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+++ b/controle-20190408.tex
@@ -0,0 +1,734 @@
+%% This is a LaTeX document. Hey, Emacs, -*- latex -*- , get it?
+\documentclass[12pt,a4paper]{article}
+\usepackage[francais]{babel}
+\usepackage[utf8]{inputenc}
+\usepackage[T1]{fontenc}
+%\usepackage{ucs}
+\usepackage{times}
+% A tribute to the worthy AMS:
+\usepackage{amsmath}
+\usepackage{amsfonts}
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+\usepackage{amsthm}
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+\usepackage{mathrsfs}
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+%\externaldocument{notes-mitro206}[notes-mitro206.pdf]
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+\theoremstyle{definition}
+\newtheorem{comcnt}{Tout}
+\newcommand\thingy{%
+\refstepcounter{comcnt}\smallskip\noindent\textbf{\thecomcnt.} }
+\newcommand\exercice{%
+\refstepcounter{comcnt}\bigskip\noindent\textbf{Exercice~\thecomcnt.}\par\nobreak}
+\renewcommand{\qedsymbol}{\smiley}
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+ {\fontencoding{U}\fontfamily{manual}\selectfont\symbol{#1}}}
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+ \hbox to0pt{\hskip-\hangindent\dbend\hfill}}
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+\newcommand{\spaceout}{\hskip1emplus2emminus.5em}
+\newif\ifcorrige
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+{\ifcorrige\relax\else\setbox0=\vbox\bgroup\fi%
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+{{\hbox{}\nobreak\hfill\checkmark}%
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+%
+%
+%
+\begin{document}
+\ifcorrige
+\title{MITRO206\\Contrôle de connaissances — Corrigé\\{\normalsize Théories des jeux}}
+\else
+\title{MITRO206\\Contrôle de connaissances\\{\normalsize Théories des jeux}}
+\fi
+\author{}
+\date{8 avril 2019}
+\maketitle
+
+\pretolerance=8000
+\tolerance=50000
+
+\vskip1truein\relax
+
+\noindent\textbf{Consignes.}
+
+Les exercices sont totalement indépendants. Ils pourront être traités
+dans un ordre quelconque, mais on demande de faire apparaître de façon
+très visible dans les copies où commence chaque exercice.
+
+La longueur du sujet ne doit pas effrayer : d'une part, l'énoncé est
+long parce que des rappels ont été faits et que la rédaction des
+questions cherche à éviter toute ambiguïté ; d'autre part, il ne sera
+pas nécessaire de tout traiter pour obtenir la totalité des points
+(cf. barème).
+
+\medbreak
+
+L'usage de tous les documents (notes de cours manuscrites ou
+imprimées, feuilles d'exercices, livres) est autorisé.
+
+L'usage des appareils électroniques est interdit.
+
+\medbreak
+
+Durée : 2h
+
+Barème \emph{indicatif} : exercice 1 : $9$ points ; exercice 2 :
+$9$ points ; exercice 3 : $4$ points.
+
+\ifcorrige
+Ce corrigé comporte 10 pages (page de garde incluse).
+\else
+Cet énoncé comporte 6 pages (page de garde incluse).
+\fi
+
+\vfill
+{\noindent\tiny
+\immediate\write18{sh ./vc > vcline.tex}
+Git: \input{vcline.tex}
+\immediate\write18{echo ' (stale)' >> vcline.tex}
+\par}
+
+\pagebreak
+
+
+%
+%
+%
+
+\exercice
+
+On s'intéresse dans cet exercice à des jeux à deux joueurs (que l'on
+appellera Alice et Bob) de la forme suivante :
+\begin{itemize}
+\item Alice et Bob sont autour d'une table sur laquelle se trouvent un
+ certain nombre (fini) de \emph{jetons} ; chaque jeton porte un
+ entier naturel qu'on appellera son \emph{type} ; il peut y avoir
+ plusieurs jetons de même type (par exemple, trois jetons de
+ type $0$, deux jetons de type $1$ et un jeton de type $1729$) ; le
+ nombre (fini) de jetons de jetons de chaque type constitue l'état du
+ jeu, et il est visible de tous ;
+\item Alice et Bob jouent tour à tour, et chacun, quand vient son
+ tour, doit retirer un jeton de la table et le \emph{remplacer}
+ éventuellement par des jetons de type(s) strictement plus petit(s) :
+ les règles exactes de remplacement seront différentes d'une question
+ à l'autre, mais prendront toujours la forme « un joueur peut
+ remplacer un jeton de type $n$ par telle ou telle combinaison de
+ jetons de types $<n$ » ; dans tous les cas, un coup consiste à
+ retirer un unique jeton et à en poser éventuellement plusieurs ; il
+ y aura toujours au moins une manière de remplacer un jeton de
+ type $n$ donné ;
+\item il n'y a aucune interaction entre les jetons, c'est-à-dire que
+ les remplacements permis pour un jeton de type $n$ ne dépendront que
+ de $n$ et pas des autres jetons présents sur la table (ni de
+ l'identité du joueur, ni du numéro du coup, ni de quelque autre
+ information) ;
+\item on notera que les jetons de type $0$ ne peuvent être que retirés
+ (il n'y a aucun remplacement possible puisqu'il n'existe pas de
+ jeton de type $<0$) ;
+\item le gagnant est celui qui retire le dernier jeton (puisque son
+ adversaire ne peut plus jouer).
+\end{itemize}
+
+\smallskip
+
+Dans les questions (1) à (3), on ne fait pas d'hypothèse particulière
+sur les règles de remplacement autre que celles qui sont indiquées
+ci-dessus. Dans les questions (4) à (6), on traite le cas de règles
+de remplacement particulières.
+
+\medskip
+
+(1) Montrer que le jeu termine toujours en temps fini. On pourra pour
+cela associer judicieusement un ordinal à l'état du jeu et montrer
+qu'il décroît strictement à chaque tour.
+
+\begin{corrige}
+On associe à la position $J(n_1,\ldots,n_r)$ (définie en (2)
+ci-dessous), quitte à supposer $n_1>\cdots>n_r$ l'ordinal
+$\omega^{n_1} + \cdots + \omega^{n_r}$ ; ou, ce qui revient au même,
+s'il y a $r_n := \#\{i : n_i = n\}$ jetons de type $n$, on considère
+l'ordinal $\omega^N r_n + \cdots + \omega^2 r_2 + \omega\, r_1 + r_0$
+où $N := \max\{n_i\}$ est le plus grand type d'un jeton sur la table.
+Par la comparaison des ordinaux écrits en forme normale de Cantor, cet
+ordinal décroît à chaque coup (puisqu'on remplace un $\omega^n$ par
+des $\omega^{n'}$ avec $n' < n$, la suite $(r_n,\ldots,r_0)$ décroît
+lexicographiquement). Le jeu termine donc en temps fini.
+\end{corrige}
+
+\medskip
+
+(2)(a) En notant $J(n_1,\ldots,n_r)$ l'état du jeu dans lequel $r$
+jetons se trouvent sur la table et ont les types $n_1,\ldots,n_r$
+(éventuellement répétés, p.ex. $J(0,0,0,1,1,1729)$), expliquer
+pourquoi $J(n_1,\ldots,n_r)$ peut s'identifier à la somme de nim des
+positions $J(n_1),\ldots,J(n_r)$ (où $J(n)$ désigne l'état du jeu
+ayant un unique jeton de type $n$).\quad(b) En déduire la valeur de
+Grundy $\gr J(n_1,\ldots,n_r)$ de $J(n_1,\ldots,n_r)$ en fonction de
+celles des $J(n_i)$.\quad(c) Qui a une stratégie gagnante
+dans une position du type $J(n,n)$ ? Expliciter une telle stratégie
+en termes simples.
+
+(\emph{Convention :} $J()$ est le jeu nul dans lequel il ne reste plus
+aucun jeton sur la table. Notamment, on a $\gr J() = 0$. On ne le
+confondra pas avec $J(0)$ où il reste un jeton de type $0$.)
+
+\begin{corrige}
+(a) Il s'agit simplement d'observer que les différents jetons
+ n'interagissent pas du tout. Jouer à la somme de nim de
+ $J(n_1),\ldots,J(n_r)$ revient à jouer sur $r$ tables différentes à
+ partir d'un jeton de type $n_i$ sur chacune, c'est équivalent à
+ jouer à $J(n_1,\ldots,n_r)$.
+
+(b) On en déduit que $\gr J(n_1,\ldots,n_r) = \gr(J(n_1) \oplus \cdots
+ \oplus J(n_r)) = \gr J(n_1) \oplus \cdots \oplus \gr J(n_r)$ (la
+ première égalité par (a), la seconde d'après le fait que la valeur
+ de Grundy d'une somme de nim est la somme de nim des valeur de
+ Grundy).
+
+(c) Le second joueur a une stratégie gagnante à $J(n,n)$ (ceci se voit
+ par le fait que sa valeur de Grundy vaut $0$). Cette stratégie
+ consiste à reproduire systématiquement les coups de son adversaire
+ (ce qui maintiendra un nombre pair de jetons de chaque type à la fin
+ de son coup).
+\end{corrige}
+
+\medskip
+
+(3)(a) Pour une règle de remplacement donnée, expliquer comment se
+calcule $\gr J(n)$ si on suppose connus tous les $\gr J(n')$
+pour $n'<n$.\quad(b) On rappelle que le seul remplacement possible
+d'un jeton de type $0$ est de l'enlever purement et simplement : en
+déduire la valeur de $\gr J(0)$ et celle de $\gr J(0,\ldots,0)$ (où il
+y a $r$ jetons de type $0$).
+
+\begin{corrige}
+(a) Puisque $\gr x$, pour une position $x$ d'un jeu combinatoire
+ impartial bien-fondé, vaut $\mex\{\gr y : y\in\outnb(x)\}$, on a ici
+ $\gr J(n) = \mex\{\gr J(n'_1,\ldots,n'_r) : J(n'_1,\ldots,n'_r)
+ \in\outnb J(n)\}$, c'est-à-dire $\gr J(n) = \mex\{\gr J(n'_1) \oplus
+ \cdots \oplus \gr J(n'_r) : J(n'_1,\ldots,n'_r)\in\outnb J(n)\}$
+ d'après (2)(b) ; la règle de remplacement consiste justement à
+ décrire les $J(n'_1,\ldots,n'_r)\in\outnb J(n)$.
+
+(b) Dans le cas de $n=0$, comme $\outnb J(0) = \{J()\}$, on trouve
+ $\gr J(0) = \mex\{0\} = 1$, et par conséquent $\gr J(0,\ldots,0) =
+ 1\oplus \cdots\oplus 1$ vaut $0$ ou $1$ selon que $r$ est pair ou
+ impair.
+\end{corrige}
+
+\medskip
+
+(4) On suppose dans cette question que la règle de remplacement est la
+suivante : un joueur peut remplacer un jeton de type $n$ par un nombre
+quelconque (y compris $0$) de jetons de type $n-1$. (Autrement dit, à
+chaque coup, le joueur retire un jeton de type $n$ et si $n>0$ il
+ajoute ensuite, optionnellement, le nombre qu'il souhaite de jetons de
+type $n-1$. Par exemple, on peut remplacer un jeton de type $1729$
+par $42$ jetons de type $1728$ ; on peut aussi le retirer sans
+remplacement.)\quad(a) Dans ces conditions, que vaut $\gr J(n)$ ? (On
+pourra par exemple commencer par calculer $\gr J(n)$ pour $n=0,1,2,3$,
+conjecturer une formule générale, et la démontrer par récurrence
+sur $n$.)\quad(b) Exprimer de façon simple la stratégie gagnante du
+jeu considéré dans cette question.
+
+\begin{corrige}
+(a) On a vu en (3)(b) que $\gr J(0,\ldots,0)$ vaut $0$ ou $1$ selon
+ que le nombre de jetons est pair ou impair ; on en déduit que $\gr
+ J(1) = \mex\{0,1\} = 2$, et alors (en se rappelant que $2\oplus
+ 2=0$) on trouve que $\gr J(1,\ldots,1)$ vaut $0$ ou $2$ selon que le
+ nombre de jetons est pair ou impair ; on en déduit que $\gr J(2) =
+ \mex\{0,2\} = 1$, et donc $\gr J(2,\ldots,2)$ vaut $0$ ou $1$ selon
+ que le nombre de jetons est pair ou impair ; par conséquent, $\gr
+ J(3) = \mex\{0,1\} = 2$. En général on imagine facilement que $\gr
+ J(n)$ vaut $1$ ou $2$ selon que $n$ est pair ou impair, et ceci se
+ démontre par une récurrence immédiate avec exactement le même
+ argument qu'on vient de faire.
+
+(b) La valeur de Grundy de $\gr J(n_1,\ldots,n_r)$ est le XOR (= la
+ somme de nim) de $r$ valeurs $1$ si $r$ est le nombre de jetons de
+ type pair, et $r'$ valeurs $2$ si $r'$ est le nombre de jetons de
+ type impair : ce nombre vaut $0$, $1$, $2$ ou $3$ selon que $r$ et
+ $r'$ sont tous les deux pairs, que $r$ est impair et $r'$ pair,
+ qu'on a le contraire, ou qu'ils sont tous les deux impairs. La
+ stratégie gagnante consiste donc à jouer de façon que le nombre $r$
+ de jetons de type pair et le nombre $r'$ de jetons de type impair
+ soient tous les deux pairs (de façon à annuler Grundy).
+\end{corrige}
+
+\medskip
+
+(5) On suppose dans cette question que la règle de remplacement est la
+suivante : un joueur peut remplacer un jeton de type $n$ par un nombre
+quelconque (y compris $0$) de jetons de type $k<n$, le type $k$
+pouvant être quelconque mais doit être le même pour tous les jetons
+posés. (Autrement dit, à chaque coup, le joueur retire un jeton de
+type $n$ et si $n>0$ il ajoute ensuite, optionnellement, le nombre
+qu'il souhaite de jetons d'un même type $k\leq n-1$. Par exemple, on
+peut remplacer un jeton de type $1729$ par $42$ jetons de type $1728$
+ou $1728$ jetons de type $42$ ; on peut aussi le retirer sans
+remplacement.) Dans ces conditions, que vaut $\gr J(n)$ ? (On pourra
+par exemple commencer par calculer $\gr J(n)$ pour $n=0,1,2,3$,
+conjecturer une formule générale, et la démontrer par récurrence
+sur $n$.)
+
+\begin{corrige}
+On a vu en (3)(b) que $\gr J(0,\ldots,0)$ vaut $0$ ou $1$ selon que le
+nombre de jetons est pair ou impair ; on en déduit que $\gr J(1) =
+\mex\{0,1\} = 2$, et alors (en se rappelant que $2\oplus 2=0$) on
+trouve que $\gr J(1,\ldots,1)$ vaut $0$ ou $2$ selon que le nombre de
+jetons est pair ou impair ; on en déduit que $\gr J(2) = \mex\{0,1,2\}
+= 3$ (la différence avec (4)(a) est que maintenant on peut aussi aller
+en $\gr J(0,\ldots,0)$ donc $1$ apparaît dans le $\mex$), et donc $\gr
+J(2,\ldots,2)$ vaut $0$ ou $3$ selon que le nombre de jetons est pair
+ou impair ; par conséquent, $\gr J(3) = \mex\{0,1,2,3\} = 4$. En
+général on imagine facilement que $\gr J(n)$ vaut $n+1$, et ceci se
+démontre par une récurrence immédiate avec exactement le même argument
+qu'on vient de faire.
+\end{corrige}
+
+\medskip
+
+(6) On suppose dans cette question que la règle de remplacement est la
+suivante : un joueur peut remplacer un jeton de type $n$ par un nombre
+quelconque (y compris $0$) de jetons de types $<n$, qui cette fois
+n'ont pas d'obligation d'être tous du même type. (Autrement dit, à
+chaque coup, le joueur retire un jeton de type $n$ et si $n>0$ il
+ajoute ensuite, optionnellement, le nombre qu'il souhaite de jetons de
+n'importe quels types $<n$. Par exemple, on peut remplacer un jeton
+de type $1729$ par $42$ jetons de type $1728$ et $666$ de type $0$ ;
+on peut aussi le retirer sans remplacement.)\quad(a) Dans ces
+conditions, que vaut $\gr J(n)$ ? (On pourra par exemple commencer
+par calculer $\gr J(n)$ pour $n=0,1,2,3$, conjecturer une formule
+générale, et la démontrer par récurrence sur $n$.)\quad(b) Exprimer de
+façon simple la stratégie gagnante du jeu considéré dans cette
+question.
+
+\begin{corrige}
+(a) On a vu en (3)(b) que $\gr J(0,\ldots,0)$ vaut $0$ ou $1$ selon
+ que le nombre de jetons est pair ou impair ; on en déduit que $\gr
+ J(1) = \mex\{0,1\} = 2$, et alors (en se rappelant que $2\oplus
+ 2=0$) on trouve que $\gr J(0,\ldots,0,\penalty0\relax 1,\ldots,1)$
+ vaut $0$, $1$, $2$ ou $3$ selon que le nombre de jetons de chaque
+ type est pair ou impair (comme expliqué en (4)(b)) ; on en déduit
+ que $\gr J(2) = \mex\{0,1,2,3\} = 4$, et donc $\gr
+ J(0,\ldots,0,\penalty0\relax 1,\ldots,1,\penalty0\relax 2,\ldots,2)$
+ prend exactement les valeurs entre $0$ et $7$ selon la parité des
+ jetons de chaque type ; par conséquent, $\gr J(3) =
+ \mex\{0,\ldots,7\} = 8$. En général on imagine facilement que $\gr
+ J(n)$ vaut $2^n$, et ceci se démontre par une récurrence immédiate
+ en remarquant que le $\gr J(n'_1,\ldots,n'_r)$, si les $n'_i$
+ sont $<n$, peut prendre toutes les valeurs de $0$ à $2^n - 1$ selon
+ la parité des jetons de chaque type (donnant l'écriture binaire du
+ résultat).
+
+(b) La stratégie gagnante consiste donc à jouer de façon que le nombre
+ de jetons de chaque type soit pair.
+\end{corrige}
+
+
+%
+%
+%
+
+\exercice
+
+On définit une opération binaire $\alpha\boxplus\beta$ (appelée
+« somme naturelle » ou « somme de Hessenberg ») sur les ordinaux (ici
+notés $\alpha,\beta$) par la formule suivante :
+\[
+\alpha \boxplus \beta = \sup\nolimits^+ \Big( \{\alpha'\boxplus\beta :
+\alpha' < \alpha\} \cup \{\alpha\boxplus\beta' : \beta' <
+\beta\}\Big)
+\]
+où on rappelle que $\sup^+ S$, si $S$ est un ensemble d'ordinaux,
+désigne \emph{le plus petit ordinal strictement plus grand que tous
+ les éléments de $S$} (c'est aussi $\sup\{\gamma+1 : \gamma\in S\}$
+mais c'est probablement moins utile d'y penser sous cette forme).
+Autrement dit, $\alpha\boxplus\beta$ désigne le plus petit ordinal qui
+soit strictement supérieur à tous les $\alpha'\boxplus\beta$ pour
+$\alpha'<\alpha$ ainsi qu'à tous les $\alpha\boxplus\beta'$
+pour $\beta'<\beta$. Cette définition a bien un sens par induction
+bien-fondée.
+
+\medskip
+
+%% À toutes fins utiles, on signale le fait évident qu'on a $\xi =
+%% \sup^+ S$ si et seulement si on a (i) $\xi$ est strictement
+%% supérieur à tout élément de $S$, et (ii) tout ordinal $<\xi$ est
+%% inférieur ou égal à un élément de $S$.
+
+À toutes fins utiles, on signale le fait évident que $\sup^+ S$ ne
+change pas si on insère dans $S$ des nouveaux éléments qui sont
+majorés par des éléments déjà dans $S$.
+
+\medskip
+
+(1)(a) Calculer $m\boxplus n$ pour $0\leq m\leq 5$ et $0\leq n\leq
+5$.\quad(b) Conjecturer une formule générale pour $m\boxplus n$
+lorsque $m,n\in\mathbb{N}$ (c'est-à-dire
+$m,n<\omega$).\quad(c) Démontrer cette formule.
+
+\begin{corrige}
+(a)/(b) On construit le tableau de proche en proche en inscrivant dans
+ chaque case le plus petit entier strictement supérieur à tous les
+ nombres écrits plus haut dans la colonne ou plus à gauche dans la
+ ligne : on obtient $m\boxplus n = m + n$, et on peut imaginer que
+ c'est vrai en général.
+
+(c) Montrons que $m\boxplus n = m + n$ pour tous $m,n\in\mathbb{N}$ :
+ par récurrence (sur $m+n$), on peut supposer connu le fait que
+ $m'\boxplus n = m' + n$ pour tout $m'<m$ et $m\boxplus n' = m + n'$
+ pour tout $n'<n$. On a alors $m \boxplus n = \sup^+ \big( \{m'
+ \boxplus n : m' < m\} \penalty0 \cup \penalty0 \{m \boxplus n' : n'
+ < n\}\big) = \sup^+ \big( \{m' + n : m' < m\} \penalty0 \cup
+ \penalty0 \{m + n' : n' < n\}\big)$ ; or l'ensemble dont on prend le
+ $\sup^+$ ne contient que des entiers $<m+n$ et contient $m+n-1$ donc
+ ce $\sup^+$ vaut $m+n$, ce qui conclut la récurrence.
+\end{corrige}
+
+\medskip
+
+(2)(a) Montrer que $\boxplus$ est commutative, c'est-à-dire que
+$\alpha_1\boxplus\alpha_2 = \alpha_2\boxplus\alpha_1$ quels que
+soient $\alpha_1,\alpha_2$.\quad(b) Montrer que $\boxplus$ admet $0$
+pour élément neutre, c'est-à-dire que $\alpha\boxplus 0 =
+0\boxplus\alpha = \alpha$ pour tout ordinal $\alpha$.\quad(c) Montrer
+que si $\alpha'\leq\alpha$ et $\beta'\leq\beta$ alors
+$\alpha'\boxplus\beta' \leq \alpha\boxplus\beta$, avec inégalité stricte
+dans la conclusion si au moins une d'elles est stricte dans
+l'hypothèse.
+
+\begin{corrige}
+(a) Par induction transfinie sur $\alpha_1$ et $\alpha_2$, on prouve
+ $\alpha_2\boxplus\alpha_1 = \alpha_1\boxplus\alpha_2$ : en effet,
+ $\alpha_2\boxplus\alpha_1 = \sup^+ (\{\alpha_2\boxplus\beta_1:
+ \beta_1<\alpha_1\} \penalty0 \cup \penalty0
+ \{\beta_2\boxplus\alpha_1: \beta_2<\alpha_2\})$, et par hypothèse
+ d'induction ceci vaut $\sup^+ (\{\beta_1\boxplus\alpha_2:
+ \beta_1<\alpha_1\} \penalty0 \cup \penalty0
+ \{\alpha_1\boxplus\beta_2: \beta_2<\alpha_2\}) =
+ \alpha_1\boxplus\alpha_2$.
+
+(b) Par induction sur $\alpha$, on prouve $\alpha \boxplus 0 =
+ \alpha$ : en effet, $\alpha \boxplus 0 = \sup^+ \{\beta\boxplus 0:
+ \beta<\alpha\}$, et par hypothèse d'induction ceci vaut $\sup^+
+ \{\beta: \beta<\alpha\} = \alpha$. Par la commutativité déjà
+ prouvée, $0 \boxplus \alpha$ vaut lui aussi $\alpha$.
+
+(c) Si $\alpha'<\alpha$ alors $\alpha'\boxplus\beta <
+ \alpha\boxplus\beta$ par définition même de $\alpha\boxplus\beta$,
+ et de même si $\beta'<\beta$ alors $\alpha\boxplus\beta' <
+ \alpha\boxplus\beta$. Si on a à la fois $\alpha'<\alpha$ et
+ $\beta'<\beta$ alors $\alpha'\boxplus\beta' < \alpha'\boxplus\beta <
+ \alpha\boxplus\beta$ d'après ce qu'on vient de dire. C'est
+ exactement ce qu'il fallait démontrer.
+\end{corrige}
+
+\medskip
+
+On \underline{admettra} pour la suite que $\boxplus$ est associative,
+c'est-à-dire que $(\alpha_1\boxplus\alpha_2) \boxplus \alpha_3 =
+\alpha_1 \boxplus (\alpha_2\boxplus\alpha_3)$ quels que soient
+$\alpha_1,\alpha_2,\alpha_3$ ; et on admettra aussi que
+$\alpha_1\boxplus\cdots\boxplus\alpha_n$ est le plus petit ordinal
+strictement supérieur à tous les
+$\alpha_1\boxplus\cdots\boxplus\beta_i\boxplus
+\cdots\boxplus\alpha_n$, où exactement un des $\alpha_i$ a été
+remplacé par un ordinal $\beta_i$ strictement plus petit
+(généralisation de la définition au cas de $n$ termes, analogue à un
+résultat vu en cours sur les sommes de nim).
+
+\smallskip
+
+Si $\alpha$ est un ordinal et $n\geq 1$ un entier naturel, on
+\underline{notera} $\alpha\boxdot n$ pour la somme naturelle $\alpha
+\boxplus \cdots \boxplus \alpha$ de $n$ fois l'ordinal $\alpha$ (on
+pourra aussi poser $\alpha\boxdot 0 = 0$). Dans ces conditions, il
+est trivial que $(\alpha\boxdot n) \boxplus (\alpha\boxdot n') =
+\alpha\boxdot (n+n')$ ; par ailleurs, on a $1\boxdot n = n$ d'après la
+question (1).
+
+\medskip
+
+Considérons l'affirmation suivante :
+
+{\narrower\noindent\leavevmode\llap{(*) }si $\alpha =
+ \omega^{\gamma_1} n_1 + \cdots + \omega^{\gamma_r} n_r$ où
+ $\gamma_1 > \cdots > \gamma_r$ sont des ordinaux en ordre
+ strictement décroissant et $n_1,\ldots,n_r$ des entiers naturels non
+ nuls (c'est-à-dire qu'il s'agit de la forme normale de Cantor
+ de $\alpha$), alors on a $\alpha = (\omega^{\gamma_1} \boxdot n_1)
+ \boxplus \cdots \boxplus (\omega^{\gamma_r} \boxdot n_r)$\par}
+
+\noindent (ceci est à comparer au fait, démontré en cours, que si
+$\alpha = 2^{\gamma_1} + \cdots + 2^{\gamma_r}$, où $\gamma_1 > \cdots
+> \gamma_r$ sont des ordinaux en ordre strictement décroissant,
+c'est-à-dire qu'il s'agit de l'écriture binaire de $\alpha$, alors on
+a $\alpha = 2^{\gamma_1} \oplus \cdots \oplus 2^{\gamma_r}$).
+
+On pourrait démontrer (*) par induction transfinie sur $\alpha$.
+Comme c'est notationnellement un peu fastidieux, on va seulement, dans
+la question suivante, montrer un cas particulier assez représentatif
+de l'idée générale :
+
+\medskip
+
+(3)(a) Pour $n_0,n_1 \in \mathbb{N}$, montrer que $(\omega\boxdot n_1)
+\boxplus n_0 = \sup^+ \big( \{(\omega\boxdot n'_1) \boxplus n_0' :
+n'_1 < n_1 \;\hbox{et}\; n'_0 \in\mathbb{N}\} \penalty0 \cup
+\penalty0 \{(\omega\boxdot n_1) \boxplus n_0' : n'_0 <
+n_0\}\big)$.\quad (b) En déduire par induction transfinie sur $\alpha$
+que si $\alpha = \omega\, n_1 + n_0$ où $n_0,n_1 \in \mathbb{N}$,
+alors $\alpha = (\omega \boxdot n_1) \boxplus n_0$ (ceci est un cas
+particulier de (*)).
+
+\begin{corrige}
+(a) D'après ce qu'on a admis ci-dessus, $(\omega\boxdot n_1) \boxplus
+ n_0$, qui est une somme naturelle de $n_1$ copies de $\omega$ et
+ $n_0$ fois $1$, est le plus petit ordinal strictement supérieur à
+ toutes les sommes naturelles obtenues en remplaçant un
+ des ($n_1+n_0$) termes par un terme strictement plus petit,
+ c'est-à-dire à tous les $(\omega\boxdot (n_1-1)) \boxplus b \boxplus
+ n_0$ pour $b<\omega$ (cas où on remplace un $\omega$ par $b$) et à
+ $(\omega\boxdot n_1) \boxplus (n_0-1)$ (cas où on remplace un $1$
+ par $0$). En se rappelant que $b \boxplus n_0 = b + n_0$ (qui prend
+ donc toutes les valeurs $\geq n_0$) et qu'on a le droit d'insérer
+ dans un ensemble dont on prend le $\sup^+$ des nouveaux éléments qui
+ sont majorés par des éléments déjà dedans (et comme $\boxplus$ est
+ croissante en chaque variable d'après (2)(c)), on peut écrire
+ $(\omega\boxdot n_1) \boxplus n_0 = \sup^+ \big( \{(\omega\boxdot
+ n'_1) \boxplus n_0' : n'_1 < n_1 \;\hbox{et}\; n'_0 \in\mathbb{N}\}
+ \penalty0 \cup \penalty0 \{(\omega\boxdot n_1) \boxplus n_0' : n'_0
+ < n_0\}\big)$ comme annoncé.
+
+(b) On procède par induction transfinie sur $\alpha = \omega n_1 +
+ n_0$. On veut montrer que $\alpha = (\omega \boxdot n_1) \boxplus
+ n_0$. Or, d'après ce qu'on vient de voir, $(\omega\boxdot n_1)
+ \boxplus n_0 = \sup^+ \big( \{(\omega\boxdot n'_1) \boxplus n_0' :
+ n'_1 < n_1 \;\hbox{et}\; n'_0 \in\mathbb{N}\} \penalty0 \cup
+ \penalty0 \{(\omega\boxdot n_1) \boxplus n_0' : n'_0 < n_0\}\big)$.
+ D'après l'hypothèse d'induction, et en utilisant le fait que les
+ formes normales de Cantor des ordinaux se comparent
+ lexicographiquement, ceci vaut encore $\sup^+ \big( \{\omega\, n'_1
+ + n_0' : n'_1 < n_1 \;\hbox{et}\; n'_0 \in\mathbb{N}\} \penalty0
+ \cup \penalty0 \{\omega\, n_1 + n_0' : n'_0 < n_0\}\big)$, qui est
+ bien $\omega\, n_1 + n_0$ comme souhaité (il s'agit précisément du
+ $\sup^+$ de l'ensemble des ordinaux $<\omega\, n_1 + n_0$).
+\end{corrige}
+
+\medskip
+
+(4)(a) On admet maintenant l'affirmation (*) en toute généralité. En
+déduire la manière dont on calcule $\alpha\boxplus\beta$ à partir des
+formes normales de Cantor de $\alpha$ et $\beta$.\quad(b) En
+particulier, calculer $(\omega+1)\boxplus(\omega+1)$, et comparer avec
+$(\omega+1) + (\omega+1)$.
+
+\begin{corrige}
+(a) Soient $\alpha = \omega^{\gamma_1} p_1 + \cdots +
+ \omega^{\gamma_r} p_r$ et $\beta = \omega^{\gamma_1} q_1 + \cdots +
+ \omega^{\gamma_r} q_r$ (quitte à insérer des $p_i$ et $q_i$ nuls
+ dans la forme normale de Cantor) avec $\gamma_1 > \cdots >
+ \gamma_r$. En utilisant (*), on peut écrire $\alpha =
+ (\omega^{\gamma_1} \boxdot p_1) \boxplus \cdots \boxplus
+ (\omega^{\gamma_r} \boxdot p_r)$ et $\beta = (\omega^{\gamma_1}
+ \boxdot q_1) \boxplus \cdots \boxplus (\omega^{\gamma_r} \boxdot
+ q_r)$. En utilisant la commutativité et l'associativité
+ de $\boxdot$ et en regroupant les puissances égales de $\omega$, on
+ obtient $\alpha \boxplus \beta = (\omega^{\gamma_1} \boxdot
+ (p_1+q_1)) \boxplus \cdots \boxplus (\omega^{\gamma_r} \boxdot
+ (p_r+q_r))$. Et quitte à utiliser de nouveau (*), on trouve $\alpha
+ \boxplus \beta = \omega^{\gamma_1} (p_1+q_1) + \cdots +
+ \omega^{\gamma_r} (p_r+q_r)$. On a ainsi montré que la somme
+ naturelle se fait en ajoutant simplement terme à terme les formes
+ normales de Cantor, i.e., on ajoute les chiffres (=coefficients) de
+ chaque puissance de $\omega$.
+
+(b) En particulier, $(\omega+1)\boxplus(\omega+1) = \omega\,2 + 2$
+ (qui est aussi $(\omega\boxdot 2)\boxplus 2$ comme on l'a vu), alors
+ que $(\omega+1) + (\omega+1) = \omega + (1+\omega) + 1 = \omega +
+ \omega + 1 = \omega\,2 + 1$ est strictement plus petit.
+\end{corrige}
+
+\medskip
+
+(La question qui suit ne fait pas appel aux questions (3) et (4).)
+
+(5) On considère le jeu à deux joueurs suivant : les deux joueurs
+s'appellent Blaise et Roxane, et ils jouent tour à tour (on ne précise
+pas qui commence) ; l'état du jeu est défini par trois ordinaux, qu'on
+notera $(\alpha,\beta,\rho)$, et il est visible de tous ; les coups
+possibles de Blaise consistent à diminuer strictement soit l'ordinal
+$\alpha$ soit l'ordinal $\beta$ (c'est-à-dire passer de
+$(\alpha,\beta,\rho)$ à $(\alpha',\beta,\rho)$ avec $\alpha'<\alpha$
+ou à $(\alpha,\beta',\rho)$ avec $\beta'<\beta$), tandis que les coups
+possibles de Roxane consistent à diminuer strictement l'ordinal $\rho$
+(c'est-à-dire passer de $(\alpha,\beta,\rho)$ à $(\alpha,\beta,\rho')$
+avec $\rho'<\rho$) ; le joueur qui ne peut plus jouer a perdu.
+
+Montrer que, dans ce jeu, Blaise possède une stratégie gagnante
+lorsque $\rho < \alpha\boxplus\beta$, que Roxane possède une stratégie
+gagnante lorsque $\rho > \alpha\boxplus\beta$, et que le second joueur
+possède une stratégie gagnante lorsque $\rho = \alpha\boxplus\beta$.
+
+\begin{corrige}
+On procède par induction transfinie (sur
+$\alpha\boxplus\beta\boxplus\rho$, si l'on veut) : on peut supposer la
+conclusion déjà connue pour tous les $(\alpha',\beta,\rho)$,
+$(\alpha,\beta',\rho)$ et $(\alpha,\beta,\rho')$ tels que dans la
+question.
+
+Si Blaise joue en premier : si $\rho < \alpha\boxplus\beta$, alors par
+définition de $\alpha\boxplus\beta$, il existe un
+$\alpha'\boxplus\beta$ avec $\alpha'<\alpha$ ou $\alpha\boxplus\beta'$
+avec $\beta'<\beta$ qui majore $\rho$ (au sens large), et Blaise peut
+faire le coup correspondant $(\alpha',\beta,\rho)$ ou
+$(\alpha,\beta',\rho)$ auquel cas il aura une stratégie gagnante comme
+second joueur par hypothèse d'induction ; si $\rho \geq
+\alpha\boxplus\beta$, alors quel que soit le coup
+$(\alpha',\beta,\rho)$ ou $(\alpha,\beta',\rho)$ fait par Blaise, on
+aura $\rho > \alpha'\boxplus\beta$ ou $\rho > \alpha\boxplus\beta'$
+donc Roxane aura une stratégie gagnante par hypothèse d'induction.
+
+Si Roxane joue en premier : si $\rho > \alpha\boxplus\beta$, alors
+elle peut jouer vers $(\alpha,\beta,\rho')$ avec $\rho' =
+\alpha\boxplus\beta$, auquel cas elle comme second joueur aura une
+stratégie gagnante par hypothèse d'induction. Si $\rho \leq
+\alpha\boxplus\beta$, alors quel que soit le coup qu'elle fait, elle
+arrivera à un $(\alpha,\beta,\rho')$ avec $\rho' <
+\alpha\boxplus\beta$ auquel cas Blaise a une stratégie gagnante par
+hypothèse d'induction.
+\end{corrige}
+
+{\footnotesize Autrement dit, on a montré que l'addition des « nombres
+ (surréels) » de Conway coïncide, dans le cas particulier des
+ ordinaux, avec l'opération $\boxplus$ de somme naturelle.\par}
+
+
+%
+%
+%
+
+\exercice
+
+Soit $n\geq 3$ un entier naturel. On considère le jeu suivant : Alice
+et Bob choisissent chacun en secret un entier naturel $0\leq i\leq
+n-1$ et le révèlent simultanément. Si les deux nombres sont égaux, la
+partie est nulle ; sinon, le gagnant est celui qui a choisi le plus
+grand, \emph{sauf} dans le cas où un joueur a choisi $n-1$ et l'autre
+joueur a choisi $0$, et alors c'est celui qui a choisi $0$ qui gagne.
+
+(On considérera qu'un gain apporte une valeur de $+1$ à celui qui
+gagne, une perte une valeur de $-1$ à celui qui perd, et qu'une partie
+nulle a une valeur de $0$ pour les deux joueurs.)
+
+(1) De quelle sorte de jeu s'agit-il ? Écrire explicitement sa
+matrice de gains dans le cas $n=5$. Pour des raisons de symétrie,
+quelle est la valeur du jeu ?
+
+\begin{corrige}
+Il s'agit d'un jeu en forme normale et à somme nulle. Pour $n=5$, la
+matrice des gains d'Alice vaut :
+
+\begin{center}
+\begin{tabular}{r|ccccc}
+$\downarrow$Alice, Bob$\rightarrow$&${0}$&${1}$&${2}$&${3}$&${4}$\\\hline
+${0}$&$0$&$-1$&$-1$&$-1$&$+1$\\
+${1}$&$+1$&$0$&$-1$&$-1$&$-1$\\
+${2}$&$+1$&$+1$&$0$&$-1$&$-1$\\
+${3}$&$+1$&$+1$&$+1$&$0$&$-1$\\
+${4}$&$-1$&$+1$&$+1$&$+1$&$0$\\
+\end{tabular}
+\end{center}
+
+Pour des raisons de symétrie (la matrice étant antisymétrique,
+c'est-à-dire que les deux joueurs sont dans la même situation
+vis-à-vis du jeu), la valeur du gain vaut $0$.
+\end{corrige}
+
+(2) On considère la stratégie mixte consistant à jouer chacune des
+options $0$, $n-2$ et $n-1$ avec probabilité $\frac{1}{3}$ (et jamais
+les autres). On l'appellera $s_0$. Si Alice joue selon cette
+stratégie $s_0$ et si Bob joue l'option $i$, quel est le gain espéré
+d'Alice en fonction de $i$ ?
+
+\begin{corrige}
+Si Bob joue $0$, Alice obtient le gain espéré $\frac{1}{3}(0 + 1 - 1)
+= 0$. Si Bob joue une option entre $1$ et $n-3$ inclus, Alice obtient
+le gain espéré $\frac{1}{3}(-1 + 1 + 1) = \frac{1}{3} > 0$. Si Bob
+joue $n-2$, Alice obtient le gain espéré $\frac{1}{3}(-1 + 0 + 1) =
+0$. Si Bob joue $n-1$, Alice obtient le gain espéré $\frac{1}{3}(+1 -
+1 + 0) = 0$.
+\end{corrige}
+
+(3) Pourquoi $s_0$ est-elle une stratégie optimale ?
+
+\begin{corrige}
+Pour vérifier que $s_0$ est optimale, il s'agit de vérifier qu'elle
+réalise au moins la valeur du jeu contre toute option (=stratégie
+pure) de l'adversaire. C'est ce qu'on vient de faire puisque la
+valeur du jeu est $0$.
+\end{corrige}
+
+(4) Déduire de (2) qu'aucune stratégie optimale ne peut avoir une
+option autre que $0$, $n-2$ ou $n-1$ dans son support. (On pourra
+faire jouer une telle stratégie contre $s_0$.)
+
+\begin{corrige}
+Si $t$ est une stratégie ayant une autre option que $0$, $n-2$
+et $n-1$ dans son support, les espérances trouvées en (2) montrent que
+son espérance de gain contre $s_0$ est strictement négative
+(strictement positive pour le joueur qui applique $s_0$, donc
+strictement négative pour celui qui applique $t$). Donc $t$ ne peut
+pas être optimale.
+\end{corrige}
+
+(5) Montrer que la stratégie $s_0$ décrite en (2) est la seule
+stratégie optimale de ce jeu.
+
+\begin{corrige}
+On vient de voir que toute stratégie optimale $s$ a un support inclus
+dans $\{0, n-2, n-1\}$. Si on appelle $p_0, p_{-2}, p_{-1}$ les
+probabilités respectives de ces options dans $s$, on sait que $s$ doit
+avoir une espérance de gain nulle contre $s_0$, donc contre chacune
+des options pures $0$, $n-2$ et $n-1$, ce qui donne $p_{-2} = p_{-1}$,
+$p_{-1} = p_0$ et $p_0 = p_{-2}$, bref, la seule possibilité est $p_0
+= p_{-2} = p_{-1} = \frac{1}{3}$.
+\end{corrige}
+
+
+%
+%
+%
+\end{document}