'intersection $\ell\wedge +m$ de $\ell$ et $m$, et pourquoi ces bijections sont des +transformations projectives (une fois identifiées les droites $m$ +et $O^*$ à $\mathbb{P}^1$). + +(3) En déduire que, si $\ell_a,\ell_b,\ell_c,\ell_d$ sont quatre +droites distinctes concourantes en $O$, et $A,B,C,D$ les points +d'intersection respectifs de $\ell_a,\ell_b,\ell_c,\ell_d$ avec une +même droite $m$ ne passant pas par $O$, le birapport $(A,B;C,D)$ de +ces quatre points est égal au birapport +$(\ell^*_a,\ell^*_b;\ell^*_c,\ell^*_d)$ des quatre points +correspondant à $\ell_a,\ell_b,\ell_c,\ell_d$ sur $O^*$. + +(4) En déduire le fait suivant : si $A,B,C,D$ sont quatre points +distincts de $\mathbb{P}^2$ tous alignés sur une droite $m$, et $O$ +non situé sur $m$, et si $m'$ est une droite distincte de $m$ et ne +passant pas par $O$, alors en appelant $A' = m' \wedge OA$ +l'intersection de $m'$ avec la droite $OA$ et de même pour $B',C',D'$, +le birapport $(A',B';C',D')$ (sur $m'$) est égal au birapport +$(A,B;C,D)$ (sur $m$). + +\begin{figure}[h] +\begin{center} +\begin{tikzpicture}[line cap=round,line join=round,x=1.0cm,y=1.0cm,extended line/.style={shorten >=-#1,shorten <=-#1},extended line/.default=0.5cm] +%% \clip(-4.19,-0.2) rectangle (2.99,5.28); +%% \draw [domain=-4.19:2.99] plot(\x,{(--3.61-0.24*\x)/2.12}); +%% \draw [domain=-4.19:2.99] plot(\x,{(-9.08-2.44*\x)/-1.58}); +%% \draw [domain=-4.19:2.99] plot(\x,{(--0.08-2.68*\x)/0.54}); +%% \draw [domain=-4.19:2.99] plot(\x,{(--3.56-2.77*\x)/1.34}); +%% \draw [domain=-4.19:2.99] plot(\x,{(--8.3-2.9*\x)/2.44}); +%% \draw [domain=-4.19:2.99] plot(\x,{(--2.13--0.34*\x)/3.46}); +\begin{scriptsize} +\coordinate (O) at (-0.86,4.42); +\coordinate (A) at (-2.44,1.98); +\coordinate (B) at (-0.32,1.74); +\coordinate (C) at (0.48,1.65); +\coordinate (D) at (1.58,1.52); +\coordinate (Aprime) at (-3.55,0.27); +\coordinate (Bprime) at (-0.09,0.61); +\coordinate (Cprime) at (0.94,0.71); +\coordinate (Dprime) at (2.17,0.83); +\draw[extended line=0.5cm] (O)--(Aprime); +\draw[extended line=0.5cm] (O)--(Bprime); +\draw[extended line=0.5cm] (O)--(Cprime); +\draw[extended line=0.5cm] (O)--(Dprime); +\draw[color=black!50!red,extended line=0.5cm] (A)--(D); +\draw[color=black!50!orange,extended line=0.5cm] (Aprime)--(Dprime); +\fill [color=blue] (O) circle (1.5pt); +\draw[color=blue] (-0.76,4.58) node {$O$}; +\fill [color=red] (A) circle (1.5pt); +\draw[color=red] (-2.34,2.14) node {$A$}; +\fill [color=red] (B) circle (1.5pt); +\draw[color=red] (-0.22,1.91) node {$B$}; +\fill [color=red] (C) circle (1.5pt); +\draw[color=red] (0.58,1.81) node {$C$}; +\fill [color=red] (D) circle (1.5pt); +\draw[color=red] (1.68,1.68) node {$D$}; +\fill [color=orange] (Aprime) circle (1.5pt); +\draw[color=orange] (-3.43,0.43) node {$A'$}; +\fill [color=orange] (Bprime) circle (1.5pt); +\draw[color=orange] (0.02,0.76) node {$B'$}; +\fill [color=orange] (Cprime) circle (1.5pt); +\draw[color=orange] (1.05,0.86) node {$C'$}; +\fill [color=orange] (Dprime) circle (1.5pt); +\draw[color=orange] (2.29,0.99) node {$D'$}; +\end{scriptsize} +\end{tikzpicture} +\end{center} +\end{figure} + +\begin{corrige} +(1) En termes d'algèbre linéaire, on affirme que l'ensemble des formes + linéaires sur $V$ (ici $V = k^3$) s'annulant en un vecteur $v$ non + nul fixé de $V$ (représentant le point $O$) forme un hyperplan dans + l'espace vectoriel dual $V^*$ des formes linéaires sur $V$. C'est + une conséquence du fait que $\varphi \mapsto \varphi(v)$ est une + forme linéaire non nulle sur $V^*$, ce qui est immédiat à vérifier. + Si on préfère le dire en termes de coordonnées : le fait que $\ell$ + d'équation $u_\ell x + v_\ell y + w_\ell z = 0$ passe par $O$ se + traduit par une relation $u_\ell x_O + v_\ell y_O + w_\ell z_O = 0$ + soit $x_O u_\ell + y_O v_\ell + z_O w_\ell = 0$ linéaire entre les + coordonnées $(u_\ell:v_\ell:w_\ell)$ de $\ell^*$, qui définit donc + une droite $[x_O : y_O : z_O] =: O^*$ de $\mathbb{P}^{2*}$. + +(2) Le fait que $\varphi \colon m \to O^*, P \mapsto (OP)^*$ et $\psi + \colon O^* \to m, \ell^* \mapsto \ell\wedge m$ soient des bijections + réciproques est une conséquence immédiate du fait que deux points + déterminent une unique droite (en l'occurrence $O$ et $P$ + déterminent $\ell$) et que deux droites se coupent en un unique + point (en l'occurrence $m$ et $\ell$ déterminent $P$). La question + cruciale, cependant, est de savoir s'il s'agit bien d'une + transformation projective, c'est-à-dire si $\varphi$ et $\psi$ + proviennent d'applications \emph{linéaires}. Mais c'est une + conséquence, pour $\varphi$, des formules donnant les coefficients + $[u:v:w]$ d'une équation ($ux+vy+wz=0$) de la droite reliant + $O$ et $P$ en fonction de coordonnées $(x_O:y_O:z_O)$ de $O$ et + $(x_P:y_P:z_P)$ de $P$, à savoir : $u = y_O z_P - z_O y_P$ et $v = + z_O x_P - x_O z_P$ et $w = x_O y_P - y_O x_P$ ; et pour $\psi$, des + formules donnant des coordonnées homogènes $(x:y:z)$ du point + d'intersection de $\ell$ et $m$ en fonction de coefficients des + équations $[u_\ell:v_\ell:w_\ell]$ de $\ell$ et $[u_m:v_m:w_m]$ + de $m$, à savoir : $x = v_\ell w_m - w_\ell v_m$ et $y = w_\ell u_m + - u_\ell w_m$ et $z = u_\ell v_m - v_\ell u_m$ ; le point crucial + est que ces deux formules sont \emph{linéaires}, la première en + $(x_P,y_P,z_P)$ et la seconde en $(u_m,v_m,w_m)$. + +(3) On a défini deux transformations projectives réciproques $\varphi + \colon m \to O^*, P \mapsto (OP)^*$ et $\psi \colon O^* \to m, + \ell^* \mapsto \ell\wedge m$. En tant que telles, elles préservent + le birapport : on en déduit que + $(\ell^*_a,\ell^*_b;\ell^*_c,\ell^*_d)$ est égal à + $(\psi(\ell^*_a),\psi(\ell^*_b);\psi(\ell^*_c),\psi(\ell^*_d))$, + c'est-à-dire $(A,B;C,D)$ par définition de ces quatre points. + +(4) On a vu à la question précédente que le birapport $(A,B;C,D)$ + coïncide avec $(\ell^*_a,\ell^*_b;\ell^*_c,\ell^*_d)$ où $\ell_a = + OA$ et ainsi de suite. Mais $(A',B';C',D')$ coïncide aussi avec + $(\ell^*_a,\ell^*_b;\ell^*_c,\ell^*_d)$ puisque $\ell_a = OA'$ et + ainsi de suite. Ces deux quantités sont donc égales. + +(Si on préfère le dire ainsi : l'application $m \mapsto m'$ envoyant + un point $P$ de $m$ sur l'intersection $P' = m' \wedge OP$ de $m'$ + avec la droite $OP$ et une transformation projective pour exactement + les mêmes raisons qu'en (2) à savoir la linéarité des formules + calculant la droite reliant deux points et l'intersection de deux + droites : elle préserve donc le birapport, ce qui montre $(A,B;C,D) + = (A',B';C',D')$.) +\end{corrige} + + +% +% +% + +\exercice + +Dans cet exercice, on se place sur un corps $k$ de caractéristique +différente de $2$ et $3$. + +Soit $C := \{ y^2 = x^3 - x \}$ la variété algébrique affine dans +$\mathbb{A}^2$ définie par l'annulation du polynôme $h := y^2 - x^3 + +x \in k[x,y]$. + +(1) Donner l'équation de la complétée projective $C^+$ de $C$ +dans $\mathbb{P}^2$ (c'est-à-dire, l'adhérence de Zariski de $C$ +dans $\mathbb{P}^2$) dont les coordonnées seront notées $(T{:}X{:}Y)$ +(en identifiant le point $(x,y)$ de $\mathbb{A}^2$ avec $(1{:}x{:}y)$ +de $\mathbb{P}^2$). Quels sont ses points « à l'infini » +(c'est-à-dire situés sur $C^+$ mais non sur $C$) ? + +\begin{corrige} +La complétée projective de $Z(h) \subseteq \mathbb{A}^2$ est donnée +par l'équation $T^{\deg h}\, h(\frac{X}{T}, \frac{Y}{T})$, +c'est-à-dire $T Y^2 = X^3 - T^2 X$. Les points à l'infini sont donnés +en mettant $T=0$ (équation de la droite à l'infini) avec cette +équation, ce qui donne $X^3=0$ soit $X=0$, si bien que le seul point +est $(0{:}0{:}1)$ (point à l'infini dans la direction « verticale »). +\end{corrige} + +(2) Montrer que $C^+$ est lisse. + +\begin{corrige} +Si $h^+\in k[T,X,Z]$ est le polynôme homogène $T Y^2 - X^3 + T^2 X$, +il s'agit de vérifier que $\frac{\partial h^+}{\partial T} = Y^2 + 2T +X$ et $\frac{\partial h^+}{\partial X} = -3X^2 + T^2$ et +$\frac{\partial h^+}{\partial Y} = 2 T Y$ n'ont pas de zéro commun +(autre que $T=X=Y=0$ qui ne définit pas un point de $\mathbb{P}^2$) +sur la clôture algébrique $k^{\alg}$ de $k$. Or $2TY=0$ implique soit +$T=0$ soit $Y=0$ (car le corps est de caractéristique $\neq 2$), dans +le premier cas les deux autres équations donnent $Y^2=0$ donc $Y=0$ et +$-3X^2=0$ donc (comme le corps est de caractéristique $\neq 3$) que +$X=0$ ; et dans le second cas, on a $2TX=0$, le cas $T=0$ a déjà été +traité, reste à regarder $X=0$, mais on a alors $T^2=0$ par une autre +équation, donc $T=0$ ; donc dans tous les cas $T=X=Y=0$. + +(On pouvait aussi trouver les relations $X^3 = \frac{1}{6} T \, +\frac{\partial h^+}{\partial T} - \frac{1}{3} X \, \frac{\partial + h^+}{\partial X} - \frac{1}{12} Y \, \frac{\partial h^+}{\partial + Y}$ et $Y^3 = Y \, \frac{\partial h^+}{\partial T} - X \, +\frac{\partial h^+}{\partial Y}$ et $T^4 = \frac{3}{2} T X \, +\frac{\partial h^+}{\partial T} + T^2 \, \frac{\partial h^+}{\partial + X} - \frac{3}{4} X Y \, \frac{\partial h^+}{\partial Y}$ qui +collectivement montrent que $\frac{\partial h^+}{\partial T}$ et +$\frac{\partial h^+}{\partial X}$ et $\frac{\partial h^+}{\partial Y}$ +engendrent un idéal irrelevant puisque contenant $X^3,Y^3,T^4$ (donc +ne peuvent pas toutes s'annuler simultanément dans $\mathbb{P}^2$). +\end{corrige} + +(3) On considère maintenant $h := y^2 - x^3 + x$ comme élément de +$k(x)[y]$, c'est-à-dire comme polynôme en l'indéterminée $y$ sur le +corps $k(x)$ des fractions rationnelles en l'indéterminée $x$. +Montrer qu'il est irréductible (on pourra pour cela vérifier que +l'élément $x^3 - x$ de $k(x)$ n'est pas le carré d'un élément de +$k[x]$ et en déduire qu'il n'est pas le carré d'un élément de $k(x)$). +En déduire que le quotient $K := k(x)[y]/(h)$ est un corps. En +déduire que $K := k(x)[y]/(h)$ est le corps des fonctions rationnelles +aussi bien de $C$ que de $C^+$ (on pourra remarquer que $k(x)[y]/(y^2 +- x^3 + x)$ contient $k[x,y]/(y^2 - x^3 + x)$). + +\begin{corrige} +Remarquons d'abord que $x^3 - x$ n'est pas le carré d'un élément +de $k[x]$ : c'est clair car le carré d'un polynôme sur un corps est de +degré pair. On en déduit que ce n'est pas non plus le carré d'un +élément de $k(x)$, car si on écrivait un tel élément $u/v$ avec $u,v$ +polynômes sans facteur commun (ce qui a un sens car $k[x]$ est un +anneau factoriel — c'est-à-dire qu'il admet une décomposition unique +en éléments irréductibles), son carré serait $u^2/v^2$ avec $u^2,v^2$ +également sans facteur commun, donc on doit avoir $v$ constant pour ne +pas avoir de dénominateur et finalement $u$ est un polynôme. + +Le fait que $x^3 - x$ ne soit pas un carré dans $k(x)$ signifie que $h +:= y^2 - x^3 + x \in k(x)[y]$ n'a pas de racine. Mais il est de +degré $2$, donc sa seule factorisation non-triviale possible serait en +deux facteurs de degré $1$, ce qui implique qu'il aurait deux racines, +et on vient de voir qu'il n'y en a pas. Ainsi, $h$ est irréductible +(en tant qu'élément de $k(x)[y]$). + +Le quotient $K := k(x)[y]/(h)$ est donc un corps car il est de la +forme $K = E[y]/(h)$ avec $E$ un corps et $h$ un polynôme irréductible +en une seule variable sur $E$. (Rappels : $K$ est un anneau intègre +puisque $uv=0$ dans $K$ signifie que $u,v$ relevés à $E[y]$, sont +multiples de $h$, mais comme $h$ est irréductible, l'un des deux doit +être multiple de $h$, donc nul dans $K$ ; et $K$ est alors un anneau +intègre de dimension finie sur $E$, donc un corps car la +multiplication $K \to K, z \mapsto az$ par un élément $a$ non nul est +injective donc bijective car entre espaces vectoriels de même +dimension finie.) + +Comme $C = Z(y^2 - x^3 + x)$ est affine, l'anneau $\mathcal{O}(C)$ des +fonctions \emph{régulières} sur $C$ est $k[x,y] / (y^2 - x^3 + x)$. +Cet anneau est contenu dans $K$ (au sens où le morphisme évident +$\mathcal{O}(C) \to K$, défini en envoyant chacun de $x$ et $y$ sur +l'élément du même nom, et qui passe au quotient par $y^2 - x^3 + x$, +est injectif puisque tout multiple de $y^2 - x^3 + x$ dans $k(x)[y]$ +qui est dans $k[x,y]$ est déjà multiple de $y^2 - x^3 + x$ dans +$k[x,y]$). Puisque le corps $K$ contient $\mathcal{O}(C)$, il +contient son corps des fractions, qui est le corps $k(C)$ des +fonctions rationnelles de $C$ ; mais réciproquement, comme $k(C)$, vu +dans $K$, contient à la fois $x$ et $y$, il doit contenir d'abord le +corps engendré par $x$, soit $k(x)$, et ensuite l'anneau engendré par +$y$ au-dessus de ce corps, qui est justement $K$. + +Ceci montre que $K = k(C)$. Comme $C$ est un ouvert de Zariski (non +vide, donc dense) de $C^+$ (précisément, c'est l'ouvert $T \neq 0$), +ils ont le même corps des fonctions rationnelles, donc $K = k(C^+)$ +aussi. +\end{corrige} + +(4) Expliquer pourquoi tout élément de $K := k(x)[y]/(h)$ possède une +représentation unique sous la forme $g_0 + g_1\, y$ où $g_0$ et $g_1$ +sont des fractions rationnelles en l'indéterminée $x$ (et où on a noté +abusivement $y$ pour la classe de $y$ modulo $h$). Expliquer comment +on calcule les sommes et les produits dans $K$ sur cette écriture. +Expliquer comment la connaissance d'une relation de Bézout $ug + vh = +1 \in k(x)[y]$ permet de calculer l'inverse d'un élément $g = g_0 + +g_1\, y$ de $K$. À titre d'exemple, calculer l'inverse de $y$ +dans $K$ (on pourra observer ce que vaut $y^2$ dans $K$). + +\begin{corrige} +Par division euclidienne dans $E[y]$ où $E = k(x)$ (noter que $E$ est +un corps), tout élément de $E[y]$ s'écrit de façon unique sous la +forme $q h + g$ où $\deg g < \deg h = 2$. C'est-à-dire que tout +élément de $E[y]$ est congru modulo $h$ à un unique élément $g \in +E[y]$ de degré $<2$, qu'on peut alors écrire sous la forme $g_0 + +g_1\, y$ où $g_0,g_1 \in E = k(x)$. + +Pour ajouter deux éléments écrits sous cette forme, on ajoute +simplement les $g_0,g_1$ correspondants. Pour les multiplier, on +effectue le produit dans $E[y]$ et on effectue une division +euclidienne par $h$ pour se ramener à un degré $<2$, ce qui, en +l'espèce, revient simplement à remplacer $y^2$ par $x^3 - x$. + +Une relation de Bézout $ug + vh = 1$ dans $E[y]$ se traduit en $ug = +1$ dans $E[y]/(h) =: K$, ce qui signifie que $u$ est l'inverse de $g$. +Or on sait qu'on peut (par l'algorithme d'Euclide étendu dans $E[y]$) +calculer une telle relation de Bézout dès lors que $g$ et $h$ ont pour +pgcd $1$ (c'est-à-dire que $g$ n'est pas multiple de $h$, i.e., pas +nul dans $K$). À titre d'exemple, comme $y^2 = x^3 - x$ dans $K$, on +a $\frac{1}{y} = \frac{y}{x^3-x}$. +\end{corrige} + +On rappelle le fait suivant : pour chaque point $P$ de la courbe +$C^+$, il existe une et une seule fonction $\ord_P\colon K\to +\mathbb{Z}\cup\{\infty\}$ qui vérifie les propriétés suivantes : +\textbf{(o)} $\ord_P(g) = \infty$ si et seulement si $g=0$,\quad +\textbf{(k)} $\ord_P(c) = 0$ si $c\in k$,\quad +\textbf{(i)} $\ord_P(g_1 + g_2) \geq \min(\ord_P(g_1), \ord_P(g_2))$ +(avec automatiquement l'égalité lorsque $\ord_P(g_1) \neq +\ord_P(g_2)$),\quad \textbf{(ii)} $\ord_P(g_1 g_2) = \ord_P(g_1) + +\ord_P(g_2)$,\quad \textbf{(n)} $1$ est atteint par $\ord_P$, et enfin +\quad \textbf{(r)} $\ord_P(g) \geq 0$ si $g$ est définie en $P$ (avec +automatiquement $\ord_P(g) > 0$ si $g$ s'annule en $P$). + +(5) On va chercher à mieux comprendre la fonction $\ord_O$ lorsque $O$ +est le point $(0,0)$ de la courbe $C$.\quad (a) Posons $e := +\ord_O(x)$ : pourquoi a-t-on $e \geq 1$ ?\quad (b) Cherchons à +comprendre ce que vaut $\ord_O$ sur le sous-corps $k(x)$ de $K$ ne +faisant pas intervenir $y$. Montrer que $\ord_O(g) = e\cdot +\val_0(g)$ si $g \in k[x]$, où $\val_0(g)$ désigne l'ordre du zéro de +$g$ à l'origine en tant que polynôme en une seule variable $x$ +(c'est-à-dire le plus grand $r$ tel que $x^r$ divise $g$). En déduire +que $\ord_O(g) = e\cdot \val_0 (g)$ pour tout $g\in k(x)$, où +$\val_0(g)$ désigne l'ordre du zéro de $g$ à l'origine en tant que +fonction rationnelle en une seule variable $x$ (c'est-à-dire $\val_0$ +de son numérateur moins $\val_0$ de son dénominateur).\quad +(c) Calculer $\ord_O(y^2)$ et en déduire $\ord_O(y)$ (en faisant +intervenir le nombre $e$).\quad (d) En déduire comment calculer +$\ord_O(g_0 + g_1\, y)$ pour $g_0,g_1\in k(x)$ (toujours en faisant +intervenir le nombre $e$).\quad (e) En faisant intervenir la propriété +(n) (de normalisation de $\ord_O$), en déduire la valeur de $e$ et +finalement la valeur de $\ord_O(g_0 + g_1\, y)$ pour $g_0,g_1 \in +k(x)$. + +\begin{corrige} +(a) On a $e := \ord_O(x) \geq 1$ car $x$ s'annule en $O$ (par la + propriété (r)). + +(b) De $\ord_O(x) = e$ on déduit $\ord_O(x^i) = e\cdot i$ par la + propriété (ii), donc $\ord_O(c x^i) = e\cdot i$ si $c\in k^\times$ + par la propriété (k), et donc, par la propriété (i), que $\ord_O(c_r + x^r + \cdots + c_n x^n) = e\cdot r$ si $r\leq n$ et $c_r,\ldots,c_n + \in k$ et $c_r \neq 0$, ce qui signifie précisément $\ord_O(g) = + e\cdot\val_0(g)$ si $g\in k[x]$. Si $g = u/v \in k(x)$ avec $u,v\in + k[x]$, on a $\val_0(g) = \val_0(u) - \val_0(v)$ et $\ord_O(g) = + \ord_O(u) - \ord_O(v)$ (par la propriété (ii)), donc toujours + $\ord_O(g) = e\cdot\val_0(g)$. + +(c) Comme $y^2 = x^3 - x$ dans $K$, on a $\ord_O(y^2) = e\cdot + \val_0(x^3 - x) = e$. On en déduit $\ord_O(y) = \frac{1}{2}e$ + (propriété (ii)). + +(d) On a vu $\ord_O(g_0) = e\cdot\val_0(g_0)$ en (b), et $\ord_O(g_1\, + y) = e\cdot(\val_0(g_1)+\frac{1}{2})$ puisque $\ord_O(y) = + \frac{1}{2}e$. Comme $\val_0(g_0)$ et $\val_0(g_1)+\frac{1}{2}$ ne + peuvent pas être égaux, la propriété (i) donne $\ord_O(g_0 + g_1\, + y) = e\cdot\min(\val_0(g_0), \val_0(g_1)+\frac{1}{2})$ quels que + soient $g_0,g_1\in k(x)$. + +(e) On vient de voir $\ord_O(g_0 + g_1\, y) = e\cdot\min(\val_0(g_0), + \val_0(g_1)+\frac{1}{2})$ : pour que ceci ne prenne que des valeurs + entières, $e$ doit être pair ; mais pour que ceci puisse prendre la + valeur $1$ (donc tous les entiers), $e$ doit être exactement égal + à $2$. Finalement, on a donc $\ord_O(g_0 + g_1\, y) = + \min(2\val_0(g_0), 2\val_0(g_1)+1)$. +\end{corrige} + +(6) En notant $(\infty)$ le point à l'infini de $C^+$, montrer que le +diviseur $\divis(x)$ de $x$ (vu comme fonction rationnelle sur $C^+$) +vaut $2[O] - 2[\infty]$. En déduire $\ord_\infty(y)$, et en déduire +$\divis(y) = [O] + [P] + [Q] - 3[\infty]$ où $P=(1,0)$ et $Q=(-1,0)$. + +\begin{corrige} +À la question (5), on a calculé $\ord_O(x) = 2$. En tout autre point +de $C^+$ non situé à l'infini (c'est-à-dire, situé sur $C$), la +fonction $x$ n'a ni zéro ni pôle (elle n'a pas de pôle car $x$ est une +fonction régulière sur $\mathbb{A}^2$ et notamment sur $C$, et elle +n'a pas de zéro car le seul point de $C$ où $x$ s'annule vérifie +aussi $y=0$ d'après l'équation $y^2 = x^3 - x$, donc est $(0,0) =: +O$). Comme le degré total du diviseur de $x$ doit être $0$, l'ordre +en $\infty$ doit forcément être $-2$, autrement dit $\divis(x) = 2[O] +- 2[\infty]$. + +Comme $\ord_\infty(x) = -2$, on a $\ord_\infty(x^3) = -6$ et +$\ord_\infty(y^2) = \ord_\infty(x^3 - x) = -6$, donc $\ord_\infty(y) = +-3$. Comme la fonction $y$ est régulière sur $\mathbb{A}^2$ et +notamment sur $C$, elle n'a pas d'autre pôle que $\infty$, et elle +s'annule en les points $(x,y)$ de $C$ où $y=0$ et $x^3-x=0$ +c'est-à-dire $x(x-1)(x+1)=0$, qui sont donc $O,P,Q$ (qui sont +distincts car $k$ est de caractéristique $\neq 2$). Comme le degré +total de $\divis(y)$ doit être $0$, l'ordre en chacun de $O,P,Q$ doit +forcément être $1$ (puisque ce sont trois entiers strictement positifs +de somme $3$), autrement dit $\divis(y) = [O] + [P] + [Q] - +3[\infty]$. +\end{corrige} + +(7) Toujours en notant $(\infty)$ le point à l'infini de $C^+$, +montrer que $\ord_\infty(g_0 + g_1\, y) = \min(2\val_\infty(g_0), +2\val_\infty(g_1)-3)$ pour $g_0,g_1 \in k(x)$, où $\val_\infty(g)$ +désigne la valuation usuelle de $g$ à l'infini en tant que fonction +rationnelle en une seule variable $x$, c'est-à-dire le degré du +dénominateur moins le degré du numérateur. + +\begin{corrige} +On a vu $\ord_\infty(x) = -2 = 2\val_\infty(x)$ : on en déduit que +$\ord_\infty(g) = 2\val_\infty(g)$ pour tout $g\in k[x]$ puis pour +tout $g\in k(x)$ (comme en (5)(b)). Comme $\ord_\infty(y) = -3$, on a +$\ord_\infty(g_0 + g_1\, y) = \min(2\val_\infty(g_0), +2\val_\infty(g_1)-3)$ (en utilisant la propriété (i) et en remarquant +que $2\val_\infty(g_0)$ et $2\val_\infty(g_1)-3$ ne peuvent pas être +égaux). +\end{corrige} + +(8) Pour $n\in \mathbb{N}$, soit $\mathscr{L}(n[\infty]) := \{0\} \cup +\{f\in k(C)^\times : \divis(f) +n[\infty] \geq 0\}$ l'espace vectoriel +sur $k$ des fonctions rationnelles sur $C^+$ ayant au pire un pôle +d'ordre $n$ en $\infty$ (et aucun pôle ailleurs). Décrire +explicitement $\mathscr{L}(n[\infty])$ comme l'ensemble des $g_0 + +g_1\,y$ avec $g_0,g_1\in k[x]$ vérifiant certaines contraintes sur +leur degré : en déduire la valeur de $\ell (n[\infty]) := \dim_k +\mathscr{L}(n[\infty])$ et notamment le fait que $\ell (n[\infty]) = +n$ si $n$ est assez grand. + +\begin{corrige} +Dire que $g_0 + g_1\, y$ appartient à $\mathscr{L}(n[\infty])$ +signifie qu'elle est régulière partout sauf peut-être en $\infty$, et +que par ailleurs $\ord_\infty(g_0 + g_1\, y) \geq -n$. La première +condition signifie $g_0,g_1\in k[x]$ ; la seconde signifie +$\min(2\val_\infty(g_0), 2\val_\infty(g_1)-3) \geq -n$, c'est-à-dire +$\max(2\deg(g_0), 2\deg(g_1)+3) \leq n$, autrement dit, +$\mathscr{L}(n[\infty])$ est l'ensemble des $g_0 + g_1\,y$ avec +$g_0,g_1\in k[x]$ vérifiant $\deg(g_0) \leq \frac{1}{2}n$ et +$\deg(g_1) \leq \frac{1}{2}(n-3)$. Comme la dimension de l'espace des +polynômes vérifiant $\deg(g) \leq B$ pour $B\in \mathbb{R}$ vaut +$\max(0,\lfloor B\rfloor + 1)$, on trouve finalement $\ell (n[\infty]) += \max(0,\lfloor \frac{1}{2}n\rfloor + 1) + \max(0,\lfloor +\frac{1}{2}(n-3)\rfloor + 1)$, ce qui, après examen des quelques +premiers cas, donne +\[ +\ell (n[\infty]) = \left\{ +\begin{array}{ll} +0&\hbox{~si $n<0$}\\ +1&\hbox{~si $n=0$ (ou $n=1$)}\\ +n&\hbox{~si $n\geq 1$}\\ +\end{array} +\right. +\] +pour dimension de l'espace des fonctions rationnelles sur $C^+$ ayant +au pire un pôle d'ordre $n$ en $\infty$ (et aucun pôle ailleurs). +\end{corrige} + +(9) En comparant la valeur trouvée pour $\ell (n[\infty])$ avec la +formule de Riemann-Roch, calculer le genre de $C^+$. + +\begin{corrige} +La formule de Riemann-Roch prédit $\ell(D) - \ell(K-D) = \deg(D) + 1 - +g$ où $g$ est le genre de la courbe (à déterminer), et notamment +$\ell(D) = \deg(D) + 1 - g$ si $\deg(D) > 2g-2$. Or on vient de voir +que pour $D := n[\infty]$ avec $n$ assez grand (et notamment +$\deg(n[\infty]) = n$ plus grand que ce qu'on voudra), on a +$\ell(n[\infty]) = n = \deg(n[\infty])$. On en déduit $g = 1$. +\end{corrige} + +(10) Montrer que $\omega := \frac{dx}{y} = \frac{2\,dy}{3x^2-1} \in +\Omega^1(C)$ et montrer que cette différentielle est d'ordre $0$ +en $\infty$. Expliquer pourquoi $dx$ et $dy$ sont régulières (i.e., +d'ordre $\geq 0$) sur $C$ et ne peuvent pas s'annuler (i.e., avoir un +ordre $>0$) simultanément en un point de $C$. (Pour la seconde +affirmation, on pourra noter que si $f$ est régulière sur $C$ alors +$df = f'_x\,dx + f'_y\,dy$ avec $f'_x,f'_y$ régulières sur $C$, et +qu'il n'est pas possible que tous les $df$ s'annulent en $M$.) En +remarquant que $y$ et $3x^2-1$ ne s'annulent jamais simultanément +sur $C$, montrer que $\omega$ est d'ordre $0$ en tout point (elle n'a +ni zéro ni pôle), i.e., $\divis(\omega) = 0$. En déduire un calcul du +genre de $g$ indépendant des questions (8) et (9). + +\begin{corrige} +En dérivant $y^2 = x^3 - x$ on trouve $2y\,dy = (3x^2-1)\,dx$ dans le +$k(C)$-espace vectoriel $\Omega^1(C)$, d'où $\frac{dx}{y} = +\frac{2\,dy}{3x^2-1}$ comme annoncé. + +En $\infty$, on a $\ord_\infty(dx) = \ord_\infty(x) - 1 = -3$ (car +$\ord_\infty(x) = -2 \neq 0$), et $\ord_\infty(y) = -3$, donc +$\ord_\infty(\omega) = 0$. + +En tout point (géométrique) $M$ de $C$ on a $\ord_M(x) \geq 0$ donc +$\ord_M(dx) \geq 0$, et $\ord_M(y) \geq 0$ donc $\ord_M(dy) \geq 0$. +Par ailleurs, si $f$ est une fonction rationnelle sur $C$, on a $df = +f'_x\,dx + f'_y\,dy$ où $f'_x,f'_y$ sont les dérivées partielles (au +sens usuel) de $f$ par rapport à $x,y$ respectivement (si $f$ est +écrite, disons, de la forme $g_0 + g_1\,y$ avec $g_0,g_1\in k(x)$, +alors $f'_x = g'_0 + g'_1\,y$ et $f'_y = g_1$) ; en choisissant une +fonction régulière sur $C$ (donc dans $k[x,y]/(y^2-x^3+x)$) qui est +une uniformisante en $M$, on a $f'_x,f'_y$ régulières et $\ord_M(df) = +0$, ce qui interdit qu'on ait simultanément $\ord_M(dx) > 0$ et +$\ord_M(dy) > 0$. + +En tout point (géométrique) $M$ de $C$ où $y$ ne s'annule pas, on a +$\ord_M(\omega) \geq 0$ car $\ord_M(dx) \geq 0$ et $\ord_M(y) = 0$ ; +de même, en tout point où $3x^2-1$ ne s'annule pas, on a +$\ord_M(\omega) \geq 0$ car $\ord_M(dy) \geq 0$ et $\ord_M(3x^2-1) = +0$. Comme $y$ et $3x^2-1$ ne s'annulent jamais simultanément sur $C$ +(car $y$ ne s'annule qu'en $O=(0,0)$, $P=(1,0)$ et $Q=(-1,0)$, et +$3x^2-1$ n'est nul en aucun de ces points), ceci montre +$\ord_M(\omega) \geq 0$ en tout $M$. Mais si on avait $\ord_M(\omega) +> 0$ en un point $M$, les écritures $dx = y\,\omega$ et $dy = +\frac{3x^2-1}{2}\,\omega$ montreraient que $dx,dy$ s'annulent toutes +les deux en $M$, ce qui n'est pas possible. Donc $\ord_M(\omega) = 0$ +en tout $M$ de $C$, et on a déjà montré par ailleurs que +$\ord_\infty(\omega) = 0$. Ceci prouve $\divis(\omega) = 0$. + +Comme $\deg(\divis(\omega)) = 2g-2$ pour n'importe quelle $\omega \in +\Omega^1(C)$, ceci montre $2g-2 = 0$ soit $g=1$. +\end{corrige} + + +% +% +% +\end{document} |