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%% This is a LaTeX document.  Hey, Emacs, -*- latex -*- , get it?
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% A tribute to the worthy AMS:
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\author{}
\date{2025-04-16}
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\noindent\textbf{Instructions.}

Les exercices sont indépendants sauf dans la mesure où le contraire
est précisé.  Ils pourront être traités dans un ordre quelconque, mais
on demande de faire apparaître de façon très visible dans les copies
où commence chaque exercice.

La longueur de l'énoncé ne doit pas décourager : les exercices ont été
formulés de manière à rappeler le contexte ainsi que certaines notions
du cours, ce qui explique leur longueur.

\medbreak

L'usage de tous les documents (notes de cours manuscrites ou
imprimées, feuilles d'exercices, livres) est autorisé.

L'usage des calculatrices électroniques est interdit.

Les réponses peuvent être écrites en français ou en anglais.

\ifcorrige
Ce corrigé comporte 6 pages (page de garde incluse).
\else
Cet énoncé comporte 4 pages (page de garde incluse).
\fi

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\exercice

Soit $k$ un corps de caractéristique $\neq 2,3$, et $C$ la variété
algébrique d'équation
\[
x^3 + y^3 + z^3 = 0
\]
dans $\mathbb{P}^2$ de coordonnées $(x{:}y{:}z)$ sur $k$.

(1) Montrer que $\frac{\partial f}{\partial x}$, $\frac{\partial
  f}{\partial y}$ et $\frac{\partial f}{\partial z}$, où $f := x^3 +
y^3 + z^3$, n'ont pas de zéro commun dans $\mathbb{P}^2$.  On rappelle
que ceci nous permet de conclure que $C$ est une courbe (plane).

\begin{corrige}
On a $\frac{\partial f}{\partial x} = 3x^2$, $\frac{\partial
  f}{\partial y} = 3y^2$ et $\frac{\partial f}{\partial z} = 3z^2$.
Si ces trois valeurs s'annulent, comme le corps était supposé de
caractéristique $\neq 3$, on a $x=y=z=0$, ce qui est impossible pour
des coordonnées homogènes sur $\mathbb{P}^2$.

On a donc montré que $f=0$ définit une courbe plane (lisse !).
\end{corrige}

(2) Quels sont les points géométriques de $C$ situés la droite
$\{z=0\}$ ?  On pourra noter $\omega$ une racine primitive cubique de
l'unité dans la clôture algébrique $k^{\alg}$ de $k$.  Par symétrie,
on donnera aussi les points géométriques de $C$ sur les droites
$\{x=0\}$ et $\{y=0\}$.

\begin{corrige}
Si un point géométrique $(x{:}y{:}z)$ de $C$ vérifie de plus $z=0$,
alors il vérifie $x^3 + y^3 = 0$.  On ne peut pas aussi avoir $x=0$
car ceci forcerait $y=0$ ce qui n'est pas possible : on a donc
$(-\frac{y}{x})^3 = 1$, c'est-à-dire que $-\frac{y}{x}$ est l'une des
trois racines cubiques de l'unité $1,\omega,\omega^2$.  Bref, les
trois points de $C$ sur la droite $\{z=0\}$ sont $(1{:}{-1}{:}0)$,
$(1{:}{-\omega}{:}0)$ et $(1{:}{-\omega^2}{:}0)$.  Symétriquement, les
trois points de $C$ sur la droite $\{x=0\}$ sont $(0{:}1{:}{-1})$,
$(0{:}1{:}{-\omega})$ et $(0{:}1{:}{-\omega^2})$, et les trois points de
$C$ sur la droite $\{y=0\}$ sont $(-1{:}0{:}1)$, $(-\omega{:}0{:}1)$
et $(-\omega^2{:}0{:}1)$.  Notons que chacun de ces neuf points peut
se réécrire de diverses manières, par exemple les trois derniers
s'écrivent aussi $(1{:}0{:}{-1})$, $(1{:}0{:}{-\omega^2})$ et
$(1{:}0{:}{-\omega})$ respectivement.
\end{corrige}

(3) Quelle est l'équation affine de la partie de $C$ située dans
l'espace affine $\mathbb{A}^2$ complémentaire de la droite $\{z=0\}$
dans $\mathbb{P}^2$ ?  On appellera $u,v$ les coordonnées affines sur
ce $\mathbb{A}^2$, qu'on exprimera par rapport aux coordonnées
homogènes $x,y,z$ sur $\mathbb{P}^2$.

\begin{corrige}
En posant $u = \frac{x}{z}$ et $v = \frac{y}{z}$, l'équation affine de
$C$ s'écrit en déshomogénéisant l'équation projective, c'est-à-dire :
\[
u^3 + v^3 + 1 = 0
\]
\vskip-3ex\leavevmode
\end{corrige}

(4) Calculer la droite tangente à $C$ au point $(0{:}{-1}{:}1)$.  Quel
est l'ordre d'annulation la fonction $\frac{x}{z}$ en ce point ?  En
déduire quel est l'ordre d'annulation de la fonction $\frac{y}{z}+1$
en ce point.  (On recommande de faire les calculs dans $\mathbb{A}^2$,
et éventuellement de faire une translation pour se ramener à l'origine
de $\mathbb{A}^2$.)

\begin{corrige}
Utilisons les coordonnées affines $(u,v) = (\frac{x}{z}, \frac{y}{z})$
décrites à la question (3) pour trouver l'équation de la droite
tangente à $C$ au point $(0,-1)$.  Elles s'obtient en dérivant
l'équation $u^3 + v^3 + 1$ de la partie affine de $C$ en ce point, ce
qui donne $-3(v+1) = 0$, c'est-à-dire $v=1$.  Autrement dit, il s'agit
de la droite horizontale par le point $(0,-1)$ considéré.

La coordonnée $u$ s'annulant à l'ordre $1$ en $0$ sur la droite $v=1$
tangente à $C$, elle s'annule aussi à l'ordre $1$ en $0$ sur $C$,
c'est-à-dire $\ord_{(0,-1)}u = 1$.

Pour ce qui est de l'ordre de $v+1$ en ce point, on utilise le fait
que $v^3+1 = (v+1)(v^2-v+1) = -u^3$ s'annule à l'ordre $3$ comme on
vient de le voir.  Comme $v^2-v+1$ ne s'annule pas, c'est que $v+1$
s'annule à l'ordre $3$.  (Ceci est peut-être plus intuitif en
translatant, c'est-à-dire en posant $v' = v+1$ : l'équation de la
courbe est alors $u^3 + v^{\prime3} - 3v^{\prime2} + v' = 0$, et comme
$u^3$ a l'ordre $3$ et que $v'$ a un ordre au moins $1$, cet ordre
doit être exactement $3$.)
\end{corrige}

(5) Quels sont les diviseurs principaux associés aux fonctions
rationnelles $\frac{x}{z}$ et $\frac{y}{z}+1$ sur $C$ ?  On vérifiera
que le degré est bien ce qu'il doit être.

\begin{corrige}
On a vu que la fonction rationnelle $\frac{x}{z}$ s'annule exactement
aux points $(0{:}1{:}-1)$, $(0{:}1{:}{-\omega})$ et
$(0{:}1{:}{-\omega^2})$, et à chaque fois c'est à l'ordre $1$ (la
question précédente le donne pour le premier de ces points, mais pour
les deux autres on peut par exemple appliquer la transformation
projective multipliant la coordonnée $z$ par $\omega$, qui laisse
invariante la courbe $C$).  Son inverse $\frac{z}{x}$ s'annule
exactement aux trois points $(1{:}{-1}{:}0)$, $(1{:}{-\omega}{:}0)$ et
$(1{:}{-\omega^2}{:}0)$, là aussi à l'ordre $1$ à chaque fois, par
permutation des coordonnées.  Le diviseur de la fonction $\frac{x}{z}$
est donc
\[
\begin{aligned}
& [(0{:}1{:}{-1})] + [(0{:}1{:}{-\omega})] +
  [(0{:}1{:}{-\omega^2})]\\
-\, & [(1{:}{-1}{:}0)] - [(1{:}{-\omega}{:}0)] -
  [(1{:}{-\omega^2}{:}0)]
\end{aligned}
\]
Son degré vaut bien $0$ comme il sied à un diviseur principal.  Quant
à $\frac{y}{z}+1$, ses pôles sont les mêmes que ceux de $\frac{y}{z}$,
qui sont eux mêmes les mêmes que ceux de $\frac{x}{z}$ pour les mêmes
raisons que cei-dessus, et l'unique zéro, triple, de $\frac{y}{z}+1$ a
été révélé à la question (4): bref, le diviseur de $\frac{y}{z}+1$ est
\[
3\cdot [(0{:}1{:}{-1})]
- [(1{:}{-1}{:}0)] - [(1{:}{-\omega}{:}0)] -
  [(1{:}{-\omega^2}{:}0)]
\]
De nouveau, il est bien de degré $0$.
\end{corrige}


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\exercice

\label{equation-with-no-solutions}Soit $K = k(C)$ le corps de fonctions\footnote{I.e., le corps des
fonctions rationnelles sur $C$.} d'une courbe $C$ sur un corps $k$.
Soit $P$ un point géométrique de $C$.  Pour $f \in K$, on notera $v(f)
:= \ord_P(f)$ l'ordre d'annulation de $f$ en $P$ (aussi appelé
« valuation » de $f$ en $P$).

On rappelle que $v \colon K \to \mathbb{Z}\cup\{+\infty\}$ vérifie
notamment les propriétés suivantes :
\begin{itemize}
\item $v(f) = +\infty$ ssi $f=0$, et $v(c)=0$ si $c\in k^\times$ ;
\item $v(f+g) \geq \min(v(f),v(g))$ avec égalité si $v(f)\neq v(g)$ ;
\item $v(fg) = v(f)+v(g)$.
\end{itemize}

\smallskip

Soit $z \in K$ une uniformizante en $P$ (autrement dit, $v(z) = 1$).
Soit enfin $d \geq 2$ un entier naturel.

On cherche à montrer que la variété algébrique projective définie dans
$\mathbb{P}^{d-1}$ de coordonnées homogènes $(x_0{:}\cdots{:}x_{d-1})$
par l'équation
\[
x_0^d + z x_1^d + z^2 x_2^d + \cdots + z^{d-1} x_{d-1}^d = 0
\]
n'a pas de $K$-point, c'est-à-dire que l'équation ci-dessus
(algébrique homogène de degré $d$ en $d$
inconnues\footnote{Attention, $z$ est un élément de $K$, ce n'est
pas une inconnue !} $x_0,\ldots,x_{d-1}$) n'a pas de solution
dans $K$ autre que $(0,\ldots,0)$.

\smallskip

Pour cela, on va raisonner sur la valuation $v(x_j)$ des $x_j$ :
expliquer pourquoi, si $x \in K^\times$ alors $v(z^i x^d)$ est congru
à $i$ modulo $d$ ; en déduire que deux termes de la somme $x_0^d + z
x_1^d + z^2 x_2^d + \cdots + z^{d-1} x_{d-1}^d$ n'ont jamais la même
valuation, et conclure.

\smallskip

On pourra au préalable prouver l'affirmation suivante : si dans la
somme $g_1 + \cdots + g_m$ d'éléments de $K$ un des termes a une
valuation \emph{strictement plus petite} que tous les autres, alors la
somme n'est pas nulle.

\begin{corrige}
Commençons par montrer l'affirmation du dernier paragraphe : si $g_1 +
\cdots + g_m$ est une somme où $v(g_i) < v(g_j)$ pour tout $j\neq i$,
alors $v(g_i) < v(g')$ où $g' := \sum_{j\neq i} g_j$ d'après la
propriété sur la valuation d'une somme, et celle-ci entraîne alors que
la valuation de la somme $g_i + g'$ est égale à celle de $g_i$, donc
n'est pas $+\infty$.

Passons à la question principale.  On remarque que si $x \in
K^\times$, alors $v(x^d) = d\,v(x)$ est un multiple de $d$.  Par
conséquent, $v(z^i x^d) = i + d\,v(x)$ est congru à $i$ modulo $d$.
Par conséquent, dans la somme $x_0^d + z x_1^d + z^2 x_2^d + \cdots +
z^{d-1} x_{d-1}^d$, il est impossible que deux termes aient la même
valuation (puisqu'elles sont congrues à des valeurs différentes
modulo $d$) sauf si cette valuation est $+\infty$, c'est-à-dire que
les termes sont nuls.  Donc dès lors que tous les termes ne sont pas
nuls, il y en a un qui a une valuation \emph{strictement} plus petite
que tous les autres.  La somme ne peut pas être nulle d'après ce qui
vient d'être démontré, ce qui prouve le résultat voulu.
\end{corrige}


%
%
%

\exercice

Dans cet exercice, on \emph{admet} le résultat suivant.  Soit $k$ un
corps \emph{algébriquement clos}, soient $n \geq m$ des entiers
naturels, et soient $f_1,\ldots,f_m \in k[t_0,\ldots,t_n]$ des
polynômes \emph{homogènes} de degrés\footnote{Non supposés égaux.}
tous $\geq 1$ en les indéterminées $t_0,\ldots,t_n$.
Alors\footnote{L'explication intuitive est que chaque polynôme $f_j$
fait tomber la dimension d'au plus $1$ et comme on part de
$\mathbb{P}^n$ qui est de dimension $n$ et qu'on considère $m\leq n$
polynômes, il reste forcément quelque chose à la fin.} la variété
algébrique projective $Z_{\mathbb{P}^n}(f_1,\ldots,f_m)$ définie dans
$\mathbb{P}^n$ par les équations $f_1 = \cdots = f_m = 0$ n'est pas
vide, c'est-à-dire que $f_1,\ldots,f_m$ ont un zéro commun autre que
le zéro trivial $(0,\ldots,0)$.

\smallskip

Soit maintenant $k$ un corps \emph{algébriquement clos}, et soit $K$
le corps de fonctions d'une courbe $C$ sur $k$ (dans les questions
(1) et (2), on supposera d'ailleurs que cette courbe
est $\mathbb{P}^1$).

\smallskip

On considère $f \in K[t_0,\ldots,t_n]$ un polynôme \emph{homogène} en
les indéterminées $t_0,\ldots,t_n$ dont le degré total $d$ vérifie
$1\leq d \leq n$.  Le but de l'exercice est de montrer\footnote{Ce
résultat s'appelle le théorème de Tsen.} que la variété algébrique
projective $Z_{\mathbb{P}^n}(f)$ définie dans $\mathbb{P}^n$ de
coordonnées homogènes $(x_0{:}\cdots{:}x_n)$ par l'équation
$f(x_0,\ldots,x_n) = 0$, a un $K$-point, c'est-à-dire que l'équation
$f(x_0,\ldots,x_n) = 0$ a une solution avec $x_0,\ldots,x_n$ dans $K$
qui soit non-triviale, i.e. différente de $(0,\ldots,0)$.

\smallbreak

(1) \emph{Dans un premier temps,} on suppose que $K$ est simplement
égal au corps $k(z)$ des fractions rationnelles en une
indéterminée $z$, et on suppose de plus que $f$, qui \textit{a priori}
vit dans $k(z)[t_0,\ldots,t_n]$, est en fait dans
$k[z,t_0,\ldots,t_n]$ (et toujours de degré total $1\leq d\leq n$ en
$t_0,\ldots,t_n$).  On recherche une solution $(x_0,\ldots,x_n)$ de
$f(x_0,\ldots,x_n) = 0$ où les $x_i$ soient dans $k[z]$ (et non tous
nuls).  On va écrire $x_i = \sum_{j=0}^N c_{i,j} z^j$ où les $c_{i,j}
\in k$ sont des coefficients indéterminés et où $N$ est un entier.

\phantom{(1)}(a) Expliquer pourquoi la condition $f(x_0,\ldots,x_n) =
0$ recherchée se traduit sous la forme d'un système d'équations
algébriques en les $c_{i,j}$, toutes homogènes.  On ne demande pas
d'écrire ce système, mais on précisera au moins clairement le nombre
d'équations, leur degré, et le nombre de variables ; on pourra appeler
$\delta$ le degré de $f$ en la variable $z$, et raisonner sur degré en
$z$ et le degré total en les $c_{i,j}$ d'un terme $a_{r_0,\ldots,r_n}
x_0^{r_0} \cdots x_n^{r_n}$ de $f(x_0,\ldots,x_n)$.

\phantom{(1)}(b) En utilisant le résultat admis, montrer ensuite que
ce système a, en effet, une solution en les $c_{i,j}$ si $N$ est assez
grand.

\begin{corrige}
Disons qu'on ait
\[
f(t_0,\ldots,t_n) = \sum_{r_0+\cdots+r_n=d}
a_{r_0,\ldots,r_n} t_0^{r_0}\cdots t_n^{r_n}
\]
où on a fait l'hypothèse que les coefficients $a_{\underline{r}}$ sont
dans $k[z]$.  Soit $\delta$ le plus grand de leurs degrés, qui est
donc le degré de $f$ en la variable $z$.  Comme suggéré par l'énoncé,
on cherche un zéro non-trivial dans $(k[z])^n$ par la méthode des
coefficients indéterminés, en écrivant chaque $x_i$ (pour $i$ allant
de $1$ à $n$) comme un polynôme de degré $\leq N$ en $z$, à savoir
$x_i = \sum_{j=0}^N c_{i,j} z^j$.

Considérons une expression de la forme $x_0^{r_0} \cdots x_n^{r_n}$ :
si on la développe complètement, elle est un polynôme en $z$ de degré
au plus $N(r_0+\cdots+r_n)$ (puisque chaque $x_i$ est un polynôme
en $z$ de degré $\leq N$) ; et elle est homogène de degré total
$r_0+\cdots+r_n$ en les $c_{i,j}$ (puisqu'un produit de polynômes
homogènes est un polynôme homogène de la somme des degrés totaux), au
sens où le coefficient devant chaque puissance de $z$ est homogène de
degré total $r_0+\cdots+r_n$ en les $c_{i,j}$.  Concernant
$a_{r_0,\ldots,r_n} x_0^{r_0} \cdots x_n^{r_n}$, si
$r_0+\cdots+r_n=d$, on en déduit qu'il est de degré $\leq N d +
\delta$ en $z$, et (que son coefficient de chaque puissance de $z$
est) homogène de degré $d$ en les $c_{i,j}$.  Il en va donc de même de
la somme $f(x_0,\ldots,x_n)$ des $a_{r_0,\ldots,r_n} x_0^{r_0} \cdots
x_n^{r_n}$.

On en déduit que l'équation $f(x_0,\ldots,x_n) = 0$ se traduit, en
exprimant la nullité du coefficient devant chaque $z^j$, comme un
système d'équations homogènes de degré $d$ en les $c_{i,j'}$.  Le
nombre d'équations est donné par le nombre de coefficients de $z$ à
écrire, soit $1$ de plus que la borne trouvée sur le degré en $z$,
bref $N d + \delta + 1$.  Enfin, le nombre de variables est le nombre
de $c_{i,j}$, c'est-à-dire $(n+1)\,(N+1)$.

Si on tient absolument à écrire le système, ce qui n'était pas
demandé, c'est :
\[
(\forall j)\;
\sum_{\mathop{}^{s_{1,0}+\cdots+s_{n,N}=d}_{s_{1,1}+\cdots+N s_{n,N}+\rho=j}}
\frac{\scriptstyle(\Sigma s_{1,\bullet})!\cdots
  (\Sigma s_{n,\bullet})!}{\scriptstyle s_{1,0}!\cdots s_{n,N}!}\,
a_{(\Sigma s_{1,\bullet}),\ldots,(\Sigma s_{n,\bullet});\rho}\,
c_{1,0}^{s_{1,0}}\cdots c_{n,N}^{s_{n,N}}
= 0
\]
où $\Sigma s_{i,\bullet}$ désigne $s_{i,0}+\cdots+s_{i,N}$ et
$a_{r_0,\ldots,r_n;\rho}$ est le coefficient de $z^\rho$ dans le polynôme
$a_{r_0,\ldots,r_n} \in k[z]$, et où $j$ parcourt les entiers de $0$ à
$N d + \delta$.

Bref, on a un système de $N d + \delta + 1$ équations, chacune
homogène de degré total $d$, en $(n+1)\,(N+1) = N n + N + n + 1$
variables.  Puisque $d\leq n$, on a $N d + \delta + 1 \leq N n + N +
n$ lorsque $N$ est assez grand.  On conclut d'après le résultat admis
que le système a une solution avec les $c_{i,j}$ non tous nuls,
c'est-à-dire les $x_i$ non tous nuls.
\end{corrige}

\smallbreak

(2) On suppose toujours que $K = k(z)$.  On a montré en (1) que si $f
\in k[z,t_0,\ldots,t_n]$ alors $f(x_0,\ldots,x_n) = 0$ a une solution
non-triviale (dans $(k[z])^n$, donc dans $K^n$).  En déduire que si $f
\in k(z)[t_0,\ldots,t_n]$ alors $f(x_0,\ldots,x_n) = 0$ a encore une
solution non-triviale dans $K^n$.

\begin{corrige}
Il suffit de chasser les dénominateurs.  Plus précisément, si $f \in
k(z)[t_0,\ldots,t_n]$, soit $q \in k[z]$ un dénominateur commun à tous
les coefficients $a_{r_0,\ldots,r_n}$ de $f$ (en les variables
$t_0,\ldots,t_n$).  Alors $q\,f \in k[z,t_0,\ldots,t_n]$, et comme on
a vu en (1) que l'équation $q\,f(x_0,\ldots,x_n) = 0$ a une solution
non-triviale, cette solution en est aussi une de
l'équation $f(x_0,\ldots,x_n) = 0$.
\end{corrige}

\smallbreak

(3) Dans cette question (indépendante des précédentes), on suppose que
$K_0 \subseteq K$ est une extension de corps de degré $\ell := [K :
  K_0]$ fini.  On rappelle que cela signifie que $K$ est de
dimension $\ell$ en tant que $K_0$-espace vectoriel.  Soit
$e_1,\ldots,e_\ell$ une base de $K$ comme $K_0$-espace vectoriel.

Lorsque $w \in K$, on notera $\mathbf{M}(w)$ la matrice $\ell\times
\ell$ à coefficients dans $K_0$ qui représente l'application $K \to K,
\penalty0\; y\mapsto w\cdot y$ de multiplication par $w$ (vue comme
une application $K_0$-linéaire du $K_0$-espace vectoriel $K$ de
dimension $\ell$), sur la base $e_1,\ldots,e_\ell$, et on notera
$\norm(w) := \det(\mathbf{M}(w))$ son déterminant (c'est donc un
élément de $K_0$).

\phantom{(3)}(a) Expliquer pourquoi $\mathbf{M}(ww') = \mathbf{M}(w)\,
\mathbf{M}(w')$ si $w,w'\in K$, pourquoi $\norm(ww') = \norm(w)\,
\norm(w')$, et pourquoi $\norm(w) = 0$ si et seulement si $w=0$.

\phantom{(3)}(b) Expliquer pourquoi si $w = \sum_{j=1}^\ell w_j e_j$
avec $w_j \in K_0$, alors les coefficients de $\mathbf{M}(w)$
s'écrivent comme des combinaisons $K_0$-linéaires des $w_j$, et
pourquoi $\norm(w)$ s'écrit comme un polynôme homogène de degré $\ell$
en $w_1,\ldots,w_\ell$.

\begin{corrige}
(a) On a $\mathbf{M}(ww') = \mathbf{M}(w)\,\mathbf{M}(w')$ car la
  multiplication par $ww'$ est la composée, dans n'importe quel ordre,
  de celle par $w$ et de celle par $w'$.  L'identité $\norm(ww') =
  \norm(w)\, \norm(w')$ s'en déduit par la multiplicativité du
  déterminant.  On en déduit que $\norm(w)\, \norm(w') = 1$ si $w'$
  est l'inverse de $w$, et donc que $\norm(w) \neq 0$ si $w \neq 0$
  (l'autre implication est triviale).

(b) Si $w = \sum_{j=1}^\ell w_j e_j$ alors on a $\mathbf{M}(w) =
  \sum_{j=1}^\ell w_j E_j$, où on a noté $E_j := \mathbf{M}(e_j)$ :
  comme $E_j$ est une certaine matrice $\ell\times \ell$ à
  coefficients dans $K_0$, ceci montre bien que les coefficients de
  $\mathbf{M}(w)$ s'écrivent comme des combinaisons $K_0$-linéaires
  des $w_j$.  Comme le déterminant d'une matrice $\ell\times \ell$ est
  un polynôme homogène de degré $\ell$ en les coefficients de la
  matrice, on en déduit que $\norm(w)$ s'écrit comme un polynôme
  homogène de degré $\ell$ en $w_1,\ldots,w_\ell$.
\end{corrige}

\smallbreak

(4) On suppose maintenant que $K$ est le corps de fonctions d'une
courbe quelconque sur $k$.  On rappelle (ou on admet...) que, si $z$
est élément non constant quelconque de $K$, alors $z$ est transcendant
sur $k$, c'est-à-dire qu'on peut considérer $K_0 := k(z)$ comme le
corps des fractions rationnelles en une indéterminée ; et que $K$ est
alors une extension de corps de degré $\ell := [K : K_0]$ fini.

On reprend les notations $\mathbf{M}(w)$ et $\norm(w)$ de la
question (3), en appelant $e_1,\ldots,e_\ell$ une base de $K$ comme
$K_0$-espace vectoriel.

Soit $f \in K[t_0,\ldots,t_n]$ (toujours de degré total $1\leq d\leq
n$ en $t_0,\ldots,t_n$).  On va écrire $x_i = \sum_{j=1}^\ell x_{i,j}
e_j$ où les $x_{i,j} \in K_0$ sont des coefficients indéterminés.
Expliquer pourquoi la condition $\norm(f(x_0,\ldots,x_n)) = 0$ se
traduit sous la forme d'une équation algébrique homogène de degré $d
\ell$ en $(n+1) \ell$ indéterminées.  En déduire qu'elle a une
solution non-triviale.  Conclure.

\begin{corrige}
Disons qu'on ait
\[
f(t_0,\ldots,t_n) = \sum_{r_0+\cdots+r_n=d}
a_{r_0,\ldots,r_n} t_0^{r_0}\cdots t_n^{r_n}
\]
les coefficients $a_{\underline{r}}$ sont dans $K$.  Comme suggéré par
l'énoncé, on cherche un zéro non-trivial dans $K^n$ par la méthode des
coefficients indéterminés, en écrivant chaque $x_i$ (pour $i$ allant
de $1$ à $n$) comme $x_i = \sum_{j=1}^\ell x_{i,j} e_j$.

Considérons une expression de la forme $\mathbf{M}(x_0^{r_0} \cdots
x_n^{r_n}) = \mathbf{M}(x_0)^{r_0} \cdots \mathbf{M}(x_n)^{r_n}$ :
d'après la question (3)(b), les coefficients de chaque
$\mathbf{M}(x_i)$ sont des combinaisons $K_0$-linéaires des $x_{i,j}$
(pour ce $i$), donc les coefficients du produits sont des polynômes
homogènes de degré total $r_0+\cdots+r_n$ en les $x_{i,j}$ (en
utilisant le fait que le produit de matrices est bilinéaire).

Concernant $\mathbf{M}(a_{r_0,\ldots,r_n} x_0^{r_0} \cdots
x_n^{r_n})$, si $r_0+\cdots+r_n=d$, on en déduit qu'il est homogène de
degré total $d$ en les $x_{i,j}$.  Il en va donc de même de la somme
$\mathbf{M}(f(x_0,\ldots,x_n))$ des $a_{r_0,\ldots,r_n} x_0^{r_0}
\cdots x_n^{r_n}$.  Par l'homogénéité du déterminant,
$\norm(f(x_0,\ldots,x_n))$ est un polynome homogène (à coefficients
dans $K_0$) de degré total $d \ell$ en les indéterminées $x_{i,j}$ qui
sont au nombre de $(n+1) \ell$.

D'après la question (2), si $d \ell < (n+1) \ell$, ce qui équivaut à
$d < n+1$, il y a bien une solution non triviale à cette équation
algébrique de degré $d \ell$ en $(n+1) \ell$ indéterminées dans $K_0 =
k(z)$.  Or d'après la question (3)(a), l'annulation de ce déterminant
$\norm(f(x_0,\ldots,x_n))$ équivaut à l'annulation de tous les $x_i$
(i.e., de tous les $x_{i,j}$).  On a donc bien montré que
$f(x_0,\ldots,x_n) = 0$ a une solution non-triviale dans $K$.
\end{corrige}

\smallbreak

(5) Que nous dit la conclusion de
l'exercice \ref{equation-with-no-solutions} par rapport à celle du
présent exercice concernant les points d'une hypersurface définie par
un polynôme homogène de degré $1\leq d\leq n$ dans $\mathbb{P}^n$ sur
le corps des fonctions $K$ d'une courbe sur un corps $k$
algébriquement clos ?

\begin{corrige}
On vient de démontrer que si $K$ est le corps de fonctions d'une
courbe sur un corps algébriquement clos $k$, alors toute hypersurface
définie par un polynôme homogène de degré $1\leq d\leq n$ dans
$\mathbb{P}^n$ a un $K$-point.  La conclusion de
l'exercice \ref{equation-with-no-solutions} est que ce n'est pas le
cas pour $n = d-1$, et comme par ailleurs c'est aussi trivialement
faux pour $d=0$, les inégalités $1\leq d\leq n$ ne peuvent pas être
améliorées.
\end{corrige}



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\end{document}