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@@ -985,23 +985,23 @@ est un corps contenant $K$ et $x'$ et qu'on a $L' = K(x')$.
\begin{defn}
Soit $K$ un corps et $f \in K[t]$ un polynôme quelconque. On appelle
\textbf{corps de décomposition} de $f$ sur $K$ une extension $K
-\subseteq L$ telle que $f$ soit complètement décomposé sur $L$, i.e.,
-$f = c\prod_{i=1}^n (t-x_i)$ (avec $c$ le coefficient dominant de $f$,
-et $x_1,\ldots,x_n$ ses racines avec multiplicité) et que $L =
-K(x_1,\ldots,x_n)$.
+\subseteq L$ telle que $f$ soit scindé (=complètement décomposé)
+sur $L$, i.e., $f = c\prod_{i=1}^n (t-x_i)$ (avec $c$ le coefficient
+dominant de $f$, et $x_1,\ldots,x_n$ ses racines avec multiplicité) et
+que $L = K(x_1,\ldots,x_n)$.
On définit de même la notion de corps de décomposition sur $K$ d'une
famille $(f_i)$ quelconque de polynômes : il s'agit d'une extension
-de $K$ dans laquelle tous les $f_i$ sont complètement décomposés, et
-qui est engendrée (en tant que corps, cf. \ref{subfield-generated})
-par l'ensemble de toutes les racines de tous les $f_i$.
+de $K$ dans laquelle tous les $f_i$ sont scindés, et qui est engendrée
+(en tant que corps, cf. \ref{subfield-generated}) par l'ensemble de
+toutes les racines de tous les $f_i$.
\end{defn}
\begin{prop}\label{existence-uniqueness-decomposition-field}
Soit $K$ un corps et $f \in K[t]$ un polynôme. Alors : (1) Il existe
un corps de décomposition de $f$ sur $K$. (2) Si $K \subseteq L$ est
un corps de décomposition de $f$ sur $K$, et si $K \subseteq L'$ est
-une extension dans laquelle $f$ est complètement décomposé, il existe
+une extension dans laquelle $f$ est scindé, il existe
un morphisme de corps $L \to L'$ qui soit l'identité sur $K$ ; de
plus, (2b) dans les conditions, si $f$ est irréductible, et si $x$ et
$x'$ sont une racine de $f$ dans $L$ et $L'$ respectivement, on peut
@@ -1028,7 +1028,7 @@ d'appliquer les conclusions à $f_2$.
Pour montrer (1), on utilise l'hypothèse de récurrence pour construire
un corps de décomposition $L$ de $f_2$ sur $E$ : disons $L =
E(x_2,\ldots,x_n)$ avec $x_2,\ldots,x_n$ les racines de $f_2$, et il
-est clair que $f$ est complètement décomposé sur $L$ et on a $L =
+est clair que $f$ est scindé sur $L$ et on a $L =
K(x_1,\ldots,x_n)$, donc $L$ est un corps de décomposition de $f$
sur $K$. Pour montrer (2) et (2b), soit $x'$ une racine de $f$
dans $L'$ : d'après \ref{existence-uniqueness-rupture-field}(2), il
@@ -1057,7 +1057,7 @@ Soit $K$ un corps et $(f_i)$ une famille quelconque d'éléments
de $K[t]$. Alors : (1) Il existe un corps de décomposition des $f_i$
sur $K$. (2) Si $K \subseteq L$ est un corps de décomposition des
$f_i$ sur $K$, et si $K \subseteq L'$ est une extension dans laquelle
-tous les $f_i$ sont complètement décomposés, il existe un morphisme de
+tous les $f_i$ sont scindés, il existe un morphisme de
corps $L \to L'$ qui soit l'identité sur $K$ ; de plus, (2b) dans les
conditions, si un des $f_i$ est irréductible, et si $x$ et $x'$ sont
une racine de $f_i$ dans $L$ et $L'$ respectivement, on peut de plus
@@ -1095,7 +1095,7 @@ montrer l'existence et l'unicité de la clôture algébrique :
\begin{defn}
Soit $K$ un corps. On appelle \textbf{clôture algébrique} de $K$ une
extension $K \subseteq L$ algébrique telle que tout polynôme de $K[t]$
-soit complètement décomposé sur $L$.
+soit scindés sur $L$.
\end{defn}
De toute évidence, un corps est algébriquement clos si et seulement si
@@ -1125,6 +1125,111 @@ algébriquement clos.
\end{proof}
+\subsection{Éléments séparables, corps parfaits, théorème de l'élément primitif}
+
+\thingy Si $k$ est un corps, et $f \in k[t]$ un polynôme en une
+indéterminée sur $k$, on dit que $f$ est \textbf{séparable} lorsque
+$f$ est premier avec sa dérivée $f'$ : ceci revient à dire que les
+racines de $f$ sont simples (=sans multiplicité) dans une extension où
+$f$ est scindé (cf. \ref{existence-uniqueness-decomposition-field}).
+Lorsque $f$ est de plus irréductible (sur $k$), dire qu'il est
+séparable signifie simplement que $f' \neq 0$ (puisque $f'$ ne peut
+diviser $f$ qu'en étant nulle).
+
+Si $k$ est de caractéristique $0$, tout polynôme irréductible est
+séparable. Si $k$ est de caractéristique $p>0$, tout polynôme $f \in
+k[t]$ s'écrit de façon unique sous la forme $f(t) = f_0(t^{p^s})$ pour
+un certain $s \in \mathbb{N}$ et où $f_0' \neq 0$ (en effet, un
+polynôme de dérivée nulle n'a que des termes d'exposant multiple
+de $p$, et on itère) ; avec une telle écriture, si $f$ est séparable
+alors $s = 0$, et si $f$ est irréductible alors $f_0$ l'est aussi.
+
+Lorsque $k \subseteq K$ est une extension de corps, un élément $x \in
+K$ algébrique sur $k$ est dit séparable (sur $k$) lorsque son polynôme
+minimal l'est. D'après ce qu'on vient de dire, en
+caractéristique $0$, tout algébrique est séparable, et en
+caractéristique $p$, pour tout algébrique $x$ il existe un $s$ tel que
+$x^{p^s}$ soit séparable et de degré égal à l'entier $\deg(x)/p^s$
+(notamment, si $\deg(x)$ n'est pas multiple de $p$, alors $x$ est
+séparable).
+
+\begin{defn}\label{definition-perfect-field}
+Un corps $k$ est dit \textbf{parfait} lorsque \emph{soit} $k$ est de
+caractéristique $0$, \emph{soit} $k$ est de caractéristique $p$ et le
+morphisme de Frobenius, $x\mapsto x^p$, est surjectif $k \to k$ (on
+rappelle qu'il s'agit d'un morphisme de corps, en particulier
+injectif), i.e., tout élément a une racine $p$-ième (automatiquement
+unique).
+\end{defn}
+
+\thingy Ainsi, les corps $\mathbb{Q},\mathbb{R},\mathbb{C}$ sont
+parfaits (car de caractéristique $0$). Il en va de même d'un corps
+fini $\mathbb{F}_q$ (car le morphisme de Frobenius, injectif d'un
+ensemble fini vers lui-même, est forcément surjectif). Enfin, un
+corps algébriquement clos est parfait (car le polynôme $x^p - c$ se
+scinde).
+
+Un exemple de corps qui \emph{n'est pas} parfait est le corps
+$\mathbb{F}_p(t)$ des fractions rationnelles en une indéterminée $t$
+sur $\mathbb{F}_p$, vu que l'élément $t$ n'a pas de racine $p$-ième.
+
+\thingy Si $k$ est parfait, tout élément $x$ algébrique sur $k$ (dans
+un corps le contenant) est séparable : en effet, si $f$ est le
+polynôme minimal de $x$, on peut écrire $f(t) = f_0(t^{p^s})$ comme
+expliqué plus haut, mais quitte à appeler $f_1$ le polynôme dont les
+coefficients sont les racines $p^s$-ièmes de ceux de $f_0$ (c'est là
+qu'on utilise la perfection de $k$), on a $f(t) = f_0(t^{p^s}) =
+(f_1(t))^{p^s}$, et ceci ne peut être irréductible que pour $s=0$.
+
+\begin{prop}[théorème de l'élément primitif]
+Soit $K = k(x_1,\ldots,x_n)$ avec $x_1,\ldots,x_n$ algébriques sur $k$
+et $x_2,\ldots,x_n$ séparables sur $k$ (on ne demande pas que $x_1$
+soit séparable). Alors l'extension $k\subseteq K$ est monogène,
+c'est-à-dire qu'il existe $y \in K$ tel que $K = k(y)$.
+\end{prop}
+\begin{proof}
+Si $k$ est un corps fini, alors $K$ l'est aussi (puisque $K$ est fini
+sur $k$), et on peut choisir $y$ un générateur du groupe cyclique
+$K^\times$ (vu que ses puissances sont tous les éléments
+de $K^\times$, il engendre certainement $K$ en tant que corps).
+Excluons donc ce cas.
+
+En procédant par récurrence sur $n$, on voit qu'il suffit de montrer
+le cas $n=2$. Supposons donc $K = k(x_1,x_2)$ avec $x_1,x_2$
+algébriques et $x_2$ séparable. On va poser $y = x_1 + c x_2$ et
+chercher à choisir judicieusement $c \in k$ non nul. Pour montrer que
+$K = k(y)$, il suffira de montrer que $x_2$ est dans $k(y)$, puisque
+ensuite $x_1 = y - c x_2$. Pour cela, on va s'intéresser au polynôme
+minimal de $x_2$ sur $k(y)$ : il s'agit de montrer qu'il a degré $1$
+(pour $c$ bien choisi).
+
+Soient $f_1$ et $f_2$ les polynômes minimaux de $x_1$ et $x_2$
+sur $k$. Travaillons dans $L$ une extension de $K$ dans laquelle $f_1
+f_2$ est scindé (cf. \ref{existence-uniqueness-decomposition-field}).
+L'élément $x_2$ est racine de $f_2(t)$ et aussi de $g(t) := f_1(y -
+ct)$, ce dernier étant un polynôme en $t$ à coefficients dans $k(y)$ :
+il est donc racine de leur pgcd $h$ dans $k(y)[t]$. Or toute racine
+de ce pgcd dans $L$ est à la fois racine de $f_2$, appelons-la $z_2$,
+et aussi de la forme $(y - z_1)/c$ pour une certaine racine $z_1$
+de $f_1$ ; on a donc $y = x_1 + c x_2 = z_1 + c z_2$, et si $z_2 \neq
+x_2$ cela implique $c = (z_1 - x_1)/(x_2 - z_2)$. Autrement dit, si
+on choisit pour $c$ une valeur dans $k$ différente de tous les $(z_1 -
+x_1)/(x_2 - z_2)$ pour $z_1$ parcourant les racines de $f_1$ et $z_2$
+parcourant celles de $f_2$ (autres que $x_2$), ce qui est possible vu
+que $k$ est infini et qu'on n'exclut qu'un nombre fini de valeurs,
+alors la seule racine commune de $f_1$ et $g$ est $x_2$. Comme de
+plus $f_1$ est séparable, cette racine est simple pour $f_1$ donc
+pour $h$, et ainsi $x_2$ est racine d'un polynôme $h$ dans $k(y)$
+ayant une unique seule racine, de surcroît simple, dans un corps $L$
+où ce polynôme se scinde (parce que $f_2$ s'y scinde). C'est donc que
+$x_2 \in k(y)$, et on a expliqué que cela conclut.
+\end{proof}
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+\begin{cor}
+Toute extension finie d'un corps parfait est monogène.
+\end{cor}
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