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authorDavid A. Madore <david+git@madore.org>2018-02-10 21:58:27 +0100
committerDavid A. Madore <david+git@madore.org>2018-02-10 21:58:27 +0100
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--- a/notes-accq205-v2.tex
+++ b/notes-accq205-v2.tex
@@ -784,13 +784,13 @@ bien l'application $\psi$ décrite (et en particulier, celle-ci est un
morphisme d'anneaux).
\end{proof}
-\thingy Lorsque $A$ est un anneau \emph{intègre}
-(cf. \ref{integral-domains-and-prime-ideals}), tout localisé
-$A[S^{-1}]$ avec $0\not\in S$ peut se décrire comme un sous-anneau du
-corps des fractions $\Frac(A)$, à savoir celui engendré par $A$ et les
-inverses (dans $\Frac(A)$) des éléments de $S$, donc concrètement
-l'ensemble des quotients $a/f$ où $a\in A$ et $f\in S$ (interprétés
-comme des vrais quotients dans le corps $\Frac(A)$).
+\thingy\label{localizations-of-integral-domain} Lorsque $A$ est un
+anneau \emph{intègre} (cf. \ref{integral-domains-and-prime-ideals}),
+tout localisé $A[S^{-1}]$ avec $0\not\in S$ peut se décrire comme un
+sous-anneau du corps des fractions $\Frac(A)$, à savoir celui engendré
+par $A$ et les inverses (dans $\Frac(A)$) des éléments de $S$, donc
+concrètement l'ensemble des quotients $a/f$ où $a\in A$ et $f\in S$
+(interprétés comme des vrais quotients dans le corps $\Frac(A)$).
%
@@ -1245,13 +1245,15 @@ $k[t_1,\ldots,t_d]$ (ils ont tous pour quotient $k$).
%
\subsection{Ouverts de Zariski et ouverts relatifs}
-\thingy Un \defin{ouvert de Zariski} de $k^d$ est par définition le
-complémentaire d'un fermé de Zariski. De façon équivalente, si on
-note $D(f) := \{x \in k^d :\penalty0 f(x) \neq 0\}$, un ouvert de
-Zariski est un ensemble de la forme $D(f_1) \cap \cdots \cap D(f_r)$
-(en effet, tout idéal $I$ de $k[t_1,\ldots,t_d]$ est engendré par un
-nombre fini d'éléments $f_1,\ldots,f_r$, et le complémentaire de $Z(I)
-= Z(f_1,\ldots,f_r)$ est alors $D(f_1) \cup \cdots \cup D(f_r)$).
+\thingy\label{zariski-open-sets} Un \defin{ouvert de Zariski} de $k^d$
+est par définition le complémentaire d'un fermé de Zariski. De façon
+équivalente, si on note $D(f) := \{x \in k^d :\penalty0 f(x) \neq
+0\}$, un ouvert de Zariski est un ensemble de la forme $D(f_1) \cap
+\cdots \cap D(f_r)$ (en effet, tout idéal $I$ de $k[t_1,\ldots,t_d]$
+est engendré par un nombre fini d'éléments $f_1,\ldots,f_r$, et le
+complémentaire de $Z(I) = Z(f_1,\ldots,f_r)$ est alors $D(f_1) \cup
+\cdots \cup D(f_r)$). Les $D(f)$ sont parfois appelés \defin[ouvert
+ principal]{ouverts principaux}.
Les propriétés vues sur les fermés de Zariski
(cf. \ref{basic-facts-on-zariski-closed-sets}) montrent, par passage
@@ -1277,12 +1279,12 @@ parfois d'ouvert \emph{relatif} dans $X$.
%
\subsection{Fermés irréductibles et idéaux premiers}
-\thingy On dit qu'un fermé de Zariski $E \subseteq k^d$ non vide est
+\thingy On dit qu'un fermé de Zariski $X \subseteq k^d$ non vide est
\defin[irréductible (fermé)]{irréductible} lorsqu'on ne peut pas
l'écrire comme réunion de deux fermés de Zariski strictement plus
-petits : autrement dit, lorsque $E = E' \cup E''$, où $E',E''$ sont
-deux fermés de Zariski (forcément contenus dans $E$), implique $E'=E$
-ou $E''=E$.
+petits : autrement dit, lorsque $X = X' \cup X''$, où $X',X''$ sont
+deux fermés de Zariski (forcément contenus dans $X$), implique $X'=X$
+ou $X''=X$.
\emph{Contre-exemple :} $Z(xy)$ (dans le plan $k^2$ de
coordonnées $x,y$) n'est pas ir\-ré\-duc\-tible, car $Z(xy) = \{(x,y)
@@ -1295,37 +1297,67 @@ irréductible. Essayons de préciser les conditions qui font qu'un
fermé de Zariski soit irréductible :
\begin{prop}\label{closed-irreducible-iff-prime-ideal}
-Un fermé de Zariski $E \subseteq k^d$ est irréductible si, et
-seulement si, l'idéal $\mathfrak{I}(E)$ est premier.
+Un fermé de Zariski $X \subseteq k^d$ est irréductible si, et
+seulement si, l'idéal $\mathfrak{I}(X)$ est premier.
\end{prop}
\begin{proof}
-Supposons $\mathfrak{I}(E)$ premier : on veut montrer que $E$ est
-irréductible. Supposons $E = E' \cup E''$ avec $E',E''$ des fermés de
-Zariski (on a donc $E = Z(\mathfrak{I}(E))$, $E' =
-Z(\mathfrak{I}(E'))$ et $E'' = Z(\mathfrak{I}(E''))$) : on veut
-montrer que $E' = E$ ou $E'' = E$. Supposons le contraire,
-c'est-à-dire $\mathfrak{I}(E) \neq \mathfrak{I}(E')$ et
-$\mathfrak{I}(E) \neq \mathfrak{I}(E'')$. Il existe alors $f' \in
-\mathfrak{I}(E') \setminus \mathfrak{I}(E)$ et $f'' \in
-\mathfrak{I}(E'') \setminus \mathfrak{I}(E)$. On a alors $f'f''
-\not\in \mathfrak{I}(E)$ car $\mathfrak{I}(E)$ est premier, et
-pourtant $f'f''$ s'annule sur $E'$ et $E''$ donc sur $E$, une
+Supposons $\mathfrak{I}(X)$ premier : on veut montrer que $X$ est
+irréductible. Supposons $X = X' \cup X''$ avec $X',X''$ des fermés de
+Zariski (on a donc $X = Z(\mathfrak{I}(X))$, $X' =
+Z(\mathfrak{I}(X'))$ et $X'' = Z(\mathfrak{I}(X''))$) : on veut
+montrer que $X' = X$ ou $X'' = X$. Supposons le contraire,
+c'est-à-dire $\mathfrak{I}(X) \neq \mathfrak{I}(X')$ et
+$\mathfrak{I}(X) \neq \mathfrak{I}(X'')$. Il existe alors $f' \in
+\mathfrak{I}(X') \setminus \mathfrak{I}(X)$ et $f'' \in
+\mathfrak{I}(X'') \setminus \mathfrak{I}(X)$. On a alors $f'f''
+\not\in \mathfrak{I}(X)$ car $\mathfrak{I}(X)$ est premier, et
+pourtant $f'f''$ s'annule sur $X'$ et $X''$ donc sur $X$, une
contradiction.
-Réciproquement, supposons $E$ irréductible : on veut montrer que
-$\mathfrak{I}(E)$ est premier. Soient $f',f''$ tels que $f'f'' \in
-\mathfrak{I}(E)$ : posons $E' = Z(\mathfrak{I}(E) + (f'))$ et $E'' =
-Z(\mathfrak{I}(E) + (f''))$. On a $E' \subseteq E$ et $E'' \subseteq
-E$ puisque $E = Z(\mathfrak{I}(E))$, et en fait $E' = E \cap Z(f')$ et
-$E'' = E \cap Z(f'')$ ; on a par ailleurs $E = E' \cup E''$ (car si $x
-\in E$ alors $f'(x)\,f''(x) = 0$ donc soit $f'(x)=0$ soit $f''(x)=0$,
-et dans le premier cas $x \in E'$ et dans le second $x \in E''$).
-Puisqu'on a supposé $E$ irréductible, on a, disons, $E' = E$,
-c'est-à-dire $E \subseteq Z(f')$, ce qui signifie $f' \in
-\mathfrak{I}(E)$ (cf. \ref{trivial-inclusions-between-z-and-i}($*$)).
-Ceci montre bien que $\mathfrak{I}(E)$ est premier.
+Réciproquement, supposons $X$ irréductible : on veut montrer que
+$\mathfrak{I}(X)$ est premier. Soient $f',f''$ tels que $f'f'' \in
+\mathfrak{I}(X)$ : posons $X' = Z(\mathfrak{I}(X) + (f'))$ et $X'' =
+Z(\mathfrak{I}(X) + (f''))$. On a $X' \subseteq X$ et $X'' \subseteq
+X$ puisque $X = Z(\mathfrak{I}(X))$, et en fait $X' = X \cap Z(f')$ et
+$X'' = X \cap Z(f'')$ ; on a par ailleurs $X = X' \cup X''$ (car si $x
+\in X$ alors $f'(x)\,f''(x) = 0$ donc soit $f'(x)=0$ soit $f''(x)=0$,
+et dans le premier cas $x \in X'$ et dans le second $x \in X''$).
+Puisqu'on a supposé $X$ irréductible, on a, disons, $X' = X$,
+c'est-à-dire $X \subseteq Z(f')$, ce qui signifie $f' \in
+\mathfrak{I}(X)$ (cf. \ref{trivial-inclusions-between-z-and-i}($*$)).
+Ceci montre bien que $\mathfrak{I}(X)$ est premier.
\end{proof}
+\thingy En combinant le résultat ci-dessus avec le Nullstellensatz, on
+voit que (en se rappelant que le corps $k$ est supposé algébriquement
+clos !) le fermé $Z(\mathfrak{p})$ est irréductible lorsque
+$\mathfrak{p}$ est un idéal premier de $k[t_1,\ldots,t_d]$.
+
+Notamment, on retient de \ref{gauss-lemma-on-irreducibility} que si $f
+\in k[t_1,\ldots,t_d]$ est un polynôme irréductible, alors $Z(f) =
+\{x\in k^d : f(x) = 0\}$ est un fermé irréductible. Ceci justifie au
+moins partiellement la terminologie.
+
+\thingy La notion de fermé irréductible peut encore se reformuler de
+la manière suivante : $X$ est irréductible si et seulement si
+lorsqu'un ouvert relatif $U$ de $X$
+(cf. \ref{relative-closed-and-open-sets}) est contenu dans un fermé
+$F$ de $X$, on a soit $U=\varnothing$ soit $F=X$. (Pour vérifier
+l'équivalence, on pose $U = X\setminus X'$ et $X'' = F$, et alors
+$U\subseteq F$ signifie $X'\cup X'' = X$.)
+
+Encore une autre reformulation est la suivante : $X$ est irréductible
+si et seulement si deux ouverts relatifs non vides $U,V$ de $X$ se
+rencontrent toujours. (Pour vérifier l'équivalence, on pose $U =
+X\setminus X'$ et $V = X\setminus X''$, et alors $U\cap V =
+\varnothing$ signifie $X'\cup X'' = X$.)
+
+Autrement dit, \emph{$X$ est irréductible si et seulement si tout
+ ouvert non vide est dense} (une partie d'un espace topologique étant
+dite « dense » lorsque le seul fermé qui la contient est l'espace tout
+entier, ou, de façon équivalente, lorsqu'elle rencontre tout ouvert
+non vide).
+
%
\subsection{L'anneau d'un fermé de Zariski : fonctions régulières}
@@ -1349,13 +1381,18 @@ vient d'être dit est que la fonction polynomiale $\Psi(f)$ définie
par $f\in k[t_1,\ldots,t_d]$ ne dépend que de la classe de $f$
modulo $I$.
-L'anneau $k[t_1,\ldots,t_d]/I$ s'appellera \defin[régulières
- (fonctions)]{anneau des fonctions régulières} du fermé de
+L'anneau $k[t_1,\ldots,t_d]/I$ s'appellera \defin[régulière
+ (fonction)]{anneau des fonctions régulières} du fermé de
Zariski $X$. Comme on vient de le signaler, ses éléments peuvent
s'identifier aux restrictions à $X$ des fonctions polynomiales
sur $k^d$. On le notera $\mathcal{O}(X)$.
-Par construction, $\mathcal{O}(X)$ est une $k$-algèbre de type
+Il sera important de garder à l'esprit les deux points de vue sur les
+fonctions régulières sur $X$ : on peut les voir soit comme des
+éléments du quotient $k[t_1,\ldots,t_d]/I$, soit comme des fonctions
+$X \to k$ qui sont polynomiales.
+
+\thingy Par construction, $\mathcal{O}(X)$ est une $k$-algèbre de type
fini (cf. \ref{finite-type-algebras-as-quotients-of-polynomial-rings}),
donc un anneau noethérien
(cf. \ref{finite-type-algebras-are-noetherian}) ; par construction,
@@ -1387,6 +1424,51 @@ idéal radical $J$ de $\mathcal{O}(X)$, alors $\mathcal{O}(Y) =
purement formel, l'intérêt est surtout de se convaincre que les
fonctions régulières se comportent bien comme des polynômes.
+%
+\subsection{L'anneau d'un ouvert relatif : fonctions rationnelles}
+
+\thingy Si $X$ est une variété algébrique affine (= un fermé de
+Zariski) et $f \in \mathcal{O}(X)$ une fonction régulière sur $X$, on
+a note $D(f) := X \setminus Z(f) = \{x\in X : f(x) \neq 0\}$
+l'ensemble des points de $X$, ou \index{ouvert principal}ouvert
+principal, où $f$ ne s'annule pas (en relevant $f$ de façon quelconque
+à un polynôme $\tilde f\in k[t_1,\ldots,t_d]$, ce $D(f)$ est
+simplement $X \cap D(\tilde f)$ où $D(\tilde f)$ est défini de la même
+manière sur $k^d$, cf. \ref{zariski-open-sets}).
+
+On définit alors l'\defin[régulière (fonction)]{anneau des fonctions
+ régulières} sur $D(f)$ comme le localisé $\mathcal{O}(X)[f^{-1}]$
+inversant $f$ de l'anneau $\mathcal{O}(X)$ des fonctions régulières
+sur $X$. Autrement dit (cf. \ref{subsection-localization}), les
+fonctions régulières sont $D(f)$ sont définies comme des fractions de
+fonctions régulières sur $X$ admettant une puissance de $f$ au
+dénominateur.
+
+On peut voir un élément de $\mathcal{O}(X)[f^{-1}]$, disons $g/f^n$ où
+$g\in \mathcal{O}(X)$ et $n\in\mathbb{N}$, comme une fonction
+sur $D(f)$ : en effet, si $x \in D(f)$, on a $f(x)\neq 0$ par
+définition, ce qui permet de donner un sens à $g(x)/f(x)^n$. (Par
+ailleurs, l'identification est légitime car si $g(x)/f(x)^n$ est nul
+pour tout $x\in D(f)$ alors $g(x)$ aussi, donc $f(x)\,g(x)$ est nul
+pour tout $x\in X$, ce qui signifie que $g/f^n = 0$
+dans $\mathcal{O}(X)[f^{-1}]$ par définition de la localisation.)
+
+Concrètement, donc, une fonction régulière sur $D(f)$ est le quotient
+d'une fonction régulière sur $X$ (c'est-à-dire la restriction à $X$
+d'un polynôme) par une certaine puissance de la fonction $f$
+elle-même.
+
+Plus généralement, si $U := D(f_1)\cup \cdots\cup D(f_r)$ est un
+ouvert relatif quelconque de $X$, on définit une fonction régulière
+sur $U$ comme une fonction $U \to k$ dont la restriction à
+chaque $D(f_i)$ est régulière.
+
+Ces définitions sont assez complexes et peu maniables, donc nous
+allons considérer le cas beaucoup plus simple où $X$ est irréductible,
+c'est-à-dire $\mathcal{O}(X)$ intègre, ce qui permet de traiter les
+localisations comme vivant toutes dans le corps des fractions
+de $\mathcal{O}(X)$ (cf. \ref{localizations-of-integral-domain}).
+
%